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défend également l'expropriation de leurs héritages, avant la discussion de leur mobilier (2206) : la prescription ordinaire est suspendue tant à l'égard de l'un qu'à l'égard de l'autre (2252): comme le délai de la rescision ne court contre le mineur que du jour de sa majorité, de même il ne court contre l'interdit que du jour de la main-levée de l'interdiction (1304 ) : enfin le ministère public doit conclure dans toutes les causes de l'un comme dans celles de l'autre (1).

Mais quelle que soit l'étendue des rapports sous lesquels la loi les assimile l'un à l'autre, leur condition n'est cependant pas toujours la même, parce que le fondement de leur incapacité est bien différent.

La loi ne peut voir qu'un défaut absolu de jugement dans l'homme déclaré en démence; ce serait un outrage d'abaisser le mineur à cette condition: ici ce n'est plus le défaut entier de jugement, c'est l'inexpérience, c'est la raison naissante, mais combattue par la violence des passions du jeune âge, que la loi protége.

L'incapacité de l'interdit est dans le droit naturel, parce que le jugement d'interdiction n'est que déclaratif de la démence qui en est la cause : l'incapacité du mineur est, au contraire, un effet du droit civil qui l'établit et la modifie suivant les circonstances (a).

(1) Art. 83 du Cod. de proc.

(a) C'est bien certainement en vertu d'une règle de droit positif que l'on considère l'interdit comme entièrement incapable, et qu'on annule tous les actes postérieurs à l'interdiction, lors

Celle de l'interdit doit donc être plus absolue que celle du mineur, parce que l'imprévoyance de celui-ci peut être suppléée par, des formes de précaution, tandis le défaut absolu du jugement ne peut ja

que

mais l'être.

De là il résulte que le mineur peut, avec le consentement de sa famille (148), s'engager dans les liens du mariage, tandis que l'interdit en est incapable tant que dure l'interdiction (174); que le mineur peut, avec la même assistance, faire des libéralités, par son traité nuptial (1095, 1309 et 1398); et que, parvenu à l'âge de seize ans, il peut seul disposer, par testament, jusqu'à concurrence de la moitié des biens que la loi laisse à la disposition du majeur (904), tandis que l'interdit étant jugé n'être pas sain d'esprit, ne peut disposer ni par acte entre-vifs, ni par testament (901) (a);

même que les parties intéressées prétendraient prouver que ces actes ont été faits dans un intervalle lucide. Le législateur a organisé l'interdiction, pour trancher toutes les difficultés qui pourraient surgir sur le point de savoir, si la personne qui est habituellement en démence se trouvait ou non dans cet état au moment où elle a fait tel ou tel acte, et aussi pour donner à cette personne des administrateurs et des défenseurs légaux. L'interdiction des aliénés est si bien une création du droit positif, qu'elle n'existait pas en droit romain, où l'on n'interdisait que les prodigues. D'un autre côté, l'incapacité du mineur étant établie à raison de son inexpérience présumée, rien n'empêcherait de la rattacher à ce que l'auteur appelle le droit naturel.

(a) Comp. note a de la p. 363.

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Que l'interdit ne peut être tuteur ni membre d'un conseil de famille, tandis que le mineur est au contraire, de plein droit, le tuteur de ses enfants;

Qu'enfin, à l'égard du mineur, on doit préalablement examiner la question de savoir s'il a été lésé, pour le relever de ses engagements, ce qui n'a pas lieu à l'égard de l'interdit, quia dementis nulla voluntas (a).

L'article 502 du Code porte que l'interdiction a son effet du jour du jugement, et qu'en conséquence tous actes passés postérieurement par l'interdit sont nuls de droit; d'où il résulte :

1° Que, sans être obligé d'articuler aucune lésion, ces actes doivent être déclarés nuls par le seul motif

(a) I. Il ne faut pas oublier ce que nous avons reconnu plus haut avec l'auteur (V. p. 490), à savoir que dans certains cas le mineur peut demander la nullité de ses contrats, sans être tenu de prouver la lésion.

il y a

II. Il ne faut pas trop insister sur ce brocard: dementis nulla voluntas. Car s'il était reconnu que, dans un cas donné, eu absence complète de volonté, il serait reconnu par là même qu'il n'y a point eu de fait légal, par exemple, de convention; tandis qu'au contraire celui qui a contracté avec l'interdit ne peut demander la nullité de la convention (V. art. 1125), et que l'interdit lui-même est déchu de la faculté de demander la nullité, lorsque dix ans se sont écoulés depuis la main-levée de l'interdiction. Ainsi la loi voit dans cette convention un acte ⚫ vicieux et annulable, mais non un acte dépourvu de toute existence légale; sans doute parce qu'ici la nullité ne découle que d'une simple présomption, l'acte ayant pu être fait dans un intervalle lucide.

du défaut de volonté essentiellement inhérent à l'aliénation d'esprit, parce qu'il y aurait de l'absurdité à supposer un contrat valable sans consentement de la part d'un des contractants (a);

2° Que l'appel ne peut pas être suspensif sur ce point, parce que l'arrêt confirmatif déclarant le bienjugé, déclare par là même que la démence existait déjà lors du jugement de première instance, et frappe conséquemment de nullité tout ce qui aurait été fait par l'interdit, dans l'intermédiaire; c'est pourquoi la sentence des premiers juges doit être publiée et affichée nonobstant l'appel (501); c'est pourquoi encore l'administrateur provisoire, quand il en a été établi

ne cesse ses fonctions qu'après l'arrêt défini

tif (505) (b).

(a) Nous rappelons ce que nous venons de dire (note précédente, No II), que si l'un des prétendus contractants n'avait donné aucune espèce de consentement, il n'y aurait point de convention, et l'interdit lui-même ne pourrait se prévaloir de l'acte.

(b) L'auteur, en disant que l'appel n'est pas suspensif des effets de l'interdiction prononcée, se fonde sur ce que l'arrêt confirmatif déclare implicitement que la démence existait déjà lors du jugement de première instance. Mais s'il en est ainsi, pourquoi ne fait-on pas remonter les effets de l'interdiction jusqu'à l'époque où la démence a commencé, époque souvent bien antérieure au jugement de première instance qui a prononcé l'interdiction? Pourquoi enfin cet effet rétroactif de l'arrêt n'aurait-il pas lieu au cas où cet arrêt prononce l'interdiction, en infirmant le jugement qui avait refusé de la prononcer? Évidemment il faut compléter la pensée de notre auteur, en disant qu'au jugement de première

Remarquons néanmoins que, quoique les actes passés par l'interdit postérieurement à son jugement d'interdiction, soient nuls de droit, dans le sens que nous venons d'expliquer, ils ne sont pas nuls de plein droit, sans qu'on soit obligé d'en faire prononcer la nullité par les tribunaux, parce que la loi, en accordant dix ans à dater de la main-levée de l'interdiction (1304), pour ouvrir l'action en nullité contre ces actes, suppose la nécessité du recours à la justice pour cet objet (a).

Comme en cette matière le jugement est déclaratif de l'incapacité naturelle préexistante dans l'interdit, non-seulement il opère pour l'avenir, mais il peut aussi avoir indirectement un effet rétroactif sur le passé, en sorte que les actes antérieurs sont susceptibles d'être annulés, si la cause de l'interdiction existait déjà notoirement à l'époque où ils ont eu lieu (503).

Mais après la mort d'un individu, les actes par lui faits ne peuvent plus être attaqués pour cause de démence, s'il n'a été interdit avant son décès (504),

instance, et surtout à l'affiche de ce jugement, se rattache une présomption légale de notoriété à l'égard des tiers.

(a) Il est bien entendu que dans le cas même où une convention est nulle de plein droit, il deviendra nécessaire d'en faire reconnaître la nullité par les tribunaux, s'il y a contestation sur ce point. Mais cette nullité de plein droit, ou pour mieux dire, n-existence de la prétendue convention pourra être constatée à toute époque, et sur la demande de toute personne intéressée.

cette non

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