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incapable de faire le bonheur de l'Espagne et de la Reine, dont il apprend le choix avec le plus grand déplaisir, et à qui il aurait jugé tout autre préférable, ce prince est un objet de répugnance, de résistance de la part du noble lord, autant que le permettent les principes du droit public et la convenance entre nations. Je me flatte que vous trouverez ces explications catégoriques, et que tout au moins vous ne serez plus surpris des paroles que j'ai prononcées au Sénat, surtout l'opinion du ministre des affaires étrangères d'Angleterre ayant été communiquée à M. Tacon sans aucun genre de réserve, ce qui ne lui permettait pas de demeurer un mystère, alors même qu'elle n'eût pas transpiré par d'autres voies.

Je saisis cette occasion pour réitérer à Votre Seigneurie les assurances de ma considération la plus distinguée, etc., etc.

XAVIER DE ISTURIZ.

CONVENTION MATRIMONIALE

DE S. A. R. Monseigneur le dUC DE MONTPENSIER AVEC
S. A. R. MADAME MARIE-LOUISE-FERDINANDE, INFANTE
D'ESPAGNE.

22 septembre 1846.

et le consentement exprès de leurs augustes parents, déclarent qu'ils se marient sous le régime dotal, avec faculté d'aliéner les immeubles dotaux, à charge de remploi, tel que ce régime est réglé par les articles du Code civil français.

Les biens meubles seront taxés, et la propriété passera au futur époux qui sera redevable du prix.

Les biens meubles acquis et ceux qui s'acquerraient par la suite avec l'argent que S. A. R. l'Infante aura apporté en dot, seront considérés comme biens dotaux. Les nouvelles acquisitions de biens immeubles qui auraient lieu avec le surplus des rentes produites par les biens des deux conjoints, après avoir fait face aux frais de l'établissement matrimonial, appartiendront par moitié à chacun d'eux; à cet effet, la société permise par l'article 1581 du Code civil est établie.

Article 2. S. A. R. le duc de Montpensier apporte audit mariage tous les droits indivis de propriété qui lui sont acquis et qui lui appartiennent en vertu de la donation paternelle à lui faite par acte du 7 août 1830, devant Mes Dentend et Noël, notaires à Paris, tels que ces droits seront réglés par le partage testamentaire de S. M. le roi des Français, ainsi que tous les autres droits de propriété et biens qui lui appartiennent ou pourront lui appartenir à tout autre titre et de quelque nature qu'ils soient.

Article 3.-Ii est stipulé, comme condition expresse Au nom de la très-sainte et indivisible Trinité, Soit notoire à tous ceux qui ces présentes verront, duc de Montpensier décéderait sans enfants, comme du présent contrat, que, dans le cas où S. A. R. le que comme des promesses de mariage ont été faites entre S. A. R. monseigneur le prince Antoine-Marie- aussi dans le cas où les enfants issus de son mariage ou leurs descendants décéderaient sans postérité légitime, Philippe-Louis d'Orléans, duc de Montpensier, fils de S. M. Louis-Philippe Ier, roi des Français, et de S. M. les biens immeubles appartenant à Son Altesse Royale Marie-Amélie, reine des Français, d'une part; dont il n'aurait pas disposé, ou qui appartiendraient Et sous l'autorité de son auguste mère et de S. M. la à son dernier descendant, retourneront aux princes et reine d'Espagne, son auguste sœur, S. A. R. Madame la princesses ses frères et sœurs, ou à leurs représentants en ligne directe et légitime, français et domiciliés en princesse Marie-Louise-Ferdinande, Infante d'Espagne, fille du feu roi d'Espagne Ferdinand VII, et de Marie-France, francs et quittes de toutes dettes et hypoChristine, reine douairière d'Espagne, d'autre part; Dans la vue de resserrer de plus en plus les liens de parenté, d'amitié et de confiance réciproques qui les unissent, S. M. le roi des Français et S. M. la reine d'Espagne ont, à l'effet de régler et conclure solen

nellement les conventions matrimoniales, choisi et nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir:

S. M. le roi des Français, S. E. le sieur CharlesJoseph, comte de Bresson, son ambassadeur près Sa Majesté catholique ;

Et S. M. la reine d'Espagne, S. E. le sieur Xaxier de Isturiz, son président du conseil des ministres et premier secrétaire d'État;

Lesquels, en vertu des pleins pouvoirs spéciaux qu'ils ont reçus et qu'ils se sont communiqués, sont convenus des articles et conditions du contrat de mariage, ainsi qu'il suit :

Article 1. Les futurs époux, sous l'autorisation

thèques.

A cet effet, lesdits biens demeureront grevés d'un droit de retour perpétuel en faveur des princes et princesses et de leurs descendants, lequel s'ouvrira à l'extinction de la descendance du prince futur époux.

Article 4. S. A. R. future épouse apporte au mariage et se constitue en dot :

La maison de plaisance de Quitapesares donnée en présent à Son Altesse Royale par Sa Majesté son au

guste mère, taxée à. . . . réaux vellon

La moitié de la possession royale de Vista Alegre, avec ses meubles, par indivis avec son auguste sœur, donnée par S. M. la Reine-Mère, à compte de la légitime maternelle et droits provenant de son père, taxée à..

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Le montant des bijoux de Son Altesse
A reporter.

2,834,010

16,037,701

18,871,711

D'autre part. ...

Royale, se réservant d'y comprendre ce qui résulterait en sa faveur dans l'inventaire qui se forme..

Le montant des autres bijoux que S. M. la Reine-mère donne à Son Altesse Royale, à compte de ce qui pourrait lui revenir dans sa succession.

L'avoir de Son Altesse Royale provenant de la succession paternelle, conformément à une transaction dûment effectuée entre elle et son auguste sœur, et qui devra se payer ainsi qu'il suit : dix millions sept cent soixante-neuf mille quatre cent soixante-dix réaux, le 8 octobre de la présente année 1846; dix millions le 31 janvier de l'année prochaine 1847; quatre millions le 31 janvier de l'année 1848; quatre millions pareils jour et mois de l'année 1849, et les autres quatre millions restant, pareils jour et mois de l'année 1850. .

En numéraire, suivant les comptes courants des registres de l'administration. En caisse, chez MM. Rothschild, de Londres.

18,871,711 vrira à l'extinction de la descendance de la princesse future épouse.

Article 6. S. M. le roi des Français payera au 2,000,000 futur époux une rente annuelle de cent vingt mille francs, sur laquelle S. A. R. le duc de Montpensier assigne à la princesse future épouse une pension de soixante mille francs par an; ladite rente sera éteinte 1,036,000 de plein droit, soit à partir du décès du duc de Montpensier, soit au moment où, par suite du décès de S. M. le roi des Français, le prince entrera en jouissance des biens dont la nu-propriété lui a été conférée par la donation du 7 août 1830; mais, dans ce dernier cas, S. A. R. le duc de Montpensier assignera à la princesse future épouse, pour toute la durée du mariage, une pension annuelle proportionnée à ses revenus, aussi bien qu'à sa naissance et à son rang, tant pour la dépense de sa chambre que pour celle de son état de maison.

La rente ci-dessus énoncée n'empêchera pas que le Roi ne continue, comme il le fait pour tous ses enfants, à subvenir par le service de sa maison à tous 32,769,470 les détails d'une existence conforme au rang des futurs époux.

2,000,000

656,310 57,333,491 Total réaux vellon. . . Son Altesse Royale jouit en outre d'une assignation annuelle décrétée par les Cortès le 23 mai 1845, de trois millions de réaux, de la manière suivante : Comme Infante d'Espagne.

Comme héritière immédiate à la couronne, pendant qu'elle le sera. ..

550,000

2,450,000 Son Altesse Royale la future épouse déclare, en outre, qu'elle constitue sa dot avec tous les autres biens présents et à venir qui lui appartiennent ou pourraient lui appartenir, quelle que soit leur origine ou leur provenance, par héritage, donation, legs ou de toute

autre manière.

Article 5.-Il est stipulé, comme condition expresse du présent contrat, que, dans le cas où la princesse future épouse décéderait sans enfants, de même que dans le cas où les enfants qui seraient nés de ce mariage, ou leurs descendants, mourraient sans postérité légitime, tous les biens dotaux et ceux acquis en vertu de la société établie à l'article premier appartenant à Son Altesse Royale, desquels elle n'aurait pas disposé, ou qui appartiendraient à son dernier descendant, retourneront francs et quittes de toutes dettes et hypothèques aux personnes qui devront les posséder suivant les lois d'Espagne.

A cet effet, lesdits biens demeureront grevés d'un droit de retour perpétuel et du droit de les réclamer en faveur desdits héritiers ou descendants, lequel s'ou

Article 7.-Il est assigné et constitué à la princesse future épouse, pour son douaire, une rente de cent mille francs, argent de France, dont elle aura la jouissance dès qu'elle sera veuve, pour en jouir sa vie durant, soit qu'elle demeure en France, soit qu'elle juge à propos de se retirer hors du royaume.

Dans le cas où la princesse préférerait fixer son séjour en France, il sera mis à sa disposition, sa vie durant, un appartement et ses dépendances convenablement meublé pour son habitation, dans un des palais du Roi ou dans un des châteaux de S. A. R. le duc de Montpensier.

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La baronnie de Lépaud, composée du château de Lépaud, et de bois, terres et prés;

La forêt de Roseux et les bois de la grande et petite Héroudière;

La forêt d'Ivry, les bois de l'Étang et du Bochet et les remises des Genièvres ;

La forêt des Andelys et les bois de la Haye Gaillard et de la Fosse Cabot, compris la prairie Saint-Roch; Les bois et forêt de Montaigu;

Les duchés de Montpensier et de Randan, composés du château de Randan, du château de Maulmont, parcs, jardins, chapelle, maisons et bâtiments; de la forêt de Montpensier, de la forêt de Randan, de la. forêt de Reillat, de la forêt de Vernet, de la forêt de Vic-le-Comte, de la forêt de Saint-Pardoux, et d'autres forêts et bois; de l'usine Montpensier, du moulin Adélaïde et d'autres établissements, terres et prés;

Le domaine d'Armainvilliers, composé de la forêt de Crécy, de la forêt d'Armainvilliers et de différents bois;

L'hôtel de Madame, situé à Paris, rue de Varennes, faubourg Saint-Germain.

Et deux cent quatre-vingt-quatre actions des canaux

Ces biens ont une contenance d'au moins 24,500 hectares.

Des biens que S. A. R. monseigneur le duc de Mont-d'Orléans et de Loing.
pensier est appelé à recueillir dans les successions de
LL. MM. le Roi et la Reine des Français, ses père
et mère, et de S. A. R. Madame la princesse Adélaïde
d'Orléans, sa tante.

Le domaine de Breteuil et de la Bonneville, composé de la forêt de Breteuil, de la forge de la Bonneville, du château de Bémécourt, parc, jardins, terres et prés;

La proportionnelle du revenu brut de dix années s'élève à 1,178,026 fr.

Monseigneur le duc de Montpensier aura à payer différentes soultes, dont le revenu est de 254,242 francs.

De sorte, jusqu'au payement de ces soultes, le revenu brut du prince ne sera que de 923,784 francs.

LETTRES DE LOUIS-PHILIPPE A S. M. LE ROI DES BELGES (1).

III.

A S. M. LE ROI DES BELGES.

Paris, mardi 11 décembre 1838.

verez ci-jointes. Je vous remercie infiniment de m'avoir communiqué la lettre de lord Palmerston. Je dois vous répéter que je vois la chose tout à fait sous le même point de vue que lui, et dans ma conviction, Mon très-cher frère et excellent ami, les conseils qu'il vous donne sont les seuls que vous J'étais hier au Conseil quand j'ai reçu votre lettre puissiez raisonnablement suivre. L'opinion qui vous d'avant-hier, avec les incluses, ce qui m'a empêché pousse à une résistance que vous ne pouvez pas soutede vous les renvoyer tout de suite, mais vous les trou-nir, sera la première à vous abandonner, et à taxer

(1) Voir par 327.

d'humiliation et de lâcheté le résultat que cette tentative ne pourrait manquer d'amener à sa suite. Ceux

Quant à la demande d'une extension de territoire au moyen d'un sacrifice pécuniaire, c'est-à-dire d'un rachat, je ne crois guère à son succès, et je crois plutôt que si elle réussissait, ce que vous acquierriez ne compenserait pas pour la Belgique ce qu'elle aurait payé

qui vous applaudissent pour vous entraîner dans le torrent des illusions au moyen desquelles ils se flattent d'allumer la guerre, feront des armes contre vous de toutes les concessions que vous aurez faites à ces chi− mères ou à leurs sinistres projets; car ce qu'ils veulent au fond c'est la guerre, la révolution et le boulever- | pour l'avoir. Un projet d'échange ajouté à une offre sement général. Selon moi, en suivant les conseils pécuniaire en rendrait probablement le succès moins que vous donne lord Palmerston, non-seulement vous difficile; mais la ville de Werdt dont vous me parlez ne feriez rien de contraire aux intérêts de la Belgique, est bien au nord de la ligne de démarcation qui part mais je pense positivement que ce n'est qu'en suivant de la Meuse au-dessus de Wesem, et qui est dirigée la marche qu'il vous indique que vous pouvez éviter sur la pointe la plus méridionale du Brabant hollande les compromettre gravement. Le temps presse, dais, c'est-à-dire au sud de Locmel. Je viens de le vémon cher frère, nous voilà déjà obligés de vous de- rifier sur la carte de Ferrari où les anciennes possesmander de préciser catégoriquement ce qui vous em- sions sont bien marquées. J'avoue que je ne vois pas pêcherait d'adhérer au traité que vous avez précédem- plus ce que vous pourrez donner en échange que ce ment signé et que vos Chambres ont approuvé, et de que vous aurez à recevoir préférablement à ce qui se nous informer d'une manière précise des changements trouve dans les limites des 24 articles. Dans mon opique vous voudriez qui y fussent faits. Le vague où vous nion ce n'est plus qu'en demandant une démarcation vous êtes tenu à cet égard ne peut pas se prolonger plus précise de ses limites que vous pouvez avoir une davantage; car vous sentez bien qu'il serait inadmis- chance d'obtenir quelques villages ou les mines de la sible que vous dissiez : Je ne veux plus du traité que Calamite, mais je trouve que c'est déjà les acheter bien j'ai signé, mais je ne vous dirai pas pourquoi je n'en cher que de les payer au prix de la position où la levée veux plus. Il faut donc que vous vous expliquiez nette- de boucliers de vos Chambres a achevé de vous placer. ment, et, devant vous expliquer, je ne crois pas que Je crois que vous devez prendre un parti tranché, et vous puissiez dire autre chose que ce que vous conseille cela le plus vite que vous pourrez. C'est en vérité le lord Palmerston. seul moyen de vous en tirer.

Mon bien cher frère,

J'en étais là de ma lettre, quand je reçois la vôtre d'hier avec les incluses, que je vous remets immédiate

Je ne crois pas que, soit par les négociations, soit par la force des armes, vous puissiez empêcher l'occupation des territoires non compris dans les limites. tracées par les 24 articles, et je ne crois pas que la force militaire quelconque qui les occupera, franchissement ci-jointes avec celles d'hier. J'ai envoyé chercher les susdites limites. Non, elle les respectera soigneuse- le comte Molé, qui a tout lu sur mon bureau, et qui a ment, tout comme nous les avons respectées nous- même lu ce que je vous écris ci-dessus. Il est bien toumêmes en sens inverse, quand nous avous assiégé la ché de votre confiance, et me demande de vous l'excitadelle d'Anvers. On sait très-bien que la France ne primer. Il ne vous écrit pas lui-même, n'ayant rien souffrira dans aucun cas une invasion en Belgique, et de plus à y ajouter en ce moment. La même estafette personne ne s'y frottera; mais on sait aussi que la qui vous porte cette lettre (car il est six heures et la France vent l'exécution des traités et le maintien de poste est partie), porte sa dépêche à M. Sérurier, pour la paix générale, et je crois que c'est en vain que vous le charger de la communiquer à M. de Theux, qui a vous flatteriez d'échapper de la part des puissances à dû demander à votre gouvernement une réponse catédes mesures auxquelles nous n'aurions rien à dire, et gorique et quelle est votre résolution finale relativequi seraient par conséquent préférées à des tentatives ment au traité : car le moment est venu où les tergid'invasion contre lesquelles tout le poids de la France versations et les échappatoires ne sont plus praticables se lèverait à l'instant. Je crois que ces mesures seraient et où tout ce qui n'est pas un oui serait nécessaireun blocus rigoureux depuis Luxembourg jusqu'à la ment un non avec toutes ses conséquences. Ne vous mer en y comprenant l'Escaut que la Hollande ferme- faites, je vous en conjure, aucune illusion à cet égard. rait hermétiquement, même quand, pour s'en don- En même temps que cette estafette part pour ner la grâce, elle aurait évacué Lillo et Liefkensoeckles, il en part une autre pour Londres, qui porte à Sedont elle n'a pas besoin pour effectuer le blocus. Il ne bastiani une dépêche pour demander que le protocole resterait donc que le port d'Ostende dont la marine reste ouvert en attendant que nous ayons reçu de votre hollandaise entreprendrait probablement le blocus sans gouvernement la réponse avec explications que nous que l'Angleterre elle-même eût à s'en mêler : car cela lui demandons sur sa résolution finale relativement à rentrerait dans le droit commun des nations. Je crois son adhésion au traité. Vous me dites, mon cher frère, que vos ministres, en partie, sont d'une déraison affli▪ geante; je ne vois d'autre chance pour vous de sauver

pouvoir en appeler à vous-même en disant que cette position ne serait pas tenable pour la Belgique.

Bruxel

votre couronne et la Belgique des dangers imminents | intérêts de la Belgique, sans me laisser dégoûter par auxquels je les vois exposées, que de changer cette l'ingratitude des Belges, ni intimider par leur extravapartie, si la lumière de l'évidence ne suffit pas pour gance. C'est à vous à voir si vous croyez de votre de éclairer leur raison. voir de me laisser seul dans cette position; mais, quant à moi, mon parti est pris. Je crois de mon devoir de les braver et de faire signer le protocole, et je vous avertis donc de nouveau qu'il le sera. Cependant, nous résisterons encore à la signature immédiate, nous prenons encore un délai qui, quoique bien court, vous laisse un peu de temps pour réfléchir définitivement sur ce que vous allez faire, et pour agir autour de vous, et leur faire comprendre le véritable état des choses.

Je vous embrasse bien tristement, mais du fond de mon cœur. Embrassez de même pour moi ma bonne Louise et mes chers petits enfants, et croyez-moi toujours pour la vie, bien vivement et bien sincèrement, mon bien cher frère, votre bon frère, beau-père et très-fidèle ami.

AU MÊME.

LOUIS-PHILIPPe.

Paris, mardi 18 décembre 1838.

Mon très-cher frère et excellent ami,

Mon temps a été tellement absorbé, que je n'ai pas pu répondre plus tôt à votre lettre du 12. Vous ne savez que trop d'ailleurs combien nous avons souffert des nouvelles accablantes de la pauvre Marie. Aujourd'hui nous en avons de meilleures, ou au moins de moins mauvaises. Je crois encore que la poitrine n'est pas sérieusement attaquée; mais l'état fébrile ne fait qu'augmenter, et c'est ce qui me désespère. Notre bonne Louise reçoit certainement tous les détails que nous avons nous-mêmes. Dites-lui bien combien je souffre avec elle, et que je l'embrasse bien tendrement, ainsi que vos chers enfants.

Quant à moi, mon cher frère, je ne vous ai jamais caché que je regardais les clauses territoriales comme obligatoires pour moi, pour vous et pour vos Chambres qui ont adopté ou consenti le traité du 15 novembre 1831, par une loi qu'elles ont votée et que vous avez sanctionnée. Nul ne peut disconvenir que le traité conclu par les cinq puissances entre elles et par elles avec vous, ne soit obligatoire pour les six parties contractantes dans tout ce qui regarde leurs rapports mutuels. Aussi, n'est-ce que sur la fixation de la dette que j'ai jamais cru qu'il fût possible de faire revenir, parce que c'était la seule question qu'on pût considérer comme afférante exclusivement aux rapports particuliers entre la Belgique et la Hollande, qui, n'ayant pas voulu signer le traité, ne pouvait pas en réclamer les garanties.

Cependant cette dernière argumentation n'a pas même été admise dans son entier par quatre des puissances signataires du traité, et ce n'est qu'au moyen d'autres prétextes qu'elles ont consenti à grand' peine à effacer les arrérages et à réduire la dette sous la con

Vous êtes bien bon de craindre que le tourment que me cause l'affaire hollando-belge ne prenne sur ma santé. Je vous assure qu'il n'en est rien et que je me porte à merveille; mais, mon cher frère, je vous avoue que je suis fort inquiet et surtout profondément affligédition de l'abandon de la liquidation du syndicat. de voir que mes avertissements et mes conseils n'aient N'oubliez pas que voici l'argumentation des puispas produit plus d'effet. Déjà, nous avons dû recourir sances, et que même celles de la Russie et de la diète à une demande officielle adressée à votre gouverne- germanique vont encore plus loin. La Belgique tout ment, à laquelle il ne nous a pas fait attendre la ré- entière, cédée par la France, a été incorporée dans le ponse la plus négative, et, quoi qu'il puisse m'en coûter royaume des Pays-Bas, créé dans le congrès de Vienne, de donner un pareil avis, je dois vous avertir que nous par les traités de 1814 et de 1815, en faveur de Guilne pouvons pas nous contenter de ces réponses-là. Je laume de Nassau et de ses descendants. En 1830, les sais que dans l'opinion des révolutionnaires belliqueux, cinq grandes puissances reconnaissant que le maintien qui vous poussent à la guerre pour mieux assurer votre de la paix générale, etc., rendait nécessaire que la Belperte, ils disent « Eh bien! forçons Louis-Philippe gique fût séparée de ce royaume, et qu'elle fût érigée à déclarer qu'il nous abandonne. S'il ne l'ose pas, nous en royaume indépendant, ce qu'elle n'avait jamais été triomphons et nous avons la guerre; mais s'il l'ose, à aucune époque, n'ont pas cru devoir attendre que le alors nous déverserons sur sa tête tout l'odieux de cet roi Guillaume y eût consenti, et elles ont procédé à réabandon, et nous ne parlerons que des grandes proues-gler les clauses, conditions, etc., de cette séparation, ses que nous aurions faites si la France ne nous avait et la délimitation du nouveau royaume, afin de faire pas manqué. >> ensuite accepter le tout par le roi Guillaume et par le Voilà, mon cher frère, ce que je sais bien qui m'at-prince destiné à occuper le trône de la Belgique. Il rétend de leur part; voilà la récompense qui m'est résulte de ces prémisses que toutes les portions des proservée pour avoir soutenu et défendu, comme je l'ai vinces belges du royaume des Pays-Bas, selon la délifait, et votre couronne, et l'indépendance et tous les mitation des traités de 1814 et de 1815, qui ne sont

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