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SECTION I I.

De la forme du Contrat d'Assurance maritime.

Nota. La forme du contrat d'assurance, dont il est parlé dans cette section, n.o 99 à 114, étant une matière susceptible de beaucoup d'observations, nous nous reservons de la traiter aux additions.

99. CE contrat, aux termes du droit naturel, et pour qu'il oblige les parties dans le for de la conscience, peut recevoir sa perfection par le seul consentement sur les choses qui font la substance du contrat, sans qu'il soit besoin d'observer aucune forme.

Celles que l'Ordonnance prescrit, articles 2 et 3 du titre des Assurances (C. de c. 332), concernent plutôt la preuve qui doit être faite de ce contrat, lorsqu'on en poursuit l'exécution dans les Tribunaux, qu'elles ne sont de sa substance.

L'Ordonnance, article 2 (C. de c. 332 ), porte: Le Contrat appellé POLICE D'ASSURANCE, sera rédigé par écrit.

On peut faire sur cet article deux questions. La première est de savoir si cette forme que l'Ordonnance prescrit par cet article, est requise pour la validité du contrat, ou seulement pour la preuve du contrat. Je du contrat. Je pense qu'elle n'est requise

que pour la preuve du contrat, et que l'Ordonnance n'a voulu autre chose par cet article, sinon que ce contrat, dans le cas auquel les parties en disconviendraient ne pût se prouver que par un acte par écrit, et que la preuve testimoniale n'en pût être admise. Les raisons qui me portent à croire que cette forme que l'Ordonnance prescrit, n'est que pour la preuve, et non pour la validité du contrat, sont, 1.° que cette forme est absolument étrangère à la substance du contrat; 2.o que l'Ordonnance ne la requiert pas à peine de nullité.

De là il suit que lorsque le contrat n'a pas été rédigé par écrit, et qu'en conséquence il ne. peut pas y en avoir de preuve, l'une des parties. peut à défaut de preuve, déférer à l'autre le serment décisoire sur la vérité du contrat, et sur les conditions du contrat.

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100. La seconde question est de savoir si la disposition de cet article ne doit avoir lieu que dans le cas auquel l'objet du contrat excède la somme de cent livres. Valin, sur cet article, est d'avis de cette restriction. Il pense que cet article doit s'interpréter par l'Ordonnance de 1667, qui ordonne qu'il sera fait des actes par écrit de toutes choses dont l'objet excède cent livres ; et qu'en conséquence lorsque l'objet du contrat d'assurance maritime n'excède pas cent livres, la preuve

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testimoniale, à défaut d'écrit, en doit être admise de même que de tous les autres contrats dont 'T'objet n'excède pas cent livres.

L'opinion contraire, qui est celle de l'ancien Commentateur, me paraît plus régulière. Nous ne devons point suppléer dans une loi une distinction qu'elle ne fait point. Ubi Lex non distinguit, nec nos distinguere debemus. C'est pourquoi, l'Ordonnance ayant dit en général que le contrat d'assurancé sera rédigé par écrit, sans distinguer, comme elle fait à l'égard des autres contrats par l'Ordonnance de 1667, si l'objet excédait ou non cent livres; on doit penser qu'elle y a assujetti indistinctement tous les contrats d'assurance maritime. soit que leur objet excède ou n'excède pas cent livres. Si l'intention du Législateur n'eût été que d'assujettir ceux dont l'objet excéderait cent livres, il eût été inutile d'en faire une disposition dans cette Ordonnance, puisque la loi se trouvait déjà faite par celle de 1667.

IOI. On peut faire une troisième question sur cet article, qui est de savoir si la preuve testimoniale d'un contrat d'assurance maritime qui n'a pas été rédigé par écrit, peut être admise lorsqu'il y a un commencement de preuve, par écrit, de même qu'elle est admise, en ce cas, par l'Ordonnance de 1667, à l'égard de tous les autres contrats. J'aurais de la peine à l'admettre. L'Or

donnance ayant fait une disposition particulière, pour la forme dans laquelle doit être rédigé le contrat d'assurance maritime, elle l'a tirée de la thèse générale des autres contrats: c'est pourquoi ce que l'Ordonnance de 1667 permet à l'égard des autres contrats, ne peut s'appliquer à celuici. L'Ordonnance de la Marine ayant par cet article assujetti absolument le contrat d'assurance à être rédigé par écrit, en a exclus et interdit toute autre preuve.

Nos décisions sur cette question et sur la présont conformes à l'avis d'un savant Magistrat qui a l'expérience de ces matières.

cédente,

102. Quid, si l'une des parties alléguait que le contrat a été rédigé par écrit, mais que l'acte a péri dans un incendie, ou par quelque autre accident? Il faudrait avoir recours en ce cas, au regis tre de l'assureur, tous les assureurs devant en avoir un. Mais si le registre avait aussi été enveloppé dans l'incendie? Je pense qu'en ce cas l'incendie ou autre accident, étant avoué ou justifié, la partie pourrait être admise à la preuve du contrat; car on ne peut pas en ce cas lui imputer de n'avoir pas observé l'Ordonnance.

103. L'écrit que l'Ordonnance prescrit, peut être ou un acte pardevant notaires, ou un acte sous signatures privées. L'Ordonnance, article 2,

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permet expressément de le faire sous signatures, privées.

Ces actes sont exempts de contrôle, quoique faits devant notaires, suivant un arrêt du 12 août 1732, rapporté dans le Commentaire de Valin. (a)

Il s'était glissé un abus à l'égard de ces actes. Les courtiers et agens avaient des modèles imprimés de ces actes, dans lesquels il n'y avait à remplir que les noms et qualités du vaisseau, des marchandises, la prime, et le nom des parties contractantes, et dans lesquels ils inséraient toutes les clauses qu'ils imaginaient pour favoriser leurs parties. Les assureurs à qui on présentait ces modèles à signer, ne s'informant que de la somme qu'on faisait assurer, et du prix de la prime, les signaient sans faire attention aux clauses qui y étaient insérées, et dont ils n'entendaient pas le sens: ils se trouvaient par ce moyen soumis à des clauses désavantageuses qu'ils n'avaient pas entendues. Pour remédier à cet abus, l'Amirauté du Palais a fait un réglement très-sage qui ordonne que toutes les clauses dérogatoires à quelque article de l'Ordonnance, ou extraordinaire dans les polices d'assurance, y seraient écrites à la main, et défend d'avoir égard à ces clauses lorsqu'elles seront imprimées.

Il y a un autre réglement très-sage du même Siége, du 18 juillet 1759, qui fait défenses à tous

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