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faire cette attaque, avancèrent au pas de charge, et, la baïonnette en avant, chassèrent l'ennemi du village qu'il occupoit.

L'Empereur Napoléon, qui paroissoit attacher une grande importance à la possession de cet endroit, arriva en personne avec l'artillerie de sa garde, et essaya de reprendre le village, sous la protection d'un feu bien dirigé. Voyant que ses tentatives réitérées étoient rendues infructueuses

par la persévérance des deux bataillons qui le défendirent, il fit jouer tout le feu de som artillerie contre le village, espérant forcer ces braves à le quitter ou à s'ensevelir sous ses ruines.

Le général Comte de Wrede, ne pouvant consentir à ce que l'ennemi arrachât de nouveau aux alliés un avantage qu'ils avoient obtenu, plaça une cavalerie choisie devant le village où les batteries ennemies, protégées par des carrés d'infanterie et de forts détachemens de cavalerie, entretenoient un feu nourri. Comme le terrain étoit très-humide à cause de la quantité de pluie qui étoit tombée, on n'auroit pu exécuter qu'au pas une attaque dirigée, à travers champs, sur le front de l'ennemi; cependant il étoit extrêmement urgent d'éloigner sans délai ces batteries ou de s'en emparer. Dans ces circonstances défavorables, le colonel Dietz, faisant les fonc

de

tions de brigadier, fit, avec promptitude et sang froid, des dispositions que ses troupes exécutèrent parfaitement. Par divers mouvemens il réussit à tromper l'ennemi sur son véritable dessein, jusqu'à ce qu'il pût saisir le moment favorable pour pour tomber sur lui tout d'un coup tous côtés, et avec toutes ses divisions éparses. Il mit en déroute la cavalerie ennemie, rompit les carrés d'infanterie, et força les batteries, auxquelles il prit seize canons, avec plusieurs chariots de munitions attelés. Étonné de la promptitude et de l'accord de sa manœuvre, et mis complètement en déroute, l'ennemi se retira avec précipitation, et quoiqu'il tentât plusieurs fois de prendre poste encore une fois, on le poursuivit jusqu'à la nuit tombante.

Pendant que ces événemens se passèrent sur l'aile gauche de l'armée bavaro-autrichienne, le général Wrede fit aussi attaquer de deux côtés le village de Morvilliers. Le maréchal Marmont, Duc de Raguse, l'avoit occupé; mais sans attendre l'attaque à la baïonnette qui alloit être dirigée sur lui, il se retira, par la route qui conduit de Morvilliers à Brienne, jusqu'à l'entrée d'un bois, où il prit une seconde position.

Le feld-maréchal lieutenant Baron de Spleny suivit l'ennemi à travers le village, au-delà duquel

il forma sa ligne; ensuite il avança rapidement vers la forêt, força l'ennemi de quitter aussi cette seconde position, s'empara de la forêt et se plaça au-delà.

Sur ces entrefaites le feld-maréchal Blücher étoit arrivé à Dienville, et S. A. le Prince Royal de Wurtemberg à la hauteur de Taile gauche de l'armée bavaro-autrichienne et de la droite du feld-maréchal. La nuit mit fin au combat ; les armées alliées la passèrent en cette position, ayant derrière elles le champ de bataille.

L'ennemi a souffert dans cette journée une perte considérable. L'Empereur des François luimême a été en 'danger d'être fait prisonnier par les chevau-légers.

Le 2 février, avant le jour, l'ennemi retira son infanterie de Brienne, n'y laissant qu'une forte arrière-garde de cavalerie et d'artillerie. L'infanterie marcha sur la grande route de Paris à travers le village de Lesmont. Par un mouvement combiné avec le corps du Prince Royal de Wurtemberg, le général Wrede attaqua l'arrièregarde, la chassa de Brienne, s'empara de cette ville et poursuivit l'ennemi jusqu'à Lesmont où celui-ci détruisit le pont sur l'Aube, essayant de former une ligne au-delà de la rivière.

Dans la nuit même le corps du maréchal Duc

de Raguse s'étoit éloigné du front du feld-maréchal lieutenant Spleny, et, par un mouvement latéral, s'étoit rendu sur la route de Vitry et Maizières. Pendant que l'armée bavaro - autrichienne marchoit en avant sur Lesmont, le maréchal Marmont manoeuvroit sur son flanc droit qu'il menaça par la position qu'il prit; cette position pouvoit même mettre en danger le derrière de l'armée alliée, si elle avoit continué de se porter en avant.

Gette circonstance engagea le Comte de Wrede à quitter la route de Lesmont pour manœuvrer contre le corps d'armée du général françois. Celui-ci avoit occupé le village de Ronay, sur les hauteurs duquel étoit placée sa principale force; il avoit devant lui un terrain marécageux presque inondé par les débordemens de la Voire; il avoit coupé le pont et obtenu ainsi une position excellente, choisie par l'Empereur lui-même, qui, à ce que dirent les paysans, s'étoit transporté la veille sur les lieux et avoit fait toutes ces dispositions.

Tous ces obstacles rendirent extraordinairement difficile l'attaque qui fut dirigée contre le maréchal. Déjà plusieurs tentatives avoient été infructueuses; la glace trop foible rompoit sous les pieds des soldats, qui souvent enfoncérent

jusqu'aux flancs. Les armes et les munitions étoient mouillées; on ne put avancer que sur la route même.

Dans cet état de choses, le général Comte de Wrede résolut de prendre d'assaut la position de l'ennemi. On avança au pas de charge, on surmonta tous les obstacles qu'opposèrent le terrain difficile et la défense opiniâtre de l'ennemi; tout en combattant on s'empara d'un pont sur le ruisseau qui traverse Ronay en deux bras ; on avoit déjà pris la moitié du village, lorsqu'on fut arrêté par le second bras dont le pont avoit été rompu. L'ennemi se plaça en masse au-delà du ruisseau, et, placé dans l'église et les maisons où l'on avoit pratiqué des meurtrières, il entretint un feu bien nourri.

Quoiqu'on ne pût, dans ces conjonctures, avancer pour le moment, cependant, vers quatre heures du soir, la cavalerie ayant trouvé un endroit guéable, on réussit à chasser l'ennemi des bords du ruisseau; le dixième bataillon national passa le pont qu'on avoit rétabli par le moyen d'une seule planche, et l'ennemi fut entièrement expulsé du village.

Satisfait de lui avoir fait quitter une position. regardée comme inexpugnable, le Comte de Wrede ne le poursuivit pas; son plan l'appeloit

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