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» Ah! puisse le Ciel détruire ces maux dans leur germe naissant! Puisse le Père des fidèles jeter dans ces cœurs égarés des paroles de vie et de conservation! puisse-t-il trouver bientôt les moyens de régénérer la foi dans cette Allemagne qui l'a si fortement altérée! Oh! oui, nous l'espérons, l'Allemagne sera encore sauvée : non, elle n'est pas irrévocablement destinée à périr! Déjà de sublimes génies s'y élèvent, comme des phares lointains, pour éclairer la barque qui porte dans ce pays précieux le dépôt de la foi catholique. Puisse cette lumière ouvrir enfin les yeux à tant de chrétiens entraînés dans une voie de perdition! Puisse enfin le fatal exemple de quelques malheureux prêtres montrer à tous les esprits combien de mal peut faire à la foi une philosophie fondée sur des bases mouvantes, et cette protection ou plutôt cette servitude légale, que quelques princes veulent mettre à la place de l'autorité seule légale, seule paternelle, seule infaillible, qui a passé intacte de Jésus-Christ et Pierre, son disciple, à ce Grégoire XVI qui édifie aujourd'hui l'univers par l'exemple de toutes les vertus ! »>

TRADUCTION DE LA BIBLE PAR M. CAHEN.

M. Cahen, auteur d'une nouvelle traduction française de la Bible, imprimée avec le texte en regard, vient de publier une courte réponse aux critiques qu'on a faites de son travail. Nous trouvons que, sur plusieurs points, il réfute victorieusement ses adversaires, et en particulier MM. les rabbins. On ne peut, en général, que louer la scrupuleuse fidélité de sa version, qui, sous ce rapport, offre un secours précieux pour l'intelligence littérale du texte; et ce mérite nous paraît bien préférable à une froide et sèche élégance, qui est ce qu'il y a au monde de plus opposé au génie de nos livres saints. Au lieu donc d'attaquer avec passion M. Cahen, comme l'a fait un journal dont'il n'a que trop droit de se plaindre, nous croyons qu'on lui doit et des éloges et des encouragemens. Ce qu'on peut, à notre avis, reprendre justement dans son ouvrage, ce sont plusieurs des notes qui accompagnent sa traduction, et le système même d'après lequel elles sont rédigées, système d'un rationalisme étroit, hostile dans son ensemble à la révélation, et qui tend à ramener les idées antiques aux mesquines proportions de nos idées modernes. L'auteur étant israélite, nous ne pouvons cer

tainement pas exiger de lui qu'il parle en chrétien

aussi le reproche que nous lui faisons, indépendant de la différence qui existe entre ses croyances et les nôtres, porte-t-il principalement sur ce que les principes qui président à son interprétation du texte sacré nous paraissent former une mauvaise méthode d'exégèse. Au reste, il annonce le dessein de se tenir dans les livraisons suivantes plus en garde contre cette critique, selon nous la seule raisonnable qu'on puisse lui adresser. Le second volume, comprenant l'Exode, paraîtra dans le courant de décembre prochain. Nous le recommandons surtout aux jeunes hébraïsans, auxquels il sera, nous le répétons, d'une utilité incontestable.

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SUR CETTE MAXIME : HORS DE L'ÉGLISE POINT DE SALUT.

On lit dans l'Album de la Creuse, du 5 novembre :

« L'Avenir annonce qu'il a reçu une pétition en faveur de » la liberté d'enseignement, signée par soixante-sept habitans » du département de la Creuse. Nous ignorions l'existence de » cette pétition; nous ne connaissons ni l'état, ni même les » noms des pétitionnaires. Du reste, l'Avenir peut aussi nous » compter au nombre des partisans d'une sage liberté, dans >> l'exercice de tous les droits qu'une société bien réglée doit >> conserver et maintenir aux individus. Mais nous n'avons pas » oublié quelle liberté on doit attendre de certaine faction

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catholique, apostolique et romaine, qui aime à régler toutes >> les choses humaines par ses maximes religieuses, dont les >> deux principes essentiels sont, 1° que hors son Eglise il n'est » pas de salut; 2° que l'autorité séculière doit forcer d'y en>> trer ceux qui en sont dehors.

» L'Avenir ne peut méconnaître ces deux points de la foi » et de la jurisprudence catholique : il ne peut les décliner » sans inconséquence; c'est donc pour lui, et non pour nous, qu'il demande une liberté absolue. »

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Nous sommes fâchés que l'Album de la Creuse ait si peu de connaissance de la religion catholique. Nous allons lui mettre sous les yeux un passage de l'Essai sur l'indifférence, qui engagera peut-être ses rédacteurs à ne plus parler de choses aussi graves sans les avoir étudiées.

« Rien n'est plus facile que de résoudre une difficulté que propose Rousseau, et qu'on a depuis souvent reproduite. Après avoir supposé qu'il existe des millions d'hommes qui jamais n'entendirent parler de Moïse, ni de JésusChrist, il ajoute :

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Quand il serait vrai que l'Evangile est annoncé par » toute la terre, qu'y gagnerait-on? La veille du jour que » le premier missionnaire est arrivé dans un pays, il est » sûrement mort quelqu'un qui n'a pu l'entendre. Or dites>> moi ce que nous ferons de ce quelqu'un là? N'y eût-il » dans l'univers qu'un seul homme à qui l'on n'aurait ja» mais prêché Jésus-Christ, l'objection serait aussi forte » pour ce seul homme que pour le quart du genre hu» main (1). »

<< Nul n'est obligé de croire ce qu'il ne peut connaître, et nul ne peut connaître, à moins d'une révélation spéciale, Jésus-Christ et sa doctrine, s'ils ne lui sont point annoncés (2). Avant donc l'arrivée du premier missionnaire dans un pays, les habitans de ce pays sont précisément dans l'état où se trouvait les peuples avant la venue de Jésus-Christ : ils n'ont point d'autres devoirs que ceux qui furent toujours promulgués par la tradition générale, et ils peuvent se sauver comme tous les hommes pouvaient se sauver antérieurement à la rédemption, par une fidèle obéissance à la loi primitivement révélée et universellement connue (3). La forte objection de Rousseau n'est donc pas même une objection. Voyons la suite :

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(1) Emile, livre 4, t. 3, p. 33, édit. de 1793.

(2) Quomodo credent ei, quem non audierunt? Quomodo autem audient sine prædicante?... Ergo fides ex auditu: auditus autem per verbum Christi. (Epist. ad Rom., 10, 14, 17.)

(3) Voyez le chapitre 6, t. 3.

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» dre aux peuple éloignés, que leur ont-ils dit qu'on pût >> raisonnablement admettre sur leur parole, et qui ne » demandât pas la plus exacte vérification? Vous m'an» noncez un Dieu né et mort, il y a deux mille ans, à l'au» tre extrémité du monde, dans je ne sais quelle petite ville, et vous me dites que tous ceux qui n'auront point » cru à ce mystère seront damnés. Voilà des choses bien étranges pour les croire si vite sur la seule autorité d'un » homme que je ne connais point! Pourquoi votre Dieu a-t-il » fait arriver si loin de moi les événemens dont il vou» lait m'obliger d'être instruit? Est-ce un crime d'ignorer » ce qui se passe aux antipodes? Puis-je deviner qu'il y a » eu dans un autre hémisphère un peuple hébreu et une » ville de Jérusalem? Autant vaudrait m'obliger de savoir » ce qui se fait dans la lune. Vous venez, dites-vous, me l'apprendre; mais pourquoi n'êtes-vous pas venu l'ap» prendre à mon père, ou pourquoi damnez-vous ce bon » vieillard pour n'en avoir jamais rien su? Doit-il être >> éternellement puni de votre paresse, lui qui était si bon, » si bienfaisant, et qui ne cherchait que la vérité? Soyez » de bonne foi, puis mettez-vous à ma place voyez si je dois, sur votre seul témoignage, croilé toute les cho>> ses incroyables que vous me dites, et concilier tant d'injustices avec le Dieu que vous m'annoncez. »

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Tout ce discours repose sur de fausses suppositions. Afin de paraître combattre le christianisme avec avantage, Rousseau commence philosophiquement par le calomnier. Qui a dit à ce sophiste qu'un homme sera damné pour n'avoir pas cru à des mystères qu'il ne pouvait connaître? Sur quel fondement impute-t-il aux chrétiens une doctrine si absurde et si horrible? Jamais l'Eglise enseigna-t-elle qu'un homme bon, bienfaisant, qui ne cherche que la vérité, dût être éternellement puni d'avoir ignoré une vérité dont il lui était impossible d'être instruit? Non, cet homme ne sera point damné s'il est réellement tel que vous le dites; il se sauvera, nous n'en doutons pas, et il se sauvera dans le christianisme; car quiconque n'a point entendu la prédication évangélique, et croit tous les dogmes que proclame la tradition universelle, tout ce que croyaient les anciens justes, celui-là croit implicitement tout ce que

SOUSCRIPTION POUR L'ABBAYE DE MEILLERAY.

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nous croyons; ce n'est pas la foi qui lui manque, mais un enseignement plus développé; il est, comme nous l'avons déjà dit ailleurs, dans la position de l'enfant qui meurt avant qu'on ait achevé de l'instruire, il est chrétien (1). »

Le Journal du commerce annonçait avant-hier que M. le comte de Montalembert avait publié dans le Midi, à propos des Trappistes de Meilleray, une lettre toute jésuitique. Nous sommes bien aises que nos lecteurs puissent en juger. Voici la pièce en question.

SOUSCRIPTION POUR L'ABBAYE DE MEILLERAY, OUVERTE

A MARSEILLE.

« Un grand attentat vient d'être commis sur la terre de France, sur cette terre que nous voulons pour patrie, mais dont les violences du gouvernement semblent vouloir chasser tous ceux qui croient encore au Dieu de leurs pères. Cent citoyens français, rassemblés depuis quinze ans pour prier et travailler sous la triple protection de Dieu, de la liberté et des lois, ont été assiégés dans leur solitude par les satellites du pouvoir, arrachés de leurs foyers, expulsés de leurs propriétés, dépouillés de leur industrie et de tout moyen d'existence, jetés sur la grande route comme des vagabonds, puis séparés violemment les uns des autres, et conduits en malfaiteurs au lieu qu'il a plu à la police de leur désigner pour qu'ils aillent y cacher sa honte et leur infortune. » Ces choses ont été accomplies à Meilleray, près de Nantes, sous le régime de la Charte de 1830.

» Il est vrai que ces cent Français sont catholiques, sont prêtres et même moines; il est vrai que depuis quinze ans ils ont pratiqué les vertus les plus austères du christianisme; il est encore vrai qu'ils avaient une église et un cloître dans leur maison; qu'ils plantaient des croix dans leurs champs et dans leur cimetière, et que dans les actes du pouvoir envers eux, à côté du vol et de la violence, il y a encore le sacrilége.

» Il s'agit de savoir maintenant si des Français, par cela même qu'ils

(1) Essai sur l'indifférence, tom. 4, page 459-463.

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