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cles 1, 2 et 5 de la loi du 9 septembre 1835, dont le système consiste dans la qualification d'attentats à la sûreté de l'État attribuée à des faits qui, antérieurement, étaient punissables, mais non à ce titre.

D'après ces notions, on conçoit que, toutes les fois qu'un fait est déféré à la Chambre des Pairs comme rentrant dans l'article 28 de la Charte, il s'élève ou peut s'élever devant la Chambre une question de compétence qui revient à demander si le fait qui lui est déféré constitue un crime de haute trahison ou un attentat à la sûreté de l'État. La Chambre des Pairs prononce à cet égard, comme juge souverain; son arrêt sur ce point est inattaquable comme l'arrêt définitif.

QUATRE-VINGT-DOUZIÈME LEÇON .

SOMMAIRE

La royauté, dans notre système constitutionnel, est le centre autour duquel tous les pouvoirs viennent se coordonner pour former un seul tout; elle n'est complétement étrangère à aucun des grands pouvoirs de l'État. Attributions législatives de la royauté: 1° attributions indirectes: Nomination des Pairs de France, convocation des colléges électoraux, convoca. tion et prorogation des Chambres, dissolution de la Chambre des Députés. - 2° attributions directes: Droit d'initiative exercé presque toujours en fait par le gouvernement seul. · Droit de sanction ou de non sanction. Question du veto. Le veto était impossible en 1789 avec une assemblée unique et ayant seule l'initiative. Dans un système régulier il doit être considéré comme un moyen préventif plutôt que comme un moyen d'action direct; il empêche toute proposition extravagante et prévient l'excessive multiplicité des lois. Veto suspensif; il n'a aucun des avantages du veto absolu.

MESSIEURS,

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Vous connaissez maintenant ce qui concerne les attributions des deux Chambres, et vous aurez remarqué que, pour ne pas trop morceler la matière, c'est en parlant du pouvoir législatif que nous avons énuméré ces attributions, même celles qui ne concernent pas l'action législative proprement dite. Nous l'avons fait pour ne pas trop morceler la matière, pour présenter à votre esprit des groupes qui fussent plus faciles à saisir, à retenir. Une fois amené à par

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ler des attributions de l'une et de l'autre Chambre, nous aurions jeté une espèce de confusion dans les idées si nous avions renvoyé, par exemple, au moment où nous nous occuperons de l'ordre judiciaire ce qui concerne les pouvoirs judiciaires de l'une et de l'autre Chambre; il nous a semblé qu'il valait mieux grouper. Mais vous voyez que l'attribution dominante, fondamentale, de l'une et de l'autre institution, c'est l'attribution législative proprement dite; l'une et l'autre Chambre sont avant tout et essentiellement deux branches du pouvoir législatif, deux autorités dont le concours est indispensable pour que la loi existe. C'est là, encore une fois, l'attribution capitale, l'attribution dominante, et il est essentiel de ne jamais oublier les articles de la Charte si souvent cités, les articles 14 et 16. « La puissance >> législative s'exerce collectivement par le Roi, la >> Chambre des Pairs et la Chambre des Députés. >> Toute loi doit être discutée et votée librement >> par la majorité de chacune des deux Chambres. >> Il résulte de ces deux articles fondamentaux, d'un côté, que le concours des deux Chambres est indispensable à la formation de la loi, de l'autre, que le concours des deux Chambres ne suffit pas pour la formation de la loi, que le concours des deux Chambres ne suffit pas pour qu'un projet, une proposition devienne une loi. Les résolutions, pour employer le mot technique, les résolutions d'une Chambre et même les résolutions conformes des deux Chambres ne sont pas des lois; elle n'ont aucune puissance, aucun droit à l'obéissance des citoyens. C'est que la loi

ne peut résulter que du concours des trois branches du pouvoir législatif. Ainsi le pouvoir royal doit donner son approbation, doit apposer sa sanction, le pouvoir royal aussi a le droit d'examiner, le droit de délibérer; il est aussi libre dans l'exercice de ses droits que le sont l'une et l'autre Chambre. Le pouvoir royal aussi a le droit d'examiner si la résolution, telle qu'elle est sortie de l'une et de l'autre Chambre, lui paraît ou non propre à contribuer à la prospérité du pays; il a le droit d'y donner sa sanction dans le premier cas et de la refuser dans le second. Si, d'un côté, le pouvoir royal seul est impuissant pour produire la loi, de l'autre, la loi ne peut jamais naître sans le concours de la puissance royale.

Nous l'avons déjà dit, le gouvernement de la France, tel que nos institutions fondamentales nous l'ont fait, est un gouvernement monarchique. L'article 13 de la Charte constitutionnelle dit en propres termes : « Le Roi est le chef de l'État. » Or lorsque, pour reconnaître quelle est la royauté que la Charte a fondée, on examine les données de notre droit positif, on ne tarde pas à reconnaître que, dans le système de l'unité française, c'est dans la royauté qu'on a placé le centre autour duquel tous les pouvoirs de l'État viennent se coordonner pour former un seul tout. Si, d'un côté, ces pouvoirs de l'État servent de frein et de limite à la puissance royale, de l'autre, ces pouvoirs eux-mêmes trouvent dans la puissance royale une limite et une impulsion. Les faits de notre droit positif nous montrent que c'est dans la puissance royale que le législateur a voulu placer le lien qui

fait tenir ensemble les diverses parties du mécanisme politique et qui sert, en quelque sorte, d'engrenage à la machine politique. Si, en effet, vous ouvrez la Charte aux articles 12, 13, 14 et autres, vous ne tarderez pas à reconnaître que l'intention du législateur a été d'organiser les pouvoirs divers, d'avoir des pouvoirs séparés et indépendants, tels, par exemple, que le pouvoir des Chambres et le pouvoir judiciaire, mais en même temps de placer au sommet de cet édifice un principe qui soit à la fois un principe moteur et conservateur, qui lie toutes les parties ensemble. Ainsi, le législateur a dit que les Chambres proposent, discutent et votent les lois; mais en même temps il a dit que le Roi aussi les propose et et que le Roi peut seul les sanctionner et les promulguer; il a dit la puissance exécutoire appartient au Roi seul, l'administration générale opère et se meut sous l'autorité du Roi, par le moyen d'agents que le Roi nomme et révoque; les forces de terre et de mer, c'est le Roi qui les commande; l'État, dans ses relations extérieures, c'est le Roi qui le représente. Le pouvoir judiciaire lui-même, dans sa haute et noble indépendance, qui est une des plus solides garanties des libertés publiques, le pouvoir judiciaire lui-même c'est le Roi qui en nomme les membres. Les actes du pouvoir judiciaire lui-même, le Roi peut, par l'exercice du droit de grâce, ou en corriger les erreurs ou en modérer la sévérité. Enfin, vous le savez par vos études sur le droit criminel, ce sont des agents du pouvoir exécutif qui seuls, ou presque seuls (car il y a un certain nombre d'exceptions), exercent le droit

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