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impérial ne fait porter sa déclaration d'appel que sur un seul de ces délits; le tribunal du chef-lieu ne peut statuer qu'à l'égard de cette escroquerie, nonobstant les conclusions prises à l'audience par le ministère public à l'égard de l'autre (1).

Un tribunal correctionnel saisi des délits : 1° d'introduction de denrées coloniales en fraude des droits d'entrée ; 2° d'importation de marchandises anglaises, se déclare incompétent à raison du premier délit, et applique au prévenu les peines encourues pour le second; l'appel interjeté ne portant que sur le jugement d'incompétence, le tribunal supérieur ne pouvait sans excès de pouvoir connaître de la condamnation relative aux marchandises anglaises (2).

Un individu, poursuivi pour détention de denrées coloniales, avait été condamné à la confiscation pour toute peine. La régie des douanes ayant appelė scule, pour défaut d'application de l'amende, le tribunal supérieur (alors Cour prévôtale des douanes) devait borner sa décision à ce point et ne pouvait toucher à la disposition du jugement concernant la confiscation, parce qu'il y avait chose jugée (3).

Les premiers juges avaient, dans une affaire, rendu deux jugements distincts: le premier, relatif à des distributeurs d'instruments de musique contrefaits, statuait sur une question préjudiciclle; le deuxième, qui concernait les contrefacteurs des marques, renvoyait leur affaire à une autre audience. Sur l'appel qui ne touchait qu'au jugement des distributeurs, la Cour

(4) 19 déc. 1807, B. 265.

(2) 23 oct. 1806, B. 160; V. 11 mars 4834, B. 47, où se trouve une décision analogue, quoique sur une espèce en sens inverse.

(3) 9 mai 1812, B. 117; V. aussi 7 mai 1813, B. 97, qui, en matière de contributions indirectes, contient une décision analogue; idem, 13 déc. 4844, B. 173, concernant un délit rural.

avait retenu l'affaire des contrefacteurs, dont elle n'était pas saisie c'était un excès de pouvoir (1).

Un jugement correctionnel admettait le déclinatoire élevé par le prévenu pour une partie des faits, et le rejetait pour le surplus; la première disposition du jugement n'avait été attaquée par aucune des parties, et cependant le tribunal supérieur, sur l'appel du prévenu, dirigé contre la seconde disposition seulement, avait infirmé la première, ce qui constituait un autre excès de pouvoir.

Un tribunal saisi de plusieurs chefs de demandes par une partie civile avait fait droit aux uns et rejeté (2) les autres la partie civile a pu valablement pourvoir à l'exécution du jugement, touchant les dispositions qui lui avaient donné gain de cause, sans se priver pour cela du droit d'appeler des autres dispositions du jugement qui lui avaient été défavorables (3).

1125. Je pourrais multiplier ces exemples. Ils suffisent, je crois, pour faciliter l'application de la règle, fort simple d'ailleurs, que j'ai rappelée plus haut. J'ai maintenant à m'occuper de l'appel des parties. Les pouvoirs et les obligations des juges d'appel sont différents suivant que l'appel a été relevé seulement par le prévenu - par la personne civilement responsable - la partie civile - une administration publique - le ministère public - ou bien par quelques-unes de ces parties ensemble.

1126. II. Appel du prévenu seul. - Par cet appel le juge supérieur est investi du droit d'infirmer la

(1) 24 sept. 1830, B. 223.

(2) 8 sept. 1843, B. 236; V. aussi 7 août 1852, B. 268, relatif à la suppression d'une lettre produite à l'audience.

(3) 19 déc. 1846, B. 325.

disposition attaquée; mais son infirmation ne pourra être que favorable au prévenu condamné, d'après les principes consacrés par l'avis du conseil d'Etat de 1806. En effet, le juge d'appel ne saurait aggraver la peine, puisque le ministère public garde le silence et qu'ainsi la vindicte publique est censée satisfaite (1). Le même juge ne pourrait augmenter les dommages alloués à la partie civile, puisque cette partie, en demeurant dans l'inaction, a acquiesce implicitement au chef du jugement qui la concerne. L'application d'une règle si simple a pourtant donné lieu à de nombreuses décisions de la Cour suprême. Ainsi, il a été jugé, notamment:

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Que le recours du condamné seul, formé à raison de sa condamnation, sur un seul des chefs de la poursuite, ne pouvait remettre en question les autres chefs de prévention dont il avait été reconnu non coupable (2);

Qu'un mineur, acquitté pour défaut de discernement et soumis à la correction jusqu'à un âge détermině, ne pouvait, par le juge d'appel, être déclaré coupable et frappé d'une condamnation, le juge supérieur n'ayant, dans ce cas, que la faculté d'user de l'alternative établie par l'art. 66 du Code pénal, d'ordonner la remise du mineur à ses parents ou d'abrẻger la durée de la correction (3);

Que, tout en abrégeant la durée de l'emprisonnement, on ne pouvait, sans excès de pouvoir, pronon

(1) Il y a toutefois, en matière disciplinaire, une exception à cette règle tu télaire. Elle se trouve dans l'ordonnance du 20 novembre 1822, art. 28, qui porte: « Lorsque l'appel aura été interjeté par l'avocat condamné, les Cours pourront, quand il y aura lieu, prononcer une peine plus forte, quoique le procureur général n'ait pas lui-même appelé. »

(2) 46 juin 1809, B. 406; 26 nov. 4812, B. 308 et p. 478 (aff. Fabus); 8 août 1846, B. 207.

(3) 26 juill. 1844, B. 276.

cer une amende que le jugement attaqué ne portait pas (1);

Qu'on ne pouvait, pour un délit, ajouter l'emprisonnement à l'amende; pour un autre, joindre l'amende à l'emprisonnement (2); ajouter l'interdiction des droits, mentionnée en l'article 42 du Code pénal, aux autres peines prononcées (3); joindre à l'amende infligée l'emprisonnement et l'interdiction de l'exercice des droits civiques (4); prononcer l'emprisonnement à raison d'un délit, qui, mal qualifié par les premiers juges, n'entraînait d'abord que l'amende (5);

Qu'il n'était pas davantage permis d'augmenter la peine prononcée (6);

Ni d'adjuger à la partie civile des dommages-intérêts (7), ou d'augmenter ceux qui lui avaient déjà été alloués (8);

Que bien moins encore est-il possible de condamner la partie civile à l'emprisonnement et à l'amende (9);

Ni d'élever la durée de la contrainte par corps, d'abord déterminée par les premiers juges (10).

1127. Toutefois le juge supérieur peut, sans appel du ministère public, ordonner que le prévenu sera tenu par corps de l'amende prononcée en première

(4) 23 frim. an 8, B. 165.
(2) 18 juill. 1806, B. 147.
(3) 4 mai 1827, B. 140.
(4) 27 août 1842, B. 195.
(5) 13 janv. 1854, B. 40.

(6) 24 déc. 1846, B. 87; 44 juill. 1827, B. 186; 21 août 4854, B. 343. (7) 48 janv. 1822, B. 14; 30 mai 1840, B. 455.

(8) 29 août 1851, B. 362.

(9) 7 juill. 1827, B. 175.

(40) Douai, 7 mars 1835, D. P., 2, 114.

instance; d'après l'art. 52 du Code pénal, la contrainte est de droit en cette matière (1), et d'ailleurs, il s'agit d'une voie d'exécution et non d'une peine proprement dite.

1128. D'après les mêmes principes la Cour suprême a encore décidé :

Que le juge d'appel ne pouvait, par le motif que le délit, objet du jugement, présentait les caractères d'un crime, annuler le jugement et renvoyer le prévenu devant le juge d'instruction pour procéder contre lui par la voie criminelle; ce renvoi est une aggravation du sort du prévenu, contraire aux principes de l'Avis du conseil d'Etat de 1806, parce que le jugement, qui n'avait condamné que pour un délit, avait acquis en faveur de la partie condamnée et à l'égard de la vindicte publique l'autorité de la chose jugée (2); tout ce que pouvait faire, dans ce cas, le tribunal supėrieur, était de diminuer la peine prononcée, ou de prononcer le renvoi du prévenu (3); · V. aussi au chap. IX, des Appels de simple police, le n° 1036;

Que le tribunal d'appel ne pouvait même pas, par ce motif, se déclarer incompétent et délaisser la cause, pour être statué ainsi que de droit (4); cette décision, qui conduirait à un règlement de juges et aux lenteurs qui en résultent, n'en serait pas moins une violation de la loi (5);

Que le juge d'appel ne pouvait déclarer son incom

(4) 44 juill. 1827, j. cit.; 22 juin 1837, D. P., 4, 479.

(2, 3) 27 mars, 1er mai 1842, B. 74, 115; 49 août 1813, D. A., t. 2, p. 644; 47 nov. 1814, B. 40; 49 janv. 1816, B. 3; 25 mars 1825, B. 59; 12 mars 1829, B. 64; 48 fév. 4834, B. 28; 30 juin 1832, B. 242; 24 avril 1835, B. 457; 7 oct. 1836, B. 333; 30 mars 1837, B. 93; 13 mai, 13 oct. 1853, B. 164, 505.

(4, 5) 18 juill. 4828, B. 210; 49 août 4834, B. 486; 24 avril 1832, B. 143; 30 mars 1837, B. 95; 9 juill. 4844, B. 208; 14 nov. 1850, B. 380.

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