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bienfaits, qui vous a favorisés plus que ses propres sujets et vous a rendus la nation la plus florissante et la plus heureuse, l'empereur Alexandre a été payé de la plus noire ingratitude.

Vous n'avez jamais pu vous contenter de la position la plus avantageuse, et vous avez fini par briser vous-même votre bonheur. Je vous dis ici la vérité pour éclaircir notre position mutuelle et pour que vous sachiez bien à quoi vous en tenir; car je vous vois et vous parle pour la première fois, depuis les troubles.

Messieurs, il faut des actions et non pas des paroles; il faut que le repentir vienne du cœur. Je vous parle sans m'échauffer; vous voyez que je suis calme; je n'ai pas de rancune, et je vous ferai du bien malgré vous. Le maréchal que voici remplit mes intentions, me seconde dans mes vues et pense aussi à votre bien-être. (A ces mots, les membres de la députation saluent le maréchal Paskévitsch.)

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Eh bien! messieurs, que signifient ces saluts? Avant tout il faut remplir ses devoirs, il faut se conduire en honnêtes gens. Vous avez, messieurs, à choisir entre deux partis : ou persister dans vos illusions d'une Pologne indépendante, ou vivre tranquillement et en sujets fidèles sous mon gouvernement. 3160

Si vous vous obstinez à conserver vos rêves de nationalité distincte, de Pologne indépendante et de toutes ces chimères, vous ne pouvez qu'attirer sur vous de grands malheurs. J'ai fait élever ici la citadelle, et je vous déclare qu'à la moindre émeute je ferai foudroyer la ville, je détruirai Varsovie, et certes ce ne sera pas moi qui la rebâtiraitez opp plat ang in esti e ponul me

Il m'est bien pénible de vous parler ainsi; il est bien pénible à un souverain de traiter ainsi ses sujets, mais je vous le dis pour votre propre bien. C'est à vous, messieurs, de mériter l'oubli du passé : ce n'est que par votre conduite et par votre dévouement à mon gouvernement que vous pouvez y parvenir.

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Je sais qu'il y a des correspondances avec l'étranger, qu'on envoie ici de mauvais écrits et que l'on tâche de pervertir les esprits. Mais la meilleure police du monde, avec une frontière comme vous en avez, ne peut empêcher les relations clandestines; c'est à vous-mêmes à faire la police, à écarter le mal.

C'est en élevant bien vos enfants, en leur inculquant des prin

cipes de religion et de fidélité à leur souverain, que vous pouvez rester dans le bon chemin.

Et au milieu de tous ces troubles qui agitent l'Europe, et de toutes ces doctrines qui ébranlent l'édifice, il n'y a que la Russie qui reste forte et intacte.

Croyez-moi, messieurs, c'est un vrai bonheur d'appartenir à ce pays et de jouir de sa protection. Si vous vous conduisez bien, si vous remplissez tous vos devoirs, ma sollicitude paternelle s'étendra sur vous tous, et, malgré tout ce qui s'est passé, mon gouvernement pensera à votre bien-être.

Rappelez-vous bien ce que je vous ai dit.

Déclaration concernant l'article XX, du traité conclu à Vienne, le 21 avril 3 mai 1815, entre la Prusse et la Russie, relativement au duché de Varsovie, datée de Berlin, le 19/31 décem bre 1835.

(Voir Martens, N. R., t. IV, p. 64.

Martens et Cussy, t. IV, p. 429.)

Note de la conférence des trois résidents austro-prusso-russes, présentée au président et au sénat de la république de Krakovie, relative à l'expulsion des Polonais réfugiés.

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Varsovie, le 9 février 18361.

Les résidents soussignés de S. M. l'empereur de toutes les Russies et de S. M. le roi de Prusse, ainsi que le chargé d'affaires soussigné de Sa Majesté Impériale et Royale Autrichienne se sont empressés de donner connaissance à leurs Cours respectives de la communication qui leur a été faite par S. Exc. M. le président du sénat de la ville libre de Krakovie, au sujet des malheureux événements qui ont signalé dans cette ville les premiers jours de cette année. Les trois Cours d'Autriche, de Prusse et de Russie n'ont dû apercevoir dans ces événements qu'une preuve nouvelle et incontestable d'un mal profondément enraciné, répandu dans l'intérieur de cet Etat, et qui menace non-seulement son repos et sa paix, mais encore la sécurité des provinces avoisinantes.

Par les traités existants, destinés à protéger la ville libre de Krakovie et à veiller au maintien de sa neutralité, les trois Cours se sentent d'autant plus obligées de prendre les mesures exigées par les circonstances, que l'obligation de garantir leurs propres États d'un mal ostensible y est également attachée.

Par suite de ces considérations, les soussignés sont chargés d'annoncer à S. Exc. M. le président et au sénat de la ville libre de Krakovie que l'assainis sement moral instantané de la ville et du territoire de Krakovie au moyen de l'éloignement des réfugiés polonais et d'autres individus dangereux, qui s'y sont malheureusement rassemblés en grand nombre, est une mesure qui a été 1. Martens, N. R., XIII, 572.

jugée indispensable pour anéantir les trames séditieuses ourdies contre la sûrelé et le repos de la ville et du district de Krakovie aussi bien que contre les provinces avoisinantes.

Les soussignés ne peuvent pas douter que la ville de Krakovie ne se prête d'autant plus volontiers à cette mesure que déjà à plusieurs reprises elle a ellemême manifesté cette intention, et que les trois Cours ont préparé actuellement tous les moyens pour lui en faciliter l'exécution.

Appuyées sur l'article 9 de l'acte du congrès de Vienne', qui est en harmonie avec les articles 6 du traité du 3 mai 1815 et de la nouvelle constitution de la ville libre de Krakovie, en date du 30 mai 1833, les puissances protectrices interpellent le gouvernement de Krakovie d'éloigner de son territoire, dans le délai de huit jours, tous les réfugiés polonais qui s'y trouvent.

Pour faciliter autant que possible le départ des réfugiés, on leur ouvrira la station de Podgorze; ceux de ces réfugiés qui peuvent justifier que l'un ou l'autre des gouvernements consentent à leur admission, seront, suivant les circonstances, pourvus de moyens de se rendre à leur destination, mais les autres seront transportés en Amérique.

Les sujets des autres puissances séjournant à Krakovie et qui sont désignés comme dangereux par les puissances protectrices, devront également être éloignés du territoire de Krakovie dans le délai de huit jours; à ces fins la puissance protectrice dont ces étrangers traverseront le territoire leur fera délivrer, par son résident à Krakovie, les passe-ports nécessaires.

Les trois puissances protectrices ont jugé convenable de faire avancer des troupes vers les frontières du territoire de Krakovie, aussi bien pour empêcher que les individus désignés aux précédents paragraphes ne s'éloignent de la route qui leur est ouverte pour leur départ, que pour prêter au gouvernement de Krakovie l'appui dont il pourrait avoir besoin, comme aussi pour appuyer l'interpellation faite et maintenir l'ordre et la tranquillité publiques.

Il dépendra, en conséquence, de S. Exc. M. le président et du sénat, de s'adresser aux soussignés, s'ils devaient être dans le cas d'avoir besoin de la force armée pour l'accomplissement de l'une ou l'autre de ces mesures.

Aussi longtemps que dureront les circonstances actuelles, tout sujet de la ville libre de Krakovie qui voudra passer la frontière des trois Etats avoisinants devra être muni, pour obtenir le passage, d'un passe-port régulier revêtu du visa du résident que cela concerne.

Les trois puissances aiment à croire que, par suite des facilités offertes au gouvernement de cet État libre, l'assainissement moral du territoire de Krakovie n'éprouvera plus de difficulté ultérieure. Cependant, si leur attente devait être trompée, et si le délai fixé devait s'écouler sans que les mesures dont il s'agit aient reçu leur pleine et complète exécution, les trois Cours se croiraient

1. L'article mentionné de l'acte du congrès de Vienne est ainsi conçu : « Les Cours de Russie, d'Autriche et de Prusse s'engagent à respecter et à faire respecter, en tous temps, la neutralité de la ville libre de Krakovie et de son territoire; aucune force armée ne pourra jamais y être introduite sous quelque prétexte que ce soit. En revanche il est entendu et expressément stipulé, qu'il ne pourra être accordé dans la ville libre et sur le territoire de Krakovie, aucun asile ou protection à des transfuges, déserteurs ou gens poursuivis par la loi, appartenant au pays de l'une ou de l'autre des hautes puissances susdites, et que sur la demande d'extradition qui pourra en être faite par les autorités compétentes, de tels individus seront arrêtés et livrés sans délai, sous bonne escorte, à la garde qui sera chargée de les recevoir à la frontière.»

obligées à obtenir par l'emploi de leurs propres moyens ce que le gouvernement de Krakovie n'aurait pas eu la volonté ou la force d'exécuter par lui-même.

Les soussignés, en accomplissant les ordres qui leur ont été communiqués par leurs hautes Cours, saisissent cette occasion pour exprimer à S. Exc. M. le président et au sénat, l'assurance, etc.

Réponse du sénat de Krakovie à la note des plénipotentiaires des puissances protectrices, en date du même jour.

Krakovie, le 9 février 1836.

Immédiatement après la réception de la Note collective de ce jour, par laquelle MM. les résidents des trois puissances protectrices ont déclaré au sénat que c'était la volonté de ces puissances que tous les ex-militaires étrangers polonais ou ceux qui, sans avoir été militaires, ont pris part à la dernière révolution polonaise des années 1830 et 1831, et qui se trouvent sur le territoire de la ville libre de Krakovie, en soient éloignés dans le délai de huit jours, avec l'ordre de se rendre à Podgorze, où ils recevront leur destination ultérieure, le sénat s'est empressé de rendre la publication ci-jointe pour faire connaître a toutes les personnes de cette catégorie les dispositions ci-dessus mentionnées. prises par les hautes puissances protectrices, et il leur à en même temps ordonné, en les menaçant des mesures annoncées par MM. les résidents, de se soumettre à ces prescriptions, dans un délai encore réduit de deux jours. En outre, le gouvernement ne négligera aucun des moyens mis à sa disposition pour répondre d'une manière efficace à cette haute volonté. Et, comme au nombre des réfugiés polonais qui séjournent ici, il en existe plusieurs auxquels on a accordé des emplois subalternes dans le service public, afin de les occuper d'une manière utile, le sénat leur a de suite donné le congé nécessaire, en leur intimant l'ordre de se rendre au lieu de leur nouvelle destination.

Après avoir immédiatement, sans restriction aucune, et par toutes les voies possibles, donné connaissance au pays entier, et nommément aux personnes que cela concerne, de la volonté expresse des hautes puissances, le sénat ne saurait pourtant se dispenser de recommander à MM. les résidents d'avoir égard à la brièveté du délai fixé pour l'évacuation du territoire, soit parce qu'il serait pos sible que les dispositions arrêtées ne pussent 1 pas être r rendues publiques en temps opportun, dans les lieux les plus éloignés de l'Etat libre, soit en considération de l'impossibilité de mettre ordre à leurs affaires dans laquelle peuvent se trouver ceux des individus réclamés qui ont contracté des liens d'intérêt et de fortune dans ce pays pendant les cinq années qu'ils y ont séjourně.

Comme il est d'ailleurs facile de prévoir que pendant l'exécution de cette décision des hautes puissances, ceux des individus compris dans la catégorie en question et qui se sont attachés par les liens du mariage aux familles de cette ville, qui ont acheté ou pris à bail des immeubles, ou enfin ceux qui oat pris la direction d'ateliers, feront des représentations et réclameront l'appui du gouvernement sous la protection duquel ils se sont établis; et comme la Note de MM. les résidents ne contient à ce sujet aucune explication, le sénat se croit obligé par devoir de soumettre cette circonstance à leur appréciation, et de demander à MM. les résidents de vouloir bien lui i faire savoir

vidus en faveur desquels les considérations ci-dessus subsis Ceux des indi

doivent également être frappés, sans distinction, de ces mesures générales, ou bien si

les hautes puissances, ayant égard à leur situation, se sentiraient disposées à

les en excepter généreusement.

Le président du sénat:

Le secrétaire général du sénat :

Gaspard Wieloglowski.

Vincent Darowski.

Notification du sénat de Krakovie, relative à l'expulsion des Polonais réfugiés, exilés par les trois Cours copartageantes.

Varsovie, le 9 février 1836.

Le sénat gouvernant de la ville libre, indépendante et rigoureusement neutre de Krakovie et de son territoire.

MM. les résidents des trois sérénissimes puissances protectrices accréditées auprès du gouvernement de cet Etat ont donné communication, à la date de ce jour, au sénat régnant, qu'il entrait dans la volonté de leurs hautes Cours que tous les Polonais étrangers, ayant appartenu à l'état militaire ou civil, et qui ont pris part à la révolution du royaume de Pologne dans les années 1830 et 1831, en servant comme officiers, sous-officiers ou soldats, ou de toute autre manière, et qui séjournent dans la ville et le territoire de Krakovie, sans pouvoir légitimer leur séjour par un passe-port en forme légale ou par une permission délivrée par les autorités compétentes des puissances protectrices, soient tenus de quitter immédiatement le territoire de la ville libre de Krakovie et de se rendre à Podgorze, où ceux d'entre eux qui pourront justifier que l'un ou l'autre gouvernement veut les accueillir recevront les secours nécessaires pour se rendre au lieu de leur destination; et que ceux au contraire qui ne se trouveront pas dans cette position, doivent être transportés en Amérique. En même temps les très-sérénissimes Cours ont déclaré que celles des personnes de cette catégorie qui sont revêtues dans ce pays d'un emploi civil ou militaire ne sont pas exceptées de cette disposition, quand même le gouvernement de cette ville leur aurait accordé le droit de bourgeoisie.

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En portant à la connaissance générale cette haute décision des très-sérénissimes Cours, et en prévenant nommément celles des personnes que cela coucerne, le sénat les interpelle de se rendre dans la ville de Podgorze dans les six jours et de s'y présenter devant les autorités autrichiennes chargées de leur réception,

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Le sénat gouvernant croit nécessaire de prévenir les personnes qui ont à se soumettre à la décision ci-dessus, que le gouvernement de cet Etat a été averti que dans le cas où le délai de huit jours fixé pour l'évacuation s'écoulerait sans que la volonté des très-séréníssimes cours ait été complétement accomplie, elles se verraient obligées d'en amener l'exécution par l'emploi de leurs propres mesures. Il compte, en conséquence, que les personnes désignées éviteront les mesures annoncées, et qu'elles suivront volontairement leur destination; par là elles conserveront l'expectative d'obtenir les égards des gouvernements sous T'autorité desquels elles se placeront, et de plus elles préserveront le gouvernement de Krakovie des tristes suites qu'amènerait inévitablement le non accomplissement de la volonté des hautes Cours.

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Le président du sénat

Le secrétaire général du sénat :

Wieloglowski.

Darowski.

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