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même Cour a dû juger en même temps « qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait dépendre la validité des arrêtés de police, qui sont légalement émanés de l'autorité municipale, de leur transcription sur un registre destiné à les recevoir et à les réunir; qu'il suffit que ces arrêtés existent et soient représentés pour que les tribunaux soient tenus de réprimer les contraventions qui peuvent y avoir été commises, quand d'ailleurs leur publication a eu lieu suivant les formes d'usage et se trouve attestée par l'autorité même qui les a rendus » Il est utile sans doute que les arrêtés de police de chaque commune soient transcrits et réunis dans un même registre; mais cette mesure, qui touche plus à l'unité et à la conservation de ces actes qu'à leur solennité, n'est point nécessaire à leur existence : leurs formes essentielles sont celles qui les constituent, qui déterminent leur nature et leur autorité, qui les rendent susceptibles d'exécution.

Il faut distinguer ensuite s'ils sont temporaires ou permanents les uns sont ceux qui, motivés par une cause temporaire, comme les chaleurs ou les neiges, les fêtes publiques, les épidémies, la taxe du pain, n'ont qu'une existence momentanée; les autres sont ceux qui, motivés par un intérêt durable, comme la police des marchés, le nettoiement de la voie publique, doivent prolonger leur autorité dans l'avenir.

Les premiers sont exécutoires sur-le-champ. C'est ce qui résulte du 3 § de l'art. 11 de la loi du 18 juillet 1837, portant : « Les arrêtés pris par le maire sont immédiatement adressés au sous-préfet. Le préfet peut les annuler ou en suspendre l'exécution. » Si le préfet ne peut que les annuler ou les suspendre, et, si aucun délai n'est stipulé pour leur mise à exécution, ils ne sont donc assujettis à aucune approbation préalable. Il a été jugé dans ce sens « qu'il ne faut pas confondre avec les réglements permanentsde police les arrêtés qui, d'après leurs termes explicites et formels, sont purement temporaires et doivent de plein droit cesser d'être obliga

1 Cass. 13 avril 1833, rapp. M. Rives. J. P., t. XXV, p. 361.

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toires à l'expiration du laps de temps par eux déterminés, ou lorsque les conditions qui s'y trouvent prescrites n'ont pas été remplies; que les arrêtés de cette dernière catégorie obligent pleinement les citoyens qu'ils concernent, aussitôt qu'ils en ont une connaissance légale, puisque la loi ne fait dépendre leur exécution de l'observation d'aucun délai 1. »

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Les arrêtés permanents ne sont point, au contraire, susceptibles d'une exécution immédiate. Le 3° S de l'art. 11, que nous venons de citer, est suivi d'une disposition ainsi conçue: « Ceux de ces arrêtés qui portent réglement permanent ne seront exécutoires qu'un mois après la remise de l'ampliation. constatée par les récipissés donnés par le sous-préfet. » Ce délai a pour objet de laisser à l'autorité administrative le temps nécessaire pour examiner l'utilité du règlement; il est donc suspensif de toute exécution". Il a été décidé, en conséquence, que cette disposition est générale et absolue; qu'elle ne peut dès lors être modifiée par cette circonstance que le préfet aurait donné son approbation au réglement avant l'expiration du mois du dépôt, et que la loi ne distinguant pas, il ne peut appartenir aux tribunaux d'admettre aucune distinction.» Toutefois la loi n'impose point aux maires l'obligation de rendre publiques la remise de l'ampliation de l'arrêté et la date de cette remise, et la Cour de cassation a jugé « qu'il y a présomption suffisante, que le maire qui fait eéxcuter un de ses arrêtés portant règlement permanent, s'est conformé à la disposition de l'art. 11, et que cette présomption ne peut cesser que là où, sur la demande des parties intéressées ou du juge requis d'assurer l'exécution et de

* Cass. 17 nov. 1849, rapp. M. Rives. Bull. n. 306; et Conf. 1 avr. 1841, rapp. M. Romiguières, n. 80; et 24 sept. 1847, rapp. M. Jacquinot, n. 234.

2 Cass. 7 juill. 1838, rapp. M. Isambert. Bull. n. 196, 20 juill. 1838, rapp. M. Mérilhou, n. 235.

3 Cass. 17 mars 1848, rapp. M. Jacquinot. Bull. n. 71; 14 mars 1851, rapp. M. Jacquinot, n. 99.

punir la violation d'un tel arrêté, la justification de la remise et de la date de la remise à l'autorité administrative supérieure serait refusée 1. D

Mais les uns et les autres ne sont obligatoires qu'après avoir été publiés. Il est, en effet, de principe, et les art. 471, n° 15, du Code pén. et 11 de la loi du 18 juillet 1837 le rappellent l'un et l'autre, « qu'un réglement administratif, dont l'application emporte l'application d'une peine, n'a force d'exécution que par la connaissance qui en est légalement donnée à ceux auquels est imposée l'obligation de s'y conformer; car, ainsi que le déclare un arrêt, « les citoyens ne sont tenus de se conformer aux injonctions spéciales ou individuelles de police qui les concernent, qu'à partir du moment où ils en ont légalement connaissance'. » Ce n'est donc qu'à partir de leur publication que les arrêtés de police peuvent être appliqués . Quelle doit être la forme de cette publication? La loi n'en a prescrit aucune qui soit spéciale aux arrêtés. Il faut donc se reporter aux règles générales de la matière. L'avis du conseil d'État du 25 prairial an XIII dispose que « les décrets qui ne sont point insérés au Bulletin des lois ne sont obligatoires que du jour où il en est donné connaissance aux personnes qu'ils concernent par publication, affiche, notification ou signification. » La jurisprudence a dû faire l'application de cette règle générale à la publication des arrêtés; il a donc été reconnu «< que l'avis du conseil d'État doit, par raison d'identité et d'analogie, s'appliquer également aux réglements municipaux de police; qu'il suffit, dès lors, pour les rendre pleinement obligatoires, que ces réglements aient été publiés ou affichés

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Cass. 19 oct. 1842, rapp. M. Romiguières. Bull. n. 286; 3 déc. 1810, rapp. M. Rives, n. 346.

Cass. 5 juill. 1845, rapp. M. Rocher, Bull. n. 222.

3 Cass. 11 août 1854, rapp. M. Rives. Bull, 256.

Cass. 27 fév. 1847, rapp. M, Jacquinot. Bull. n. 46; 3 mai 1850, rapp. M, Leganneur, n. 146.

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dans les communes soumises à leur observation. » Mais lorsqu'ils ont été publiés ou affichés, toute notification ultérieure est inutile, car leur notification n'est nécessaire pour astreindre à s'y conformer sous les peines de droit les personnes qu'ils ont en vue, que dans le cas où ils n'ont été portés à la connaissance du public ni par affiche ni par publication. » Dans cette dernière hypothèse, il serait nécessaire que l'acte lui même fut notifié un simple avertissement verbal ne suffirait pas; car un avertissement ne constitue pas une notification légale et n'en a pas les effets. Il a été jugé dans ce sens qu'un arrêté n'est pas devenu obligatoire à l'égard d'un prévenu par un simple avertissement verbal, qu'il ne pouvait être tenu de l'exécuter qu'autant qu'il en aurait eu une connaissance légale, soit par une publication dans les formes accoutumées, soit par l'envoi qui lui en aurait été fait officiellement par voie administrative. >>

Les arrêtés qui sont ainsi légalement faits et publiés sont obligatoires pour tous les individus, même étrangers à la commune, qui se trouvent sur son territoire *.

§ 477.

L. Pouvoir réglementaire des préfets.— II. Cas dans lesquels ils exercent le pouvoir municipal. III. Cas dans lesquels ils agissent en vertu d'une délégation directe de la loi. — IV. Peuvent-ils en dehors de ces cat, prendre des arrêtés sur les matières énumérées par la loi des 16-24 août 1790? - V. Formes de leurs arrêtés.

I. Le pouvoir réglementaire de la police exclusivement attribué à l'autorité municipale par l'Assemblée constituante,

Cass. 24 juill. 1852, rapp. M. Rives. Bull. n. 246.

* Même arrêt.

* Cass. 27 avril 1849, rapp. M. Vincens Saint-Laurent, Bull. n. 99. Cass. 31 août 1820, rapp. M. Aumont. J. P., t. XVI, p. 894.

* Cass. 27 fév. 1847, rapp. M. Jacquinot. Bull. n. 41, 14 mai 1×53, rapp. M. Rivas, n. 167.

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a été étendu, d'abord par la loi, dans plusieurs cas spéciaux, ensuite par la jurisprudence, dans quelques cas de police ordinaire, aux préfets. Nous allons essayer d'en fixer l'étendue et les limites.

Une première observation est que, parmi les membres de l'administration, les préfets seuls, quel que soit ce pouvoir en lui-même, peuvent en revendiquer l'exercice aucun autre agent administratif, dans l'étendue de chaque département, ne pourrait y participer, car le préfet seul est le représentant du pouvoir exécutif et le chef responsable de l'administration dans le territoire où s'étendent ses fonctions. Ainsi la Cour de cassation n'a pas hésité à déclarer que l'arrêté de police pris par un sous-préfet, même avec l'approbation du préfet, est illégal et nul : « attendu que l'art. 3 de loi du 28 pluviose an VIII charge les préfets seuls de l'administration; que l'exercice du pouvoir réglementaire ne saurait dès lors, dans aucun cas, appartenir aux sous-préfets, et que les arrêtés par lesquels ces derniers se l'attribuent ne peuvent recevoir aucune force de l'approbation des préfets'. »

II. Les préfets, en premier lieu, ont été investis dans certaines localités du pouvoir réglementaire qui appartient à l'autorité municipale.

Ainsi nous avons vu que les arrêtés du 12 messidor an VIII et du 3 brumaire an Ix ont délégué au préfet de police dans le département de la Seine et dans quelques communes voisines le pouvoir réglementaire que les lois des 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791 ont attribué aux corps municipaux. Le préfet de police exerce donc seul, à Paris et dans ces communes, le droit de prendre des arrêtés de police.

La loi du 19 juin 1851 a conféré au préfet du Rhône des pouvoirs analogues à ceux du préfet de police :

Art. 1. A dater de la promulgation de la présente loi, le préfet du Rhône remplira dans les communes de Lyon, la Guillotière, la CroixRousse, Vaisse, Calluire, Oullins et Sainte-Foy, les fonctions de préfet

Cass. 27 janv. 1854, rapp. M. de Glos, Bull, n. 23.

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