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DE QUOI LE TRIBUNAL EST SAISI. 487 relevé par un maître de poste, partie civile, d'un jugement qui n'avait pas appliqué l'amende prononcée par la loi du 15 ventôse an 13, pour les contraventions à ses dispositions (V. t. 1, n° 167). On a considéré que cette amende de 500 fr., dont moitié appartient au maître de poste intéressé et l'autre moitié à l'administration des postes, était indivisible qu'ainsi le maître de poste qui, régulièrement, demandait au tribunal supérieur de lui adjuger la moitié de cette amende qui lui revenait et qui, à ce titre, participait de la nature des réparations civiles, donnait forcément le droit au juge d'appel, nonobstant l'avis du conseil d'Etat de 1806, et malgré le silence du ministère public, de prononcer l'autre moitié de l'amende, qui pouvait présenter un caractère pénal (1).

1136. V. Appel d'une administration publique seule. -L'effet de l'appel d'une administration publique tient aux pouvoirs de cette administration relativement à la poursuite des délits qui l'intéressent. S'il s'agit d'unc administration qui n'a pas le droit de poursuivre, comme autrefois l'administration de la loterie et encore aujourd'hui l'administration des postes, l'appel, dans ce cas, ne saurait avoir d'autre résultat que celui d'une simple partie civile. Mais s'il s'agit de douanes ou de contributions indirectes, comme ces administrations ont droit de poursuivre, sur leur appel, le tribunal supérieur peut non-seulement condamner aux dommages et autres réparations civiles, mais prononcer les peines encourues pour le délit poursuivi (2). Cependant si le délit empor

(4) 12 août 1837, D. P., 1, p. 535; 28 déc. 1838, B. 390. (2) 24 juin 1838, B. 172.

tait une peine d'emprisonnement, ayant pour unique objet la vindicte publique, l'appel de l'administration ne pourrait, à cet égard, suppléer celui du ministère public (1). De plus, le tribunal supérieur saisi par l'appel de l'administration d'un seul chef du jugement ne pourrait statuer sur un autre, sans excès de pouvoir (2).

1137. Quant à l'administration forestière elle est investie de l'action publique en ce qui concerne la conservation des forêts; son appel indéfini remet en question tout le jugé, comme pourrait le faire un appel du ministère public; sur cet appel, le juge supérieur peut statuer sur les restitutions, frais et peines prononcés par le Code (3). Cet appel va même jusqu'à profiter au prévenu qui peut, dans ce cas, quoique il n'ait pas attaqué le jugement, obtenir une éduction de la peine prononcée ou même son renvoi pur et simple (4).

1138. VI. Appel du ministère public seul. Lorsque l'une des parties qui ont figuré au jugement interjette seule appel, son recours ne remet en question que la partie du jugé qui la concerne personnellement. L'appel du ministère public a un effet plus large: il saisit le tribunal supérieur de tout l'ensemble de la décision; les restitutions civiles seules (hormis encore celles qui intéressent l'administration forestière) subsistent, protégées par l'autorité de la chose jugée. Le but de

(1) 28 prair. an 44, B. 462; 23 fév. 1814, B. 29.

(2) 9 mai 4842, B. 447.

(3) 28 janv. 1808, B. 14; 31 janv. 1817, B. 7; Grenoble, 23 nov. 1836, D. P., 38, 2, 143.

(4) Nîmes, 6 fév. 4835; Metz, 11 nov. 1840, cités par M. Meaume, Code orestier, t. 2, p. 843: Boitard, Code d'instruction, p. 332.

l'appel du ministère public n'est pas toujours le même suivant la manière dont il est formulé, quoique en définitive le résultat auquel il conduit présente rarement de la différence; je crois cependant utile de rappeler, pour plus de clarté, les diverses formules usitées de cet acte de poursuite.

L'appel du ministère public est pur et simple ou indéfini; il est restreint à certains chefs du jugement; il est qualifié a minima; il est enfin, ad mitiorem, quoique cela soit infiniment rare.

1139. L'appel pur et simple ou indéfini, saisit le tribunal supérieur de la connaissance de tous les faits énoncés dans le jugement de première instance et de toutes ses dispositions, et, par là, il impose à ce tribunal l'obligation de statuer sur tous les chefs; dis

l'omission d'un seul de ces chefs serait une cause d'annulation à l'égard du jugement souverain (1). Sur cet appel le tribunal supérieur peut dépasser les conclusions du ministère public en ce qui concerne l'application de la peine. En effet, on l'a déjà vu (1 partie, no 377), le droit de proportionner la duréc de la peine à la gravité du délit n'appartient qu'au tribunal saisi du jugement du procès (2). Les conclusions prises à l'audience, par lesquelles le ministère public viendrait à restreindre sa poursuite à certains chefs seulement, n'enlèveraient pas au júge supérieur le droit et ne le dispenseraient pas du devoir de statuer de nouveau sur toutes les questions résolues en première instance (3). - L'appel indéfini

(4) 4er déc. 4809, B. 184; 6 sept. 1844, B. 427; 6 sept. 1833, B. 360; 27 juin 1834, B. 199.

(2) 14 mai 1847, Journal criminel, art. 4583.

(3) 6 sept. 1814, B. 127; 22 mai 1842, D. A., t. 2, p. 328; 27 fév. 4843, Journal du Palais; 27 juin 1834, B. 199; 31 déc. 1847, Journal criminel, art. 4246.

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profite au prévenu qui peut être acquitté, parce que le tribunal supérieur est investi du droit de connaître de l'action publique tout entière et par conséquent de la juger dans l'appréciation des preuves du fait qui a été l'objet des poursuites. V. le président Barris, note 165 (1),

Appel restreint; chef distinct, un seul frappé d'appel. V. plus haut, no 1124.

1140. L'appel à minimá du ministère public profite même au condamné qui n'a pas trouvé à propos d'attaquer le jugement. Telle n'était pas d'abord la jurisprudence de la Cour suprême, qui décidait que, sur le seul appel du ministère public, les prévenus qui avaient gardé le silence ne pouvaient être renvoyés des poursuites (2). Un arrêt doctrinal, rendu en 1825 (3), a consacré la règle actuelle qui, depuis est demeurée comme doctrine hors de toute controverse (4). Une femme Autard avait été condamnée à un mois d'emprisonnement. Le procureur du roi appela seul du jugement, en déclarant en termes exprès que son appel était à minimá sur cet appel, la Cour d'Aix réduisit la peine à quinze jours. Pourvoi, dans l'intérêt de la loi, formé de l'ordre du garde des sceaux, et fondé, principalement, sur le motif qu'un appel indéfini seul pouvait investir lè

(1) Et 27 fév. 1813, Journal du Palais : 24 janv. 4814, B. 8; 47 janv. 1847, Journal du Palais; 47 août 1824, B. 446.

(2) V. entre autres, 9 prair. an 8, B. 356; 43 déc. 1844, B. 173. (3) 4 mars 1825, B. 42; depuis, 10 mai 1843, B. 402 et autres.

(4) Dalloz, Jurisprudence générale, t. 4, p. 593 (M. Morin, Répertoire, t. 4, p. 472, n'a transcrit qu'une partie du passage de cet auteur, de sorte que la conclusion y diffère du commencement); Legraverend, Législation criminelle, t. 2, p. 402, note 3; Morin, Répertoire, t. 4, p. 472; Sulpicy, Code d'instruction, sur l'art. 203, no 74.

Contrà, Merlin, Questions, vo Appel, § 5; Boitard, Code d'instruction, p. 335.

tribunal supérieur du droit de connaître de l'action publique tout entière, et d'annuler même la première condamnation; et qu'un appel à minimá avait, pour point de départ, le jugement acquiesce par le prévenu, et ne pouvait avoir pour résultat que l'aggravation ou le maintien de la peine prononcée. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi par les considérations suivantes (1) :

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L'appel du ministère public, exerçant l'action Pater pisse publique, saisit indispensablement le tribunal d'ap

pel de l'examen du jugement des faits dénoncés, ezust 2 puisqu'il est impossible que ce tribunal puisse apprécier quelle est la nature de la peine qui doit être appliquée à ces faits, s'ils sont constatés et s'ils constituent des délits ou contraventions, sans apprécier, en même temps, le degré de culpabilité ;.....

- Il y aurait contradiction que la loi (Cod. instruct., art. 175, 176) qui autorise un nouvel examen, et un nouveau débat, obligeât les juges d'appel qui s'y livrent à négliger l'évidence qui pourrait en résulter, à imposer silence à leur propre conviction, pour s'en tenir à la déclaration de fait énoncée des juges de première instance......... Si, sur l'appel de la partie civile ou du prévenu, lorsque le ministère public n'est point appelant, il n'est point loisible aux juges d'aggraver la peine prononcée, c'est que cet appel n'intervient que dans un intérêt civil ou purement privé, et que le silence du ministère public annonce suffisamment que la société est désormais sans intérêt dans la cause: mais il importe peu que le prévenu ou la partie civile n'ait point appelé, lorsque le ministère public est luimême appelant, parce que ce dernier, qui agit au

(4) 4 mars 4825, B. 42; depuis, 10 mai 1843, B. 102, et autres.

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