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contrat, de la perte des effets qu'il a fait assurer, et que celui-ci a refusé de le rendre, il n'est pas douteux que son refus rend avéré le fait de cette connaissance qu'il a eue; Manifesta turpitudinis et confessionis est, nolle jurare. L. 38, ff. de Jurejur., et qu'en conséquence le contrat doit être déclaré nul, et l'assuré condamné à la restitution de ce qu'il a reçu de l'assurcur. Mais doit-il être en ce cas, condamné au paiement de la peine de la double prime? La raison de douter est, que l'ordonnance prononce cette peine en cas de preuve contre l'assuré. Dans cette espèce, l'assureur n'avait pas de preuves. Les raisons de décider que l'assuré doit être en ce cas, condamné au paiement de la peine, sont qu'il est vrai que l'assureur lorsqu'il a déféré le serment, n'avait pas encore de preuve mais il acquiert une preuve complète par le refus que fait l'assuré de rendre le serment qu'il iui a déféré; car le refus de ce serment tient lieu d'un aveu du dol qu'il a commis en contractant; et il n'y a pas de preuve plus parfaite d'un dol que l'aveu de celui qui l'a commis. L'assureur se trouve donc en ce cas dans l'espèce de l'art. 41, (Cod. de c. art. 368) qui dit, en cas de preuve contre l'assuré. D'ailleurs la loi 3, §. 1, ff. de Jurejur. décide qu'on peut déférer le serment sur toutes sortes d'actions, sur les pénales, quibus panam

persequimur, aussi-bien que sur celles qui sont rei

persecutoria.

Emerigon, Ass. ch. 15, sect. 6, pense au contraire que le refus de prêter serment ne peut pas soumettre l'assuré à la peine de la double prime. Ce refus n'est ni une preuve positive, ni un aveu formel de la fraude; on a vu des hommes s'interdire en principe, toute prestation de serment; il y en a dont la conscience timorée peut s'en effaroucher, dans des cas même où ils n'auraient pas cû cette connaissance qui peut les rendre coupables; enfin on ne doit pas, à mon avis, arrêter › par la perspective d'une peine trop sévère, celui qui par un reste de bonne foi, redoute de sceller une fausseté par un faux serment; il me paraît donc que le juge ne doit pas, dans ce cas de refus de serment, appliquer la peine de la double prime.

17. Quand l'assuré, qui savait lors du contrat la perte des effets assurés, n'a pas été poursuivi par l'assureur, le contrat auquel son dol a donné lieu, est bien nul dans le for de la conscience, et il ne peut pas en profiter; mais il ne doit pas, dans le for de la coscience, la peine de la double prime: il ne la doit ni par le droit naturel, qui ne l'oblige à autre chose qu'à la réparation du tort qu'il a causé à l'assureur en contractant avec lui; ni par le droit civil, qui n'inflige cette peine qu'en cas de preuve contre l'assuré. On peut même dire en général, à l'égard des peines que la loi civile prononce au-delà de la réparation du tort qu'a causé

celui qui a commis le délit, qu'elle ne rend celui qui a commis le délit, débiteur que par la sentence du juge qui l'y condamne.

18. Lorsqu'un tuteur de mineurs a fait, en sa qualité de tuteur, assurer des effets de ses mineurs qu'il savait, lors du contrat, être péris; quoique le tuteur n'ait contracté qu'en nom qualifié de tuteur, et que le mineur pour qui il contractait, n'ait pas eu cette connaissance, ce dol du tuteur étant justifié, doit faire déclarer nul le contrat d'assurance, et faire en conséquence condamner le mineur à la restitution de la somme assurée, que son tuteur a reçue pour lui.

Cela est conforme au principe de droit qui décide qu'on peut opposer au mineur le dol qu'a commis son tuteur en contractant pour lui. Dicendum sive quis emerit à tutore rem pupilli, sive contractum sit cum eo in rem pupilli, sive dolo quid tutor fecerit, et ex eo pupillus locupletior factus est, pupillo nocere debere (L. 4, §. 23, ff. de doli et met. except.), et de dolo tutoris exceptionem pupillo esse objiciendam. d. L. §. 24.

Le mineur doit être en ce cas condamné à la restitution de la somme assurée, quand même il ne pourrait la recouvrer par l'insolvabilité de son tuteur qui l'a reçue pour lui; c'est ce qui résulte de la loi ci-dessus citée; car après avoir dit que le dol du tuteur nuit et peut être opposé au

mineur, elle ajoute : 'Nec illud distinguendum, cautum sit ei ( pupillo) an non; solvendo sit (tutor) an non........ undè enim divinat is qui cum tutore contrahit? d. §. 23.

A l'égard de la peine de la double prime, l'assureur ne peut se pourvoir que contre le tuteur, qui doit y être condamné sans pouvoir la répéter contre le mineur; car la peine du dol ne doit être supportée que par celui qui a commis le dol: on ne peut donc pas la prétendre contre le mineur qui ne l'a pas commis,

19. De même qu'un mineur ne peut pas profiter du dol de son tuteur, et que le dol de son tuteur lui peut être opposé, pareillement nous ne pouvons pas profiter du dol de ceux que nous avons chargés de notre procuration soit générale soit spéciale, et leur dol nous peut être opposé : Si is procurator sit cui omnium bonorum administratio concessa, de omni dolo ejus excipi posse, d. L. 4, §. 18. C'est pourquoi lorsqu'un commissionnaire a fait assurer les effets de son commettant, soit en vertu d'un ordre spécial, soit en vertu du pouvoir général qu'il avait de gérer ses affaires, il n'est pas douteux que si, lors du contrat, le commissionnaire avait la connaissance de la perte des effets, le contrat est nul ; et le commettant, quoiqu'il n'eût pas cette connaissance, non sculement ne peut demander la somme assurée, mais doit la rendre, s'il l'a reçue. A l'égard de la peine de la double prime,

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l'assureur doit se pourvoir contre le commissionnaire qui a commis le dol, et ne peut la demander

au commettant.

20. Vice versa, lorsque le commissionnaire qui a fait assurer les effets de son commettant, était de bonne foi et en ignorait la perte, on a, par arrêt du Parlement d'Aix, du mois de mai 1744, (cité par Valin ), jugé le contrat valable, quoique le commettant eût dès le tems du contrat, connaissance de la perte des effets assurés.

La décision de cet arrêt doit être restreinte au cas auquel le commissionnaire aurait fait assurer les effets de son commettant, sans aucun ordre spécial, à son insçu, et en vertu du pouvoir général qu'il avait de gérer ses affaires; car en ce cas, il n'y a aucun dol ni de la part du commissionnaire, ni de la part du commettant, qui puisse donner atteinte au contrat.

Mais si le propriétaire des effets assurés avait donné ordre de les faire assurer, ayant connaissance de leur perte, le contrat sera nul, quoique son commissionnaire, qui les a fait assurer pour lui, en eût ignoré la perte; car le dol de ce propriétaire, qui est censé avoir contracté lui-même par le ministère de son commissionnaire, rend le contrat nul, et le rend sujet à la peine de l'article 41 (C. de c. 368), tout ainsi que s'il eût contracté par luimême: Nam is qui mandat ipse facere videtur.

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