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ment, qui indiquait et limitait l'objet de la mission des experts, laquelle au surplus se trouvait réglée par les art. 823, 824, 827, 831, 832 et 833 du G. civ., ne leur conférait le pouvoir de faire des lots d'attribution, pouvoir qu'ils n'auraient pu recevoir que d'une délégation des juges, si, sur les demandes des parties, ils avaient cru devoir l'accorder, on du consentement exprès des parties; Attendu qu il ne résulte d'aucun écrit qu'Antoine Mazuer ait douné son consentement...; que dès lors les experts sont allés au-delà de leur mandat en faisant des lots d'attribution que `ni la loi, ni le jugement, ni les parties, ne les avaient autorisés à faire; Sans s'arrêter à la fin de non recevoir, ORDONNE que, par de nouveaux experts, il sera procédé, etc. »

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COUR D'APPEL DE BOURGES.

J. A. L.

Est-on recevable, jusqu'à l'exécution d'un jugement par défaut, é former une nouvelle opposition, lorsque celle formée précédemment par acte extrajudiciaire n'a pas été renouvelée par requête dans les délais de la loi? (Rés. aff.)

L'article 162 dú C. de proc. civ. déroge-t-il à cet égard à l'article 158 du même Code? (Rés. nég.)

VEUVE ROCHARD ET CONSORTS, C. LÉGER.

Le 4 juin 1827, la veuve Rochard et ses coïntéressés obtiennent devant le tribunal civil de Nevers un jugement par défaut, faute de constituer avoué, contre le sieur Léger. Ce jugement, qui prononce la résolution de la vente d'une maison, faute par Léger, acquéreur, d'avoir rempli les conditions du contrat, est signifié au sieur Léger; mais les demandeurs n'en poursuivent pas l'exécution.

Léger, par acte extrajudiciaire, a formé contre ce jugement une opposition qui n'a point été réitérée dans le délai légal. Ce fut alors que la veuve Rochard et consorts prétendirent que Léger n'était plus recevable dans son opposition, puisqu'il ne l'avait pas renouvelée par requête dans la huitaine, conformément à l'article 162 du C. de proc. civ.

Léger soutint au contraire que la déchéance résultant du défaut de renouvellement de l'opposition dans la huitaine ne pouvait être encourue 'autant que le jugement par défaut avait reçu un commencement d'exécution; qu'autrement la partie condamnée par défaut pouvait toujours, par une seconde requête, réitérer sa première opposition, soit en former une nouvelle.

· Néanmoins, il intervint, le 24 mai 1851, un jugement du tribunal de première instance de Nevers qui, sans s'arrêter à

l'opposition, qu'il déclara non recevable, ordonna l'exécution du jugement par défaut du 4 juin 1827.

Léger se pourvut par appel devant la cour de Bourges. Suivant lui, les articles 158 et 162 doivent être entendus de cas différents; autrement, ils impliqueraient contradiction. L'art. 158 suppose qu'il n'y a pas encore eu d'exécution donnée au jugement par défaut; l'article 162 suppose, au contraire, qu'il y a eu commencement d'exécution; car, prévoyant le cas où l'opposition ne serait pas recevable, il ajoute, et l'exécution séra CONTINUÉE. Tel est donc le système de la loi: ou l'exécution a été commencée (c'est le cas de l'art. 162), et l'opposition, formée par acte extrajudiciaire, devra, sous. peine de déchéance, être réitérée par requête dans la huitaine; ou l'exécution du jugement n'a pas été tentée (c'est l'hypothèse de l'article 158), et la partie condamnée pourra toujours, à quelque époque que ce soit, jusqu'à l'exécution du jugement, renouveler son opposition. De l'opinion embrassée par le tribunal de Nevers sort cette conséquence inadmissible, qu'en formant opposition à un jugement inexécuté, la partie se priverait du droit, qu'elle avait avant son opposition, de former opposition jusqu'à l'instant de l'exécution. L'interprétation proposée par l'appelant n'a rien d'insolite; elle est au contraire appuyée par une jurisprudence constante (1).

Les intimés répondaient que la loi accordait la faculté de former opposition par acte extrajudiciaire, à la charge de la réitérer; mais que, cette faculté une fois épuisée, on ne pouvait plus s'en prévaloir; que l'art. 162 dérogeait à l'art. 158, on plutôt expliquait que le motif du Code de procédure en permettant de former, jusqu'à l'exécution, opposition à un jugement par défaut rendu contre une partie qui n'avait pas constitué avoué, avait été d'empêcher des surprises préjudiciables au condamné; mais que l'acte extrajudiciaire dénotait une suffisante connaissance du jugement; que par conséquent le but de la loi était rempli, et qu'il fallait restreindre autant que possible les longueurs d'une procédure qu'un mauvais débiteur tâcherait d'éterniser. Ils citaient à l'appui de leur dé

(1) Voyez dans ce Journal un arrêt de la cour de cassation du 18 av. 1811, anc. col., t. 65, p. 163; nouv. édit, t t. 12, p. 349; un arrêt de Colmar du 10 jauv. 1816, anc. col., t. 46, p. 348; nouv. édit., t. 18, p. 20; et un arrêt de Bourges du 15 fév. 1823, t. 1o de 1824, p. 123.

fense une consultation de M. Merlin, délibérée à Bruxelles le 29 février 1821.

Du 1er février 1832, ARRÊT de la cour d'appel de Bourges, première chambre, M. Mater premier président, MM. Michel et Mayet-Genetry avocats, par lequel:

« LA COUR, — Sur les conclusions de M. Tassin, substitut du procureur-général; Considérant que les appelants avaient formé en 1827 une opposition par acte extrajudiciaire au jugement par défaut du 4 juin 1827, et qu'ils ne l'ont pas renouvelée dans la huitaine par acte d'avoué à avoué; d'où les intimés tirent la conséquence que, cette opposition étant déclarée nou recevable par l'art. 162 du C. de proc. civ., il n'est plus permis d'en former une autre : mais que l'art. 158 du même code pose en principe que, si le jugement par défaut est rendu contre une partie qui n'a pas d'avoué, l'opposition sera recevable jusqu'à l'exécution du juge ment, et que, dans l'espèce, le jugement par défaut n'a pas été exécuté ; que l'art. 162, en auterisant la partie à former opposition par acte ex trajudiciaire, quoique la cause fût pendante en justice, a pu exiger, sous peine de déchéance de cette opposition, qu'elle fût habilitée dans la hui taine par acte d'avoué à avoué, sans déroger au principe général porté en l'art. 158; qu'ainsi les appelants ont pú former une seconde opposition au jugement par défaut du 4 juin 1827;

«Sans avoir égard à l'exception présentée par les intimés, dir qu'il a été mal jugé par le jugement dont est appel, au chef qui déclare l'op position non recevable, etc..

COUR DE CASSATION.

Les gardes nationaux qui refusent, après dissolution de la garde nationale, de restituer les armes qui leur ont été confiées par l'état, quoique sommés individuellement, sont-ils passibles des peines portées en l'art. 408. du C. pén. pour violation de dépôt ? (Rés. aff.) L'offre par eux faite de les représenter, et la déclaration qu'ils n'entendent point se les approprier, ôtent-elles à ce détournement le caractère de délit? (Rés. imp!. nég. )

LE MINISTÈRE PUBLIC, C. DÉROCLE ET AUTRES. Une ordonnance royale du 17 mars 1832 a dissous la garde nationale de Grenoble. Plusieurs gardes nationaux, sans intention frauduleuse, et dans le seul but de résister à l'autorité, ont refusé de restituer les armes qui leur avaient été confiées par l'état, malgré la sommation qu'ils en ont individuellement reçue. Le 13 av. 1832, jugement du tribunal correctionnel de Grenoble qui leur ordonne d'effectuer la remise des armes dans le délai de trois jours, à défaut de quoi les déclare convaincus d'avoir voulu les détourner au préjudice de l'état, et les condamne chacun à 3-fr. d'amende par application des art. 406, 408 et 463 du C. pén.

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Sur l'appel, les prévenus n'ont pas eu de peine à combattre le moyen terme adopté par le tribunal de première instance. Au foud, ils ont développé les moyens consignés dans l'arrêt suivant. Le 3 mai 1832, arrêt de la cour de Grenoble ainsi conçu « Attendu que le premier principe en matière criminelle est qu'aucune action de l'homme ne peut être passible de peines et justiciable des tribunaux criminels qu'autant qu'elle a été prévue par la loi et qualifiée crime, délit ou contravention; Attendu que la violation du contrat qui s'est formé entre le gouvernement qui a confié des armes à un citoyen pour veiller à la sûreté publique et le citoyen qui les a reçues pour accomplir les obligations que la loi lui imposait ne pourrait entraîner de peine qu'autant que cette même loi aurait déterminé les cas dans lesquels elle serait encourue; Attendu que le seul cas prévu dans la loi sur la garde nationale du 22 mars 1831, art. 91, est celui où un garde national serait prévenu d'avoir vendu les armes qui lui ont été confiées; que ce qui constitue évidemment la criminalité est l'action d'avoir vendu les armes à son profit ; que le cas où un garde national serait prévenu d'avoir retenu les armes qui lui ont été confiées, sous un prétexte quelconque, n'y est pas prévu, et que cette circonstance suffit pour qu'il ne puisse lui être imputé ni crime, ni délit, ni contravention; quelle que soit la lacune qui existe, à ce sujet, dans la loi, on ne saurait la combler par une assimilation et des argumentations contraires aux principes en matière pénale; - Attendu que la disposition de l'art. 408 du C. pén., par la rubrique sous laquelle il est placé, Abus de confiance, ne saurait s'appliquer au contrat intervenu entre le gouvernement et le garde national auquel des armes ont été confiées, par le motif que la loi spéciale sur la garde nationale a reconnu qu'il n'y avait abus de confiance et lieu à application de cet art. 408 qu'autant qu'il y avait eu vente de la part du garde national; que sa prévision n'est point allée audelà, et qu'il est de principe que la loi spéciale déroge à la loi générale lorsqu'elle lui est postérieure; qu'en effet toutes les convenances semblent se réunir pour qu'à raison du contrat intervenu entre le garde national et l'état, le garde national ne doive être traduit devant les tribunaux correctionnels qu'autant qu'il aurait détourné frauduleusement l'arme qui lui a été confiée, et que, dans l'espèce, les prévenus offrent de les représenter et n'entendent pas se les approprier; par ces mo

tifs, reforme le jugement, et renvoie, les prévenus de la plainte, sans dépens, sauf au ministère public à se pourvoir, s'il y a lieu, ainsi qu'il avisera. »

Pourvoi en cassation. Les défendeurs ne sont point intervenus; Mais M. l'avocat-général Nicod a conclu au rejet du pourvoi.

Du 27 juillet 1832, ARRÊT de la cour de cassation, chambre criminelle, M. de Bastard président, M. Isambert rappoṛteur, par lequel:

LA COUR, Après en avoir délibéré en la chambre du conseil ; — Vu les art. 69 et 91 de la loi du 29 mars 1831, sur l'organisation de la garde nationale, et l'art. 408 anc. C. pén;-Attendu que l'art. 91 de la loi du 22 mars ne prévoit que le cas spécial de la vente par un garde national, à son profit, des armes ou des effets d'équipement qui lui ont été confiés par l'état ou par les communes, et non celui de détournement: que c'est à l'art. 69 de la même loi qu'il faut se référer pour connaître les obligations générales des gardes nationaux envers l'état, à l'occasion des armes qui leur sont confiées; que cet article déclare expressément que ces armes restent la propriété de l'état ; que la délivrance n'en est faite, aux termes du premier alinéa de cet article, qu'à la charge par les gardes nationaux qui les reçoivent d'en donner un reçu par émargement; qu'il suit de là que ces armes ne leur sont confiées qu'à titre de dépôt, et à charge de les rendre lorsque le service pour lequel ce dépôt a été fait entre leurs mains a légalement cessé; que cette cessation alien lorsque la dissolution de la garde nationale a été prononcée par le roi, en vertu de la prérogative attachée à sa couronne par l'art. 5 de la même loi; - Attendu que, lorsque, après la dissolution ainsi prononcée, les gar des nationaux dépositaires de ces armes. refusent, après sommation individuelle, de rendre ces armes il y a détournement veritable de l'objet de leur destination, puisque les gardes nationaux ne peuvent plus en faire l'usage pour lequel elles leur avaient été confiées; qu'après cette sommation demeurée sans effet, l'art. 408 du C. pén. devient applicable, et que ce n'est plus par la voie civile qu'il doit être procédé contre les rétentionnaires des objets déposés; D'où il sait que, dans l'espèce, la cour royale de Grenoble a fait une fausse application des principes du droit civil, méconnu les dispositions spéciales de la loi du 22 mars, et formellement violé l'art. 408, du C. pén. Par ces motifs CASSE (1).

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J. S.

(1) En droit il n'y a pas d'abus de confiance en l'absence d'une intention frauduleuse. L'intention frauduleuse est un fait qui rentre dans le domaine souverain des cours royales. Sous ce rapport, l'arrêt dénoncé échappait à la cassation. Mais la question doit être envisagée de plus haut: une ordonnance du 24 juil. 1816 avait avisé aux moyens de faire rentrer toutes les armes de guerre dans les arsenaux de l'état. L'inconstitutionnalité des peines d'emprisonnement et d'amende qu'elle prononce était si flagrante, que la restauration n'en a pu tirer aucun parti. La lacune qui existait dans la législation subsiste encore. Il n'appartenait pas à la cour de cassation de la combler.

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