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1791] COMMENTS ON DECREE OF JULY 15 105

l'esprit de la sédition; de temps en temps des émissaires soldés viennent recruter, pour le Champ-de-Mars, où des ouvriers crédules, jouets et victimes de quelques centaines de factieux, jurent de renverser la monarchie, de désobéir aux Lois et de déchirer le sein de la patrie, à la vue du même autel où ils ont juré d'être fidèles à la Nation, à la Loi, et au Roi. Quelques citoyens honnêtes paraissent mécontents du décret: il leur semble que l'Assemblée nationale a manqué à sa gloire, sa dignité, en déclarant que Louis XVI n'était pas coupable: ces messieurs se trompent; ce n'est pas là le sens du décret: personne dans l'Assemblée ne s'est avili par une indigne faiblesse, en essayant de justifier le parjure du Roi; mais les orateurs les plus sages ont démontré qu'il n'y avait pas de monarchie sans l'inviolabilité de son chef. * * *

Café de Foi. Un Jacobite s'est présenté pour déclamer contre le décret du Corps législatif, qu'il accuse de corruption et de lâcheté. Sa harangue n'a pas été longue: un cri général a chassé l'orateur du café.

Cafe du Caveau. Les avis y sont partagés. Les uns déclament contre l'Assemblée nationale et présagent le retour du despotisme. * * Les autres soutiennent que le décret est le seul qui convient aux circonstances, qu'il était attendu, désiré par tous les départements de l'Empire et qu'il ne déplaisait qu'à ceux dont il contrarie les vues et les desseins.

Cour du Manège. Une foule immense y troublait, par des cris tumultueux, les délibérations du Corps constituant: un seul homme a eu l'audace de manifester une opinion modérée et de défendre avec chaleur l'inviolabilité du Roi. Des huées, des menaces violentes ont dû prouver à ce citoyen que les prétendus amis de la liberté n'étaient pas ceux de la tolérance: un officier de garde est venu l'arracher à la fureur d'un Peuple égaré. Dans un autre groupe, formé sur la petite place devant la porte de la cour, un particulier annonçait que Louis XVI serait détrôné aujourd'hui, nonobstant tous les décrets faits ou à faire. Une patrouille a saisi le prophète et l'a conduit en lieu de sûreté.

Café de la porte Saint-Martin. Plus de cent personnes y attendaient avec impatience la décision de l'Assemblée nationale sur l'affaire du Roi: à peine a-t-elle été connue que des cris de joie, des applaudissements unanimes ont attesté la satisfaction de cette société. Il s'en faut bien que les clubs aient présenté le même tableau.

Club des Cordeliers. Tous les autres se sont réunis mo

mentanément à celui-ci. * * * On a parlé du décret de l'Assemblée nationale qui consacre l'inviolabilité du Roi. Il n'est au pouvoir de personne de décrire le tumulte, les éclats de la délibération prise à ce sujet.

F.

Petition of July 17. 1791.

['BUCHEZ AND Roux,' vol. XI, p. 114.]

Sur l'autel de la Patrie, le 17 juillet de l'an 3.

Représentants de la Nation,

Vous touchiez au terme de vos travaux; bientôt des successeurs, tous nommés par le Peuple, allaient marcher sur vos traces sans rencontrer les obstacles que vous ont présentés les députés des deux ordres privilégiés, ennemis nécessaires de tous les principes de la sainte égalité. Un grand crime se commet; Louis XVI fuit; il abandonne indignement son poste; l'Empire est à deux doigts de l'anarchie. Des citoyens l'arrêtent à Varennes, il est ramené à Paris. Le Peuple de cette capitale vous demande instamment de ne rien prononcer sur le sort du coupable sans avoir entendu l'expression du vœu des 83 autres départements. Vous différez; une foule d'adresses arrivent à l'Assemblée; toutes les sections de l'Empire demandent simultanément que Louis soit jugé. Vous, Messieurs, avez préjugé qu'il était innocent et inviolable, en déclarant, par votre décret d'hier, que la charte constitutionnelle lui sera présentée alors que la Constitution sera achevée. Législateurs! ce n'était pas là le vœu du Peuple, et nous avions pensé que votre plus grande gloire, que votre devoir même consistait à être les organes de la volonté publique. Sans doute, Messieurs, que vous avez été entraînés à cette décision par la foule de ces députés réfractaires, qui ont fait d'avance leur protestation contre toute espèce de constitution; mais, Messieurs, mais, Représentants d'un Peuple généreux et confiant, rappelez-vous que ces deux cent trente protestants n'avaient plus de voix à l'Assemblée nationale, que le décret est donc nul et dans la forme et dans le fond: nul au fond, parce qu'il est contraire au vou du souverain; nul en la forme, parce qu'il est porté par 290 individus sans qualité. Ces considérations, toutes les vues du bien général, le désir

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PETITION OF JULY 17

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impérieux d'éviter l'anarchie à laquelle nous exposerait le défaut d'harmonie entre les représentants et les représentés, tout nous fait la Loi de vous demander, au nom de la France entière, de revenir sur ce décret, de prendre en considération que le délit de Louis XVI est prouvé, que ce Roi a abdiqué; de recevoir son abdication et de convoquer un nouveau pouvoir constituant pour procéder d'une manière vraiment nationale au jugement du coupable, et surtout au remplacement et à l'organisation d'un nouveau pouvoir exécutif.

PEYRE, VACHART, ROBERT, DEMOY.

G.

[Extrait du registre des délibérations du Corps municipal (du dimanche 17 juillet 1791). Brit. Mus. F. 835. (10).] À l'ouverture de la séance le Corps municipal a été instruit par M. le Maire de la suite des détails qui lui avaient été donnés hier, au sujet des rassemblements d'hommes et des mouvements séditieux qui se sont manifestés depuis plusieurs jours. Il a appris qu'en exécution des ordres de la municipalité les patrouilles s'étaient multipliées hier soir, cette nuit, ce matin; que la garde nationale avait donné des preuves continuelles de son zèle et de son attachement à la Constitution; que des ordres ultérieurs avaient été donnés; qu'il paraissait constant qu'il devait se former aujourd'hui de grands rassemblements sur le terrain de la Bastille, pour se porter ensuite sur le Champ de la Fédération; que la garde nationale avait été avertie de se trouver dans les différents endroits qui ont été indiqués, et qu'il y a lieu de croire qu'au moyen des précautions qui avaient été prises et des mesures que la municipalité pourrait ordonner, la tranquillité publique ne serait point altérée.

D'après cet exposé, le Corps municipal a arrêté que les citoyens seraient à l'instant avertis par la voie de la promulgation, de l'impression et de l'affiche, des dispositions de la Loi, et de l'obligation où ils sont d'y conformer; en conséquence l'arrêté suivant a été pris:

Le Corps municipal, informé que des factieux, que des étrangers payés pour semer le désordre, pour prêcher la rébellion, se proposent de former de grands rassemblements dans le coupable espoir d'égarer le Peuple et de le porter à des excès répréhensibles;

Our le second substitut adjoint du procureur de la com

mune;

Déclare que tous attroupements, avec ou sans armes, sur les places publiques, dans les rues et les carrefours, sont contraires à la Loi; défend à toutes personnes de se réunir et de se former en groupe dans aucun lieu public;

Ordonne à tous ceux qui sont ainsi formés de se séparer à l'instant;

Enjoint aux commissaires de police de se rendre, sans délai, dans tous les lieux de leur arrondissement où la tranquillité publique pourrait être menacée, et d'employer, pour maintenir le calme, tous les moyens qui leur sont donnés par la Loi ;

Mande au commandant-général de la garde nationale de donner à l'instant les ordres les plus précis pour que les attroupements soient divisés ;

Le Corps municipal se réservant de prendre des mesures ultérieures si le cas y échoit.

Après ces premières dispositions, le Corps municipal a arrêté que deux de ses membres, MM. Cousin et Charron, se transporteraient dans les environs de la Bastille, pour s'assurer par eux-mêmes s'il se forme dans ce quartier un rassemblement d'hommes, et d'en référer, sans aucun délai, au Corps municipal, qui statuera ainsi qu'il appartiendra.

M. Charton, chef de la première division, a été ensuite introduit; il a annoncé qu'il avait été envoyé à l'Hôtel de Ville pour y prendre les ordres du Corps municipal; que la garde nationale était commandée, et qu'une partie était déjà réunie sur la place de l'Hôtel de Ville.

A onze heures, un de MM. les administrateurs est venu annoncer qu'on l'instruisait à l'instant que deux particuliers venaient d'être attaqués dans le quartier du Gros-Caillou ; qu'ils avaient, l'un et l'autre, succombé sous les coups d'un nombre de personnes attroupées, et qu'au moment actuel, leurs têtes étaient promenées au bout de deux piques.

Le Corps municipal, s'occupant au même instant des moyens de réprimer le désordre et d'en prévenir les suites, après avoir entendu le second substitut adjoint du procureur de la commune,

A arrêté que trois de ses membres, MM. J. J. Leroux, Régnault et Hardy, se transporteraient à l'instant au GrosCaillou ; qu'ils seraient accompagnés par un bataillon de la

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MARTIAL LAW PROCLAIMED

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garde nationale; qu'ils emploieraient tous les moyens que la prudence pourrait leur suggérer pour dissiper l'attroupement, et même dans le cas où il y aurait effectivement eu meurtre, qu'ils pourraient publier la Loi martiale et déployer la force publique; le Corps municipal arrêtant en même temps que MM. les commissaires l'instruiraient sans délai des événements qui se sont passés et qui se passeront sous leurs yeux.

Le Corps municipal a reçu, à une heure après midi, une lettre de M. le Président de l'Assemblée nationale, relative aux événements de ce jour, et aux mesures que la municipalité doit prendre dans cette conjoncture: il a été arrêté que M. le Maire répondrait à M. le Président 'pour lui rendre compte de ce qui a été fait de l'arrêté qui a été pris et de la nomination des Commissaires envoyés au Gros-Caillou, et même qu'il serait adressé à M. le Président expédition de l'arrêté pris à ce sujet.'

Il a été en outre arrêté 'qu'il serait adressé à M. le Président de l'Assemblée nationale copie de la lettre que viennent d'écrire MM. les Commissaires députés au Gros-Caillou, par laquelle ils confirment la nouvelle du meurtre des deux particuliers dans le quartier du Gros-Caillou.'

Le Corps municipal avait déjà reçu de la part des Commissaires envoyés dans le quartier de la Bastille, la déclaration que tout était tranquille; qu'il n'y avait dans cette partie de la capitale aucun rassemblement, et qu'il ne semblait pas que la municipalité dût avoir de plus longues inquiétudes sur les mouvements dont on avait été menacé.

Cependant les moments s'écoulaient, l'attention du Corps municipal était toujours fixée sur ce qui se passait au GrosCaillou et au Champ de la Fédération; les courriers se succédaient; les nouvelles devenaient plus inquiétantes; la tranquillité publique recevait à chaque instant de nouvelles atteintes; les citoyens étaient en alarmes; des bruits qui se sont convertis en certitude, annonçaient que la garde nationale avait été insultée; les citoyens armés sur la place et dans la maison commune, partageaient les mêmes inquiétudes; déjà le commandant-général avait fait conduire à l'Hôtel de Ville quatre particuliers qui avaient été arrêtés au Champ de la Fédération et aux environs, pour avoir lancé des pierres sur la garde nationale; l'un des rebelles, interrogé par un administrateur de la police, avait été trouvé saisi d'un pistolet chargé; il est même convenu, dans son interrogatoire, qu'il avait jeté une forte pierre à un officier de la garde nationale à cheval.

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