Page images
PDF
EPUB

AUBRY, C. BIEDEHARUTO.

Du 1er février 1832, ARRÊT de la cour de cassation, chambre des requêtes, M. Zangiacomi président, M. de Broé rappor teur, M. Lacoste avocat, par lequel:

LA COUR, Sur les conclusions de M. Lebeau, avocat-général; → Attendu, en droit, que l'art. 1116 du C. civ., lorsqu'il pose en principe général que le dol ne se présume pas et qu'il doit être prouvé, ne fait pas obstacle à ce qu'aux termes de l'art. 1353 du même code l'acte atta qué pour cause de fraude ou de dol ne soit annulé par le juge qui en re connaît et constate la fraude ou le dol au moyen de présomptions graves, précises et concordantes, assimilées par la loi à la preuve testimoniale: Attendu que, si, aux termes de l'art. 1320, les actes font pleine foi entre les parties de ce qui y est exprimé, cela n'empêche pas que ces actes ne puissent être annulés, d'après les art. 1108, 1109, 1116 et 1117, lorsque la convention est viciée, comme ne reposant que sur un consentement surpris par dol; Attendu que, si, aux termes de l'art. 1341, il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le con tenu aux actes, il n'en résulte pas que la fraude ni le dol, dans causam contractui, ne puisse pas être constaté soit par la preuve testimoniale, soit à l'aide de présomptions graves, précises et concordantes; Qu'alors, en effet, ce n'est pas le contenu en l'acte qui est contesté, mais le conser tement; Que, la surprise du consentement par le dol et fraude con stituant un fait qui participe du délit, et dont il est d'ailleurs impos 'sible de se procurer une preuve littérale, l'admission de la preuve testi moniale ou des présomptions pour constater ce fait est d'autant mieu autorisée, qu'elle se fonde sur le principe même établi par l'art. 1348, le quel fait exception à l'art. 1341, invoqué par le demandeur en cassa

⚫tion;

[ocr errors]

» Attendu, en fait, que pour annuler l'acte sous-seing privé, prétends libératoire, qu'Antoine Ruby produisait pour la première fois devant la cour royale de Lyon, et sur lequel Joseph Biedcharuton soutenait que sa signature ne pouvait se trouver que par l'effet d'une surprise pratiquée envers lui, cette cour s'est bornée 1° à juger qu'un acte sous seing pri vé ainsi attaqué pour cause de dol et de fraude peut être annulé sur des présomptions graves, précises et concordantes, et sans qu'il soit né cessairement besoin de recourir à la voie de l'inscription de faux, et s'i déclarer que, dans l'espèce, des présomptions graves, précises et concer dantes, établissaient le dol, la fraude et la surprise; Attendu qu'il ap partenait à la cour royale de déterminer souverainement la gravité, précision et la concordance des présomptions qui étaient abandonnées par la loi à ses lumières et à sa prudence, et dont l'arrêt attaqué con tient l'énuméralion; ` Qu'ainsi, cet arrêt, loin d'avoir faussement ap pliqué l'art. 1353 du C. civ., n'a fait que s'y conformer, et n'a pas viole les art. 1116, 1320 et 1341 du même code, non plus qu'aucune autre lo

REJETTE, etc. »

C.

COUR D'APPEL DE BORDEAUX.

1o Est-on recevable, sur l'appel, d exercer le retrait d'un droit litigieux qu'on aurait négligé de demander devant le juge a quo? (Rés. aff.)

2° Doit-on considérer cette demande comme une défense à l'action . principale autorisée par l'art. 464 du C. de proc.? (Rés. aff.) 3° Au fond, y a-t-il ouverture à l'exercice de ce retrait, lorsque par l'effet d'un jugement définitif, ou du contrat judiciaire, le droit cédé a perdu le caractère litigieux dont il était vicié, et qu'il est devenu certain? (Rés. nég.)

BORDENAVE, C. HOUDET.

[ocr errors]

Nous avons fait connaître l'historique des débats auxquels a lonné lieu, entre les mêmes parties, la question posée ci-desus no 3, question qui fut décidée dans un sens contraire par la our royale de Pau. Nos lecteurs peuvent se rappeler que, ur le pourvoi dų sieur Bordenave, cet arrêt a été annulé le 1er uin 1831 par la cour de cassation, qui renvoya les parties deant celle de Bordeaux (1). Ainsi, pour éviter des répétions qui seraient, inutiles, nous nous bornerons à dire que deant cette cour le sieur Bordenave, appelant et cessionnaire de demoiselle Romaine de Fortisson, a d'abord opposé à ses adersaires, les sieurs Houdot et consorts, adjudicataires des biens xpropriés sur le sieur de Fortisson, poursuite et diligence du eur Roux, son créancier, une fin de non recevoir fondée sur ce ue la demande en retrait par eux formée pour la première is devant la cour royale de Pau, par des conclusions subsiaires, était une demande nouvelle, qui, par sa nature, devait re soumise au tribunal de première instance, et non en apel, avec d'autant plus de raison qu'au bureau de conciliation, dame de Fortisson, dont il était le cessionnaire, ne leur avait is laissé ignorer qu'elle lui avait transmis tous ses droits. u fond, l'appelant a reproduit les mêmes moyens qu'il avait aidés tant devant la cour de Pau que devant celle de cassan: il a soutenu que les art. 1699 et 1700 du C. civ. étaient ns aucune application à l'espèce, puisque, bien loin que le nd du droit fût contesté ainsi que le veut ce dernier article,

( 1 ) Cet arrêt, avec l'exposé des faits et des moyens proposés par les pars, est rapporté au t. 3 1831, p. 423 de ce Journal. Feuille 31.

Tome IIIe de 1832.

la revendication de partie des biens immeubles adjugés aux adversaires avait cessé d'être litigieuse, en ce que le droit constitutif de cette revendication avait été tout à la fois reconna par le contrat judiciaire du 5 mai 1828 et l'arrêt de la cour de Pau qui condamnait les adversaires à délaisser ces inêmes immeubles, objet de leur adjudication.

Le 12 avril 1832, ARRÊT de la cour d'appel, chambres réunies, M. Roullet premier président, MM. Gergerès et Garia avocats, par lequel : .

« LA COUR, Sur les conclusions de M. Doms, avocat-général, · Attendu, sur la fin de non recevoir opposée par Bordenave et prise de ce que la cession des droits par lui acquis de Romaine de Fortisson n'arait été demandée qu'en cause d'appel, que d'abord cette demande était une défense aux conclusions du sieur Bordenave, et qu'elle était admissible, aux termes de l'art. 464 du C. de proc. civ.

vente

» Qu'ensuite le transport fait par Romaine de Fortisson à Bordenave. par acte du 5 août 1826, n'avait été connu de Lano, Houdet et con sorts, que devant la cour de Pau, et qu'ils ne peuvent être non receva bles pour n'avoir pas réclamé plus tôt la cession des droits transmis à Bordenave, puisqu'ils n'avaient pas une connaissance positive de qui leur en avait été faite; que Bordenave excipe vainement qu'ils l'a vaient reconnu et assigné comme cessionnaire de Romaine de Fortisson: que pour exercer le retrait il ne leur suffisait pas de reconnaître la qualité de Bordenave; qu'il était nécessaire qu'ils connussent positivement l'acte de transport, le prix, des clauses et conditions 'qu'il contenait. et qu'ils n'ont eu celte connaissance que devant la cour de Pau; d'où il suit que la demande en retrait est recevable;

que

Attendu, en second lieu, que l'acte du 4 août 1826 ne contient pas seulement la vente d'un corps, inais qu'il porte que Romaine de Fortis son a vendu à Bordenave tous les droits mobiliers et immobiliers, frails et revenus, qu'elle pouvait prétendre du chef de Thérèse sa sœur: que cette vente d'une universalité de biens tombe dans les dispositions des art. 1699 et 1700 du C. civ., et que, sous ce rapport, le retrait serait receva ble: Attendu le but de la loi est d'éteindre les procès en forçant l'acquéreur de droits litigieux à les abandonner à la partie avec laquelle son vendeur était en contestation, et que ce motif cesse lorsque le litige est terminé; Attendu que, dans la cause actuelle, l'objet du litige ela la propriété des biens que Romaine de Fortisson prétendait lui être échus en partage, et qui, par conséquent, n'avaient pas dû être compris dans l'adjudication des biens de Joseph de Fortisson son frère; que par acte signifié le 5 mai 1828, Houdel, et Lano et consorts, reconnurent l'identité des biens expropriés avec les biens échus au lot de Romaine de Fortisson;-Que, la cour de Pau ayant donné acte de cet aveu, el or donné le délaissement desdits biens, les droits cédés à Bordenave cessaient d'être litigieux; que cette décision principale, contre laquelle Houdet el consorts ne se sont point pourvus, et qui a acquis l'autorité de la chose jugée, rendait inadmissible leur demande subsidiaire en cession des droits acquis par Bordenave, et que dès lors il y a lieu de rejeter les conclusions qu'ils prennent aujourd'hui devant la cour;

D

lear

Statuant sur le renvoi à elle fait par l'arrêt de la cour de cassatie cu 1er juin 1831, DÉCLARE le sieur Houdet, Lano et consorts, mal fondes

dans leur demande en retrait des droits cédés par Romaine de Fortisson à l'appelant..

D. S.

COUR D'APPEL D'AIX.

Peut-on se pourvoir par appel contre le mode de procéder des experts? (Rés. nég.)

Suffit-il de faire, à cet égard, des réserves à consigner dans le procèsverbal des experts? (Rés. aff.)

COULLET, C. OLIVE ET CONSORTS.

Ainsi jugé le 24 janvier 1832, par ARRÊT de la cour d'appet l'Aix, chambre civile, M. Bret président. MM. Defougères et Fassy avocats, ainsi conçu:

Attendu qu'on n'est reçu à appeler que d'un jugement qui peut por r un préjudice quelconque à l'appelant, mais nullement d'un grief 'appel contre le mode d'opérer par des experts commis par justice, vant même leur rapport; Attendu que mal à propos Coullet requiert jourd'hui qu'il soit ordonné que l'enquête judiciaire qui va se faire à assis, en exécution de l'arrêté du 14 fruct, an 11, soit limitée aux seules rifications, à dater du 24 fév. 1793, jusqu'au 22 fruct. an 9, et que s habitants qui possèdent le bien de Cassis soient exclus du nombre des moins que lesdits experts auront à entendre; Que ces prétentions indentes et préalables ont été mal à propos portées à l'audience de la ›ur, et qu'il suffit à l'intérêt actuel de Coullet d'en faire la matière de res et réquisitions à consigner dans le procès-verbal des experts comis par justice, sur quoi il sera statué plus tard conformément à la loi.. J. A. L.

COUR D'APPEL DE NIMES.

'interdiction du mari pour cause de démence est-elle un motif de séparation de biens? (Rés. nég.) (1) C. civ., art. 506 et 1441. ANDRÉ PUGNÈRE, C. DAME PUGNÈRE.

Pierre Pugnère a épousé, le 26 octobre 1815, Anne Constant; ur union a été réglée par le régime dotal. Le 27 fév. 1828, tribunal civil de première instance de l'Argentière prononça nterdiction du mari pour cause de démence, et André Puvère, père de l'interdit, fut nommé son tuteur.

Le 8 janv. 1830, un jugement le condamna à payer à la

ime Pugnère une puelle destinée à son entretien

à celui de ses enfants. Le 9 mars 1851, la dame Pugnère

(1) Voy. M. Toullier, Droit civil français, t. 2, p. 460, no 1343.

présenta requête à l'effet d'obtenir sa demande en séparation de biens, et par suite l'autorisation de gérer et administrer ses biens personnels.

Le sieur André Pugnère ès noms, contesta cette demande sur laquelle intervint le jugement suivant:

[ocr errors]

Attendu que les art. 1443 et 1563 du C. civ. n'admettent la sépa ration judiciaire des biens qu'autant que la dot de la femme est mise en péril, et lorsque le désordre des affaires du mari donne lieu de craindre que les biens de celui-ci ne soient pas suffisants pour remplir les droits et reprises de sa femme: Attendu que la jurisprudence a étendu cette faculté au scul cas où, par l'inconduite du mari, les revenus de la dot qui doivent être affectés aux charges du mariage sont détournés de cette destination;~Attendu qu’Anne Constant ne se trouve placée dans aucun de ces cas; qu'aussi elle motive simplement sa demande sur la cir constance que son mari a été interdit pour cause de démence; mais que ce fait ne saurait donner lieu à la séparation, puisque ni la loi ni la jɛ. risprudence ne l'admettent au nombre des causes de séparation; que son mari se trouve représenté par son père, qui a été nommé son tuteur;Que ce dernier pourvoit aux frais du ménage en payant, aux termes da jugement du 8 janv. 1830, à Anne' Constant, une pension alimentaire plus ou moins considérable, suivant qu'elle nourrit et entretient ses enfants, ou que ces enfants sont nourris et entretenus par le tuteur, et en même temps en pourvoyant aux besoins du mari; qu'il ne s'agit pas, du reste, dans la cause, d'un mandat ordinaire, mais d'un mandat légal, auquel a donné lieu le mariage, en sorte que les lois invoquées à cet égard sont sans application; qu'enfin on doit d'autant moins, hors les cas prevus par la loi, accueillir une demande en séparation de biens, séparation tend à relâcher les liens du mariage, et à conférer à la femme des revenus pour en disposer suivant que ses caprices ou son esprit dindépendance le lui suggéreront; par ces motifs, déboute Anne Constant. femme Pugnère, de sa demande en séparation de biens. »

que

eette

La dame Anne Constant, femme Pugnère, attaqua cette sentence par l'appel, à l'aide d'un moyen plus subtil que fondé Il peut se réduire à ce raisonnement. En se mariant sous le régime dotal, la femme donne à son mari le mandat de gérer et d'administrer sa dot. L'interdiction du mari le place dans l'impossibilité physique et légale d'accomplir ce mandat (code civil, art. 2003). La femme propriétaire des biens dotaux d en recouvrer l'administration, car personne ne peut s'arroger le droit de substituer un mandataire à celui qu'elle a choisi. En vain objecterait-on que le conseil de famille a exclu la femme de la tutelle du mari, Peu importe cette exclusion lui enlèvera l'administration des biens personnels du mari mais une injuste défiance ne peut la priver de l'exercice de son droit de propriétaire sur ses propres biens.

Le sieur André Paguère, intimé, répondait que sous le droi

« PreviousContinue »