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S 475.

I. Réglements de police antérieurs à la loi du 16-24 août 1790. - II. Conditions de leur application. III. Réglements généraux. — IV. Conditions de leur application.

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I. Á côté des dispositions de la loi qui ont créé des contraventions, il faut placer immédiatement les réglements antérieurs aux lois des 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791, et qui, intervenus, soit sur des matières de police, soit sur des matières spéciales, ont été formellement maintenus par la législation nouvelle. Ces réglements ont acquis, quant à celles de leurs dispositions qui n'ont pas été abrogées ou renouvelées, une sorte de force légale, et ils accroissent dès lors le nombre des contraventions qui ont un caractère général et s'étendent à tout le territoire.

On peut distinguer deux séries de ces réglements: les uns qui sont maintenus par les lois de 1790 et de 1791, les autres qui sont maintenus par l'art. 484 du C. pén. Voici d'abord les textes qui s'appliquent aux premiers :

Loi du 19-20 avril 1790, art. 9: « La police administrative et contentieuse sera par provision et jusqu'à l'organisation de l'ordre judiciaire, exercée par les corps municipaux, à la charge de se conformer en tout aux réglements actuels, tant qu'ils ne seront ni abrogés ni changés.

Loi du 16-24 août 1790, tit. II, art. I. « Les corps municipaux veilleront et tiendront la main, dans l'étendue de chaque municipalité, à l'exécution des lois et réglements de police. D

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Loi des 19-22 juillet 1791, tit. Ier, art. 20: Les réglements actuelment existants sur le titre des matières d'or et d'argent, sur la vérificătion de la qualité des pierres fines et fausses, la salubrité des comestibles et des médicaments, sur les objets de serrurerie, continueront d'être exécutés jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné. Il en sera de même de ceux qui établissent des dispositions de sûreté, tant pour l'achat et la vente des matières d'or et d'argent, des drogues, médicaments et poisons, que pour la préservation, le dépôt et l'adjudication des effets précieux dans les monts-de-piété, lombards ou autres maisons de ce genre. Sont également confirmés provisoirement les réglements qui subsistent touchant la voirie, ainsi que ceux actuellement

existants à l'égard de la construction des bâtiments et relatifs à leur solidité et sûreté. ▾

Même loi, tit. I, art. 46: Le corps municipal pourra faire des arrêtés sur les objets qui suivent: 2o lorsqu'il s'agira de publier de nouveau les lois et réglements de police, ou de rappeler les citoyens à leur observation. »

Il résulte de ces textes: 1° que les anciens réglements de police légalement faits et qui se trouvaient en vigueur en 1790 et 1791, sont provisoirement maintenus dans les lieux où ils étaient observés; 2° que la loi, sans limiter expressément cette confirmation provisoire à ceux des réglemens qui rentrent dans les termes de l'art. 3 du tit. XI de loi du 16-24 août 1790, ne semble pas néanmoins s'écarter sensiblement du cercle tracé par cet article, puisque la plupart des réglements mentionnés par forme démonstrative appartiennent par leur nature à la matière de la police municipale; 3° que l'autorité municipale a le droit de rappeler les citoyens à l'observation de ces réglements, disposition maintenue par l'art. 11 de la loi du 18 juillet 1837, et d'où il faut inférer encore qu'ils rentrent dans les objets qui sont confiés à la vigilance de cette autorité.

II. Il faut induire, en premier lieu, de ce qui précède que les anciens réglements, relatifs à la police des villes et des communes, ne peuvent être invoqués que dans le cas où ils n'ont été remplacés par aucun réglement nouveau rendu par l'autorité compétente sur la même matière. Ainsi, dans une espèce où le tribunal de police s'était déclaré incompétent pour connaître d'une infraction à un arrêté municipal sur la police des cabarets, par le motif qu'un arrêt de réglement du parlement de Paris, du 10 février 1724, prononçait dans le même cas une peine supérieure aux peines de police, la Cour de cassation a annulé le jugement : « attendu que l'art. 484 C. pén. ne préscrit aux cours et tribunaux d'observer et faire exécuter que les dispositions des lois et règlements actuellement en vigueur; que, lors de la promulgation du Code, il existait pour la ville de Glamecy un réglement de police; qu'un

des articles de ce réglement a expressément le même objet que l'arrêt de 1724; que cet arrêt avait donc cessé d'ètre en vigueur relativement à cet objet. » On lit encore dans un autre arrêt, en termes plus généraux, et relativement au même arrêt du parlement de Paris : « que les anciens arrêts et réglements de police ne doivent recevoir aujourd'hui leur exécution que quand ils statuent sur des objets qui n'ont pas été réglés, soit par le Code pénal, soit par des arrêtés pris dans l'exercice légal des fonctions municipales 2. »

De là il suit encore que ces anciens réglements, qui pour la plupart n'avaient qu'une autorité limitée au ressort de l'autorité locale dont ils émanaient, ne pourraient être étendus aujourd'hui au delà du même territoire. C'est ainsi qu'il a été jugé qu'une ordonnance du lieutenant général de police de Paris a été déclarée non exécutoire en dehors de l'ancien Châtelet: « attendu que les ordonnances du lieutenant-général de la ville de Paris des 4 novembre 1778 et 8 novembre 1780, ne s'étendaient pas, pour leur exécution, hors du ressort du Châtelet de Paris; que le préfet de police de la même ville, en renouvelant ces ordonnances, a usé du droit qui lui était conféré par l'art. 46 de la loi du 19-22 juillet 1791, mais n'a pu ni entendu en étendre l'exécution au delà du territoire dont la police est confiée à sa surveillance'. >>

Mais quelle est la pénalité applicable aux contraventions à ces anciens réglements? Elle est indiquée par l'art. 5 du tit. II de la loi du 16-24 août 1790 qui porte que « les contraventions de police ne pourront être punies que des peines qu'il détermine, peines qui ont été depuis successivement modifiées, d'abord, par les art. 600 et 606 du C. du 3 brumaire an IV, ensuite par l'art. 471, no 15, et 474 du C. pén. : « Que signifient, a dit M. Merlin, ces termes les contraventions de police? Bien évidemment ils ne désignent pas

1 Cass. 11 juin 1818, rapp. M. Aumont. J. P., t. XIV, p. 853. 'Cass. 2 juin 1825, rapp. M. Aumont. J. P., t. XIX, p. 543. 5 fév. 1847, rapp. M. Rives, no 25.

'Cass. 28 avril 1832, rapp. M. Brière. J. P., t. XXIV, p. 997.

les contraventions aux réglements des corps municipaux; car les art. 1, 2, 3 et 4 avaient seulement chargé ces corps de veiller à l'exécution des réglements existants sans leur accorder le droit d'en faire, et ce droit ne leur a été conféré que par la loi postérieure du 19-22 juillet 1791, art. 46. Ces expressions les contraventions de police ne se rapportent donc et ne peuvent se rapporter qu'aux réglements de police qui ont été faits précédemment ou qui le seront à l'avenir par les autorités auxquelles le législateur en attribuera le pouvoir. L'art. 46 de la loi du 19-22 juillet 1791 charge, il est vrai, les corps municipaux de publier de nouveau les lois et réglements de police, mais il ne résulte point de là qu'ils puissent rendre à leurs dispositions pénales une autorité dont la loi du 16-24 août 1790 les a nécessairement dépouillées en les remplaçant par une disposition pénale qui est commune à tout le royaume. Cette argumentation est devenue plus évidente encore depuis que l'art. 471, no 15, du C. pénal a formulé une même pénalité contre toutes les contraventions aux réglements légalement faits par l'autorité administrative ou par l'autorité municipale. Il suit de là que, si le réglement ancien porte une pénalité différente ou supérieure, on doit séparer les dispositions réglementaire et les dispositions pénales : les premières continuent de subsister, si elles n'ont été ni modifiées ni remplacées par une loi ou par un réglement postérieur; les autres sont necessairement frappées d'abrogation par l'art. 5 de la loi du 16-24 août 1790 et par l'art. 471, n° 15, du C. pénal '.

La jurisprudence a hésité avant de se former sur ce point plusieurs arrêts ont décidé d'abord que, lorsque les anciens réglements portaient une peine supérieure aux peines de police, les tribunaux de police devaient se borner à déclarer leur incompétence; mais cette première

'Quest. v° Tribunal de police, § 4, n. 5.

'Cass, 28 mars 1807, rapp. M. Delacoste. J. P., t. V, p. 765; 11 fév. 1808, rapp. M. Carnot, t. VI, p. 499; 20 juin 1809, rapp. M. Qudart, t. VII, p. 634.

jurisprudence n'a pas tardé à se modifier: la Cour de cassation fut amenée à reconnaître dans quelques espèces que, lorsqu'un préfet ou un maire avait fait suivre un arrêté d'une autre pénalité que la énalité légale, le tribunal de police devait restituer à cet arrêté sa sanction normale, la seule qu'il pût prononcer. Cette solution fut bientôt étendue aux anciens réglements. Un préfet avait pris un arrêté pour défendre de tirer, dans l'intérieur des villes et des villages, des armes à feu, à peine de l'amende de 100 fr. prononcée par les arrêts de réglement du parlement de Besançon, des 9 juillet 1753 et 4 mars 1773. Le tribunal de police se déclara incompétent pour connaitre des contraventions à cet arrêté. L'annulation du jugement d'incompétence a été prononcée : « Attendu que les préfets sont autorisés à prendre pour toute l'étendue du département confié à leur vigilance, les mesures de police et de sûreté que la loi a placées dans les attributions de l'autorité municipale; que la connaissance des contraventions aux arrêtés de cette nature a été attribuée aux seuls tribunaux de police; que les peines encourues pour les contraventions fixées par la loi du 16-24 août 1790, doivent donc être appliquées aujourd'hui par les tribunaux de police avec les modifications des lois postérieures; que la compétence du tribunal de police est fixée et déterminée par l'objet sur lequel porte l'arrêté, et que la peine qu'il doit appliquer résulte des dispositions combinées de la loi du 16-24 août 1790 et des art. 600 et 606 C. 3 brum. an Iv; que dès lors ce tribunal doit prononcer la peine encourue par l'auteur de la contravention, aux termes des lois et dans les limites fixées par le Code pénal, sans avoir égard à celle qui peut avoir été ordonnée par l'arrêté auquel il a été contrevenu et dont les dispositions en ce point doivent être considérées comme non avenues, puisqu'elles sont contraires

Cass. 23 fév. 1811, rapp. M. Bailly, J. P., t. IX, p. 129; 12 nov. 1813, rapp. M. Aumont, t. II, p. 761; 10 avril 1819, rapp. M. Aumont, t, XV P. 240.

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