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dispose que Les maires des communes non chefs-lieux de canton connaissent, concuremment avec les juges de paix, des contraventions commises dans l'étendue de leur commune par les personnes prises en flagrant délit, ou par des personnes qui résident dans la commune ou qui y sont présentes, lorsque les témoins y seront aussi résidants ou présents, et lorsque la partie réclamante conclura pour ses dommages intérêts à une somme déterminée qui n'excède pas celle de 15 fr. Ils ne pourront jamais connaître des contraventions attribuées exclusivement aux juges de paix par l'art. 139, ni d'aucune des matières dont la connaissance est attribuée aux juges de paix considérés comme juges civils.

Ces textes tracent une ligne nette et précise entre la compétence du juge de paix et celle du maire. L'un et l'autre connaissent également, en général, de toutes les infractions. passibles soit d'un emprisonnement qui n'excède pas cinq jours, soit d'une amende qui n'excède pas quinze francs; mais la compétence du maire reçoit une triple restriction: 1o Le tribunal du juge de paix existe seul dans les communes chefslieux de canton: le tribunal du maire ne peut jamais y être établi. 2o Le tribunal du juge de paix connaît exclusivement, dans toute l'étendue du canton, soit des contraventions commises par des personnes non domiciliées ou non présentes dans la commune ou dont les témoins n'y résident pas, sauf toutefois le cas de flagrant délit, soit des contraventions à raison desquelles la partie civile réclame des dommages-intérêts supérieurs à 15 francs, soit enfin des contraventions spécialement désignées dans l'art. 139. 3° En ce qui concerne toutes les autres contraventions commises dans les autres communes du canton, le juge de paix a, non plus prévention, mais concurrence seulement avec le maire. Ainsi, ce dernier, bien que la contravention ait été commise dans la commune où il réside, peut être dépouillé de sa juridiction par une citation donnée devant le tribunal du chef-lieu de canton.

Il y a lieu d'induire de là: 10 que le tribunal du juge de paix est seul investi de la juridiction pleine et entière de la simple police et doit seul dès lors être considéré comme le juge ordinaire et naturel des contraventions de police;

2o que le tribunal du maire, purement facultatif, réduit aux pelites contraventions, n'ayant même, quant aux infractions qui lui sont déférées, qu'une concurrence avec le juge de paix, ne doit être regardé que comme une juridiction secondaire en cette matière, destinée à venir en aide aux parties, à raison des distances, mais dont l'institution par là même exceptionnelle, n'est nullement nécessaire à l'administration de la justice.

IV. Cette attribution générale ainsi établie, il y a lieu d'examiner si elle doit être appliquée, 1° à la peine accessoire de la confiscation; 2° à la condamnation à l'impression et affiche des jugements; 3° à la réunion de plusieurs contraventions accumulées; 4o aux contraventions commises en récidive; 5o enfin à la prononciation des restitutions et dommages-intérêts.

1° Les tribunaux de police sont compétents pour prononcer, outre l'emprisonnement et l'amende, la peine accessoire de la confiscation des objets saisis. Cela résulte de l'art. 137 du C. d'inst. cr. qui, après avoir fixé les limites de la compétence, ajoute : « qu'il y ait ou non confiscation des choses saisies et quelle qu'en soit la valeur. » Cette confiscation spéciale, dont le principe est posé dans l'art. 11 du C. pén., a été étendue aux matières de police par l'art. 470 du même Code qui porte: « les tribunaux de police pourront aussi, dans les cas déterminés par la loi, prononcer la confiscation, soit des choses saisies en contravention, soit des choses produites par la contravention, soit des matières ou des instruments qui ont servi ou étaient destinés à la commettre. » Cette mesure, qui frappe sur l'instrument ou la matière de la contravention, est commune à toutes les juridictions criminelles et par conséquent n'en détermine aucune 1.

2. Ils sont compétents pour prononcer, dans certains cas qu'il faut préciser, l'impression et l'affiche de leurs jugements. En géneral, l'application de cette mesure n'est point

Cass. 15 mars 1822, rapp. M. Busschop. Dev, et Car., t. VII, p. 40.

une règle des tribunaux de police : l'art. 36 du C. pén. ne l'a prescrite qu'en ce qui concerne les arrêts portant condamnation à des peines afflictives ou infamantes. Cependant il a été admis par la jurisprudence que lorsque l'affiche leur est demandée à titre de réparation civile ou comme complément de cette réparation, ils peuvent l'ordonner 1. Ce n'est point une peine qu'ils prononcent dans ce cas, c'est un simple dédommagement du préjudice causé par la contravention. Il suit de là qu'ils ne peuvent ni l'ordonner d'office, puisqu'elle prendrait alors le caractère d'une peine que la loi n'a point mise à leur disposition, ni l'ordonner pour un nombre d'exemplaires supérieur à la demande de la partie civile, puisque l'excédant ne serait infligé qu'à titre de peine, ni enfin la prescrire même sur la réquisition du ministère public, « puisqu'aucune disposition législative ne donne le droit à la partie pu- · blique de requérir eette mesure, même à titre de réparation civile de la contravention dont elle poursuit la répres sion *. »

Mais que faut-il décider si l'affiche est, non pas demandée par les conclusions des parties, mais prescrite par un réglement de police? Une ordonnance du 21 mai 1817, sur l'exercice de la profession de boulanger dans la ville d'Autun, portait, art. 16: « les contraventions à la présente ordonnance et aux réglements locaux dont il est fait mention en l'article précédent, seront poursuivies et réprimées par le tribunal de police, qui pourra prononcer l'impression et l'affiche du jugement aux frais des contrevenants. » Le tribunal de police se déclara incompétent «sur le motif que les tribunaux de police ne peuvent, dans le cas de contraventions, connaître que celles qui donnent lieu à une amende de 15 fr. et au

Voy. en sens contr. cass. 14 sept. 1793, rapp. M. Lions; 12 niv. an vIII, rapp. M. Jaume; et Conf. 17 fructidor an ix, rapp. M. Genevois; 26 pluviôse an x11, rapp. M. Basire; 22 oct. 1812, rapp. M. Busschop; 25 mars 1813, rapp. M. Liborel, Dev. et Car., Coll. nouv. et J. P, à leur date.

2 Gass. 17 mai 184, rapp. M. Schwendt. J. P., t. IX, p. 332.

* Cass. 27 déc. 1839, rapp. M. Rives. Bull. n. 291.

dessous ou à un emprisonnement de 5 jours et au-dessous, et que l'ordonnance du roi, autorisant à ordonner, outre ces peines, l'impression et l'affiche des jugements de condamnation aux frais des condamnés, elle établissait une nouvelle peine qui faisait sortir la contravention dont il s'agit du cercle des attributions de la simple police. » Ce jugement a été cassé « attendu que, ni par le Code pénal, qui a formellement déterminé quelles étaient les peines tant en matière criminelle qu'en matière correctionnelle et de police, ni par aucune autre loi, le caractère de peine n'a été attaché à l'impression et à l'affiche qui pourraient être ordonnées des jugements de condamnation aux frais des condamnés; que l'impression avec affiche aux frais du condamné n'est, à l'égard de la partie civile, qu'une réparation civile ou un complément de cette réparation; et que quand elle est ordonnée dans l'intérêt public, elle ne peut aussi être considérée que comme une mesure de police dont l'objet est de donner à la condamnation une plus grande publicité, par forme de réparation civile, et par ce moyen de rendre l'exemple plus utile. » Cet arrêt peut donner lieu à quelques objections. Comment comprendre, en effet, que l'affiche, quand elle est ordonnée dans un intérêt public, lorsqu'elle a pour objet de rendre l'exemple plus utile, et qu'elle est qualifiée dès lors de mesure de police, puisse encore être considérée comme une réparation civile? Comment admettre qu'une réparation civile puisse être ordonnée d'office ou sur les réquisitions du ministère public? Qu'est-ce que c'est enfin qu'une répation civile qui est ordonnée dans l'intérêt public et pour rendre l'exemple plus utile? Il est évident que cet arrêt a confondu dans ses motifs les principes les plus élémentaires.

La question s'est reproduite dans une autre espèce, et si elle a été résolue dans ce sens, ce n'est pas du moins par les mêmes motifs. Ce second arrêt porte : « sur le 2 moyen tiré de la prétendue violation des art. 471 et 474 du C. pén., én

'Arr, cass. 26 mars 1819, rapp. M. Rataud, Dev. et Car., t. VI, p. 49.

ce que l'impression et l'affiche du jugement ont été ordonnées aux frais des demandeurs en cassation, bien que ces articles ne les autorisent point: « attendu que le décret du 14 juin 1813, portant réglement sur l'exercice de la profession de boulanger à Nantes, se trouve inséré au Bulletin des lois et a été exécuté jusqu'ici comme une loi dans la ville de Nantes; qu'il doit dès lors continuer de conserver sa force législative tant qu'il n'aura pas été abrogé ; que son art. 16, qui confère au tribunal de police municipale la faculté, en réprimant les contraventions dont il lui attribue la connaissance, de prononcer l'impression et l'affiche du jugement aux frais des contrevenants, a légalement ajouté cette mesure d'ordre public à la pénalité déjà édictée par les art. 471 et 474; que par conséquent les réclamants ne sont pas fondés à se faire grief de cette partie de la condamnation par eux attaquée. » On voit que cet arrêt s'est bien gardé de reproduire l'argumentation hasardée de l'arrêt précédent : pour soutenir la légalité de l'affiche, il allègue, non pas qu'elle a le caractère d'une réparation civile quand elle est ordonnée par un réglement, mais que ce réglement avait dans l'espèce la force d'une loi; il faut une loi, en effet, pour ajouter une peine accessoire aux peines prononcées par le Code; et l'affiche du jugement, quand elle n'est pas demandée par la partie civile à titre de réparation civile, quand elle est ordonnée par le réglement ou d'office par le juge, est une veritable peine. Dans l'espèce, le décret du 14 juin 1813 avaitil le caractère d'un simple réglement ou d'une loi? C'est là une autre question qui ne nous importe point: il nous suffit que l'arrêt ait dù lui reconnaître la force d'une loi pour légitimer l'affiche. Il suit de là que les tribunaux de police sont compétents pour prononcer cette mesure, mais seulement dans les deux cas suivants : 1° quand ils la prononcent à titre de réparation civile; 2° quand elle est ordonnée par un réglement spécial ayant force de loi.

Cass. 27 juin 1851, rapp. M. Rives. Bull. n. 258.

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