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elle-même, à raison du caractère spécial de quelques faits de police, a cru devoir poser une restriction.

Cette restriction a été faite à l'égard 1o des contraventions en matière forestière poursuivies à la requête de l'administration; 2o des contraventions à la police de la médecine.

L'art. 139 du C, d'inst. crim. déclare que le tribunal de police du juge de paix connaît: «4° des contraventions forestières poursuivies à la requête des particuliers. » Il faut conclure de cette énonciation évidemment restrictive que les mêmes contraventions, lorsqu'elles sont poursuivies à la requête de l'administration forestière, cessent d'appartenir au tribunal de police. L'art. 2 du tit. 9 de la loi du 15-29 septembre 1791, sous l'empire de laquelle le Code d'inst. cr. a été rédigé, attribuait aux tribunaux correctionnels la poursuite de toutes les contraventions: Les actions seront portées immédiatement devant les tribunaux du district de la situation des bois. » L'ord. de 1669, tit. 26, art. 2 et 5, attribuait également aux juges spéciaux des eaux et forêts la connaissance des contraventions commises dans les bois des particuliers. La distinction introduite par l'art. 139 de notre Code a été maintenue par les art. 171 et 190 du Cod. for. : « Art. 171. Toutes les actions et poursuites exercées au nom de l'administration générale des forêts et à la requête de ses agents, en réparation des délits ou contraventions en ma-. tière forestière, sont portées devant les tribunaux correctionnels, lesquels sont seuls compétents pour en connaitre. », • Art. 190. Il n'est rien changé aux dispositions du Code d'inst. crim. relativement à la compétence des tribunaux, pour statuer sur les délits et contraventions commis dans les bois et forêts qui appartiennent aux particuliers. » Il suit de là que la compétence, en matière de contraventions forestières, dépend du droit de poursuite de l'administration: dans, toutes les affaires, quelle qu'en soit la nature, où elle a action, le tribunal de police est par là même incompétent.

Si la contravention commise dans les bois d'un particulier est poursuivie, non à la requête du particulier lésé, comme le

prévoit l'art. 139, mais à la requête du ministère public, quelle sera la juridiction compétente? On peut alléguer, pour dénier la compétence du tribunal de police, que l'art. 139 ne revendique au profit de ce tribunal, que les contraventions poursuivies à la requête des particuliers et que l'intervention directe du ministère public doit produire les mêmes effets que celle de l'administration. Il faut répondre que la loi attribue aux tribunaux de police toutes les infractions passibles des peines de police et que cette attribution ne peut cesser que là où elle trouve une limite dans la loi. Or ici où se trouve l'exception? Elle n'est pas dans l'art. 139 qui se borne à enlever au tribunal de police du maire les contraventions forestières poursuivies à la requète des particuliers; d'où l'on peut seulement induire qu'à plus forte raison les mêmes contraventions poursuivies à la requête du ministère public doivent appartenir au tribunal du juge de paix. Elle n'est pas dans les art. 171 et 190 du C. for., puisque ces articles se bornent à attribuer à la juridiction correctionnelle les poursuites exercées par l'administration et abandonnent au droit commun le réglement de la compétence en ce qui touche les contraventions commises dans les bois des particuliers. Il y a donc lieu de décider, comme l'a fait la Cour de cassation, « qu'il résulte de la combinaison des art. 139 C. inst. cr. et 190 C. for. que les contraventions forestières commises au préjudice de particuliers et qui, d'après les dispositions du 4° livre du C. pén., peuvent donner lieu, soit à 15 fr. d'amende ou audessous, soit à cinq jours d'emprisonnement ou au-dessous, appartiennent à la juridiction des tribunaux de simple police et peuvent être poursuivies soit à la requête des particulièrs au préjudice desquels elles ont été commises, soit à la requête du ministère public 1. »

Nous avons déjà vu que la récidive des contraventions ne changeait point la compétence des tribunaux de police; peut

Cass 25 janv. 1839, rapp. M. Dehaussy. Bull. n. 23; et Conf, cass. 16 avril 1825, rapp. M. Bresson. J. P., t. XXVII, p. 77.

ètre n'est-il pas inutile de suivre l'application de cette règle en matière de contraventions forestières. La Cour de cassation a reconnu, dans une espèce où le fait incriminé ne donnait lieu, aux termes de l'art. 196 du C. for., qu'à une amende de 2 fr.: « que la circonstance de la récidive entraînait seulement le doublement de l'amende à laquelle le fait incriminé donnait lieu, sans égard à la quotité de l'amende prononcée par le premier jugement; qu'ainsi l'amende à prononcer, en raison du fait incriminé combiné avec la récidive, ne s'élevant, aux termes dǝs art. 194 et 200, qu'à la somme de 4 fr., n'excédait pas la compétence du tribunal de police 1. »

La deuxième restriction est relative à la police de la médecine et de la chirurgie. L'art. 35 de la loi du 19 ventôse an 11 déclare que l'exercice de la médecine ou chirurgie sans avoir de diplôme « sera poursuivi et condamné à une amende pécuniaire envers les hospices. » Quel est le taux de cette amende? La loi ne l'a pas fixé et la jurisprudence a décidé que ce taux ne pouvait être supérieur aux amendes de police, parce que les lois pénales doivent être interprétées dans un sens favorable aux prévenus et qu'il suffit qu'une amende soit indéterminée pour qu'elle doive être rangée dans la classe des amendes les plus minimes . De cette jurisprudence, que nous n'examinons pas ici, il suit que les contraventions résultant de l'exercice de la médecine sans diplôme ne seraient justiciables que du tribunal de police, si la loi ne contenait aucune autre disposition. Mais l'art. 36 de la même loi porte que : « ce délit sera dénoncé aux tribunaux de police correctionnelle, à la diligence du commissaire du gouvernement près ces tribunaux. » Nous trouvons donc encore ici la désignation précise de la juridiction correctionnelle pour juger un fait qui ne constitue en lui même qu'une simple contravention; c'est une exception formelle à la règle de la compétence. Un arrêt des chambres réunies de la Cour

'Cass. 4 juillet 1844, rapp. M. Fréteau. I. cr., t. XVI, p. 229. Cass. 18 mars 1825, rapp. M. Brière. J. P., t. XIX, p. 316; 28 mai 18 rapp. M. Brière, t, XIX, p. 581.

de cassation déclare en conséquence: « que l'art. 36 de la loi du 19 ventôse an 11 porte en termes exprès que le délit prévu par l'art. 35 doit être dénoncé aux tribunaux de police correctionnelle; qu'à la vérité, cet art. 35 ne détermine pas la quotité de l'amende pécuniaire envers les hospices dont il ordonne que le délit sera puni; qu'il suit sans doute du silence de la loi que l'amende encourue doit être la plus faible des peines pécuniaires déterminées par le Code pénal, c'est-àdire l'amende de simple police, hors le cas où il y a des circonstances aggravantes, mais qu'il n'en résulte pas nécessairement que les tribunaux de simple police soient seuls compétents pour prononcer; qu'en effet, si en général la compétence des tribunaux se règle sur la nature de la peine portée par la loi, il en est autrement lorsque cette compétence a été réglée par le législateur; que, dans l'espèce, il y a attribution spéciale de la connaissance du délit d'exercice illégal de la médecine et de la chirurgie au tribunal de police correctionnelle par l'art. 36 de la loi ; que cette attribution, antérieure au Code pénal et au Code d'inst. cr., n'a rien d'incompatible avec leurs dispositions, puisque si les tribunaux de police ne peuvent, d'après ces Codes; prononcer d'autres peines que des peines de simple police, il n'en est pas de même des tribunaux de police correctionnelle qui sont autorisés par l'art. 192 du C. d'inst. cr. à prononcer des peines de simple police. »

IV. La deuxième exception comprend les faits de police qui, quoiqu'ils aient en eux-mêmes et qu'ils conservent le caractère de simples contraventions, sont passibles de peines supérieures aux peines de police. L'incompétence du tribunal de police est dans ce cas évidente, puisque c'est le taux de la peine et non le caractère du fait qui la fonde.

Ces faits, qui peuvent être qualifiés de contraventions correctionnelles, puisqu'ils sont contraventions par leur nature, et ne sont assimilés aux délits qu'à raison de la peine correctionnelle qui les frappe, sont nombreux dans notre législation.

1 Cass. 28 août 1832, rapp. M. Legonidec. J. P., t. XXIV, p. 1440.

Il existe, en effet, un grand nombre d'actes de désobéissance matérielle ou d'imprudence qui, quoiqu'ils ne révèlent en eux-mêmes aucune immoralité intrinsèque, entraînent des conséquences trop graves pour qu'une simple peine de police suffise à les réprimer.

Nous en trouvons un premier exemple dans le Code pénal. Ce Code renferme une assez longue série d'incriminations qui s'appliquent à des actes purement materiels, qu'aucune intention criminelle n'anime et qui ne consistent que dans des omissions, des négligences ou des prescriptions inexécutées. Telles sont les infractions relatives à la tenue des registres de l'état civil qui font l'objet des art. 192, 193 et 194, aux formes de la célébration des mariages qui font l'objet de l'art. 199, à la distribution des écrits sans les formalités prescrit es par les art. 283 et suiv., aux réunions et associations illicites prévues par l'art. 291 et suiv., à la détention et au port des armes prohibées prévus par l'art. 314, à la tenue des maisons de jeu, des loteries, des établissements de prêt sur gages, qui font l'objet des art. 410 et 411, au régime des eaux, à la conservation des récoltes et des bestiaux, que les art. 457 et suiv. ont réglés, etc.

Le Code forestier contient des contraventions de la même nature: il suffira de citer les art. 35, 36, 37, 38, 39, 42, 54, 56, 78, etc. La plupart des infractions prévues par la loi sur la pêche fluviale du 15 avril 1829 rentrent dans cette catégorie. On peut encore ranger dans la même classe les contraventions en matière de police rurale, prévues par la loi du 28 sept.-6 octobre 1791 et dont les peines excèdent le taux des peines de police, les contraventions aux anciens réglements qui ont conservé, en vertu de l'art. 484 du C. P., les amendes qu'ils avaient édictées, les contraventions commises en matière de postes, de douanes, de contributions indirectes, de garantie d'or et d'argent et de tabacs, les contraventions aux lois de la presse, en matière d'imprimerie et de colportage d'écrits, etc.

V. les contraventions, lors même qu'elles ont le carac

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