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Dans le cas de la tutelle dative, le tuteur doit être pris, autant que possible, parmi les parents successibles du mineur, soit parce que les devoirs de la parenté les appellent naturellement à cette charge, soit parce que l'équité demande que ceux-là soient tenus, en premier ordre, de veiller à la conservation des biens qu'ils ont espoir de recueillir, en cas de décès du propriétaire qui ne peut encore administrer lui-même.

Néanmoins la tutelle étant un office civil, tout homme indistinctement peut en être chargé, même malgré lui, quand il a les qualités requises, qu'il n'a pas de justes causes de s'en dispenser, et qu'aucun motif de suspicion légale ne l'en écarte.

Il y a donc trois espèces de causes qui, sous trois aspects différents, peuvent mettre obstacle à la tutelle:

Les causes d'excuses qui autorisent le refus des personnes qui seraient capables d'accepter;

Les causes d'incapacité qui empêche de décerner la tutelle à ceux-là mêmes qui ambitionneraient d'y être nommés;

Enfin, les causes de suspicions qui en excluent ou qui en font déchoir ceux qui s'en sont rendus indignes.

Ces divers genres de causes agissent, sous différents rapports, sur toutes les espèces de tutelles, sauf quelques cas d'exceptions que nous indiquerons par la suite, à l'égard des pères et mères et des veuves d'ascendants.

SECTION PREMIÈRE.

Des causes d'excuses légitimes.

Les causes qui dispensent de la tutelle appartiennent à deux classes les unes, fondées sur l'intérêt public, ne permettent pas qu'on force un citoyen à accepter une tutelle, lorsqu'il est revêtu d'une dignité éminente, ou lorsqu'appelé à des fonctions, ou employé à un service par le gouvernement, il se doit tout entier au poste qu'il occupe.

Les autres, fondées sur l'intérêt privé de ceux qui, par rapport à leur âge, ou aux embarras de leur propre position, sont autorisés à refuser la tutelle comme un surcroît de charge qu'ils ne pourraient supporter avantageusement pour les mineurs, ou qu'on ne pourrait leur imposer avec justice.

§ 1or.

Des causes de dispense fondées sur l'intérêt public.

Sont dispensés de la tutelle pour cause de dignité, fonctions et service publics :

[ 1° Les membres de la famille impériale;

2o Les grands dignitaires de l'empire;

3o Les grands officiers de l'empire;

4° Les sénateurs;

5° Les ministres ;

6° Les conseillers d'état;

7° Les membres du corps législatif; ] (a)

(a) Au sujet de ce passage, mis entre crochets, de l'édition de 1810, nous devons donner quelques explications.

Dans l'édition originale du Code, publiée en l'an XII, l'article 427 présentait en première ligne comme dispensés de la tutelle les membres des autorités établies par les titres II, III et IV de l'acte constitutionnel (du 22 frimaire an VIII); ce qui comprenait 1° les sénateurs, 2° les tribuns, 3o les membres du corps législatif, 4o les consuls, 5o les conseillers d'état, 6o les ministres.

:

Dans la seconde édition du Code, révisé législativement le 3 septembre 1807, le nouvel article 427 déclarait dispensées de la tutelle les personnes désignées dans les titres III, V, VI, VIII, IX, X et XI de l'acte des constitutions du 18 mai 1804 (28 floréal an XII). Ces personnes étaient : 1o les membres de la famille impériale, 2o les grands dignitaires de l'empire, 3° les grands officiers de l'empire, 4° les sénateurs, 5° les conseillers d'État, 6o les membres du corps législatif et les tribuns. Telle est aussi l'énumération donnée par M. Proudhon, sauf qu'il y introduit les ministres (dont pourtant ne s'occupent pas les titres précités de l'acte du 18 mai 1804), et qu'il en retranche les membres du tribunat, ce corps politique ayant été supprimé par le sénatusconsulte du 19 août 1807.

Enfin l'édition officielle publiée en vertu de l'ordonnance du roi du 17 juillet 1816, et qui n'a pas été modifiée depuis, a reproduit cette partie de l'article 427, telle qu'elle existait dans l'édition impériale, mais avec cet avertissement placé en note: Plusieurs des places et titres auxquels cette dispense s'applique, n'existent plus. Cette conservation de l'ancien texte, et l'observation qui l'accompagne, indiquent assez clairement qu'en cette matière on a entendu conserver à la loi civile toutes les applications qui pourraient s'adapter à la nouvelle organisation

8° Les présidents et conseillers à la cour de cassation, le procureur général et les avocats généraux en la même cour (a);

9° Les conseillers à la cour des comptes (b);

10° Les préfets (427) (1);

11° Tous citoyens exerçant des fonctions publiques dans un département autre que celui où la tutelle

politique. De là il nous paraît résulter qu'on doit considérer aujourd'hui comme dispensés de la tutelle en vertu du 2o alinéa de l'article 427 convenablement interprété, 1o les princes de la famille royale, 2o les membres des deux chambres législatives, 3o les maréchaux de France, qui étaient rangés parmi les grands officiers de l'empire, 4° les conseillers d'État.

(a) Nous avons corrigé le texte de cet alinéa conformément à l'édition officielle de 1816. Déjà, sous l'empire, le décret du 19 mars 1810 avait conféré aux juges de la cour de cassation le titre de conseillers, et aux substituts du procureur-général près la même cour le titre d'avocats généraux.

(b) Dans les deux éditions de l'an XII et de 1807, l'article 427 mentionnait les commissaires de la comptabilité nationale ou impériale. Les fonctions de la comptabilité publique furent peu de temps après cette seconde édition du Code (3 septembre 1807) attribuées à une cour des comptes (loi du 16 septembre 1807). Cependant les auteurs de l'édition de 1816 n'ont pas jugé à propos d'insérer dans le texte même de l'article 427, un alinéa relatif aux conseillers à la cour des comptes et au procureurgénéral près cette cour. Ils se sont contentés de rappeler dans une note l'article 7 de la loi du 16 septembre 1807 aux termes duquel: « la cour des comptes prend rang immédiatement après la cour de cassation, et jouit des mêmes prérogatives. »

(1) Voyez dans Locré, tome V, page 119, sur ces dispenses.

s'établit (427); ce qui s'applique même aux ecclésiastiques desservant des cures et succursales, et à toutes personnes exerçant pour les cultes des fonctions qui exigent résidence, dans lesquelles elles sont agréées par Sa Majesté, et pour lesquelles elles prêtent serment (1);

12° Les militaires en activité de service;

13° Tous citoyens qui remplissent, hors du territoire du royaume, une mission du gouvernement (428).

Les personnes de ces diverses qualités, qui auraient valablement accepté la tutelle postérieurement aux fonctions, services ou missions qui en dispensent, ne seraient plus admises à s'en faire décharger ( 430), parce qu'elles auraient, au besoin, la faculté de se faire remplacer par des administrateurs gérant sous leurs garantie et responsabilité personnelles; mais si, au contraire, la cause d'excuse était survenue depuis l'acceptation de la tutelle, elles auraient la faculté de s'en faire dégager, en faisant convoquer, dans le mois, le conseil de famille, pour faire procéder à leur remplacement; et si, à l'expiration des fonctions, services ou missions qui avaient fait cesser la tutelle, le nouveau tuteur réclamait sa décharge, ou si l'ancien en demandait la reprise, la loi autorise le conseil

(1) Voyez l'avis du conseil d'État, approuvé de Sa Majesté le 20 novembre 1806, bull. 126, no des lois 2047, tome V, page 604, 4 série.

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