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de mises en liberté que celles qu'avait prononcées la

Cour (1);

Une protestation faite au greffe, par un président de chambre contre un arrêt de police correctionnelle rendu après partage, et fondée sur ce que la rédaction de l'arrêt ne faisait pas mention du partage (lequel emportait acquittement; V. n° 913 (2);

L'inscription du mot dissident, faite à la suite de la signature d'un conseiller apposée au bas d'un arrêt de chambre d'accusation (3);

Des ordonnances rendues en chambre du conseil et dans lesquelles il était exprimé que l'envoi de l'affaire à la chambre d'accusation n'avait été prononcé que de l'avis d'un des juges délibérants (4);

Un incident élevé à l'audience d'un tribunal correctionnel (des colonies), par le président qui avait à haute voix, discuté les conclusions du ministère public, tendant à ce que le tribunal se déclarât incompétent; c'était une manifestation contraire au secret des votes, et comme elle avait précédé les débats, elle plaçait, en outre, son auteur dans un cas de récusation (5) ; V. t. 1or, no 537;

Une protestation faite au greffe, par le président d'un tribunal correctionnel et de laquelle il résultait que ce magistrat n'aurait pas été de l'avis de ses collègues, dans tel jugement (6).

921. En effet, tous ces actes étaient également contraires à la dignité de la magistrature et au res

(1) 27 juin 1822, B. 90.
(2) 24 avril 1827, B. 94.

(3) 18 août 1831, B. 182.

(4) 24 fév. 1837, B. 61; 9 juin 1843, B. 435; V. aussi 1er avril 4853, B. 446 (sur mon pourvoi).

(5) 28 mai 1847, B. 111.

(6) 28 mai 1847, B. 143.

:

RÈGLES COMMUNES. pect dû à l'autorité de la chose jugée à la dignitė de la magistrature, en révélant les discussions qui auraient eu lieu dans le sein d'un corps judiciaire, les erreurs qui auraient pu y être soutenues; à l'autorité de la chose jugée, en faisant connaître l'opposition qu'avait pu rencontrer l'avis de la majorité, en dépouillant ainsi cette autorité d'une partie de son prestige. En effet, tous les jugements doivent avoir un caractère égal, une autorité pareille ils sont censés la vérité même : Res judicata pro veritate habetur. Il en serait autrement, si le nombre des suffrages qui ont fait l'arrêt venait à être connu. Des différences, dans l'opinion publique, s'établiraient entre les jugements, depuis celui qui aurait réuni l'unanimité des voix jusqu'à celui qui n'aurait obtenu que la majorité strictement nécessaire (1). Il suit de là, qu'une fois arrêté, le jugement devient l'œuvre de tous les juges qui ont pris part à la délibération, et que les dissidents n'en sont pas moins responsables, le cas y échéant, que ceux dont les suffrages ont formé la majorité.

Les principes qui précèdent ont trouvé une nouvelle sanction dans des lois plus ou moins récentes. Une des lois de septembre 1835 (2) avait interdit de rendre compte des délibérations intérieures, soit des jurės, soit des Cours et tribunaux. Cette prohibition a été renouvelée par une loi de 1849 (3). Enfin, une autre loi de la même année et un décret organique de 1852 (4) ont astreint les magistrats à prêter le serment de... « garder religieusement le secret des délibérations. >>

(4) V. mon Jury en matière criminelle, 1853, no 215.

(2) Loi du 9 sept. 1833, art. 10.

(3) Loi du 27 juill. 1849, art. 44.

(4) Loi du 8 août 1849, art. 3; décret du 22 mars 1852, art. 8.

922. Du prononcé (omissions substantielles du débat reconnues pendant la délibération, V. no 906).

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« Le jugement sera prononcé de suite, ou, au plus tard, à l'audience qui suivra celle où l'instruction sera terminée. » Cod. instr. crim., art. 190. L'art. 153 contient une disposition identique, quoique exprimée en des termes un peu différents. Art. 153, S dernier : «Le tribunal de police prononcera le jugement dans l'audience où l'instruction aura été terminée, ou au plus tard dans l'audience suivante : » Le Code de brumaire, art. 162 et 184, imposait la même obligation aux juges, et c'était à peine de nullité (art. 162, 189) que le tribunal de simple police et le tribunal correctionnel devaient rendre leur jugement, au plus tard, à l'audience qui avait suivi celle où l'affaire avait été instruite. La Cour suprême avait maintenu rigoureusement dans les deux juridictions l'observation de ces dispositions. En ce qui concernait, notamment, les tribunaux correctionnels, elle avait annulé deux jugements, parce que l'instruction de l'affaire avait occupė, pour l'un, quatre audiences, pour l'autre, cinq audiences, lorsque les art. 184 et 189 n'admettaient au plus que deux audiences (1); elle avait annulé un autre jugement, parce qu'il n'avait été rendu qu'à la troisième séance, après deux ajournements, quoique l'instruction, l'audition des parties et les conclusions du commissaire du Gouvernement, eussent été terminées dans la première de ces séances (2).

Des dispositions aussi sévères, louables au point de vue de l'expédition des affaires, devenaient quelquefois un embarras sérieux, lorsque les tribunaux n'a

(4) 49, 25 brum. an 8, B. 110, 121.

(2) 27 mess. an 10, B. 213.

vaient pas sous la main tous les renseignements propres à les éclairer, lorsque la maladie d'une partie ou de son défenseur contraignait d'ajourner la suite des débats. Alors les juges se trouvaient dans l'alternative ou de tronquer l'instruction à l'audience ou de s'exposer à voir annuler leur jugement. C'est cet état de choses qui a porté le législateur de 1808 à retrancher de la fin de l'art, 190 la sanction rigoureuse du Code de brumaire, et à s'en remettre au zèle des magistrats, pour l'époque du prononcé du juge

ment.

923. L'art. 190 a ainsi facilité l'instruction des affaires, mais il a, en même temps, favorisé les retards dans le prononcé du jugement. Faute de sanction positive, la Cour de cassation n'a pu prononcer l'annulation de décisions rendues après un laps de temps évidemment trop considérable. Le tribunal correctionnel de ***, saisi d'un appel de simple police, avait terminé à l'audience du 28 août l'instruction de l'affaire il ne rendit son jugement que le 19 fevrier suivant, au bout de près de six mois ! Un pourvoi formé contre ce jugement pour violation de l'art. 153 du Code d'instruction a été rejeté par le motif « que la disposition de cet article n'est substantielle qu'en ce qui concerne la publicité de l'instruction et le résumé ainsi que les conclusions du ministère public (1).

(4) 3 avril 1844, D. P., 42, 4, 264.

D'aussi fâcheux retards ne sont malheureusement pas sans exemple (V. encore Cass., 15 mars 1845, B. 400): les parties, en ce qui les concerne, ont plus d'un moyen de les faire cesser, c'est d'abord d'écrire au procureur impérial, et après de suivre la marche indiquée par les art. 506 et 507 du Code de procé dure civile, relatifs à la négligence des juges, concernant les affaires en état et en tour d'être jugées. Il est probable qu'il suffira de l'intervention, même officieuse, du ministère public, pour faire cesser le retard.

Carnot (1) dit, à ce sujet, « que, bien que le Code ne prononce pas de nullité en cas de retard, s'il y avait réquisition au tribunal pour juger, et si cette réquisition était justifiée par écrit (V. la note de p. 275), il ne ferait aucun doute qu'il ne fallût annuler, s'il n'y avait pas été déféré. » Je ne pense pas que cette opinion puisse être suivie, en présence de l'arrêt de 1841, que j'ai cité plus haut. Mais le ministère public aurait à intervenir, si cela devenait nécessaire.

924. Il faut conclure de tout ceci qu'en matière correctionnelle, plus encore qu'en matière civile, les jugements doivent être rendus avec la plus grande diligence. A cet effet, le délibéré que nécessitent les affaires ardues doit suivre immédiatement les plaidoiries. L'avantage que les juges y trouvent est naïvement exprimé dans d'anciennes ordonnances. « Il est advenu aucune fois, dit une ordonnance de Philippe le Long, de 1320 (2), que par la longue demeure de conseiller (délibérer) les arrez, l'en a oublié les plaidoiez, et les resons qui avaient été plaidoiées, dont l'en a moins souffisamens jougie, dont il est advenu aucunes foiz, qu'il convenait rappeler les advocatz quand l'en jugeoit les arrez, pour recorder leurs pledoiers que l'en avait oubliées. »> « La cause... porte la grande ordonnance de Charles VII, de 1453 (3), sera plus brief jugée après la plaidoirie, de tant auront les présidents et conseillers meilleure et plus fresche mémoire. » — Philippe de Valois prescrivait, en 1342, aux membres de la chambre des enquêtes (4), << sur leur serment, de dedans six jours

(1) Instruction criminelle, t. 2, p. 59.

(2) Ordonn. de déc. 4320, art. 6; Isambert, Lois, 3, p. 256.

(3) Ordonn. d avril 1453, art. 77; idem, ib., l. 9,

p. 233.

(4) Ordonn. du 14 mars 1342, troisième art. 3; ibid., t. 4, p. 504.

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