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fondée sur la déclaration du roi du 30 mai 1731, qui, combinée avec l'ordonnance d'août 1681, porte une amende de 50 fr. au moins contre cette contravention. La Cour de cassation a décidé : « que les peines établies par la déclaration du 30 mai 1731 prononçant une amende de 50 fr. au minimum, pour infraction à ses dispositions, il ne peut appartenir aux tribunaux de police de connaître des poursuites en contravention qui rentrent dans les cas prévus par ladite loi 1. » 2o Un réglement du 23 janvier 1727 prononce une amende de 60 à 100 livres contre les bâtiments de petit cabotage qui ne se conforment pas à l'obligation d'avoir un mousse à bord: un arrêt a maintenu le réglement et l'amende : « attendu qu'aux termes de l'art. 484, les tribunaux sont obligés d'appliquer les lois et les réglements antérieurement rendus sur des matières qui ne font pas l'objet du Code *. » 3o Un édit de février 1776, art. 6, veut que les boulangers et les bouchers ne puissent quitter leur profession qu'un an après la déclaration qu'ils ont faite de leur intention d'abandonner leur commerce, à peine de 500 livres d'amende et de plus forte peine s'il y échoit : la Cour de cassation a jugé que cette disposition était encore en vigueur et que l'amende de 500 fr. devait être appliquée'. 4° L'édit d'octobre 1666, rendu pour l'établissement du canal du Midi, prononce une amende de 500 livres contre les contrevenants aux réglements relatifs au péage : il a été reconnu que ces réglements et cette amende n'avaient pas cessé d'être applicables *.

Il y a lieu de remarquer que, dans ces espèces, les objets auxquels s'appliquent les réglements sont entièrement étran— gers aux objets énumérés dans l'art. 3 du tit. I de la loi du 16-24 août 1790; ce ne sont plus des matières, des réglements de police locale : ils appartiennent à la police générale, ils règlent des intérêts, spéciaux à la vérité, mais qui sont

Cass. 2 sept. 1842, rapp. M. Isambert. Bull. n. 224.
*Cass. 19 déc. 1846, rapp. M. Isambert. Bull. n. 327.
Cass. 18 fév. 1848, rapp. M. Rives. Bull. n 45.
* Cass. 23 mai 1854, à notre rapport. Bull. n. 490.

d'une autre importance que les intérêts de la petite police. C'est là ce qui explique la jurisprudence. Ces réglements ne sont point à ses yeux des réglements de police, mais des lois spéciales qui vivent à côté des lois générales et doivent être conservées avec la sanction particulière qui y a été attachée.

Cette interprétation rencontre cependant quelques difficultés. Supposons qu'un ancien réglement porte, comme il y en a plus d'un exemple, quelques-unes de ces peines corporelles que nos lois nouvelles ont abrogées. Quelle sera la pénalité applicable? Il n'y en aura pas d'autre que la plus minime, la peine de police. Le maintien de l'ancienne peine, et par conséquent le caractère de l'infraction, dépendra donc de sa nature; si elle rentre dans notre système pénal, elle sera appliquée dans toute sa rigueur, lors même qu'elle s'élèverait à 3,000 livres d'amende, et le fait aura le caractère d'un délit; si elle n'y rentre pas, elle sera réduite au taux des peines de police, et l'infraction ne sera plus qu'une contravention. Or, est-ce une bonne distribution de la justice pénale que celle qui admet, pour des faits que nous supposons d'une gravité égale, cette inégale application, ou, si l'on veut, ces étranges hasards?

Une autre hypothèse. Un réglement, comme par exemple l'art. 6 de l'édit de février 1776, contient cette formule : « A peine de 500 livres d'amende et plus forte peine, s'il y échoit. >> Comment appliquer cette disposition? Le juge pourra-t-il prononcer l'emprisonnement? La Cour de cassation a répondu négativement: « attendu que les réglements particuliers ne sont applicables que dans celles de leurs prescriptions qui peuvent se concilier avec nos lois actuelles; qu'il suit de là que l'application de l'art. 6 de l'édit de 1776 doit être restreinte à la disposition qui édicte l'amende; et · que les mots « à plus forte peine, s'il y échoit » qui le terminent, ne peuvent servir de base à une condamnation à l'emprisonnement, étant indéterminés et d'ailleurs incompatibles avec les principes de notre droit criminel, qui excluent toute peine arbitraire, non-seulement quant à sa nature, mais aussi

quant à sa quotité. » Ainsi voilà un ancien réglement, dont la pénalité, bien que maintenue en thèse générale, est scindée en deux parts; la jurisprudence applique le minimum et déclare le maximum aboli; au lieu de la prendre dans son entier, elle la façonne et la modifie pour la mettre en harmonie avec les règles nouvelles de notre législation. Mais alors pourquoi maintenir les amendes fixes de 500, de 1,000, de 3,000 livres? Est-ce que ces amendes, que l'art. 463 ne peut fléchir, sont conformes au système de notre Code? Est-ce que la règle nouvelle, qui plane sur toutes nos dispositions pénales, n'est pas la flexibilité de la peine pour établir sa juste proportion avec le délit? Et n'y a-t-il pas quelque arbitraire dans l'interprétation qui, d'un côté, supprime une peine parce qu'elle n'est pas en rapport avec notre Code, et, d'un autre côté, en applique une autre qui est elle-même une anomalie dans notre législation?

On peut apprécier par ces exemples combien cette matière est délicate et combien il importe d'examiner attentivement chaque réglement avant d'en faire l'application. La règle tracée par la jurisprudence n'est qu'un phare qui peut guider au milieu de cette matière diffuse, mais qui ne suffit pas à l'éclairer I reste encore à vérifier le caractère général de chaque réglement, à constater son objet, à savoir si ses dispositions ont été abrogées, modifiées ou remplacées, à rechercher enfin quelle doit être, d'après sa nature, la pénalité qui lui est applicable, et enfin, même dans le cas où il y a lieu de le maintenir tout entier, si les peines qu'il porte peuvent être appliquées en tout ou en partie. Nous devons nous borner, au surplus, à indiquer ces difficultés : leur examen n'appartient pas à notre sujet.

§ 476.

I. Du pouvoir réglementaire de la police. II. Règles et conditions du pouvoir réglementaire de l'autorité municipale. III. Formes des arrêtés municipaux.

I. Après avoir formulé ou maintenu les dispositions géné1 Cass. 14 fév. 1856, rapp. M. Leserrurier, Bull, n. 72,

rales et uniformes qui ont prévu et puni les principales contraventions de police, le législateur a compris que la police locale de chaque commune comportait des besoins trop divers, des mesures trop différentes et trop multiples à la fois, pour qu'il fut possible d'entrer à l'avance dans leurs détails et de les régler dans les mêmes termes. Il a donc délégué à l'autorité municipale, à l'autorité qui est chargée de l'aménagement de la cité, le pouvoir de prendre, sous la surveillance d'une autorité supérieure, toutes les mesures nécessaires à l'accomplissement de la mission de cette police. Cette délégation, dont nous avons retrouvé des traces dans la législation romaine et dans notre ancien droit, a été posée comme un principe de la matière par l'Assemblée constituante, et notre législation nouvelle a conservé ce principe. Elle a seulement changé le mode et les conditions de son exercice; et plus récemment elle en a restreint les limites.

Dans le système de l'Assemblée constituante, le pouvoir réglementaire était délégué aux corps municipaux; il n'est délégué aujourd'hui qu'aux maires qui seuls exercent le pouvoir de la police. Il était exercé sous la surveillance et l'inspection des assemblées administratives de département; il est soumis maintenant, non-sculement au droit de surveillance, mais au droit de réformation des préfets. Les art. 9, 10 et 11 de la loi du 18 juillet 1837, qui ont pris la place de l'art. 50 du décret du 14 décembre 1789 et de l'art. 46 de la loi du 19-22 juillet 1791, sont ainsi conçus :

« Art. 9. Le maire est chargé sous l'autorité de l'administration supérieure, 1o de la publication et de l'exécution des lois et réglements; 2o des fonctions spéciales qui lui sont attribuées par les lois; 3° de l'exécution des mesures de sûreté générale.

Art. 10. Le maire est chargé, sous la surveillance de l'autorité supérieure 1o de la police municipale, de la police rurale et de la voirie municipale, et de pourvoir à l'exécution des actes de l'autorité supérieure qui y sont relatifs ;...

» Art. 11. Le maire prend des arrêtés à l'effet: 1. d'ordonner les mesures locales sur les objets confiés par les lois à sa vigilance et à son autorité; 2° de publier de nouveau les lois et réglements de police et

de rappeler les citoyens à leur observation. Les arrêtés pris par le maire sont immédiatament adressés au sous-préfet. Le préfet peut les annuler ou en suspendre l'exécution. Ceux de ces arrêtés qui portent réglement permanent ne seront exécutoires qu'un mois après la remise de l'ampliation constatée par les récipissés donnés par le sous-préfet.»

Ainsi le pouvoir réglementaire de la police réside encore dans la commune; mais ce n'est plus à l'autorité collective de la municipalité qu'il appartient, c'est au maire qui n'en est que le représentant et qui est nommé, aux termes de la loi du 9 mai 1855, par le pouvoir exécutif. Les conditions de son exercice diffèrent suivant le caractère temporaire ou permanent des arrêtés temporaires, ces arrêts sont exécutoires de plein droit, sauf la faculté de les réformer ou de les annuler qui appartient au préfet; permanents, ils ne peuvent être mis à exécution qu'après que l'autorité supérieure les a approuvés ou a été mise en demeure, pendant le délai d'un mois, de les examiner et de les improuver.

Cette attribution, ainsi constituée, nous paraît fondée sur la nature mème des choses. Il appartient à l'autorité qui administre la commune et réside sur son territoire de connaître ses besoins, d'étudier les mesures qui peuvent lui être utiles, de prévoir les précautions qu'exigent la propreté de ses voies publiques, la sécurité de ses habitans, la salubrité de son territoire. Toutes ces mesures étant essentiellement locales, c'està-dire, restreintes dans l'étendue de chaque commune, suivant ses intérêts particuliers, les événements qui y surviennent, les faits accidentels ou calamiteux qui s'y succèdent, ne peuvent évidemment émaner que de l'autorité qui réside sur les lieux, puisque seule elle peut apprécier leur opportunité et leur utilité. Elles doivent avoir pour objet l'intérêt de la commune, son bon aménagement, la commodité et la sûreté des relations sociales, la tranquillité publique; et quelle est l'autorité qui peut aprécier ces intéréts, s'identifier avec eux, chercher à les protéger et à les développer, si ce n'est l'autorité municipale, née dans la commune, associée à toute sa vie, et qui n'est que la commune s'administrant elle-même? Le

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