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S 2. De l'opposition, de la tierce opposition
et de la provision.

995. Le Code d'instruction porte : « Árt. 187. La condamnation par défaut sera comme non avenue, si dans les cinq jours de la signification qui en aura été faite au prévenu ou à son domicile, outre un jour par cinq myriamètres, celui-ci forme opposition à l'exécution du jugement, et notifie son opposition tant au ministère public qu'à la partie civile.

« Néanmoins les frais de l'expédition, de la signification du jugement par défaut, et de l'opposition, demeureront à la charge du prévenu.

Art. 188. L'opposition emportera de droit citation à la première audience : elle sera non avenue, si l'opposant n'y comparaît pas, et le jugement que le tribunal aura rendu sur l'opposition ne pourra être attaqué par la partie qui l'aura formée, si ce n'est par appel, ainsi qu'il sera dit ci-après.

«Le tribunal pourra, s'il y échet, accorder une provision, et cette disposition sera exécutoire nonobstant l'appel.

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996. Ces articles remplissent une grave lacune du Code de brumaire an 4, que n'ont pas signalée les motifs et les rapports de 1808. Le Code de brumaire, qui (art. 159, 160) avait admis l'opposition en matière de simple police, l'avait passée sous silence en matière correctionnelle. Il ne mentionnait (art. 192) que l'appel comme voie de recours contre les jugements de première instance. Mais la Cour de cassation avait considéré que cet article n'interdisait pas une voie plus simple et de droit commun, et déjà la loi du 11 prair, an 7 (art. 4) sur les douanes avait

consacré ce principe en défendant l'opposition pour ne laisser que la voie de l'appél (1). Enfin, un avis du conseil d'Etat du 18 fév. 1806 avait décidé qu'en matière ordinaire les jugements correctionnels défaut étaient susceptibles d'opposition.

par

Les art. 187 et 188 ont reproduit cette disposition d'après le projet du Code criminel de 1804 (art. 680 et 681); malheureusement par leur laconisme ils ont donné lieu à des inconvénients très-gravés quê la pratique révèle et que je rappellerai plus bas (n° 1021).

Définition de l'opposition, V. première partie,

n° 517.

997. La première observation à présenter sur ces textes et d'abord sur l'art. 187, c'est que le droit d'opposition à un jugement par défaut est ouvert au profit du défaillant dès l'instant du prononcé : la signification de la décision a seulement pour but de faire courir le délai imparti pour former l'opposition, de sorte que l'opposition est recevable tant que le jugement n'a pas été signifié (2), à moins cependant que la prescription (V. t. 1°, no 379) ne se trouve accomplie; dans ce cas l'opposition ne pourrait plus être formée aux termes de l'art. 641 du Code qui porte: « En aucun cas les condamnés par défaut ou par contumace, dont la peine est prescrite, ne pourront être admis à se présenter pour purger le défaut ou la contumace. »

998. L'appel d'un jugement par défaut nón signifié, relevé par une partie qui a comparu, ne paralyse

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nullement le droit d'opposition du défaillant, et ce droit subsiste tant que le délai de l'opposition n'a pas été ouvert par la signification de la décision et ne se trouve pas expiré (1). V. no 1073.

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999. Dès qu'un jugement par défaut est rendu, le ministère public doit le faire signifier aux parties défaillantes. Dans la pratique, lorsque ces parties sont indigentes et témoignent l'intention de former opposition à leur jugement, on les dispense de la signification et on les admet à déclarer verbalement leur opposition à la barre du tribunal. Cette forme de procéder rentre dans l'esprit de l'art. 147 du Code (2), et ne présente rien qui heurte les principes en matière correctionnelle.

La disposition de l'art. 187 sur cette signification est de droit étroit, et n'impose pas cumulativement à la partie publique et à la partie civile l'obligation de cette mise en demeure; il suffit que le condamné ait eu légalement et par un seul acte connaissance du jugement rendu à son préjudice, pour que de l'expiration du délai attaché à l'exercice de la faculté de pourvoi contre le jugement résulte contre lui la déchéance de cette faculté (3).

1000. La signification du jugement au prévenu fait courir le délai de l'opposition à l'égard de toutes les parties, lors même qu'elle n'aurait été faite qu'à la requête de l'un des demandeurs, soit ministère public, soit partie civile. L'art. 187, qui prescrit au défaillant de notifier son opposition à l'une et à l'autre

(4) 30 août 1821, B. 137.

(2) 23 fév. 4837, cité note 2, p. 343.

(3) 5 juill. 4849, B. 147.

de ces parties, n'exige pas une formalité géminée pour la signification (1). Cette différence s'explique d'ailleurs par cette circonstance, que le prévenu qui n'a qu'un seul intérêt se trouve suffisamment instruit par une signification unique, tandis que les intérêts de la partie publique et de la partie civile étant différents et séparés, chacune d'elles a besoin d'être avertie par une notification expresse et spéciale (2).

1001. La première condition de la validité de la signification, c'est que cet acte soit fait à la requête d'une des parties qui ont obtenu le jugement; un procureur impérial autre que celui du tribunal qui a prononcé ferait inutilement signifier au prévenu un jugement par défaut (3).

Il faut ensuite que la copie du jugement ne présente pas d'équivoque sur sa date; signifiée avec la date d'une autre année, on pourrait décider que la diligence n'est pas régulière et n'a pas fait courir le délai de l'opposition (4).

La copie entière du jugement doit être laissée au défaillant pour qu'il puisse non-seulement connaître le dispositif de la décision, mais les motifs sur lesquels elle se fonde, et vérifier si les formalités ont été régulièrement observées (5). En matière forestière et de pêche fluviale, toutefois, un simple extrait suffit. Les art. 209 du Code forestier et 75 de la loi du 15 avril 1829 portent : « Les jugements rendus à la requête de l'administration forestière, ou sur la poursuite du ministère public, seront signifiés par

(4) 24 sept. 1820, B. 131.

(2) 14 mai 1839, B. 154.

(3) 30 avril 1830, Journal criminel, art. 426.

(4) Paris, 4 mai 1829, D. P., 2, 186.

(5) Orléans, 14 fév. 1815, D. A., t. 9, p. 764.

simple extrait, qui contiendra le nom des parties et le dispositif du jugement. -Cette signification fera courir les délais de l'opposition et de l'appel du jugement par défaut. » M. Sulpicy (1) va plus loin, et pense que cette signification par extrait doit suffire pour donner cours au délai de l'opposition, dans tous les cas. Il fonde cette opinion sur ce que la loi sur la contrainte par corps qui règle l'exécution des arrêts, jugements et exécutoires en matière criminelle, dispose (2): que, « dans le cas où le jugement de condamnation n'aurait pas été précédemment signifié au débiteur, le commandement portera en tête un extrait de ce jugement, lequel contiendra le nom des parties et le dispositif. «< « Cet article, dit M. Sulpicy, ne fait aucune distinction entre les jugements contradictoires et les jugements par défaut. » Mais il n'en résulte pas pour cela que la signification par extrait soit autorisée pour les délits communs, et la raison en est que l'art. 33 de la loi ne concerne que les jugements non susceptibles de recours. Le paragraphe cité de cet article parle du « débiteur »..... Or, un défaillant ordinaire n'est pas débiteur, dans le sens de ce mot, puisqu'il peut encore se pourvoir. L'article ne s'applique évidemment qu'aux condamnés définitifs, et l'on comprend qu'à leur égard le législateur, comme procédure d'exécution, ait pu ne prescrire qu'une signification par extrait. En matière ordinaire, la signification ne sera donc régulière qu'avec une copie entière du jugement ou de l'arrét (3).

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Mari et femme; copies séparées, V. plus bas, nos 1004, 1007.

(4) Code d'instruction criminelle annoté, ári. 187, no 4.

(2) Loi du 17 avril 1832, art. 33.

(3) Metz, 26 janv. 1824, Journal du Palais.

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