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1. La principale source du droit civil est le Code civil des Français, promulgué sous ce titre par la loi du 30 ventôse an xii (21 mars 1804).

Deux législations se partagèrent le sol de l'ancienne France; le droit romain était la loi des contrées du Midi, appelées pays du droit écrit; un grand nombre de coutumes diverses de villes ou de provinces régissaient les territoires du nord et du centre de la France, appelés pays du droit coutumier. Les ordonnances royales seules étaient obligatoires pour toute la France.

Déjà le roi Louis XI avait conçu le projet de donner à la France une législation uniforme, afin d'en consolider l'unité nationale. Henri III reprit le projet que Louis XI n'avait pu réaliser. Il chargea le jurisconsulte Barnabé Brisson de faire un ouvrage qui réunirait toutes les ordonnances royales encore en vigueur et en même temps des projets de lois nouvelles. La mort empêcha le roi d'achever cette œuvre connue sous le nom de Basilique ou Code de Henri III, mais qui n'a jamais reçu force de loi.

Sous Louis XIII, le chancelier Michel de Marillac, dans la vue de rendre la législation uniforme, rédigea une ordonnance en quatre cent soixante et un articles, connue sous le nom de code Michaud ou code Marillac, et contenant non-seulement des dispositions sur beaucoup de matières du droit civil, mais encore sur le commerce, la marine, les finances et la guerre.

D'importants travaux législatifs dans presque tous les domaines du droit signalent les règnes de Louis XIV, de Louis XV et de Louis XVI, mais le projet de donner à la France une législation générale uniforme ne fut plus entrepris.

2. L'Assemblée constituante, ouverte en 1789, avait établi l'unité dans l'organisation politique et administrative de la France; l'unité de la législation civile devait en être la conséquence naturelle. Déjà la loi sur l'organisation judiciaire des 16-24 août 1790, tit. II, art. 19, proclame, « que les lois civiles seront revues et réformées par la législature, et qu'il sera fait un code général de lois simples, claires et appropriées à la constitution ». La disposition finale du titre I de la constitution des 3-14 septembre 1791 porte: «Il sera fait un code de lois civiles communes à tout le royaume. » La constitution du 24 juin 1793, qui toutefois n'a jamais été mise à exécution, dit : «Le code des lois civiles et criminelles est uniforme pour toute la république.

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La Convention nationale chargea la commission de législation. de faire un projet contenant les fondements d'un nouveau code civil. Le 9 août 1793, Cambacérès présenta un projet de code civil qui ne fut pas adopté par la Convention. Le 23 fructidor an 11, Cambacérès présenta un nouveau projet, dont quelques articles furent décrétés, mais que la nécessité de s'occuper d'affaires plus urgentes fit alors tomber dans l'oubli.

Les deux assemblées politiques qui, d'après la constitution de l'an 1, succédèrent à la Convention nationale, ne perdirent pas de vue le soin de doter la France d'une nouvelle législation civile. Le 24 prairial an iv, Cambacérès soumit au conseil des Cinq-Cents un nouveau projet de code civil, offrant beaucoup de ressemblance avec celui de 1793, mais la discussion n'en fut pas commencée.

Les événements du 18 brumaire an vi avaient changé la face

de la France. L'article 14 de la loi du 19 brumaire, qui remplace le Directoire par une commission consulaire exécutive et les conseils des Cinq-Cents et des Anciens par deux commissions composées chacune de vingt-cinq membres, porte : « Les deux «< commissions sont chargées de préparer un code civil. »

3. Un arrêté des consuls, du 24 thermidor an viii, nomma une commission chargée de rédiger un projet de code civil. Elle était composée de Tronchet, président du tribunal de cassation; Portalis, commissaire du gouvernement près du conseil des prises; Bigot-Préameneu, commissaire du gouvernement près le tribunal de cassation, et Maleville, juge au même tribunal. Le projet fut terminé en quatre mois et imprimé sous le titre de : Projet du code civil présenté par la commission nommée par le gouvernement le 24 thermidor an vIII. Le gouvernement l'adressa au tribunal de cassation et à tous les tribunaux d'appel, avec invitation de faire leurs observations; il appela en même temps celles de tous les citoyens. Les tribunaux montrèrent le plus grand empressement à faire parvenir leurs observations au gouvernement, qui les réunit en un recueil et les fit publier.

4. La constitution du 22 frimaire an vIII (13 décembre 1799) avait organisé le pouvoir législatif et prescrit la manière dont il devait fonctionner. La voie tracée par cette constitution fut suivie pour les travaux préparatoires du code civil. Chaque titre du projet était d'abord examiné en présence des membres de la commission par la section de législation du conseil d'État, qui pouvait y faire des modifications. La rédaction adoptée par cette section, après avoir été préalablement imprimée et distribuée à tous les conseillers d'État, était discutée en assemblée générale du conseil d'État présidée par le premier ou par le second con- . sul. Les membres de la commission de rédaction assistaient à cette assemblée. Le conseil d'État, à la majorité, adoptait, rejetait ou amendait le projet. Quelquefois les dispositions adoptées étaient renvoyées à la section de législation pour y subir une nouvelle rédaction. Les titres adoptés par le conseil d'État étaient présentés comme projets de loi au Corps législatif, devant lequel des orateurs du gouvernement, choisis parmi les conseillers d'État, en exposaient les motifs. Le Corps législatif communiquait les projets de loi au Tribunat, qui, après discussion sur

un rapport présenté par un membre de sa section de législation, en votait l'adoption ou le rejet, sans pouvoir les amender. Des orateurs pris dans son sein exposaient et défendaient devant le Corps législatif le vœu d'adoption ou de rejet que le Tribunat avait exprimé sur chaque projet. Le Corps législatif faisait la loi en statuant par scrutin secret, et sans aucune discussion de la part de ses membres, sur les projets de loi débattus devant lui par les orateurs du Tribunat et ceux du gouvernement. Tout décret du Corps législatif, le dixième jour après son émission, devait être promulgué par le premier consul, à moins que, dans ce délai, il ne fût dénoncé au sénat pour cause d'inconstitutionnalité par le Tribunat ou par le gouvernement.

La discussion du code civil en assemblée générale du conseil d'État commença le 28 messidor an Ix (17 juillet 1801). Le titre préliminaire De la publication des lois, le titre Ier, De la jouissance et de la privation des droits civils, et le titre II, Des actes de l'état civil, furent présentés au Corps législatif le 3 frimaire an x. Le titre préliminaire fut rejeté par le Tribunat le 21 frimaire, et sur son vœu par le Corps législatif le 24 frimaire suivant. Le Tribunat avait également proposé le rejet du titre Ier, De la jouissance et de la privation des droits civils. Alors le gouvernement, par un message adressé au Corps législatif, le 12 nivôse an x (3 janvier 1802), retira les trois projets de loi du code civil qu'il avait présentés.

5. Pour prévenir les dissensions entre le gouvernement ou le conseil d'État d'un côté et le Tribunat de l'autre, les consuls prirent, le 18 germinal an x (8 avril 1802), un arrêté par lequel ils établirent les communications officieuses entre le conseil d'État et les sections de législation du Tribunat. Avant de présenter au chef du gouvernement les projets de loi arrêtés au conseil d'État, le-secrétaire général de ce conseil les envoyait à la section du Tribunat que la matière concernait. Cette section délibérait sur ces projets, et consignait dans un procès-verbal les observations et les amendements qu'elle croyait devoir proposer. Ce procèsverbal était communiqué au conseil d'Etat, et spécialement à la section qui avait rédigé le projet. Si cette section n'adoptait pas les modifications proposées par celle du Tribunat, il s'engageait entre ces deux sections, sous la présidence du ministre de la

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