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tionnels ne peuvent absolument statuer que sur les affaires dont ils sont saisis et dans l'état où ces affaires se présentent, et dans leurs jugements il leur est interdit d'ajouter à une des peines prononcées par la loi, et d'ordonner des mesures qui sont du ressort de l'administration, ou de la compétence des officiers du ministère public. La Cour de cassation, d'après ces principes, a annulé des jugements qui

avaient :

Ordonné qu'un condamné étranger serait, à l'expiration de sa peine, conduit par la gendarmerie ou par ordre du Gouvernement jusqu'à la frontière de son pays (1);

Prescrit à un individu acquitté du délit de vagabondage de se rendre dans tel lieu, avec un extrait du jugement qui lui serait délivré pour lui servir de passe-port (2);

Ordonné qu'un autre, acquitté du même délit, serait, à la diligence du procureur du roi, reconduit dans sa commune, pour y rester sous la surveillance de la haute police (3);

Recommandé deux condamnés à la clémence royale (4);

Blâme et censuré des individus acquittés du délit d'outrages, pour avoir écrit des lettres missives qui avaient motivé la poursuite (5);

Ordonné que, nonobstant opposition ou appel, il scrait délivré à des prévenus une expédition du rẻquisitoire introductif du ministère public, délivrance

(4) 9 sept. 1826, B. 178; 45 juin 1837, B. 178.

(2) 23 juill. 1846, B. 246.

(3) 40 mars 1831, B. 44.

(4) 7 oct. 1826, B. 200.
(5) 20 juill. 1839, B. 244.

que le procureur général avait seul le droit d'autoriser (1);

Exprimé que « le premier juge était sorti de sa modération et de sa dignité» (2).

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932. Premier ressort. Les jugements correctionnels sont généralement rendus en premier ressort : qu'ils déclarent l'incompétence ou prononcent un acquittement ou une condamnation. Mais c'est une règle dont je traite plus à propos au chapitre X, des Appels, no 1040.

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933. Les jugements doivent être rédigés aussitôt qu'ils sont rendus. L'art. 196 du Code porte, § 1o : «La minute du jugement sera signée, au plus tard, dans les vingt-quatre heures, par les juges qui l'auront rendu. »

La rédaction en appartient au magistrat qui a prėsidé. C'est la conséquence de l'art. 36 du décret du 30 mars 1808, qui dispose : « Le greffier portera sur la feuille d'audience du jour les minutes de chaque jugement, aussitôt qu'il sera rendu; ... celui qui aura présidé vérifiera cette feuille à l'issue de l'audience ou dans les vingt-quatre heures... »

Le président peut charger un des juges de la rẻdaction du jugement. C'est ce qui se pratique, surtout lorsque la décision a été prise contre l'avis du magistrat qui a présidė. Il va sans dire que le projet de jugement est soumis au tribunal qui a d'abord

(4) 24 août 1833, B. 335,

(2) 12 juill. 1836, ch. req., D. P., 38, 4, 84.

arrêté la décision. Les anciennes ordonnances contenaient sur ce point des dispositions positives (1). Il n'est pas nécessaire de mentionner dans le jugement que le tribunal a délibéré ; il y a présomption légale qu'un jugement bien qu'il ne constate point ce fait explicitement, a été délibéré par les juges qui l'ont rendu (2).

934. « Ne seront point insérés dans la rédaction des arrêts et jugements les plaidoyers prononcés, soit par le ministère public, soit par les défenseurs des prévenus ou accusés, mais seulement leurs conclusions >>> (3). « L'art. 58 du tarif criminel, porte l'instruction générale de 1826, ne permettant d'insérer dans le jugement que les conclusions des parties, exclut par cela même les motifs de ces conclusions» (4). C'est, je crois, pousser trop loin le principe, et dans la pratique, on ne sépare pas ces conclusions de leurs motifs, qui peuvent seuls les recommander et même les expliquer au juge qui doit y statuer. V. plus haut Conclusions, no 839.

935. « On ne doit pas, non plus, comprendre dans la rédaction des jugements les dépositions des témoins, leurs noms, profession, âge et demeure; tous ces détails sont réservés aux notes sommaires que les

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(1) Troisième ordonn. du 11 mars 1344, art. 4 : « Ils (les conseillers aux enquêtes) rapporteront l'arrest fait pour corrigier en la chambre... » Art. 5 Que ils lisent leur arrest pour corrigier en secret, et que tantost, que on leur dira la correction, ils la facent, et escrivent et relisent. Isambert, 1. 4, p. 504.

(2) 25 nov. 1837, D. P., 38, 1, 67; 16 fév. et 1er mars 1830, ch. req., D. P., 4, 128, 145; 1 mai 1832, req., D. P., 4, 175; 23 juin 1833, S. V., 33, 4, 667.

(3) Décret du 18 juin 1844, art. 58.

(4) Instruction générale sur les frais de justice, 30 sept. 1828, n° L ; et M. de Dalmas, Des frais de justice criminelle, etc., p. 155.

greffiers sont tenus de prendre à l'audience, en conformité des art. 155 et 189 du Code d'instruction criminelle. Ces notes sont rédigées sur des feuilles séparées, et jointes en minute à la procédure. Ce serait donc un double emploi et un abus que d'en insérer le contenu dans le jugement... En un mot, on doit s'attacher à rédiger les jugements le plus succinctement possible, sans omettre rien d'essentiel (1).

936. Ecriture du jugement, greffier, V. première partie, no 391.

Dans des tribunaux très-occupés, et principalement dans ceux où se jugent un grand nombre de délits forestiers, le greffier a l'usage de se servir pour la rédaction des jugements de feuilles imprimées où sont transcrits les articles de la loi dont l'application est la plus fréquente, et jusqu'aux énonciations de forme qui reviennent textuellement dans chaque décision. Cette manière de procéder, qui a pour résultat de faciliter extrêmement l'expédition des affaires, ne me paraît présenter rien d'irrégulier. Le Code ne proscrit absolument les formules imprimées que pour le procès-verbal des débats en Cour d'assises (art. 372), et la Cour suprême, tout en maintenant l'observation de cette règle, décide constamment (2) que le procès-verbal du tirage du jury de jugement, opération qui précède immédiatement les débats, peut être imprimé d'avance. — Quant aux jugements proprement dits, je ne connais de décision de la Cour que relativement à des jugements de conseils de discipline qui ont été maintenus, quoique rédigés sur des feuilles imprimées (3).

(1) V. la note 4 de la page précédente.

(2) 6 juill., 40 oct. 1832, B. 249, 407, et nombre d'autres depuis. (3) 24 août 1832, B. 323.

Mentions marginales de la feuille d'audience; V. 1" partie, no 389, et l'art. 36 du décr. du 30 mars 1808.

937. Signature du jugement. Au XIVe siècle, d'après les plus anciennes ordonnances relatives à la procédure, les jugements et arrêts étaient seulement revêtus du sceau du président (1). Sous Charles VII (2), les jugements durent être signés du greffier; sous Louis XII (3), les arrêts devaient être signés par les présidents, et sous Charles IX (4), par le président et le rapporteur. L'ordonnance criminelle prescrivit la signature de tous les jugements (soit définitifs, soit d'instruction), en premier ou en dernier ressort, par tous les juges qui y avaient assisté ; l'usage des Parlements, où le rapporteur et le président signaient seuls, fut maintenu (5). Le Code de brumaire an 4, qui (art. 438) exigeait, à peine de nullité, pour les jugements des tribunaux criminels, la signature des cinq juges, avait gardé le silence à l'égard des jugements correctionnels, d'où la Cour suprême avait tiré la conséquence que les signatures du président et du greffier suffisaient à la validité de ces jugements (6).

D'après l'art. 196 du Code d'instruction qui est plus explicite, comme on l'a déjà vu (no 933), « les juges doivent signer le jugement qu'ils ont rendu. » Cependant, si toutes leurs signatures n'avaient pas été recueillies, il n'en résulterait pas de nullité. Le

(4) Ordonn. du 14 mars 1344, 3° partie, art. 6; Isambert, 1, 504. (2) Idem d'avril 4453, art. 17; Isambert, ix, 244.

(3) Idem de juin 1540, art. 28 ; id., XI, 596.

(4) Deuxième ordonn. de Moulins de fév. 1566, art. 65; idem, t. 14, p. 206. (5) Ordonn. d'août 1670, tit. 25, art. 14; Isambert, 48, p. 447; Cass., 30 sept. 1826, B. 195.

(6) 22 déc. 1808, D. A., t. 9, p. 647.

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