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nom de la société, dans l'intérêt de la bonne administration de la justice, remet tout en question; et cet appel doit profiter au prévenu s'il a été injustement condamné, comme à la vindicte publique, si elle n'a point été satisfaite, puisqu'il est interjetė par le magistrat institué.... autant pour procurer l'exacte application des lois, et pour protéger les droits de tous, que pour rechercher et poursuivre les crimes et les délits. Enfin, il serait souverainement contraire à l'ordre public... qu'il pût arriver, par suite d'un prétendu acquiescement à un jugement rendu en matière criminelle, qu'un citoyen subît une peine grave, lorsqu'il résulterait peut-être d'un second jugement,... que les faits poursuivis ne constituaient ni crime ni délit, ou ne constituaient qu'une infraction réprimée d'une peine inférieure à celle qui lui aurait été infligée.

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La formule usitée de l'appel dit à minima ne doit cependant pas être prise à la lettre au point de frapper de non-recevabilité un recours ainsi qualifié qui serait dirigé, non contre un jugement ayant appliqué une peine trop faible, mais contre un jugement de renvoi pur et simple: ce qu'il faut voir c'est l'intention, et l'officier du ministère public qui, dans ce cas, relève appel à minimá est censẻ, à plus forte raison, se pourvoir contre la décision portant acquittement (1).

1141. L'appel ad mitiorem est ouvert au ministère public, comme l'appel indéfini et l'appel à minimá. Cette magistrature, en effet, n'est pas un instrument de pénalité; elle est instituée dans l'intérêt général, comme la Cour de cassation l'a souvent proclamé (V. le numéro précédent), et le procureur impérial

(4) 49 juill. 4849, B. 466.

a également qualité pour conclure en appel, soit à la réduction d'une peine qui lui paraît trop forte, soit à l'acquittement d'un prévenu qui lui paraît mal à propos condamné. Ce principe, qui, d'ailleurs, ne saurait faire difficulté, sous le droit actuel (1), a été consacré par la Cour suprême, à propos de l'appel (2) et du pourvoi en cassation (3).

1142. Il est presque inutile d'ajouter ici, qu'à l'égard des parties civiles, l'appel du ministère public laisse toute leur autorité aux chefs du jugement qui concernent les intérêts de ces parties, le procureur impérial n'ayant aucunement qualité pour les attaquer (4).

1143. Appel en matière forestière. Les officiers du ministère public, d'après l'art. 202 du Code, peuvent interjeter appel des jugements rendus dans les affaires introduites par l'administration forestière. L'art. 184 du Code forestier, maintient ce droit, et il résulte des termes de l'art. 159 du même Code,

(1) L'appel ad mitiorem n'était pas admis sous l'ancien droit. Serpillon, (t. 2, p. 1440) cite deux arrêts du Parlement de Paris, de 4674 et 1680, qui décident que le procureur du Roi ou fiscal ne peut appeler des sentences conformes à ses conclusions ou plus sévères.

(2) 12 nov. 1833, B. 414. — L'appel ad mitiorem validé par cet arrêt, concernait une condamnation par défaut, dont il était à présumer que le prévenu aurait relevé appel lui-même, lors de la signification du jugement. La Gazette des Tribunaux du 17 mars 1839, fait connaître un autre appel ad mitiorem, dont les circonstances sont plus saisissantes.

Un nommé Lavocat, condamné à L..., à cinq ans de prison et dix ans de surveillance, pour vagabondage et rupture de ban en récidive, avait interjeté appel du jugement. Mais, bientôt, « regardant la maison centrale, où sa peine devait le conduire, comme un toit paternel et asyle assuré » (sic), il s'était désisté de son appel et à l'audience du tribunal de T..., on n'avait pu le faire revenir sur cette singulière résolution. C'est alors que le procureur du roi avait appelé ad mitiorem, à la barre, ce qui avait amené la réformation du jugement sur le chef du vagabondage et sur la récidive, et la réduction de la peine à trois mois de prison, sans surveillance.

(3) 26 avril 1845, B. 453.

(4) 19 prair. an 8, B. 372; 30 mai 1840, B. 455; 7 août 1852, B. 268.

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que le ministère public peut, comme l'administration elle-même, exercer des poursuites en réparation de tous délits et contraventions commis dans les bois et forêts soumis au régime forestier. » — La réparation de ces délits a lieu par l'application des amendes et par les condamnations des délinquants aux dommages-intérêts, et aux restitutions, conformément à l'art. 198 du même Code. Les tribunaux doivent donc, sur l'appel du procureur impérial scul adjuger les réparations civiles encourues, quoique l'administration ne soit pas en cause, alors même qu'elle aurait acquicscé au jugement (1), lors même que cet appel aurait été déclaré par le ministère public au nom de l'administration (2). « Je ferai remarquer, dit Mangin (3), que l'administration forestière ne peut pas interjeter appel d'un jugement intervenu sur la seule poursuite du procureur du roi. La Cour de cassation l'a ainsi jugé par arrêt de 1806 (4), sous l'empire de la loi du 15-29 septembre 1791, qui, comme le Code forestier, donnait à l'administration le droit d'appeler. Cette décision conserve son autorité sous le Code actuel; car, pour pouvoir interjeter appel d'un jugement, il faut y avoir été partie. » Si l'administration avait fait donner la citation, elle aurait le droit d'appeler, lors même qu'aucun agent ne l'aurait représentée à l'audience. Dans ce cas, on l'a vu (n° 602) le procureur impérial la représente et conclut en

son nom.

1144. Appels simultanés. - Il n'est pas difficile, maintenant, de se rendre compte des effets que pro

(4) 20 mars 4830, D. P., 4, 473; cet arrêt est très-incomplet au Bulletin, n° 70; 8 mai 1838, B. 172.

(2) 27 janv. 1837, B. 34.

(3, 4) Actions, t. 4, p. 96; Cass., 7 fév. 4806, D. A., 11, p. 220.

duisent les appels relevés simultanément par plusieurs des parties à qui cette voie de recours est ouverte. Ainsi l'appel de la partie civile et celui du prévenu ne soulèvent qu'un intérêt civil et un intérêt privé; le tribunal supérieur qui en est saisi ne peut rien en ce qui concerne la vindicte publique (V. n° 1126 et 1132). L'appel de la partie civile et celui du ministère public réunis suffisent, au contraire, pour remettre tout le jugé en question, soit dans l'intérêt du prévenu, soit dans celui de la vindicte publique, soit enfin en ce qui concerne les dommages et les restitutions civiles.

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1145. Renvoi après cassation. — Le tribunal d'appel peut encore être saisi d'une affaire par le renvoi que lui en fait la Cour suprême par un arrêt de cassation. Le Code d'instruction porte, art. 427. « Lorsque la Cour de cassation annulera yn arrêt ou un jugement rendu, soit en matière correctionnelle, soit en matière de police, elle renverra le procès et les parties devant une Cour ou un tribunal de même qualité que celui qui aura rendu l'arrêt ou le jugement annulé. » Les tribunaux correctionnels, saisis par un scmblable renvoi, ne peuvent se déclarer incompétents (1), au moins à raison du lieu, l'arrêt de la Cour suprême leur attribue pleinement juridiction sous ec rapport (V. t. 1", n° 213 bis); sous celui de la matière et de la personne, ils peuvent juger leur compétence, puisque ils n'ont pas la plénitude de juridiction (V. no 615). Saisi de la sorte, le tribunal devient le juge de l'affaire, objet de la poursuite primitive (2); il a à sa disposition toutes les voies d'instruction qui étaient

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(4) 16 août 1834, B. 274.

(2) 14 fév. 1834, D. P., 1, 217.

ouvertes au tribunal dont le jugement a été annulé; il peut ouir de nouveau les témoins (1); ordonner des vérifications sur les lieux, quoique situės hors du territoire soumis à sa juridiction (2).

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Lors donc qu'un tribunal d'appel est saisi d'une affaire correctionnelle (ou de simple police) par suite de la cassation d'un jugement souverain, il se trouve virtuellement substitué au tribunal supérieur primitivement saisi, et il statue avec tous les pouvoirs de ce tribunal, d'où résulte pour lui l'obligation de juger tous les chefs de la prévention originaire (3) et le droit de qualifier autrement, s'il y a lieu, le délit, objet du jugement annulé (4). Je suppose, bien entendu, que les parties se trouvent atteintes par l'arrêt de cassation, car si un prévenu, une personne civilement responsable, une partie civile, ne s'était pas pourvu, lorsqué de son côté le ministère public gardait le silence, l'affaire, après cassation, ne serait pas remise en question avec cette partie (5). Ce sont, à un autre point de vue, les principes déjà exposés à propos des chefs du jugement non attaqués en appel, et de l'appel relevé par une seule des parties en cause (V. n° 1124, 1126 et suiv.).

Il y a difficulté lorsque la cassation, au lieu d'avoir anéanti le jugement tout entier, n'a annulé que quelques-unes de ses dispositions. Le Code d'instruction porte :

Art. 434. « Si l'arrêt a été annulé pour avoir pro

noncé une peine autre que celle que la loi applique à la nature du crime, la Cour d'assises, à qui le procès

(4) 16 nov. 1827, D., 28, 1, 25.

(2) 25 janv. 1824, D. A., t. 2, p. 420; 25 juin 1830, D. P., 4, 309.

(3) 2 juill. 4853, B. 339.

(4) 23 nov: 1844, B. 380. (5) 16 mars 1839, B. 92.

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