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résoudre par un règlement général; ils se sont particulièrement fondés sur l'exemple de l'ancien Gouvernement qui , par des lettres patentes du 18 octobre 1783, avait interposé son autorisation pour faire cesser les contestations que des circonstances semblables avaient fait naître entre les assureurs et les assurés.

Mais leur demande a été rejettée par un avis du Conseild'état, du 4 germinal an 13, que l'Empereur a revêtu de son approbation le 8 du même mois, et dont voici les

termes.

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» Le Conseil-d'état, qui, d'après le renvoi fait par Sa » Majesté l'Empereur, a entendu le rapport de la section » de l'intérieur sur celui du Ministre de ce département, » relatif à un projet de décret impérial tendant à fixer sur » toutes les places de commerce, et suivant les parages et les » époques, le montant de la prime à payer par les assurés » aux assureurs à raison des risques de la guerre ;

- » Considérant que les engagemens contractés entre les » assureurs et les assurés, sont des engagemens privés » sur lesquels, en cas de contestation, la décision appar» tient aux Tribunaux ; que déjà la Cour de cassation, sur » la demande des parties, a renvoyé des contestations con>> cernant les négocians de la place de Nantes, devant le >> Tribunal de commerce de l'Orient; que les places de » Bordeaux et de Nantes sont les seules dont les primes » d'assurance ance pour cause de guerre survenue, aient donné » lieu à des difficultés ; et que dans les autres villes où >> se font le commerce maritime et les assurances, tout a » été réglé sans qu'on ait eu recours au Gouvernement;

» Que le règlement proposé par le Ministre de l'intérieur » est, sous l'aspect d'une décision générale, un véritable » jugement sur des affaires contentieuses et qu'il est con

» traire aux principes, de faire décider par des décrets gé>>néraux sur des contrats privés qui peuvent offrir une » diversité de cas particuliers et de circonstances non prévues.

» Que l'exemple de ce qui s'est passé lors de l'émission >> des lettres patentes de 1783, pour la place de Nantes, >> ne peut être une raison de décider de la même manière;

est d'avis qu'il n'y a lieu à adopter le projet de décret » présenté par le Ministre de l'intérieur, mais à renvoyer » les parties devant les Tribunaux ordinaires, en invitant » seulement le Grand juge, Ministre de la justice, à veiller » à ce que les jugemens, soit de première instance, soit » d'appel, soient rendus avec célérité, ainsi que cela doit » être en matière de commerce. »

Ce vœu de célérité n'a pas eu son accomplissement.

Ensuite du refus fait par le Gouvernement d'interposer son autorité, dans des contestations particulières, les assureurs et les assurés convinrent de nommer des commissaires qui fissent entre eux le règlement dont le Conseil d'état n'avait pas cru devoir s'occuper; ces commissaires furent au nombre de quinze, cinq assureurs, cinq assurés et cinq non intéressés ni comme assureurs ni comme assurés ; mais après bien des pour-parlers et divers projets agités, la commission se sépara sans rien conclure; les assureurs se sont alors pourvus devant le Tribunal de commerce de Nantes; mais la plupart des membres de ce Tribunal se trouvant intéressés à la solution des questions qui se présentaient à juger, il a fallu se pourvoir ailleurs. Nous trouvons dans le Journal de jurisprudence commerciale, an 1809, p. 408 à 429, deux jugemens rendus par le Tribunal de commerce de Saint-Malo, sur deux affaires qui lui ont été renvoyées. Il paraît que les assurés attaquèrent d'abord de nullité, la clause d'augmentation de prime, stipulée dans la police.

Cette clause portait en imprimé qu'en cas de guerre avec...... la prime serait augmentée au cours de la place. Le blanc destiné à indiquer la Puissance avec laquelle la

guerre devait exister pour donner lieu à l'augmentation, n'étant point rempli, les assurés alléguaient que la clause n'ayant pas reçu sa perfection, était sans objet ; que l'intention des parties n'avait pas été d'en faire usage.

Sur cette question, le Tribunal de commerce de SaintMalo considéra » que malgré l'état d'imperfection, dans » lequel la clause d'augmentation de prime est restée, par » le défaut d'indication des Puissances qui devaient se trou>> ver en guerre pendant la durée des risques, elle n'en » existe pas moins, puisqu'elle n'a point été biffée dans la » police.

» Considérant qu'il y a nécessité d'interpréter la clause, » soit par l'usage des lieux où le contrat a été passé, soit » en recherchant quelle a été l'intention des parties con» tractantes et qu'il est de principe, pour l'interprétation » des clauses, que lorsqu'elles sont susceptibles de deux » sens on doit plutôt les entendre dans celui avec lequel » elles peuvent avoir quelque effet, que dans le sens avec » lequel elles n'en pourraient produire aucun.

» Considérant que l'usage constant de la place de Nan» tes, est de stipuler une augmentation de prime, dans le » cas où là guerre surviendrait pendant le voyage assuré, » entre la nation à laquelle le navire assuré appartient, et » une autre Puissance maritime.

» Que dans l'espèce, où il s'agit d'un navire français, » l'intention des parties, dans la clause d'augmentation que » renferme la police, n'a pu être que de convenir d'une >> augmentation de prime, dans le cas où la guerre sur

» viendrait pendant le voyage assuré, entre la France et 30 une autre Puissance maritime.

si on

» Qu'en interprétant ainsi la clause, elle n'est pas sans » effet, tandis qu'elle ne pourrait en avoir aucun » lui donnait une interprétation différente. »

Par ces motifs, le Tribunal de commerce de Saint-Malo a rejetté cette exception des assurés.

Des difficultés plus importantes ont été agitées entre les assurés et les assureurs.

Ceux-ci ont prétendu, comme les assureurs de Marseille (Voyez pag. 389 er suiv.), que la prime devait leur être adjugée la même pour tous les navires qui avaient fait le même voyage, et qui s'étaient trouvés en mer au moment de la survenance de la guerre.

Que cette prime devait être celle donnée pour de pareils voyages depuis que la guerre s'était manifestée, sans avoir égard à l'époque du départ ni de l'arrivée du navire, sans considérer si ce navire était plus ou moins près du lieu de sa destination au moment de la survenance de la guerre.

Il s'agissait de deux navires assurés de sortie de SaintDomingue à Nantes. Le Tribunal établit en fait, que le cours des assurances sur la place de Nantes, depuis la survenance de la guerre, est, pour un pareil voyage, de 75 pour cent, réductible à 50 en cas d'heureuse arrivée;

En droit, que le risque étant indivisible, il n'y a pas lieu à graduer les primes suivant les risques plus ou moins grands, que les navires assurés peuvent avoir couru depuis la survenance de la guerre.

Il reconnaît néanmoins que les règlemens faits dans les précédentes guerres ont gradué les primes; » les rédacteurs » des règlemens de 1766, 1779 et 1794, nous apprennent dit le Tribunal, qu'ils avaient sous les le yeux

» tous

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tableau des assurances faites depuis la guerre. Dans ces » différens tems, lorsqu'ils fixèrent les augmentations de » prime, ils considérèrent toujours les risques comme in» divisibles, et l'on doit croire que, s'ils graduèrent les » primes, ils le firent parce que les polices souscrites à » diverses époques, depuis les hostilités, l'avaient été à » des primes qui s'élevèrent progressivement en raison » de ce que les dangers de la guerre augmentaient,

» Dans la guerre actuelle, les dangers ont été imminens » dès les premiers momens ainsi il n'y a pas lieu à gra» duer les augmentations de prime.

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Par ces motifs, le Tribunal de Saint-Malo a rendu les 26 octobre et 7 décembre 1808, deux jugemens dans lesquels il déclare que:

» 1. L'augmentation de prime, au cours de la place, » stipulée en cas de guerre, est acquise en entier aux

> assureurs;

» 2.

Il y a eu sur la place de Nantes, un cours qui » détermine l'augmentation de prime due aux assureurs » pour la cause de guerre ;

» 3.o Le cours des assurances, sur la place de Nantes, » a été de 75 pour cent, à rendre 25 en cas d'heureuse » arrivée, pour les voyages de Saint-Domingue en Europe; >>4.o Le cours de la prime ordinaire de paix pour les » mêmes voyages, est de 3 pour cent;

». L'augmentation de prime pour cause de guerre » due aux assureurs, au cours de la place, est de 47 pour » cent, sur les navires arrivés à bon port venant de Saint>> Domingue. »

En conséquence le Tribunal condamne les assurés à payer les 47 pour cent d'augmentation.

Le Tribunal de Saint-Malo paraît, par ces jugemens,

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