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aussi ce change est-il habituellement beaucoup au-dessus de l'intérêt ordinaire du prêt, et du taux des primes, réunis.

en

» Le contrat de grosse, dit Valin sur l'art. 18, loin » d'être aussi utile au commerce que l'assurance >> est au contraire la ruine. Aussi quand nous voyons ici » un arinateur prendre fréquemment de l'argent à la grosse, >> nous en concluons qu'il est près de manquer, parce qu'en » effet les changes maritimes doivent l'écraser. »

Ces considérations réclamaient contre le privilége du prêteur.

De plus, avec ce privilége, les droits des assureurs se trouvaient diminués par des actes qui leur étaient inconnus, étrangers, et même postérieurs au leur. Cependant le motif qui assimilant les assureurs au propriétaire, les subordonnait au prêteur, était-il bien fondé? Le droit des assureurs à l'objet sauvé, ne remponte t-il pas au contrat d'assurance, et ce titre, même en rigueur de principes, est-il moins. respectable., leur donne-t-il moins de droit à la chose que celui du prêteur? Il était donc juste, autant que convenable, de faire concourir sur les objets sauvés, l'assureur avec le donneur à la grosse ; ce concours était réclamé même entre le donneur et le preneur, tel qu'il a lieu entre l'assureur et l'assuré pour son découvert. On réclamait encore envers le donneur, l'obligation à concourir aux avaries simples, comme aux avaries grosses, c'est-à-dire, à toute sorte de pertes et dommages que pourrait éprouver l'objet en risque, affecté au prêt. V. Valin sur les art. 16,

18.

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Ce système qui tendait à faire prédominer, dans le prêt à la grosse, le contrat d'assurance, au contrat de prêt, a été, du moins en partie, accueilli par le législateur. On lit dans le Code de commerce :

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Art. 330. » Les prêteurs à la grosse contribuent, à la » décharge des emprunteurs, aux avaries communes.

» Les avaries simples sont aussi à la charge des prêteurs, » s'il n'y a convention contraire. »

Art. 331. » S'il y a contrat à la grosse et assurance sur » le même navire ou sur le même chargement, le produit » des effets sauvés du naufrage, est partagé entre le prêteur » à la grosse, pour son capital seulement, et l'assureur, » pour les sommes assurées, au marc le franc de leur » intérêt respectif, sans préjudice des priviléges établis à » l'art. 191. »

Ainsi le donneur à la grosse contribue à toutes les pertes et à tous les dommages, comme l'assureur.

Il vient seulement en concours avec lui, sur les objets sauvés.

Le concours du propriétaire de l'objet pour la valeur excédante le montant des assurances et celui des emprunts à la grosse, semble une conséquence des deux autres dispositions.

En droit le propriétaire est censé assureur à lui-même pour son découvert, il doit donc venir au partage établi avec les assureurs sans distinction; s'il en est autrement, de quelle manière le donneur se réglera-t-il avec le preneur? c'est ce que l'art. 331 ne dit pas. De plus, si le mode de règlement n'est pas le même avec le preneur qu'avec l'assureur, il y aura l'inconvenient que les droits du prêteur seront dépendans de l'existence ou non existence de contrats d'assurance étrangers au sien; enfin le prêteur contribue dans les cas d'avaries; on ne peut pas supposer qu'il soit exempt de contribution dans les cas de perte entière; c'est cependant ce qui arrivera, s'il prend, exclusivement à l'emprunteur, la totalité de l'objet sauvé,

bien que la valeur de l'objet péri, excède celle de la somme prêtée.

On peut opposer l'article 320 qui donne au prêteur un privilége illimité sur l'objet du prêt; cependant cet article. ne m'arrêterait point, parce qu'on peut dire que le privilége donné à la charge de contribuer aux avaries, n'a son effet que dans les cas d'arrivée à bon port, et qu'en cas de perte, on doit se régler par l'article 331. Mais l'art. 327 me fait plus d'impression, il y est dit: » En cas de »> naufrage, le paiement des sommes empruntées à la » grosse est réduit à la valeur des objets sauvés et affectés >> au contrat, déduction faite des frais de sauvetage. » J'avoue que cette disposition me paraît exclusive de tout concours entre le donneur et le preneur.

De quelque manière que la question soit décidée, les articles 330 et 331 forment un grand changement au système du contrat de prêt à la grosse, par cela seul qu'ils soumettent les prêteurs à contribuer à toute espèce d'avaries, et qu'ils les privent du privilége que l'Ordonnance de 1681 leur donnait à l'égard des assureurs, sur les effets sauvés.

Mon objet n'étant point ici de traiter du contrat à la grosse, je n'approfondirai point, relativement à ce contrat, les questions que présentent les nouvelles dispositions du Code, ni les conséquences du changement qu'elles opèrent. VII. Appel.

J'ai rapporté, n.o 202 not. divers arrêts de la Cour d'appel d'Aix sur cette matière.

D'après ces arrêts;

1.° La faculté d'appeler doit être réglée envers chaque assureur, suivant la somme qu'il a assurée, lorsqu'il se défend par des moyens qui lui sont particuliers; si l'assureur

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oppose une compensation, s'il prétend que sa qualité ( telle que celle de mineur, de femme inariée) ne lui permettait pas de s'obliger, s'il dit que la signature apposée à la police n'est pas la sienne, etc, etc., l'appel du jugement sur ces exceptions, ne se réglera point sur la totalité de l'intérêt des assureurs en cause; il ne sera recevable qu'autant que l'assureur qui les fera valoir, aura dans la police, un intérêt excédant 1000 francs.

2. Si les assureurs qui sont intervenus dans un même contrat, font valoir ou si on fait valoir contre eux, quelque exception qui tende à faire prononcer la nullité du contrat, alors l'objet du litige étant commun et indivisible la faculté d'appeler sera réglée d'après la somme entière en litige.

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La jurisprudence de la Cour d'appel d'Aix ne souffre pas de douté sur ces deux premiers points.

3. J'avais cru pouvoir induire (avec néanmoins quelque retenue) des arrêts cités, que la faculté d'appeler devait être réglée sur la somme entière, non seulement lorsque le contrat est querellé de nullité, mais encore toutes les fois que l'exception proposée est indivisible et commune à tous les assureurs.

Si on demande contre tous les assureurs un règlement d'avarie qui soit .contesté par eux, si l'acte d'abandon est attaqué de nullité, si on prétend l'abandon inadmissible, si on oppose qu'il n'y a pas prise, naufrage ou autres événemens de sinistre majeur, si on allégue que l'événement a eu lieu hors des limites du voyage assuré, etc., etc., toutes ces exceptions sont communes et indivisibles; elles ne peuvent être bonnes et légitimes enyers les uns, illégales et mauvaises envers les autres; elles affectent également pour tous, les engagemens pris dans le contrat.

L'appel du jugement qui statue sur de pareilles contestations, doit donc être réglé d'après la somme entière en litige.

Les 4. et 5. arrêts cités dans la note sur le n.o 202, viennent à l'appui de ce système.

Voici néanmoins deux arrêts postérieurs qui le contra

rient.

L'un est du 8 décembre 1807, entre les sieurs Bernadac Sairas et comp. et leurs assureurs sur le navire Notre-Dame de bon Conseil et Saint Barthelemy.

Les assureurs prétendaient que le navire avait été pris hors des limites du voyage assuré, le Tribunal de commerce fit droit à leurs exceptions.

Les assurés appelèrent.

Les assureurs dont l'intérêt n'excédait pas 1000 francs, opposèrent que l'appel était non recevable à leur égard. Tous le contestèrent comme mal fondé au fond.

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La Cour d'appel d'Aix çonsidéra sur la fin de non recevoir » qu'il n'y a point de solidarité entre les assureurs. » que la police d'assurance contient effectivement, autant de contrats qu'il y a de signatures, que ne s'agissant pas de » la validité du contrat en lui-même et respectivement à » tous les assureurs, mais du mérite de la demande indivi» duelle formée contre chacun d'eux, le jugement dont est » appel, a prononcé en dernier ressort sur celles de ces de» mandes qui n'excèdent pas 1000 francs. >>

La Cour accueille en même tems les moyens fonciers proposés par les assureurs; en conséquence elle rejète l'appel des sieurs Bernadac Sairas et comp.e comme non recevable envers les assureurs dont l'intérêt n'excède pas 1000 francs, et comme mal fondé envers tous.

L'autre arrêt est celui déjà cité ( pag. 421, 422 ) du 10

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