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en est-il moins un simple commissionnaire? Ne tiendra-t-il pas compte, au propriétaire, de la prime qu'il aura payée, du montant des pertes ou avaries, qu'il aurà reçu ? Et dèslors n'est-ce pas le propriétaire de l'objet assuré, qui est le véritable intéressé à l'assurance, le seul et véritable assuré? Et, s'il est tel, n'est-ce pas à lui, que la loi a imposé tout premièrement l'obligation de ne rien dissimuler, de ne rien. taire aux assureurs ? S'il ne peut pas remplir directement cette obligation, ne doit-il pas le faire par le commissionnaire qui est son organe envers les assureurs ? Et peut-il n'être pas responsable d'un silence qui est son propre fait, puisque c'est lui qui a retenu la vérité.

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L'opinion qui valide le contrat, et excuse le silence du commettant, dans le cas où il a su la perte, est donc aussi immorale que contraire à la loi.

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Telle n'a point été l'opinion des auteurs qui ont traité du Contrat d'assurance. » Si le commnissionnaire dit » Valin, Ordonnance de 1681, titre des assur., art. 40, » ignorait l'événement, l'assurance est bonne, quoique le

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commettant le sût ; mais, ajoute t-il, cela ne peut s'en» tendre que du cas où le commettant ignorait tout de même » l'événement, lors de la date de son ordre

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pour assurer

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autrement la fraude serait manifeste; DE MÊME S'IL A » ÉTÉ INFORMÉ A TÉMS POUR RÉVOQUER L'ORDRÈ, ET » QU'IL NE L'AIT PAS FAIT.

» Quando, dit Casaregis, disc. 9,

S. 24, de tempore

» mandati scientia aderat in mandante VEL QUANDO >> DOMINUS, LICET IGNORANS DE TEMPORE MANDATI, » PASSUS INDÈ FUERIT SEQUI CONTRACTUM QUEM ADHUC PROHIBERE POTUISSET, QUIA ISTE CASUS SIMILIS EST ILLI QUANDO SCIENTIA ADERAT IN » DOMINO DE TEMPORE MANDATI. » 1

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Tenons donc pour certain que l'assurance est nulle, si celui qui l'a commise, et qui a su la perte assez à tems pour en prévenir le commissionnaire, avant le contrat l'a pas fait.

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La justice et la loi suppléent, dans ce cas, au silence du commettant, et annullent le contrat qu'il n'aurait pas dû laisser former.

Je pense même que, le silence gardé étant une fraude manifeste, la peine de la double prime doit, si elle est demandée, être prononcée contre le commettant, à moins que des circonstances particulières et une prompte rénonciation à un contrat qui porte avec lui un dol réel, ne puissent lui servir d'excuse, et faire présumer que le silence gardé est moins un acte de mauvaise intention, que l'effet de quelque négligence ou de quelque oubli, qui serait assez réparé par l'annullation du contrat.

Avant de terminer cet article de l'assurance après la connaissance de l'événement, je reviendrai sur ce que j'ai dit n.o 25 not., de l'assurance sur un navire arrivé dans le port du lieu où il est assuré.

On m'a reproché de m'être mal expliqué. Le cas étant extraordinaire, et, en quelque sorte, hors de la vraisemblance, je n'ai pas dû m'y trop arrêter, et je n'ajouterai ici que peu de mots, à ce sujet.

Il est évident que l'assuré ignore l'arrivée, lorsqu'il fait faire une assurance sur un navire qui est déjà dans le port.

L'assurance serait valide, si l'arrivée était également ignorée de l'assureur, et si, au moment de la signature, cette arrivée n'avait pas un caractère de notoriété publique.

L'assurance serait nulle, s'il y avait notoriété publique lors du contrat, bien qu'il ne fût pas prouvé que le fait était

connu de l'assureur ; c'est sous ce rapport, qu'il faut considérer le cas posé par Emerigon, ass. chap. 15, Mais ce cas demande attention; Voy. Emerigon ib., et ce que j'ai dit n. 25 not. sur la connaissance présumée par

la notoriété publique

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sect. 3.

Enfin, s'il est prouvé que l'arrivée était connue de l'assureur, il sera dans le cas de supporter la peine de la double prime (Voy. n.os 47, 48, not. ).

L'assureur ne pourrait pas se défendre en disant que le navire n'était pas encore amarré à quai, que les marchandises n'étaient pas déchargées, et qu'ainsi, aux termes des articles 328, 341 du Code de comm. (Voy. n.o 110, not.), le risque n'était pas fini au moment de l'assurance. L'excuse serait bonne, si la police portait seulement sur les risques à courir dans le port; mais jamais on n'a fait une pareille assurance; et s'il est question d'une assurance sur le voyage a qui précédé l'entrée, il est clair qu'elle ne doit son existence qu'à la dissimulation de l'assureur, sur le fait de l'arrivée connue de lui; il faut donc lui appliquer la peine relative à cette dissimulation.

Ceci m'engage à examiner une autre question. L'assurance faite, par exemple, d'Alexandrie à Marseille, seraitelle nulle, si, au moment de la signature, l'assureur était instruit de l'entrée du navire, dans un port intermédiaire, ce qui lui apprendrait la consommation d'une partie du risque ? Je pense que le silence de l'assureur le placerait dans le cas de l'article 348 du Code ( Voy. n.o 199 not. ), ou même de l'article 368 ( Voy. n°s 47, 48, not. ). Une telle assurance devrait, dans le cas d'heureuse arrivée, être déclarée nulle à l'égard de l'assureur qui ne pourrait prétendre le paiement de la prime; et, dans le cas de perte, être réputée obligatoire contre lui, à l'effet de le soumettre au paiement

de la somme assurée, comme peine ou indemnité de la fraude. Voy. n.o 199 not.

III. Voyage assuré, voyage du navire, route, déroutement, changement de route, voyage changé, rompu, raccourci. Ces objets donnent lieu à de fréquentes difficultés. Il en a été parlé dans le texte et dans les notes n. OS 73,74, et dans le supplément pag. 373 à 381. J'ai cru devoir y revenir, soit pour les mieux expliquer, soit pour répondre à quelques questions qui y ont rapport.

SI, 71, 72,

Le voyage du navire est le trajet qu'il fait ou doit faire de tel endroit à tel autre.

La route est le chemin, la trace qu'il suit pour faire ce trajet.

Le voyage est un; mais il peut être effectué par diverses

routes.

On peut distinguer le voyage légal et le voyage réel du navire. Le voyage légal est celui déterminé par les expéditions; le voyage réel est celui que le navire accomplit effectivement.

Le voyage assuré est celui que le contrat indique comme devant être fait par le navire, et étant l'objet de l'assurance.

Le voyage tant légal que réel du navire, doit concorder avec le voyage assuré.

On doit, pour accomplir ce voyage, suivre la route indiquée par la police, sinon la route usitée ou une des routes usitées, s'il y en a plusieurs ( Voy. n.° 74 et not. pag. 373 et suiv. ).

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et

Si les expéditions du navire sont pour un tel voyage, que le contrat d'assurance en indique un autre, il y a fausse désignation. Si la désignation du voyage du navire est, lors du contrat, conforme au voyage assuré, et qu'ensuite,

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il y

forcément ou volontairement avant le risque commencé l'intéressé prène des expéditions pour un autre voyage, a rupture de voyage. Dans l'un et l'autre de ces deux cas le voyage assuré ne concorde pas avec le voyage légal du navire, le contrat est sans effer et il y a lieu au paiement du demi pour cent aux assureurs, pour droit de ristourne (Voyez n.oss, 6, not. ).

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Il y a également rupture de voyage, si l'intéressé qui a des expéditions conformes au voyage assuré, en prend d'autres après le risque commencé ; mais, dans ce cas, la prime entière est acquise à l'assureur, et, si la rupture n'est pas forcée, il est déchargé de tous risques ultérieurs.

Dans un sens plus étendu, le voyage est rompu, lorsqu'il est changé ou raccourci, lorsqu'il y a déroutement ou changement de route.

Il y a changement de voyage, lorsque le navire parti ou, expédié pour une destination, se dirige vers une autre, avant d'avoir atteint le bu: déterminé.

Il y a raccourcissement, lorsque le navire destiné pour un lieu, termine le voyage en un plus près, mais dans les limites du voyage assuré.

Il y a changement de route ou déroutement, lorsque le navire s'écarte de la route qu'il doit suivre pour accomplir le voyage.

Les mots déroutement ou changement de route, sont à peu près semblables; ils diffèrent en ce que le mot déroutement marque davantage l'abandon volontaire et absolu de la route qu'on a dû suivre, et s'entend communément dans un sens défavorable à l'assuré, et le mot changement de route s'entend dans le sens d'un changement forcé, comme dans celui d'une déviation reprochable à l'assuré.

Le changement volontaire de voyage, termine le risque,

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