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attaqué était du 1er décembre, et qu'une audience était donnée par la Cour le 10 janvier suivant. Ce magistrat aurait donc pu appeler à la barre. Mais je crois que l'on peut aller plus loin et soutenir que, à l'égard de toutes les parties, lors même que tous les délais d'appel sont expirés, le ministère public a encore le droit de faire donner la citation (1). Dans ce cas, il me paraît avoir qualité parce qu'il a intérêt. Cet intérêt est celui de faire promptement statuer sur les frais de première instance avancés par le trésor et mis à la charge de la partie qui a succombé, prèvenu ou partie civile. L'appel de cette partie suspendant, sur ce point, l'effet du premier jugement, la régie ne peut poursuivre le recouvrement de ces frais tant qu'il n'a pas été statué définitivement sur l'appel. Donc le procureur général a le droit de presser le jugement de l'affaire, dans l'intérêt du trésor, la partie appelante pouvant tomber en déconfiture. Ajoutons ici que dans l'usage, et notamment à Paris, où la Cour impériale juge un si grand nombre (2) d'appels correctionnels, le procureur général fait donner la citation à toutes les parties (3), pour l'audiencequi lui est indiquée par le président de la chambre.

1120. Lorsque la citation est donnée par une partie autre que le ministère public, elle ne met le tribunal ou la Cour dans l'obligation de statuer qu'autant qu'il y a eu indication préalable de jour par le 'président. Et le ministère public lui-même demande souvent cette indication. Dans la plupart des sièges

(4) Caen, 6 juill, 1854, Gazette des Tribunaux du 12 oct.

(2) En 4851, 4,396 affaires qui comprenaient 1,687 prévenus. Statistique criminelle, p. 161.

(3) Cette initiative prise par le ministère public est brièvement constatée dans l'arrêt par cette formule: « M. le procureur général anticipant...»

de chef-lieu, le nombre des affaires d'appel n'est pas assez grand pour que les audiences se tiennent à jour fixe; c'est au président de convoquer la chambre qui doit en connaître lorsqu'il se présente des affaires à juger, il faut donc que le jour soit indiqué avant que les citations soient données.

La citation est donnée à comparaître devant tel tribunal d'appels correctionnels; mais elle n'indiquerait simplement que le tribunal correctionnel de..., pourvu que ce fût celui du chef-lieu judiciaire, que le tribunal n'en serait pas moins valablement saisi, sauf à lui de se constituer au nombre suffisant de juges pour statuer (1).

1120 bis. Délais. Le Code d'instruction ne détermine aucun délai pour citer, ni pour plaider sur l'appel; cependant il faut observer au moins le délai accordé par l'art. 184, pour les citations devant le 'tribunal correctionnel, c'est-à-dire, celui de trois jours francs, outre un jour par trois myriamètres de distance (2). V. t. 1o, no 448.

La citation est donnée ordinairement par les huissiers du tribunal de l'arrondissement où sont domiciliées les parties; mais le procureur impérial de chef-lieu dans tout le département, le procureur général dans tout le ressort de la Cour, peuvent ordonner le transport d'un huissier (3), par un mandement spécial, qui n'est délivré que dans les cas de véritable urgence. V. plus bas, no 1223.`

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(3) Décret du 14 juin 1813, art. 22 et 31. — Un arrêt du 20 fév. 1812, B. 33, avait jugé que la citation donnée par un huissier, hors de son arrondissement, était nulle, mais cet arrêt avait été rendu sous l'empire de l'arrêté du 22 thermidor an 8, art. 7, que le décret de 1813 a modifié sur ce point.

1121. En fait de récusation il n'y a pas de citation à donner. Le Code de procédure porte, art. 394 : « Dans les trois jours de la remise au greffier de la Cour impériale (ou du tribunal d'appels correctionnels, V. n° 1104), il (le greffier) présentera lesdites pièces à la Cour, laquelle indiquera le jour du jugement et commettra l'un des juges; sur son rapport et les conclusions du ministère public, il sera rendu à l'audience jugement, sans qu'il soit nécessaire d'appeler les parties. » De ce qu'il n'était pas nécessaire d'appeler les parties, en cette matière, on a tirẻ et avec raison la conséquence qu'il n'y avait pas lieu de les entendre ou leurs défenseurs à l'audience, lorsqu'elles venaient à s'y présenter (1).

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1122. Du rapporteur.- Lorsque le président donne jour au ministère public et même avant, si l'affaire est importante, il commet un juge ou conseiller pour faire le rapport (V. n° 1153). Le Code d'instruction est silencieux sur ce point comme sur tant d'autres ; mais cette désignation s'induit légalement des dispositions analogues du Code de procédure civile, articles 110, 859, 863, 885, etc., d'après lesquelles le président est chargé de désigner le rapporteur dans les affaires qui doivent se juger sur rapport. Cette nomination se fait sans formalité : la présentation des pièces vaut requête, et le président, en quelques mots, libelle son ordonnance sur la cote du dossier.

Dans les appels de récusation, c'est la Cour (ou le tribunal) qui commet un des juges pour faire le rapport. Code de procédure, art. 394.

Renvoi après cassation, V. no 1145.

(4) Grenoble, 13 fév. 1826, D. P., 2, 133.

S 10. De quoi le tribunal est saisi.

Recevabilité de l'appel, V. no 1148.

1123. Le juge d'appel ne statue pas toujours comme celui de première instance dans toute la plénitude de ses pouvoirs; il ne peut exercer son autorité que sur les chefs du jugement que les parties ont trouvé à propos d'attaquer, et en tenant compte de la qualité prise par ces parties dans le jugement de première instance; le reste de la décision lui échappe complétement. Il est donc indispensable, pour les tribunaux d'appel, de bien se fixer préalablement sur la «< partie du jugé qui a été remise en question, » d'après la qualité de l'appelant et la teneur de la déclaration d'appel.

Ces principes se trouvent très-nettement posés dans un Avis du conseil d'Etat du 12 novembre 1806 (1), souvent invoqué, par la Cour suprême. J'en transcris ici d'abord le conclusum applicable au jugement des appels en général; les motifs seront reproduits plus bas à propos d'autres règles plus spéciales.

« LE CONSEIL D'ETAT, qui, d'après le renvoi ordonné par S. M., a entendu le rapport de la section de législation sur celui du ministre de la justice tendant à

savoir :

« Si, sur l'appel en matière correctionnelle émis par la partie civile, la Cour criminelle peut connaître du bien ou du mal jugé de l'entier jugement, et réformer les dispositions non attaquées, -EST D'AVIS,

Que la jurisprudence de la Cour de cassation,

(4) 42 nov. 1806. Avis du conseil d'Etat sur la question de savoir si, sur l'appel émis par la partie civile, les Cours criminelles peuvent réformer les dispositions non attaquées de jugements rendus en matière correctionnelle.

constante pour la négative de cette question, est fondée sur deux principes incontestables :

« Le premier, qu'un tribunal d'appel ne peut rẻformer un jugement de première instance qu'autant qu'il y a eu appel; que, par conséquent, s'il n'y a appel que d'une seule disposition, le tribunal ne peut pas réformer les autres, et n'a pas même la faculté de les discuter; il n'en est pas saisi.

« Le second principe est qu'un tribunal, soit d'appel, soit de première instance, ne peut adjuger ce qu'on ne lui demande pas, et que tout jugement qui prononce ultra petita est essentiellement vicieux.

« Ces deux principes seraient violés, si, sur le seul appel d'une partie civile qui se plaint de n'avoir pas assez obtenu de réparations, on aggravait la peine, dont la poursuite n'appartient qu'au ministère public qui n'a pas réclamé. »

Ces principes peuvent, dans presque toutes les affaires d'appel, servir à fixer les pouvoirs du juge supérieur. Je vais rappeler les applications nombreuses qui en ont été faites par la jurisprudence et la doctrine, dans l'ordre qui me semble le plus propre à les faire ressortir.

La pre

1124. I. Chefs du jugement non attaqués. mière règle (tot capita, tot sententiæ; V. n° 1145) à observer est la suivante : un jugement qui n'est point attaqué devant passer en force de chose jugée dans toutes ses dispositions, un jugement qui porte sur des chefs distincts et indépendants, et qui n'est attaqué qu'à l'égard de certains de ces chefs, doit également passer en force de chose jugée pour les chefs qui n'ont pas été frappés de l'appel. Ainsi :

Un individu est condamné, en première instance, à raison de deux escroqueries distinctes; le procureur

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