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à mettre le procès en état de recevoir jugement définitif. Sont réputés interlocutoires les jugements rendus lorsque le tribunal ordonne, avant dire droit, une preuve, une vérification ou une instruction qui préjuge le fond. » Cette définition a été considérée comme une règle générale qui s'applique en matière criminelle comme en matière civile. Nous verrons plus loin les questions délicates que son application a soulevées.

II. Toutes les formes des jugements en général s'appliquent aux jugements préparatoires et interlocutoires. Ils doivent donc être rendus publiquement et après l'audition des parties. Ils doivent également être rédigés et motivés. Cependant les règles relatives à la rédaction ne s'appliquent pas rigoureusement aux jugements purement préparatoires.

I. Jugements définitifs. qui les concernent.

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II. Jugements d'acquittement. - III. Règles |
IV. Dommages-intérêts. V. Dépens.

1. Les jugements sont définitifs lorsqu'ils terminent la poursuite devant la juridiction saisie.

L'art. 153 veut qu'ils soient rendus aussitôt après l'instruction terminée « Le tribunal de police prononcera le jugement dans l'audience où l'instruction aura été terminée, et au plus tard dans l'audience suivante. » Mais cette disposition, qui exprime le vœu du législateur que les jugements soient rendus avec célérité, n'est point prescrite à peine de nullité; c'est une mesure prise dans l'intérêt de la bonne administration de la justice, mais qui, par ce motif même, n'exclut pas l'examen et la méditation du juge, quand l'affaire présente des questions importantes. Il a même été jugé « que l'art. 153 n'empêche point le tribunal d'ordonner tout complément d'instruction qu'il juge nécessaire, mème à la seconde audience, où il l'oblige de statuer au plus tard".

Cass. 15 fév. 1845, rapp. M. Romiguières. Bull. n. 56.

2 Cass. 30 avril 1852, rapp. M. Rives. Bull. n. 139.

3 Cass. 3 avril 1842, rapp. M. Rives. J. du dr, cr., t. XIV, p. 334.

Les jugements définitifs prononcent l'acquittement ou la condamnation des prévenus. Il y a des règles particulières à ces deux sortes de jugements.

II. Le tribunal de police, si le fait ne présente ni délit ni contravention, doit annuler, aux termes de l'art. 159, la citation et renvoyer le prévenu de la poursuite.

Mais cet acquittement ne peut être prononcé que dans le cas où le fait ne présente ni délit ni contravention de police. Sont par conséquent contraires à la loi et doivent être annulés : 1o le jugement qui ne renvoie le prévenu qu'en admettant des excuses que la loi n'admet pas et qui, par conséquent n'effacent pas la contravention; 2° le jugement qui prononce le renvoi à raison de la nullité du procès-verbal sans apprécier la force probante résultant d'un aveu du prévenu; 3o le jugement qui, sans admettre la preuve contraire, déclare non prouvée une contravention constatée par un procès-verbal régulier'; 4 le jugement qui relaxe le prévenu parce qu'au moment de la perpétration de la contravention il était absent, lorsqu'il s'agit d'une ouverture illégale de cabaret ; 5° le jugement qui fait une fausse interprétation d'un arrêté de police 5; 6° qui se fonde sur des renseignements recueillis en dehors de l'audience; etc.

De là résulte la nécessité non seulement de motiver, comme tous les autres jugements, les jugements qui portent acquittement, mais d'énoncer spécialement le motif qui dé-

1 Cass. 8 fév. 1856, rapp. M. Jallon. Bull. n. 57; 9 fév. 1856, rapp. M. Bresson, n. 63; 17 nov. 1855, rapp. M. Jallon, n. 362; 3 août 1855, rapp. M. Poultier, n. 276; 24 fév. 1855, rapp. M. Foucher, n. 68; 28 juill. 1855, rapp. M. Moreau, n. 269; 1er sept. 1855, rapp. M. Poultier, n. 312; 23 et 24 août 1850, rapp. M. de Boissieux, n. 270, 2714 et 275, etc.

* Cass. 18 mars 1854, rapp. M. Aug. Moreau. Bull. n. 78.

*Cass. 24 janv. 1852, rapp. M. Foucher. Bull. n. 36; 13 juill. 1850, rapp.

M. de Boissieux, n. 222; 12 oct. 1850, rapp. M. Rives, n, 354.

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Cass. 8 juin 1850, rapp. M. Rives Bull. n. 192.

Cass. 11 janv. 1850, rapp. M. de Boissieux. Bull. n. 10; 25 mal 1849, rapp. M. de Boissieux, n. 118.

Cass. 3 août 1849, rapp. M. Rives. Bull, n. 192.

cide le juge; car, comment reconnaître la régularité de ces jugements? Comment apprécier s'ils ont examiné les caractères constitutifs des contraventions, s'ils ont exactement interprété les lois et les arrêtés qu'ils appliquent, lorsqu'ils ne rendent pas compte des motifs qui les ont déterminés ? C'est donc une règle générale que ces jugements doivent exprimer si le renvoi est fondé, soit parce que le fait incriminé n'est pas prouvé, soit parce qu'il ne constitue pas telle contravention, soit parce que la loi ou le réglement est muet ou incomplet':

III. L'acquittement doit être pur et simple. Il déclare, en effet, que le fait, que la poursuite avait qualifié de contravention, n'existe pas ou n'a pas ce caractère. Or, d'un fait qui n'est pas prouvé ou qui n'a aucun caractère repréhen sible, il n'est pas possible de déduire une conséquence pénale, une condamnation quelconque.

De là il suit: 1o que toute mesure pénale, même à titre de précaution, ne peut être ordonnée vis-à-vis du prévenu qui est acquitté *.

2° Que le tribunal de police ne peut lui adresser aucunes injonctions et par exemple lui enjoindre de ne plus récidiver '.

3o Qu'il ne peut le condamner aux frais de la procédure. L'art. 162 ne permet cette condamnation aceessoire qu'envers la partie qui succombe 4. Il faut excepter le cas où le jugement d'acquittement aurait été précédé d'un jugement par défaut, car il devrait alors, par argument de l'art. 187, supporter les frais de la signification de ce jugement et ceux de l'opposition 5, qui ont été motivés par le fait personnel de la non comparution.

1 Cass. 24 juin 1856, à notre rapport. Bull, n. 221.

2 Cass. 9 mess. an x, rapp. M. Delacoste. J. P., t. II, p. 633.

Cass. 6 juillet 1826, rapp. M. Gary. J. P., t. XX, p. 656.

* Cass. 7 et 30 mai 1840, rapp. M. Rives. Bull. n. 78 et 156; 29 nov. 1844,

rapp. M. Dehaussy, n. 385; 23 mars 1848, rapp. M. Rives, n. 77.

* Cass. 14 mars 1825, rapp. M. Gaillard, J, P., t. XIX, p. 291; 21 août 1852, rapp. M. Legagneur. Bull, n. 293,

4° Qu'il ne peut prononcer la confiscation des objets saisis. Cette conséquence trouve toutefois quelques exceptions en ce qui concerne les objets prohibés".

IV. L'art. 159, après avoir disposé que le tribunal annulera la citation et tout ce qui aura suivi, ajoute : « et statuera par le même jugement sur les demandes en dommagesintérêts. » Quelles sont ces demandes? de quels dommagesintérêts s'agit-il?

Deux hypothèses se présentent les dommages-intérêts peuvent être demandés, ou par le prévenu, à raison du préjudice que lui a causé une poursuite mal fondée, ou par la partie civile, à raison du préjudice que lui a causé le fait incriminé.

Dans la première hypothèse, la compétence du tribunal de police est clairement établie par la loi. La demande en dommages-intérêts qui suit un acquittement est, en général, formée par le prévenu à qui la prévention a pu causer un dommage matériel ou moral; son droit à cet égard est consacré devant toutes les juridictions répressives. A la vérité, cette demande est purement civile: c'est une indemnité résultant d'un acte d'imprudence ou de méchanceté. Mais il a paru qu'il serait trop onéreux de contraindre un citoyen, déjà injustement poursuivi par une partie civile, d'aller intenter une action civile devant le tribunal du domicile de cette partie. Et comme, d'un autre côté, le tribunal saisi est mieux que tout autre à portée d'apprécier le caractère de la plainte et la mesure du dommage, une attribution spéciale lui a été conférée à ce sujet. Il est inutile sans doute d'ajouter que cette demande ne peut jamais être dirigée, ni contre le ministère public, qui ne fait qu'exercer une fonction et qui pourrait seulement, comme on l'a vu, ètre pris à partie en cas de malversation, ni contre le plaignant, qui n'a point

1 Cass. 15 mars 1828, rapp. M. Bailly. Bull. n. 78.

199.

Voy, les lois des 22 août 1791. tit. X, art. 23; 19 bramaire an vi, art

donné de citation et ne s'est point constitué partie civile, puisqu'en se bornant à rendre plainte, il n'a point exercé d'action et n'est point en cause 1.

Dans la deuxième hypothèse, l'interprétation de la loi a donné lieu à une difficulté que la jurisprudence a définitivement résolue. On pouvait croire, d'abord, qu'il en était de la demande en dommages-intérêts formée par la partie civile comme de celle formée par le prévenu. L'art. 159 porte, en effet « le tribunal statuera sur les demandes en dommagesintérêts; ce qui semble renfermer les deux demandes. L'art. 191 reproduit, en ce qui touche la juridiction correctionnelle, les mêmes expressions, et les art. 358 et 366 reconnaissent à la Cour d'assises, dans les termes les plus précis, le droit d'accorder des dommages-intérêts à la partie civile après l'acquittement de l'accusé. N'est-ce donc point dès lors une attribution commune à ces trois juridictions? Cette conclusion, qui peut séduire à la première vue, vient promptement se briser contre les textes et les règles du droit. L'art. 212, qui reproduit en appel l'hypothèse déjà prévue par l'art. 159, en police simple, et par l'art. 191, en police correctionnelle, est plus explicite: «Si le jugement est réformé parce que le fait n'est réputé ni délit ni contravention de police par aucune loi, ie tribunal renverra le prévenu et statuera, s'il y a lieu, sur ses dommages-intérêts. » Il est clair que ces derniers mots ne se réfèrent qu'au prévenu et qu'il ne s'agit ici que de la demande qu'il peut former contre la partie civile. Or, comment comprendre cette restriction en appel si elle n'existe pas en première instance? et comment l'admettre dans l'art. 191 si elle ne se trouve pas dans l'art. 159? Remarquez ensuite que ce dernier article luimême veut que le tribunal annule la citation et tout ce qui aura suivi; or, annuler la citation donnée par la partie civile et toute l'instruction, n'est-ce pas annuler les conclusions

Cass. 9 fév. 1809, rapp. M. Guieu. Dev. et Cav. C., n. 3; 11 nov. 1824, rapp. M. Ollivier. Bull, u. 163; 2 mai 1840, rapp. M. Vincens St-Laurent, n. 126.

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