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193. Outre l'obligation que l'assuré contracte de payer la prime, et celle de payer le demi pour cent, en cas d'inexécution du contrat par son fait (Voyez notes sur n.os 181 et 182), on doit encore compter parmi ses obligations qui naissent de la nature du contrat, celle qu'il contracte par le délaissement qu'il est tenu de faire de ce qui lui reste des effets assurés, pour pouvoir demander la somme assurée dans les cas auxquels il y a lieu; sur quoi voyez ce qui en a été dit dans la section précédente, art. 1, §. 3.

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De l'obligation que forme la bonne foi entre les Parties dans le Contrat d'Assurance.

194. La bonne foi qui doit régner dans le contrat d'assurance, de même que dans tous les autres, oblige chacun des contractans de ne rien dissimuler à l'autre, de ce qu'il sait sur les choses qui font la matière du contrat: car cette dissimulation est un dol, comme nous l'avons établi en notre Traité du contrat de Vente, n.o 233, et

suivans.

Les risques qui sont à courir sur les effets assurés, étant une des principales choses qui font la marière du contrat d'assurance, chacun des con

tractans ne doit rien dissimuler à l'autre, de tout ce qu'il sait sur ce qui peut augmenter ou diminuer ces risques. Par exemple, en tems de guerre, les assureurs qui ont connaissance du prochain retour de la paix, ne doivent pas le cacher à celui qui fait assurer, pour tirer de lui une prime plus considérable que celle qu'il voudrait donner, s'il avait cette connaissance. (Voyez sur ce n.o et les suivans la note sur n.° 199.)

195. Cette espèce de dissimulation n'oblige guère que dans le for de la conscience; et dans ce for, elle oblige les assureurs qui ont dissimulé la connaissance qu'ils avaient, à restituer ce qu'ils ont reçu de plus que ce qu'eût dû être le prix de l'assurance, si toutes les parties eussent eu cette connaissance.

Cette obligation a lieu même en cas de perte du vaisseau; et ils ne peuvent pas dire, pour s'en dispenser, qu'ils sont déjà assez malheureux de payer la somme assurée: l'iniquité du prix de l'assurance est quelque chose d'indépendant de l'événement. Quoique le vaisseau soit péri, il n'en est pas moins vrai qu'il a été assuré à un prix excessif, et par conséquent l'obligation de restituer ce qu'il y a d'excessif, ne subsiste pas moins.

196. L'assuré qui a dissimulé des risques considérables auxquels il savait que le navire devait être exposé, qui auraient augmenté considérable

ment le prix de la prime, s'ils eussent été connus des assureurs, peut-il dans le for de la conscience, en cas de perte entière, exiger des assureurs la somme assurée, en leur faisant seulement déduction de la somme à laquelle eût dû monter la prime, s'ils n'eussent pas caché aux assureurs la connaissance qu'ils avaient de ces risques? Je crois que l'assuré ne peut, dans ce cas, exiger des assureurs la somme assurée ; car les assureurs n'ont pu équitablement être par le contrat chargés des risques que pour une prime équivalente au juste prix de ces risques, que l'assuré leur aurait payée lors du contrat ou promis de leur payer. L'assuré leur ayant dissimulé malicieusement le juste prix des risques dont il se proposait de les charger, en leur dissimulant la connaissance qu'il avait de ce qui en augmentait considérablement le prix ; ne leur ayant par conséquent ni payé ni promis de payer une prime qui fût le prix des risques dont il les chargeait, il n'a pu équitablement les en charger, ni conséquemment exiger d'eux la somme assurée. Il n'est plus tems, après que le tems des risques est passé et que la perte est arrivée, de leur offrir le prix du risque.

Tout ce que l'assuré peut en ce cas exiger des assureurs, c'est qu'ils lui rendent la prime qu'il leur a payée; car étant déchargés des risques, il ne leur est pas dû de prime.

197. Pourvu que les parties n'usent l'une envers l'autre d'aucune dissimulation ni d'aucun artifice, elles peuvent licitement se débattre sur le prix de l'assurance et comme l'estimation des risques est quelque chose d'incertain, et très-difficile à fixer, et qu'en conséquence le juste prix des risques doit avoir magnam latitudinem; la prime, qui est l'estimation des risques, ne sera pas censée, quelque forte ou quelque basse qu'elle soit, sortir des bornes du juste prix, même dans le for de la conscience.

A plus forte raison, dans le for extérieur, il ne doit pas y avoir lieu à la restitution pour cause de simple lésion dans le prix de l'assurance, si on n'allègue aucun dol.

Néanmoins si des assurcurs avaient exigé d'un particulier, pour le prix de l'assurance de ses effets, une prime beaucoup plus forte que celle qu'ils exigeaient dans le même tems des autres personnes avec qui ils faisaient de pareils contrats, en profitant de l'ignorance en laquelle était ce particulier, du cours de la place sur le prix des assurances il n'est pas douteux qu'ils commettraient envers lui une injustice qui les obligerait dans le for de la conscience à lui restituer l'excès de la prime: car ayant estimé eux-mêmes quel était le juste prix, par tous les contrats qu'ils ont faits avec les autres personnes, ils ne peuvent

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se dissimuler que celle qu'ils ont exigée de ce particulier, excède les bornes du juste prix.

198. La bonne foi ne permettant pas aux parties de se rien cacher sur les choses qui font la matière du contrat, il s'en suit que l'assuré est obligé de déclarer aux assureurs la qualité des marchandises qu'il fait assurer, qui les rend sujettes à plus de risques, telles que sont les marchandises sujettes à coulage, comme nous l'avons vu suprà, n.o 104. ( Voyez note sur ce n.o 104.)

Quoique l'Ordonnance dispense l'assuré de cette déclaration à l'égard des marchandises qui doivent être chargées en retour, par la raison qu'ordinairement il ne sait pas quelles sont les marchandises qu'on lui enverra en retour, néanmoins lorsqu'il le sait, il est obligé, dans le for de la conscience, de le déclarer.

199. L'obligation que la bonne foi impose aux parties de ne rien dissimuler de ce qu'elles savent sur les choses qui sont de la substance du contrat, ne concerne ordinairement que le for de la cons cience. Il en est autrement de l'obligation qu'elle impose à chacune des parties, de ne pas induire l'autre en erreur, par de fausses déclarations sur les choses qui sont de la substance du contrat : celle-ci concerné le for extérieur. Ces fausses déclarations peuvent donner lieu, dans le for extérieur, à faire prononcer la nullité du contrat;

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