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règle des dommages-intérêts l'amende prononcée contre la dépaissance dans un bois âgé de plus de dix ans, l'arrêt attaqué a fait une fausse interprétation des art. 199 et 202, et violé leurs dispositions; . Par ces motifs, CASSE. »

Observations. Les art. 199 et 202 du C. forest. sont trop précis pour que nous puissons considérer comme simple une amende que la loi qua fifie elle-même de double. C'est à tort que l'on croit trouver dans le premier de ces articles deux délits distincts: un seul y est prévu, celui de dépaissance, plus ou moins grave, à la vérité, suivant l'âge du bois où il est commis. Si la récidive, la nuit, ou l'usage d'une scie ne changent pas le fait en autant de délits distincts, pourquoi en serait-il autrement de l'âge du bois? On répond par une distinction entre les circonstances aggravantes du délit en lui-même, et celles qui tiennent à la crimina lité du délinquant. Mais cette distinction ne résulte d'aucun texte de loi. On insiste sur ce que les premières augmentent le dommage, à la différence des secondes. D'abord il ne peut pas être question des dommagesintérêts avant la qualification légale de l'amende; et au surplus, l'objec tion n'aien d'inconciliable avee notre système. L'art. 202 n'a fixé que le minimum des dommages-intérêts; les tribunaux peuvent donc en aug. menter la quotité en raison des circonstances aggravantes du délit en lui-même. Enfin, si l'art. 202 se rapporte aux art. 200 et 201, pourquoi ne se rapporte-t-il pas également à l'art. 199; l'exclusion de cet article est tout-à-fait arbitraire, et même nous ne saurions trop le répéter, elle est contraire au texte, qui, dans l'un comme dans les autres articles, qualifie l'amende de double. J. S.

COUR DE CASSATION. Les alienations faites avant l'édit de février 1566, par le prince, d'un domaine de la couronne, à la charge de retour au cas d'extinction de descendance légitime, sont elles révocables en vertu de la loi du 14 ventôse an 7? (Rés. aff.)

L'ancien conseil était-il compétent pour statuer sur les demandes et actions domaniales? (Rés.nég.)

L'arrêt du conseil qui a débouté le fermier et l'inspecteur général du domaine de leur demande à cet égard, et a maintenu le CORcessionnaire ou son ayant-cause dans la propriété et jouissance du domaine réclamé, est-il, sous prétexte de la chose jugée, *obstacle à l'application de cette loi de ventôse an 7? (Rés. nég Art. 1351, C. civ.

Le fermier ou l'inspecteur du domaine avaient-ils qualité pour intenter l'action en révocation contre le possesseur ou ayant-cause in dûment investi, par suite de l'accomplissement de la condition à laquelle cette révocation avait été subordonnée ? (1) (Rés. nég:)

(1) La première et la quatrième questions n'ont été résolues que pa la cour royale seulement.

DAMES DE ROHAN, C. LE DOMAINE,

Par lettres patentes du mois d'avril 1561, le roi Jean donna à Isabelle de France, sa fille, lors de son mariage avec Galéas Visconti, duc de Milan, le comte de Vertus, avec clause le retour au domaine de la couronne à défaut de descendants égitimes. Ge domaine, dans la suite, et par ordre des sucessions, était destiné à devenir l'héritage d'Anne de Bretagne, emme de Charles VIII et depuis de Louis XII, da chef de François II, duc de Bretagne, son père, qui en était devenu ossesseur; mais celui-ci, au mépris de la clause conditionnelle e la donation et des lettres-patentes, en fit don à un de ses nfants naturels qu'il avait légitimé, le baron d'Avaugour, tant our lui que pour ses enfants issus de mariage. C'est ainsi ue le comté de Vertus fut jusqu'en 1746 la propriété de cette mille bâtarde mais légitimée. A cette époque, Henri-Franis, baron d'Avaugour, décéda sans postérité, n'ayant pour éritier qu'un cousin issu de germain, le maréchal prince de oubise, lequel se mit aussitôt en possession dudit domaine. -Cependant les barons d'Avangour n'avaient pas joui sans. ouble de cette propriété : la transmission qui leur en avait é faite était entachée d'un vice trop sensible pour ne pas voir, à diverses époques, éveillé l'attention des agents du omaine. Des poursuites intermittentes avaient eu lieu et se nouvelèrent contre le prince de Soubise; mais elles étaient itravées par son crédit.- Enfin, le 6 juill. 1779, trente-trois is seulement après le décès du dernier titulaire, fut rendu, sujet de ce domaine et de quelques autres seigneuries qui dépendaient, possédées par le duc de Penthievre et le prési→ ent de Rosnay, l'arrêt du conseil suivant.-Ouï le rapport, sieur Berthier, après en avoir communiqué aux commisires à ce députés, les sieurs . . . ., TOUT CONSIDÉRÉ, le roi son conseil, faisant droit sur l'instance, sans s'arrêter aux positions du receveur général des domaines de Bretagne et procureur du roi du bailliage de Nantes, a débouté et déboute aspecteur-général du domaine de la couronne de la demande rapport des lettres-patentes des mois de mars et avril 1728, mme aussi de sa demande en réunion des terres d'Avaugour, Clisson, de Vertus, de la Ferté-sur-Aube et de Rosnay; a aintenu et gardé, maintient et garde le maréchal de Souse, le duc de Penthièvre et le président de Rosnay, dans la

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propriété, possession et jouissance desdites terres, à titre de propriété incommutable; défend, Sa Majesté, à l'inspecteurgénéral du domaine, aux régisseurs de ses domaines et à tous autres, de les troubler à l'avenirs Mais la révolution troubla cette quiétude et rendit cet arrêt impuissant.

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En effet, par suite des lois sur l'émigration et de celle di 10 frim, an o, sur les domaines engagés, partie 'des biens dépendants de la terre de Vertus furent, à l'exception de la fo rêt, aliénés comme biens nationaux. Une moitié de cette terre était restée invendue lorsque la princesse de Guémenée, fille et héritière du prince de Soubise, demanda, le 3 mes sidor an 10, à y être réintégrée. C'était, selon elle, un bien patrimonial, et selon l'administration des domaines un bien domanial dont la restitution ne pouvait être autorisée sans blesser la loi. Sur ce débat, 13 déc. 1809, arrêté du conseil de préfecture de la Seine qui déclara n'y avoir lieu à dé libérer, vu que tout avait été jugé par l'arrêt du conseil da 6 juillet 1779.- Mais cet arrêté fut annulé par un décret impérial du 12 mars 1811, qui renvoya au tribunal civil d'Épernay pour statuer sur la question controversée. 4 fév. 1814, jugement de ce tribunal qui, en déclarant la domanialité de la terre de Vertus et de ses dépendances'; accneillir la demande en délivrance sur le fondement de la chose jugée par l'arrêt du conseil.

Appel de ce jugement; et comme le tribunal de Châlons-sur Marne avait été également saisi, à cause de la situation dans ́son territoire d'une partie des biens litigieux une instance fut introduite en règlement de juges, par suite de laquelle le tribunal civil de la Seine fut saisi de la contestation.

Eu conséquence du décès survenu de la princesse de Guémenée, l'instance fut reprise devant ce tribunal par les dames de Rohan, le duc de Bourbon et sa soeur, ses héritiers, et par le préfet de la Marne pour l'Etat.

Le 31 août 1824, jugement qui aceueillit par le même mo tif de la chose jugée la demande des héritiers. Sur l'appel

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par le préfet devant la cour royale de Paris, 3 avril 1827, ar rêt ainsi conçu :

En ce qui touche la fin de non recevoir qu'on fait résulter de l'autorité de la chose jugée, Considérant que l'action exercée au nom l'état est l'action à fu de révocation de la concession du domain de Vertus, par application de l'art. 5 de la loi du 14 ventôse an 7 fondée sur l'existence de la clause de retour au profit de l'état dans l'acte

primitif de la concession; — - Que la révocation de la concession dans les termes et avec les facultés accordées par la loi nouvelle ne présente ni la même demande ni la même cause de demande que celles qui ont été portées au parlement de Paris et au conseil du roi jusqu'en 1779 et qui tendaient à la réversion du domaine de Vertus par suite de l'accom plissement de l'événement opérant le retour; 4 Considérant, au surplus, à l'égard des instances qui ont subsisté tant au parlement de Paris qu'au conseil du roi, que, sur la deinande du procureur-général à fin de rénnion dn domaine de Vertus au domaine de l'état, l'arrêt du 12 mai 1533 prononça un appointement en droit sur le fond, en accordant provisoirement au détenteur la continuation de la jouissance:—Que l'ar, êt du 23 avril 1563 a maintenu les dispositions de l'arrêt précédent usqu'au jugement du procès appointé en droit;—Que les lettres patenes de 1728 constatent, cet état de l'instance au parlement de Paris, resté oujours saisi de la demande originaire du procureur-général, et qu'auune évocation de fait n'a dessaisi;-Que les arrêts du conseil du 22 nars, 1595, 31 octobre 1752, 17 déc. 1754 et 6 juillet 1779, rendus oit avec le fermier, soit avec l'inspecteur général du domaine, n'ont rononcé el pu prononcer que sur le droit de jouissance provisoire, ni 'un ni l'artre de ces agents n'étant le contradicteur légitime pour la déensé de la propriété de l'état ou de la couronne;-Que l'effet de la chose ugée par les décisions du conseil a été seulement d'interdire toute enreprise sur la jouissance des biens dont il s'agit, de la part des agents du lomaine, jusqu'à l'arrêt qui terminerait l'instance appointée au parlenent de Paris;-Qu'enfin le roi ne pouvant aliéner les domaines de 'état ou de la couronne sans vérification dans les parlements, son onseil, par les mêmes principes, n'avait point compétence pour prooncer sur les actions immobilières de Fétat ou de la couronne, et qu'ainsi l'autorité de la chose jugée ne peut être invoquée par les inti

nés;

que

Au fond, Considérant la loi du 14 ventôse an 7 prononce la évocation de toutes les aliénations contenant clause de retour au profit ̧ le l'état, faites à quelque titre que ce soit et à quelques époques qu'elles uissent rémonter (1); — Qu'en fait, les lettres patentes d'avril 1361 ortent stipulation expresse de retour à la couronne, à l'extinction de la escendance légitime d'Isabelle de France; Que ce droit d'expectative e l'état suffit seul pour l'application de la loi, dont la volonté est de fixer ous les droits éventuels, jet d'éteindre toutes les actions dépendantes d'éénements futurs relativement aux anciennes concessions; Que la ipulation de retour à la couronne faite par le roi Jean, en 1361 estreinte sec!ement par le droit d'usufruit du mari dans le cas de ort d'Isabelle de France sans enfants nés d'elle, rend superflu l'exaien de la nature de la propriété, à titre privé, où autrement, dans les ains du roi, qui a voulu expressément l'unir, dans le cas prévu, au omaine de la couronne; Considérant surabondamment que lesdites ttres-patentes énoncent que dès l'époque de 1551 ce domaine concédé

et

(1) Toutes les aliénations du domaine de l'état contenant clause de etour ou réserve de rachat, faites à quelque titre que ce soit, à quelue époque qu'elles puissent remonter et en quelque lieu de la républiue que les biens soient situés, sont et demeurent definitivement retouées. (Art. 3, de la loi du 14 ventôse an 7.) ́‚'

était du domaine de la couronné: — Considérant que la loi précitée de ventôse an 7 n'a subordonné l'action de l'état à aucune condition, et moins encore aux stipulations de garantie entre les concessionnaires on leurs héritiers pendant le temps de leur jouissance, garantie qui n'a ja̸mais pu s'étendre aux effets d'une loi à venir; Par ces motifs, la cour déclare révoquée la concession du domaine de Vertus et dépendan

ces, etc.

Pourvoi pour violation des art. 1350 et 1351 du CE. civ., sur l'autorité de la chose jugée. Une fin de non recevoir fondée sur ce que le duc de Bourbon aurait acquiescé à l'arrêt attaqué a été opposée par le préfet; mais inutile de s'y arrêter, la cour n'ayant pas cru devoir s'en occuper.

C'est à tort, ont dit les dames de Rohan, qu'on a prétenda que l'ancien conseil du roi n'était compétent que pour prononcer sur le droit de jouissance provisoire; sa juridiction s'étendait au contraire sur les actions immobilières de l'état, sans qu'il fût besoin de recourir aux parlements pour la vérification des édits ou lettres patentes, dès que par un arrêt lẹ conseil avait évoqué la connaissance d'une affaire pour y être statué au fond. La seule différence, c'est qu'en matière domaniale ses décisions, d'après le règlement de 1738, étaient susceptibles du recours en cassation comme celles des autres cours souve raines; à défaut de quoi elles passaient, d'après le droit commun, en force de chose jugée. Cette doctrine a reçu une sanction toute spéciale des décrets mêmes des 15 et 20 oct. 1789.-C'est encore une erreur de l'arrêt dénoncé d'avoir avancé qu'il n'avait été statué par celui du 6 juillet 1779 que sur la jouissance provisoire; son dispositif repousse cette assertion, en maintenant le prince de Soubise.... en la propriét et jouissance desdites terres à titre de propriété incommutable, et défend aux régisseurs et à tous autres de les troubler à l'avenir.... L'autorité de la chose jugée sur le fond même du droit est donc certaine. La conséquence de ce point de fait est que l'art. 3 de la loi du 14 ventôse an 7 ne peut être in voqué en présence d'un arrêt rendu par le souverain luimême, lequel a déclaré le domaine et ses dépendances irrévocablement acquis à ceux qui en étaient en possession. Il ya donc en fausse application par l'arrêt dénoncé de cette loi, et c'est le cas de l'annuler.

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13 décembre 1831, ARRÊT de la cour de cassation, chambre civile, M. Portalis président, M. Cassaigne rapporteur, MM. Piet et Teste-Lebeau avocats, par lequel:

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