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me le fait penser, c'est la teneur de dispositions semblables qu'on lit dans les art. 10, 13, 15, 17 et 22 du chap. 1, tit. 1, liv. 6, des Const. royales, et quelques exemples.

Il est difficile qu'on donne des dispositions pour l'exécution d'une loi, sans que ces dispositions ne soient aussi une loi, d'autant plus difficile qu'il n'y a pour les dispositions à donner aucune limite, ni de temps, ni de mode. La chambre des comptes pourrait en donner, même d'ici à un an, d'ici à deux, et ainsi de suite, puisqu'il n'est pas dit que la délégation serait épuisée unico actu.

Certainement, par ces dispositions, on ne dérogera pas ouvertement à l'édit, mais on l'interprétera, on y ajoutera; enfin on fera facilement un supplément de loi, sans nouvelle signature du souverain et de toutes les personnes par qui il est d'usage que les lois soient contresignées, et sans de nouveaux entérinements.

d'exé

Une loi sur les hypothèques est de matière ordinaire, et concerne les droits de propriété. Pourquoi donner ce pouvoir particulier à un tribunal d'exception, au tribunal du fisc? Cela ne ferait-il pas croire qu'on n'a voulu faire qu'une loi fiscale? Lors même qu'il ne s'agirait que cution, la chambre des comptes ne devrait en être chargée que de la même manière que les autres tribunaux, ne le faire que dans les cas particuliers qui lui sont soumis, et non par des dispositions réglementaires et générales, surtout s'il s'agissait de dispositions auxquelles les sénats, qui ont la préséance sur la chambre des comptes et lès autres tribunaux, seront tenus de se conformer dans leurs décisions.

A la délégation de pouvoir pour une espèce de sup

plément à la loi l'édit a ajouté une dérogation partielle aux lois antérieures, et on a rendu ainsi la loi nouvelle incomplète d'une double manière.

Il faudra donc toujours recourir aux anciennes lois, et cet amalgame n'est pas toujours possible, n'est pas toujours clair, n'est pas à la portée de tout le monde, et entraîne bien d'autres inconvénients que j'ai déjà indiqués dans d'autres endroits de cet écrit 1.

Je sais très bien qu'il est assez difficile de faire une loi tellement complète sur une matière qu'on puisse franchement abolir toutes les autres lois de la même matière.

Mais c'est à quoi l'on doit viser pour avoir une plus grande perfection dans les lois, et c'est à quoi l'on parvient lorsqu'il y a un grand concours de lumières et une discussion publique et approfondie.

Par exemple, je demanderais si, par le nouvel édit, demeure aboli ou non un mode d'exécution que la loi piémontaise admettait aussi (Constitut. génér. liv. 3, tit. 32, art. 44) celui de mettre un créancier en possession des biens immeubles pour les retenir jusqu'à ce qu'il soit satisfait au moyen des seuls fruits. Il y aurait bien des raisons à dire pour et contre.

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CHAPITRE V.

DE L'UTILITÉ DE L'ÉDIT RELATIVEMENT AU FISC, AUX PARTICULIERS, ET AUX GENS DU BARREAU.

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Plus il y a d'hypothèques et de priviléges, plus il y a d'inscriptions et de transcriptions; car chacun veut se garantir: ainsi la loi piémontaise sera moins utile que la loi française, pour la clarté et en conséquence pour la sûreté des contrats et des droits immobiliers, beaucoup plus dispendieuse pour les particuliers, beaucoup plus profitable pour le fisc, et d'une double manière, à raison de la multiplicité tant des inscriptions et des transcriptions que des procédures et des questions judiciaires. Il est inutile de dire que les gens du barreau y trouveront aussi de la besogne et du profit.

Dans les premiers temps surtout, au milieu de la confusion et de l'obscurité des hypothèques tacites et générales, tout le monde sera dans le plus grand mouvement pour courir inscrire ses créances, pour transcrire ses contrats, même ceux passés depuis longues années.

Car si la prescription ne met pas à l'abri votre propriété, si vous n'inscrivez et ne transcrivez pas à votre tour les inscriptions et transcriptions, vos droits sont en péril. Le système hypothécaire est une machine où dès que l'un se meut il faut que tous les autres se meuvent, sous peine d'être froissés ou écrasés.

Voilà une belle et grande contribution levée, non sur les revenus, mais sur les capitaux de toute une nation; car, il ne faut pas se le dissimuler, presque toutes les propriétés foncières de l'État seront inscrites, et un grand nombre transcrites; et, à la réserve des créances commerciales, les créances particulières, ainsi que les publiques, seront presque toutes inscrites. C'est une belle ressource pour le trésor, mais une charge très grave pour les particuliers. Si du moins l'édit leur procurait tous les avantages dont on jouissait sous la loi française, on regretterait beaucoup moins tout cet argent; mais si la nouvelle loi apporte plus d'embarras que de facilité dans les transactions, le nouvel impôt se fera sentir plus pesant.

CHAPITRE VI.

CONVENANCE QU'IL Y AURAIT A REMETTRE EN VIGUEUR
PUREMENT ET SIMPLEMENT LES LOIS FRANÇAISES SUR
LES HYPOTHÈQUES, AVEC DES DISPOSITIONS TRANȘI-
TOIRES ET ADDITIONNELLES.

Elle a

La législation française bien discutée et à plusieurs reprises.
la sanction de l'expérience. — Même en Piémont.—Elle a déjà une
jurisprudence.-Encore en vigueur à Gênes. Regrettée et désirée
partout ailleurs.—Le rétablissement de cette législation s'opérerait
sans honte. Même avec gloire. Et sur de bons exemples anciens
et modernes. — Améliorations faites à Genève au système français
en matière d'hypothèques.

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D'après le parallèle que nous venons de faire des deux lois française et piémontaise, cette convenance me paraît évidemment démontrée.

Outre cela, rien ne peut remplacer les avantages

1° D'une législation qui, par degrés et par suite d'une lente expérience, est parvenue au point où nous la voyons dans les codes français; car il y eut auparavant (ainsi que nous avons remarqué au chap. 3) la loi du 9 messidor an 3 (27 juin 1795), ensuite celle du 11 brumaire an 7 (2 novembre 1802);

2o D'une législation qui, à l'occasion du code civil (de février 1806), éprouva encore une discussion appro

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