Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

J'ajouterai ici que, quand on voudra centraliser les bulletins dépourvus du véritable lieu de naissance, et ceux des étrangers, le local le plus propre à cette réunion est tout trouvé c'est le bureau des sommiers judiciaires; ce sera un nouveau perfectionne- » ment apporté à une institution qui rend de si grands services et qui tend toujours à s'améliorer (1). Les magistrats du parquet et les juges d'instruction ne sauraient, suivant moi, y avoir trop souvent recours.

SECTION II.

JUGEMENTS DE CONDAMNATION.

947. Code d'instruction, art. 195 : « Dans le dispositif de tout jugement de condamnation seront énon

-

(4) Origine du bureau des sommiers. Le premier des registres qui furent la base de ce bureau est daté du 23 avril 1754. Ce n'était d'abord qu'un simple journal où étaient confondus les déclarations des crimes qui se commettaient dans Paris, ainsi que les noms de leurs auteurs signalés et les déci sions qui intervenaient.

En 1795, des registres de sûreté, ainsi qu'on les nommait alors, furent consacrés à l'enregistrement des prévenus écroués régulièrement et par mandat de justice dans les prisons de la Seine. — A la même époque, d'autres registres étaient consacrés à l'inscription particulière des individus condamnés par les Cours de justice criminelle des départements et écroués momentanément dans la maison de Bicêtre.

Telle est, probablement, l'origine des dispositions du Code d'instruction criminelle, art. 600 et 604, qui prescrivent l'inscription régulière des condamnés des tribunaux de première instance et des Cours d'assises de l'Empire. Telle est la source qui vint grossir les registres-répertoires du bureau des sommiers qui, chaque jour, acquérait plus d'importance par suite des demandes de renseignements qui lui étaient adressées du parquet de Paris et par quelques juges d'instruction de la province.

En 1833, les registres, qui entraînaient d'inévitables lenteurs dans les recherches, furent transformés en bulletins individuels, sur la demande de M. Gisquet, alors préfet de police, et au moyen des fonds alloués par le conseil municipal; cette refonte ne demanda pas moins de sept années de travaux extraordinaires aux employés du bureau. Aujourd'hui (1er sept. 1854), les employés des sommiers sont au nombre de douze, qui suffisent à peine à l'inscription des bulletins, à leur classement, et aux réponses à peut-être cent mille demandes de vérification par an.

cès les faits dont les personnes citées seront jugées coupables ou responsables, la peine et les condamnations civiles.

« Le texte de la loi dont on fera l'application sera lu à l'audience par le président; il sera fait mention de cette lecture dans le jugement, et le texte de la loi y sera inséré, sous peine de cinquante francs d'amende contre le greffier. »

Art. 194. V. plus bas, n° 958.

948. La conviction du juge, indispensable prėliminaire de toute condamnation, résulte, en police correctionnelle comme en simple police, d'éléments divers : les uns qui forcent cette conviction, si je puis ainsi parler; les autres qui sont entièrement abandonnés à la conscience du magistrat.

Ainsi, lorsque les faits constitutifs d'un délit se trouvent légalement établis par des procès-verbaux réguliers (1) qui font foi jusqu'à inscription de faux (V. n° 699) ou seulement jusqu'à preuve contraire (V. no 785), dans le premier cas (2), d'une manière absolue (V. ibid.), dans le second, si la preuve contraire n'a pas été faite par le prévenu, le juge n'a plus qu'à appliquer la peine encourue au délit ainsi constaté. V. 1re partie, u° 394.

La conséquence est la même lorsque le délit rẻsulte clairement de l'aveu du prévenu (V. no 631), ibid. (3).

Mais le juge reprend son indépendance lorsque la preuve ne résulte que des dépositions des témoins;

(4) 6 juin 1835, B. 230; 1er avril 1843, B. 75.

(2) Le juge correctionnel n'est pas juré en matière spéciale; 6 sept. 4824, B. 448.

(3) 4 sept. 1813, B. 499; 26 nov. 1829, B. 265.

alors il remplit tout à la fois l'office de juré dans l'appréciation des faits, et la fonction de juge pour l'application de la loi : c'est aux dispositions de l'art. 342 du Code d'instruction criminelle qu'il doit se conformer (1). V. 1re partie, no 395.

Cette jurisprudence a commencé sous l'empire du Code de brumaire an 4 (2); elle s'est constamment maintenue sous le Code actuel (3), et ce principe a été déclaré applicable en matière de délits de la presse, non moins qu'en fait de délits communs, puisque les juges correctionnels remplissent plus spécialement encore pour ces délits les fonctions des jurės, auxquels ils ont été substitués (4) en 1822 et en 1852 (V. no 42, au tome 1er).

949. La conviction du juge formée, il faut insérer dans le jugement les faits dont les personnes citées sont jugées coupables ou responsables; ce sont là, surtout, les motifs de ces jugements.

L'art. 141 du Code de procédure porte que la rẻdaction des jugements contiendra.... « l'exposition sommaire des points de fait et de droit, les motifs et le dispositif du jugement.... » Mais il a été décidé que cet article était uniquement relatif aux juge

(4) 13 nov. 4834, B. 370. — Il faut renvoyer à l'art. 342, qui concerne le grand criminel, faute de disposition spéciale pour les matières correctionnelles. Cette lacune a été remplie, avec beaucoup d'autres, dans le Code d'instruction criminelle des Antilles françaises; on y lit, art. 189, § 4: « Hors le cas de preuve légale résultant de procès-verbaux, ainsi qu'il est dit en l'art. 454, le tribunal de première instance jugeant correctionnellement se décidera d'après les preuves résultant, soit de l'instruction écrite, soit des dépositions des témoins, et suivant son intime conviction. »>

(2) 9 vend. an 7, B. 28.

(3) 22 mai 1812, B. 125; 4 sept. 1813, B. 199; 28 oct. 1844, D. A., 2, 334 ; 4 oct. 1846, D. A., 12. 538; 4 mars et 23 déc. 1825, D. P., 25, 1, 259, et 26,

4, 224; 14 déc. 1834, B. 396; 6 juin 1835, B. 230; 4 sept. 1844, B. 270; 4er avril 1843, B. 75.

(4) 45 oct. 1825, D. P., 26, 4, 75.

ments en matière civile (1): d'où il suit que c'est à la disposition de l'art. 195 du Code d'instruction qu'il faut s'attacher. Cette disposition est très-laconique et prête à l'interprétation; la jurisprudence en a cependant déterminé la portée. Ce que l'on peut tenir pour constant d'abord, c'est que la loi n'exige pas un exposé du fait en dehors des motifs du jugement. Ces motifs peuvent, et c'est ainsi que cela se pratique, énoncer très-régulièrement les faits ou circonstances constitutifs du délit (2); cette énonciation peut être faite avec concision, même avec laconisme, sans donner ouverture à cassation (3); mais il est indispensable que dans l'énonciation des faits soient compris ceux qui sont «< substantiels et caractéristiques de la criminalité (4), ne s'agit-il que d'une simple contravention de police (5).

>>

950. C'est ainsi que la Cour suprême a annulé divers jugements ou arrêts pour avoir fait applica

tion:

1° De l'art. 179 du Code pénal, pour tentative de corruption des agents d'une administration publique, sans déclarer que cette tentative eût pour objet d'obtenir un acte de leur ministère (6);

2o De l'art. 222 du même Code, sans spécifier les paroles qui avaient constitué l'outrage, et sans faire connaître les circonstances établissant que l'outrage

(4) 14 mars 1828, 8 mai 1829, Journal du Palais, 14 août 1829, D. P., 4.382.

(2) 1er avril 1843, B. 63; 47 janv. 1829, B, 14, et D. P., 4, 142, où l'arrêt est plus complet; 42 avril 1834, B. 444.

(3) 12 mai 1820, B. 90.

(4) 9 mars 1819, B. 35; 26 mai 1826, B. 94.

(5) 5 avril 1854, B. 436.

(6) 9 mars 1819, cité note 4.

avait eu lieu pendant l'exercice des fonctions du magistrat (1);

3o De l'art. 334 dudit Code, sans exprimer que la débauche eût été excitée ou favorisée habituellement (2); 4° De l'art. 401, sans constater que la soustraction commise eût été faite frauduleusement (3); sans préciser ni expliquer les faits qui auraient caractérisé la filouterie (4);

5o De l'art. 411 du Code, sans expliquer si la maison de pret sans autorisation était sur gages ou nantissements (5);

6o Des art. 1 et 13 de la loi du 17 mai 1819, en retenant pour la juger une affaire de diffamation publique, sans avoir déclaré aucun fait d'où pût résulter que les discours imputės au prévenu eussent été tenus, ou dans un lieu public ou dans une réunion publique (6); sans qu'enfin la diffamation fût reconnue avoir eu lieu publiquement (7);

7° De la loi du 3 septembre 1807, sur l'intérêt de l'argent, pour usure habituelle, sans avoir énoncé toutes les sommes dont le prêt était reconnu usuraire; énonciation substantielle, puisque l'amende ne doit pas excéder la moitié des capitaux prêtés à usure (8);

8° De l'art. 405 du Code pénal, pour escroquerie, sans énoncer les faits d'où peuvent ressortir les éléments du délit et notamment les manoeuvres frauduleuses qui en sont un des principaux.

La jurisprudence de la Cour suprême offre, sur ce point, des variations qu'il importe de rappeler. D'a

(4) 3 janv. 1854, B. 3.

(2) 17 janv. 1829, cité note 2, p. 300.

(3) 9 mai 1828, B. 140.

(4) 15 nov. 1850, B. 385.

(5) 9 mars 1819, cité note 4, p. 300.

(6, 7) 3 janv. 1822, B. 5; 7 et 26 janv. 1826, B. 3, 19.

(8) 44 nov. 1849, B. 447; 7 mai 1824, B. 64.

« PreviousContinue »