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bunal, devant lequel la contravention se présente avec le caractère le plus grave, et est passible de la peine la plus forte, qu'elle do it être déférée ; cependant, si le premier juge est seul saisi, il ne doit point se dessaisir, puisque, d'une part, il est compétent pour connaitre de la contravention, telle qu'elle s'est produite sur son territoire, et que, d'une autre part, aucune poursuite ne l'attire devant une autre juridiction '.

III. Nous avons précédemment examiné les questions de compétence qui peuvent s'élever lorsque le fait incriminé est commis sur les confins mêmes qui séparent deux territoires, de sorte qu'il peut être réputé avoir été commis sur les deux à la fois *.

Une difficulté spéciale s'est produite, à cet égard, en matière de contravention aux réglements de péage sur les ponts, bacs et passages. Les art. 51 et 52 de la loi du 6 frimaire an vii portent des peines de police contre les adjudicataires des ponts et bacs qui enfreignent les règles de leur service ou perçoivent des taxes exagérées. Or, si la rivière, sur laquelle se trouve le pont ou le bac, sépare deux cantons, quel est le juge compétent? D'après le droit commun, il faut dire que c'est le juge de la rive où est situé le bureau de péage, puisque c'est au lieu où se trouve le préposé que la contravention a été commise. Vainement objecterait-on que l'exécution aurait été commencée à partir du moment où le passant, contre lequel la contravention aurait été commise, serait entré sur le pont, car elle ne commence qu'au moment où le préposé commet l'abus qui lui est reproché et ne peut résulter à son égard du fait du tiers qui entre sur le pont par la rive opposée. Mais la loi spéciale fournit une autre objection l'art. 32 porte que « lorsque les passages seront communs à deux départements limitrophes, l'administration et

Voy. notre t. VI, p. 677.*

2 Voy. suprà, p. 173.

* Tom. V, p. 253.

⚫ Cass. 7 fév. 1851, rapp. M. Legagneur. Bull. n. 55.

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la police des passages appartiendront à l'administration centrale dans l'arrondissement de laquelle se trouvera située la commune la plus prochaine du passage; en cas d'égalité de distance, la population la plus forte déterminera. » Et l'article 33 ajoute « l'attribution donnée par l'article précédent aux administrations centrales dans l'arrondissement desquelles se trouve située la commune la plus prochaine du passage, déterminera également celle des tribunaux civils, criminels, de police et de justice de paix, chacun suivant leur compétence. » C'est là évidemment une dérogation au droit commun, mais cette dérogation doit être restreinte dans ses termes. Remarquez que l'art. 31 de la même loi spéciale commence par conférer au préfet du département la police du droit de péage, toutes les fois que les deux rives appartiennent au même département, et, dans ce cas, la loi stipule que « la police des délits criminels et de police continuera, conformément au Code, à être de la compétence des tribunaux. » Ce n'est donc que dans le seul cas où le passage sépare deux départements qu'une règle spéciale est établie pour le réglement de la compétence, et il faut, par conséquent, la limiter à ce cas. Telle est aussi la décision d'un arrêt qui porte: « que l'art. 31 de la loi du 6 frimaire an vII, qui confie les opérations relatives à l'administration et à la police du droit de péage à l'administration centrale du département, et aujourd'hui au préfet, prévoit le cas le plus général où le bac ou pont aboutit à des communes dépendant du même département; qu'il donne alors au préfet l'autorité sur l'administration du péage, sans préjudice de la surveillance de chaque municipalité, et qu'il laisse la compétence judiciaire dans les termes du droit commun, sans y apporter de dérogation; que les art. 32 et 33, au contraire, pourvoient au cas exceptionnel où le bac ou pont touche à deux départements différents; qu'obligés de choisir alors entre les deux administrations départementales, ils donnent la préférence à celle du département dont fait partie la commune la plus rapprochée du pont, et ils étendent la règle à la compétence judiciaire,

mais que ces articles sont inapplicables à l'hypothèse prévue par l'art. 31'. »>

$489.

I. De la compétence des tribunaux de police ratione persona. - II. Règle générale qui soumet tous les habitants du canton à leur juridiction. III. Cette règle rcçoit plusieurs exceptions, notamment en ce qui concerne les militaires.

I. L'art. 155 du C. du 3 brumaire an Iv portait : « toute personne prévenue d'un délit, dont la peine n'excède ni la valeur de trois journées de travail, ni trois jours d'emprisonnement, est citée devant le tribunal de police dans l'arrondissement duquel le délit a été commis, et jugée en dernier ressort. » Il semblait résulter de ces termes une juridiction absolue qui embrassait sans exception toute personne habitant le territoire de la commune et n'admettait ni privilege ni compétence spéciale. Il n'en était peut-être pas tout à fait ainsi, comme on le verra tout à l'heure ; cependant la juridiction du tribunal de police, sauf quelques exceptions très limitées, s'étendait, en général, à tous les habitants de la commune.

Le même principe subsiste encore quoique notre Code ne l'ait pas reproduit: la compétence du juge de police comprend, suivant les termes des art. 138, 139 et 140 du C. d'inst. crim., toutes les contraventions commises dans son ressort, et par conséquent, quelles que soient les personnes qui les aient commises, et sans aucune exception pour des personnes privilégiées. C'est la résidence sur le territoire qui fait la sujétion à la juridiction, car cette résidence entraine nécessairement, de la part de tous les habitants, l'obligation d'observer les réglements de police. Cette compétence admet toutefois, comme sous le Code de l'an iv, quelques excep

tions.

II. Le juge de police connait, en premier lieu, des con

Même arrêt.

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traventions commises par tous les habitants de son territoire, et par conséquent par les étrangers qui y résident momentanément, sauf l'exception que nous avons formulée en faveur des agents diplomatiques *.

Il exerce même, en ce qui concerne la poursuite des contraventions, une compétence plus étendue relativement aux personnes, que celles qu'exercent les juges correctionnels et les Cours d'assises dans la poursuite des délits et des crimes; car quelques-uns des priviléges de juridiction qui ont été attachés à certaines personnes se bornent à les protéger en matière de poursuites criminelles et correctionnelles, et ne descendent point jusqu'aux simples contraventions.

Ainsi, la garantie politique, qui protége les membres des chambres et du conseil d'Etat, ne s'étend point aux contraventions 3.

Ainsi, la garantie établie pour les membres de l'ordre judiciaire ne s'applique qu'à la poursuite des faits qui ont le caractère d'un délit ou d'un crime *.

Mais cette règle, quelque générale qu'elle soit, admet deux restrictions qui sont relatives, l'une aux agents du gouvernement qui ont commis quelques contraventions dans leurs fonctions, l'autre aux militaires en activité de service.

Tous les faits punissables commis par les agens du gouvernement, qu'ils soient qualifiés crimes, délits ou contraventions, motivent l'application de l'art. 75 de la loi du 22 frimaire an VIII, dès qu'il est constaté qu'ils se rattachent à l'exercice des fonctions. La contravention, dans ce cas, prend le caractère d'un acte administratif dont le juge de police ne peut connaître qu'après que la poursuite contre l'agent a été autorisée suivant les formes légales °.

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III. En ce qui touche les contraventions commises par les militaires, il faut distinguer si la contravention a été commise à la fois par des individus militaires et des individus non militaires, elle appartient au tribunal de police 1. Elle appartient encore au mème tribunal, 1° si le contrevenant fait partie de l'arme de la gendarmerie, «< attendu que, par les art. 97 de la loi du 28 germinal an vi et 251 de l'ord. du 29 octobre 1820, les officiers du corps de la gendarmerie, sous-officiers et gendarmes sont déclarés justiciables de la juridiction militaire, pour les délits relatifs au service et à la discipline militaire, et de la juridiction ordinaire, pour les délits commis dans l'exercice de leurs fonctions, relatives au service de police générale et judiciaire dont ils sont chargés . » Or, dans l'espèce de cet arrêt, les gendarmes étaient prévenus d'avoir foulé une pièce de terre ensemencée, en procédant à l'arrestation d'un déserteur; ils étaient donc justiciables du tribunal de police à raison de cette contravention; 2° si le contrevenant est un militaire en congé ou hors de son corps; car les militaires sont justiciables des tribunaux ordinaires à raison des délits communs qu'ils commettent, lorsqu'ils ne se trouvent plus sous les drapeaux et à leur corps .

Mais que faut-il décider à l'égard des militaires en activité de service et présents aux corps? Nous avons vu précédemment que, dans l'état actuel de la législation, la compétence des tribunaux militaires s'étend à tous les délits communs dont les militaires se rendent coupables sous les drapeaux et à leurs corps. Or, la loi spéciale a-t-elle fait ou seulement permis une exception à l'égard des contraventions de police? Nullement; l'art. 85 de la loi du 22 frimaire an VIII défère à la juridiction militaire les délits des militaires sans restriction, et sous le Code du 3 brumaire an iv le mot délits comprenait les contraventions; enfin l'avis du

4 Voy. notre t. VI, 737.

3

* Cass. 26 fév. 1825, rapp. M, Aumont. J. P., t. XIX, p. 233.

Voy. notre t. VI, p. 749.

Voy, notre t. 6, p. 734.

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