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selle Delaroche, et en obtinrent la réduction au tiers en usufruit seulement par jugement rendu en l'an 6. Ils formèrent plus tard, devant le tribunal civil de Tours, la demande en paiement de la portion des arrérages de ladite rente qui leur appartenait, contre les enfants Delaroche; mais le sieur Delaroche-Vernay, l'un d'eux, étant encore émigré à cette époque, cette demande n'eut pas de suite, Ils la renouvelèrent en 1817 contre la dame Delaroche, femme Nappart, et celleci appela en cause le sieur Delaroche-Vernay, son frère, alors de retour de l'émigration, lequel demanda et obtint le renvoi de la cause devant le tribunal de Loudun.

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Pendant la durée de cette instance, le sieur Quirit Delamothe forma opposition sur le montant de l'indemnité qui revenait au sieur Delaroche-Vernay en sa qualité d'émigré. Celui-ci en demanda la mainlevée, sur le fondement que la créance en vertu de laquelle elle avait procédé était preserite, et il intervint, le 7 nov. 1826, un jugement qui accorda cette mainlevée.

Le sieur Delamothe en appela devant la cour royale d'Orléans. Nous nous dispenserons d'analyser plus amplement les faits du procès et les moyens qui furent plaidés de part et d'autre sur l'appel. Ils sont retracés en ces termes dans les motifs de l'arrêt rendu par cette cour, le 30 mai 1827 << Considérant, dans l'espèce, que l'acte du 14 av. 1769, passé à Loudun entre les parties qui y étaient domiciliées, était régi par le statut local de cette ville, qui avait fixé à quarante ans le temps utile pour prescrire contre toute action hypothécaire; - Considérant que la prescription dont l'intimé ex→ cipe a commencé, d'après lui-même, à courir le 1er août 1769, lorsque toutes les parties étaient encore domiciliées à Loudun, et que leur changement de domicile, survenu depuis, n'a pu l'interrompre; -Considérant que cette prescription a été suspendue par la loi du 20 août 1792, qui a appli qué aux droits corporels et incorporels entre particuliers les dispositions de la loi du 1er juil. 1791, relatives aux mêmes droits intéressant l'état; Considérant que cette prescription a été également suspendue pendant le temps de la minorité de Quirit de Lamothe pour la portion de ses droits dans la rente de 467 liv., et qu'il résulte des actes de la cause que Quirit de Lamothe, né le 27 déc. 1779, est devenu majeur à la même date de l'année 1800, a eu des droits à la rente dont il s'agit,

à partir du décès de la dame Morin, arrivé le 19 déc. 1791, par l'effet du jugement du 14 fév. 1799 (26 pluv. an 6), rendu sur le testament de cette dame, fait à Loudun, le 13 déc. de la même année;- Considérant que les instances de 1792, 1798 et 1817 n'ont pu arrêter le cours de la prescription, puisque Delaroche-Vernay, qui l'oppose, n'y était pas partie, et qu'elle a dû s'arrêter au 22 nov. 1819; que la dame Nappart, assignée primitivement par Quirit de Lamothe en paiement et reconnaissance de la rente, a appelé Delaroche-Vernay, auquel appel celui-ci a répondu en constituant avoué, par suite de quoi est intervenu jugement contradictoire de Tours, le 25 av, 1820, qui a renvoyé sur ce fait les parties devant le tribunal de Loudun, conformément aux conclusions de DelarocheVernay, appelé en cause; - Considérant qu'en appréciant la prescription de quarante ans, conformément à l'art. 2262 du C. civ., il résulte 1° qu'il s'est écoulé du 1er août 1769au 2 nov. 1789, date de la suspension admise par la loi du 20 août 1792, vingt ans trois mois trois jours; 2o que, du 2 nov. 1794, terme de la suspension légale, au 27 déc. 1800, il y a eu interruption pour cause de la minorité de Quérit de Lamothe; 3° que, du 27 déc. 1800 au 22 nov. 1819, date de l'assignation interruptive de toute prescription, il s'est écoulé dix-huit ans dix mois vingtcinq jours, ce qui fait au total trente-neuf ans quatre mois et vingt huit jours, et qu'ainsi la prescription n'est pas acquise;

En ce qui touche les conclusions subsidiaires, Considérant que, dans l'espèce, il ne s'agit pas de déterminer la quotité des droits propres à justifier l'opposition de Quirit de Lamothe, et qu'il suffit qu'on lui en reconnaisse pour qu'il ait en qualité pour la former, et qu'au surplus ladite opposition n'est pas critiquée dans la forme; - Considérant qu'il est reconnu, entre les parties, que cette opposition ne peut valoir que pour la portion afférente à Quirit de Lamothe dans le capital de la rente dont il s'agit, et abstraction faite de tous les intérêts, au paiement desquels l'appelant a conclu devant la cour, tous droits réservés à cet égard; La cour, sans s'arrêter ni avoir égard à l'appel contre les jugements des 4 juil. et 30 août 1826, le déclare non recevable et condamne l'appelant en l'amende sur ledit appel; -En ce qui touche l'appel du jugement du 7 nov. de la même année, s'ans s'arrêter ni avoir égard à la prescription opposée par l'intimé, non plus qu'à ses conclusions subsidiaires, met l'appellation et ce dont

est appel au néant; émendant, décharge l'appelant des con-damnations contre lui prononcées, et ordonne que l'amende consignée sera restituée; - Au principal, faisant droit, déclare régulière, bonne et valable l'opposition formée le 27 av. 1826 contre Delaroche-Vernay, par Quirit de Lamothe, entre les mains du ministre des finances, sur le montant de l'indemnité accordée aux émigrés par la loi du 27 av. 1825; - En conséquence, ordonne que les sommes qui pourront revenir à 'Delaroche-Vernay, en exécution de ladite loi, seront comptées et versées à Quirit de Lamothe par tous caissiers, jusqu'à concurrence de ce qu'il justifiera lui être dû en capital seulement, en vertu des titres de créance des 1er août 1768 et 14 août 1769, toutes réserves faites de ses droits pour raison des intérêts échus. »

Le sieur Delaroche-Vernay s'est pourvu en cassation.contre cet arrêt 1° pour violation de la coutume de Loudun, où il a soutenu qu'elle n'était observée qu'autant que les parties avaient formellement et réciproquement exprimé la volonté d'être jugées suivant ses dispositions; et qu'en l'absence de cette stipulation, dans l'espèce, la cour d'Orléans n'avait pu la prendre pour règle de sa décision; 2° pour violation de l'art. 2, tit. 3, de la loi du 20 août 1792, parce que cette loi ne s'appliquait qu'aux rentes foncières et seigneuriales, et non aux rentes constituées à prix d'argent; 3° pour violation de l'art. 7, tit. 20, de la coutume de Loudun, qui veut que la prescription qui a commencé à courir contre un majeur continue son cours à l'égard de l'héritier mineur, et au mépris duquel l'arrêt attaqué avait décidé qu'elle avait été suspendue par la minorité du sieur Quirit Delamothe; 4° pour contravention aux lois anciennes et nouvelles sur la prescription et sur les causes de son interruption, parce que la cour d'Orléans avait jugé que la prescription avait été interrompue à l'égard du sieur Delaroche-Vernay par la citation qui lui fut donnée à la requête de sa sœur, tandis que cet effet n'aurait pu être produit que par une citation émanant du sieur Delamothe, qui avait intérêt à opérer cette interruption; 5° enfin, pour contravention aux lois qui défendent aux tribunaux de changer la nature des conventions des parties, laquelle résultait de la disposition de l'arrêt qui alloue au sieur Delamothe les sommes qui pourraient révenir au sieur Delaroche-Vernay, en exécution de la loi du 27 avril 1825, jusques à concurrence de ce qu'il justi

fierait lui être dû en capital, quoique le capital eût été aliéné
par le contrat constitutif de la rente, et que le remboursement
n'en eût
été offert par le débiteur ni réclamé par
cier.

pas

le créan

Du 27 mars 1832, ARRÊT de la cour de cassation, chambre civile, rendu par défaut contre le défendeur, qui n'a point comparu, M. Portalis premier président, M. Cassaigne rapporteur, M. Coste avocat, par lequel:

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. LA COUR, Sur les conclusions de M. Voysin de Garlempe, avocat-général, tendantes à la cassation de l'arrêt fondée sur le deuxième moyen, et au rejet des quatre autres moyens, Attendu 1° qu'il résulte des pièces produites que les parties ont implicitement consenti, dans le cours de l'instruction, à être jugées suivant la coutume de Loudun, sous laquelle l'obligation dont il s'agit a été contractée; qu'il suit évidemment de l'art. 9, tit. 20 de cette coutume, que l'obligation personnelle et hypothécaire entre particuliers ne se prescrivait que par quarante ans: que l'obligation dont est question est de cette nature, ct n'a pas été arguée de nullité devant les juges du fond; que dès lors elle n'a pu se prescrire que par quarante ans utiles;

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» Attendu 2° que la disposition de l'art. 2, tit. 3 de la loi du 20 août 1792, qui a suspendu la prescription pendant les cinq ans y indiqués, s'applique de sa nature et par sa généralité au fond des rentes constituées, comme aux autres droits incorporels susceptibles d'arrérages; Attendu 3° que l'art. 7 du titre précité de la coutume de Loudun, suivant lequel la prescription qui a commencé à courir contre le majeur continue de courir contre l'héritier mineur, n'a pas été opposé dans l'instance; que cette disposition étant extraordinaire, doit être restreinte aux mineurs pourvus de tuteur, et rien ne prouve dans la cause que Quirit Delamothe en ait été pourvu;

» Attendu 4° qu'il est reconnu par l'arrêt que la veuve Nappart, assignée par Quirit Delamothe en renouvellement de l'acte constitutif de la rente en question, appela en garantie de cette demande LarocheVernay, par acte du 22 nov. 1819; que ce dernier constitua avoué sur ces instances, et obtint, le 25 av. 1820, un jugement qui renvoya les parties, devant les juges compétents; qu'il suit de ces faits que l'action en garantie fit réfléchir la demande principale sur le garant; que dès lors la prescription de l'action principale fut interrompue contre le garant;

· » Attendu enfin 5o que le capital d'une rente constituée est exigible lorsque le débiteur a cessé de payer les arrérages pendant deux ans; qu'il est reconnu par l'arrêt attaqué que, loin de servir les arrérages de la rente dont il s'agit, Laroche-Vernay a opposé la prescription du principal, ce qui prouve évidemment qu'il n'a pas payé les arrérages pendant le temps prescrit; qu'ainsi en ordonnant que les sommes à lui dues par le trésor seront versées entre les mains de Quirit Delamothe, à concurrence de ce qui lui est dû sur le capital de ladite rente, lés juges n'ont fait qu'une juste application de la loi; - Donnant défaut, RE

JETTE, etc. ».

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J. L. C.

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Tome III de 552.

Feuille

COUR D'APPEL DE BORDEAUX.

Le mineur peut-il être tenu des dettes de la succession qui lui echoit, autrement que comme héritier bénéficiaire? (Rés. nég.)

L'omission de l'inventaire, commise par le tuteur, aurait-elle l'effet de rendre le mineur héritier pur et simple, s'il n'est pas établi qu'il a acquis cette qualité en faisant des actes d'héritier depuis sa majorité? (Rés. nég.) C. civ., art. 461 et 776.

La clause par laquelle le débiteur promet de payer, dans un nombre d'années fixé, le capital qui lui est prêté avec intérêt pour ce temps; fait-elle courir de plein droit les intérêts à l'expiration du terme? (Rés. nég.) C. civ., art. 1153 et 1154.

Les intérêts, quoique stipulés dans le contrat, sont-ils prescriptibles par le laps de cinq ans après leur exigibilité? (Rés, aff.) C. civ., art. 2277.

Le contrat judiciaire n'est-il parfait entre les parties que lorsque la proposition faite par l'une a été acceptée par l'autre ? (Rés. aff.) Spécialement, dans le cas d'une demande en paiement de vingi ans d'intérêts, le défendeur, après avoir soutenu n'en devoir que cinq, peut-il, avant que son offre ait été acceptée, prétendre qu'il n'en doit pas du tout? (Rés aff.)

NAVICEAU, C. GIBAUDAN.

Le 18 niv. an 13 (8 janv. 1805) Jean Gibaudan a emprunté de Naviceau une somme de 9,290 fr.; L'acte contient sur les intérêts la stipulation suivante: « laquelle somme le sieur Gibaudan promet de payer, avec l'intérêt au denier vingt, dans le délai de deux ans à compter de ce jour, ledit intérêt payable de six mois en six mois, et à échéance. »

Gibaudan mourut eu 1818 sans s'être libéré, ni du capital ni des intérêts, et laissant pour seul héritier son fils mineur. Le 25 janv. 1820, la dame veuve Raby, aïeule et tutrice du mineur Gibaudan, fit au greffe du tribunal de Bordeaux la déclaration qu'elle n'acceptait pour son pupille la succession de Jean Gibaudan mais elle ne sous bénéfice d'inventaire; que fit dresser aucun inventaire du mobilier que pouvait comprendre cette succession. Gibaudan fils devenu majeur réitéra lui-même cette acceptation, et déclara, par acte notarié, qu'au décès de son père il ne s'était trouvé aucun meuble qui pût être inventorié.

Le 28 oct. 1829, les héritiers Naviceau ont demandé contre

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