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porte dans ses achats, sont des garanties plus sûres que l'examen auquel se livrent les officiers du gouvernement avant la délivrance des lettrespatentes.

La description ou spécification que l'auteur a faite de sa découverte, doit être inscrite sur un registre public, que chacun a le droit de consulter. En Angleterre, toute personne peut, non-seulement consulter ce registre; mais aussi se faire délivrer copie d'une spécification qu'elle se croit intéressée à connaître. Cette disposition a pour objet de garantir au public la possession de la découverte, et de donner à chacun la faculté de l'exploiter, quand le privilége de l'inventeur est expiré. Elle a aussi pour objet de prévenir les pertes des hommes industrieux pourraient faire, en se livrant à des travaux, et en sollicitant la concession d'un privilége pour une industrie qui serait déjà privilégiée. Des inventeurs ont quelquefois tenté d'obtenir que leurs descriptions ou spécifications ne fussent pas livrées au public, en alléguant que les étrangers pourraient profiter de leurs découvertes; mais ces tentatives n'ont eu aucun succès (1). En France, la description d'une découverte ne pourrait être cachée au public, qu'en vertu d'une loi spéciale qui aurait autorisé le secret,

que

(1) James Godson, Practical treatise, p. 143-144.

après que l'inventeur aurait eu fait connaître les raisons politiques ou commerciales qui s'opposent à la publicité.

L'inventeur qui obtient en France un brevet d'invention, est tenu de mettre sa découverte en activité dans les deux années qui suivent, sous peine de déchéance, à moins qu'il ne justifie des raisons de son inaction. Cette disposition, qui paraît d'abord assez juste, laisse cependant un vaste champ à l'arbitraire, puisqu'elle ne dit pas quelles sont les causes propres à justifier l'inventeur de n'avoir pas mis sa découverte en pratique. L'auteur d'une découverte qui a fait des frais, pour s'en assurer exclusivement l'exploitation, et qui néanmoins ne l'exploite pas, a certainement quelques bonnes raisons à donner de son inaction. La faculté donnée aux juges d'admettre comme valables toutes sortes d'excuses, ou de les repousser toutes, ne peut être considérée comme une garantie, ni pour le public ni pour l'inventeur.

La durée du monopole que les lois anglaises permettent d'accorder à l'inventeur, ne peut pas excéder quatorze ans; mais elle est quelquefois moins considérable. Le gouvernement la détermine, en prenant en considération les frais qu'exigent la mise en action de la découverte, et les bénéfices probables qui peuvent être faits dans un temps donné. En France, la durée du monopole est de

cinq, de dix ou de quinze ans, au choix de l'inventeur; comme on aurait pu craindre que l'auteur d'une découverte ne donnât toujours la préférence au terme le plus long, on a élevé la somme à payer au trésor public, en raison de la durée du monopole (1). Le terme fixé pour la jouissance du privilége ne peut être prolongé, soit en France, soit en Angleterre, que par un acte de la puissance législative.

Les lois anglaises ont déterminé le nombre des personnes qui peuvent prendre part à l'exploitation d'une découverte ce nombre ne peut jamais être au-dessus de cinq. Une des conditions les plus rigoureuses sous lesquelles la concession est faite, dit un jurisconsulte anglais, est que l'inventeur ne pourra céder son brevet, ni le diviser en actions, ni chercher des souscripteurs pour l'exploiter, ni le mettre en société, de manière que plus de cinq personnes s'y trouvent intéressées; l'infraction de cette condition suffit pour annuler le privilége. La loi du 25 mai 1794, de l'Assemblée constituante, en reconnaissant à tout inventeur le droit de contracter telle société qu'il

(1) L'impôt est de 300 fr. pour cinq ans, de 800 fr. pour dix ans, et de 1500 fr. pour quinze ans. Il y a de plus quelques frais à payer pour l'expédition des brevets et pour d'autres actes; mais ces frais sont peu considérables.

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lui plairait, en se conformant aux usages du commerce, lui avait interdit d'établir son entreprise par actions, à peine de déchéance de l'exercice de son brevet; un décret impérial, daté de Berlin, du 25 novembre 1806, déclara cette disposition abrogée, et soumit les inventeurs qui voudraient exploiter ainsi leurs découvertes, à se pourvoir de l'autorisation du Gouvernement.

Un inventeur jouit donc en France de droits beaucoup plus étendus que ceux dont il jouirait en Angleterre; il peut diviser son privilége en autant de parts qu'il juge convenable, et intéresser au succès de son entreprise, toutes les personnes qui désirent s'associer à lui.

Les lettres-patentes délivrées par le gouvernement anglais ne donnent un privilége à l'inventeur que pour l'Angleterre proprement dite, à moins que les colonies ne s'y trouvent aussi mentionnées. Si l'inventeur veut exercer son privilége sur l'Écosse et sur l'Irlande, il faut qu'il demande des lettres-patentes séparées, pour chacun de ces deux pays. Il a donc besoin de trois brevets d'invention pour avoir un monopole dans les trois royaumesunis. Cette nécessité ne paraît pas avoir d'autre objet que de grossir les revenus des hommes en

place.

Un brevet d'invention délivré par le Gouvernement français, donne à celui qui l'a obtenu le

droit de former des établissemens dans toute l'étendue du territoire national, et même d'autoriser d'autres particuliers à faire l'application et l'usage de ses moyens et procédés.

elle

Il est, dans la loi du 31 décembre 1791, une disposition dont il est difficile de trouver la raison : porte que tout inventeur qui, après avoir obtenu une patente en France, sera convaincu d'en avoir pris une pour le même objet en pays étranger, sera déchu de sa patente. Si cette interdiction faite à l'inventeur devait avoir pour résultat d'empêcher sa découverte d'arriver chez d'autres nations, on pourrait la défendre, comme on défend toutes les prohibitions produites par des rivalités commerciales. Mais, le registre des spécifications étant ouvert à tout le monde, on ne voit pas pourquoi l'on interdit à l'auteur d'une découverte un moyen de fortune licite pour tous les autres citoyens. Cette prohibition, qu'il est d'ailleurs facile d'éluder au moyen de personnes interposées, est nuisible à l'inventeur, et ne peut pas produire le moindre avantage pour le public.

Lorsqu'un brevet a été délivré, il est mis par les lois anglaises et par les lois françaises au même rang que les autres propriétés mobilières : il peut être échangé, vendu, donné, légué par testament, comme toute autre espèce de biens.

Lorsque le terme pour lequel un brevet d'inven

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