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sieurs des pétitionnaires mêmes ont été rétablis par lui sur la liste. Ce qui a fait la difficulté, c'est qu'au mois de décembre précédent, il y avait eu une élection dans le même département. Le préfet reprit la liste et demanda de nouvelles justifications aux électeurs seulement dont la position lui parut être changée; de là il a pu arriver que quelques personnes se soient trouvées inscrites, quoiqu'elles n'eussent plus le cens. C'étaient des gens honnêtes, qui ont exercé de bonne foi les droits électoraux, et qui s'en seraient abstenus si on les eût avertis. (Rumeurs à gauche.)

Je le répète en terminant, la Chambre était fatiguée de ces plaintes éternelles ; et voilà pourquoi la commission m'a ordonné de faire un rapport très court.

M. de Lorimier. Je me suis abstenu de monter à cette tribune tant qu'il a été question de moi et de mon élection, mais actuellement que je suis hors de cause, par la décision de la Chambre du 22 mars, quí a prononcé mon admission, il est de mon devoir de venir défendre un magistrat intègre attaqué de nouveau, et de joindre ma faible voix à celle des éloquents orateurs qui lui ont déjà rendu une éclatante justice.

Une discussion longue et lumineuse a eu lieu dans vos séances des 12, 13 février et 22 mars. Il en est ressorti, d'une manière claire et précise pour tout le monde, que M. le préfet de la Manche (malgré ce qu'on vient de dire) se soit conduit d'une manière franche et loyale dans la confection des listes électorales, puisque les orateurs qui étaient même les plus opposés à la validité de l'élection contestée, ont rendu hommage à sa bonne foi et à son impartialité.

Cela résulte naturellement, Messieurs, des soins et des peines apportés à la confection des listes du département de la Manche. A toute heure du jour, les électeurs étaient admis près du prefet et dans ses bureaux, pour faire valoir leurs droits, demandes et éclaircissements, entendre leurs observations.

Aussi, est-il très remarquable que le 6 février, il n'existait point une seule réclamation contre une liste de 1,400 électeurs inscrits; et pas une réclamation non plus de faite par les citoyens qui auraient prétendu aux droits électoraux, et qui auraient été repoussés injustement.

Il paraît donc que c'est longtemps après la clôture des listes, et même après l'élection, que des électeurs se sont aperçus d'erreurs commises involontairement et vous les ont dénoncées. S'il en était autrement, ils auraient de vifs reproches à se faire de n'avoir point communiqué leurs doutes à l'administration ou aux électeurs incriminés, en avertissant ceux-ci, hommes probes et honorables, incapables de fraudes, qui croyaient avoir le droit de voter, et qui certes s'en seraient abstenus sur une simple représentation; en prévenant l'administration, qui ne repoussait aucun éclaircissement. Elle aurait fait droit aux justes réclamations. Et nos listes électorales exemptes d'erreurs, les élections de la Manche n'auraient pas donné lieu à de longues et toujours pénibles discussions.

Après les plus scrupuleuses recherches, troist électeurs ont été reconnus avoir voté indûment au grand collège; mais y a-t-il eu fraude et volonté de tromper de la part de l'administration qu'on poursuit encore, et sans motif apparent ? Non, Messieurs, sa loyauté bien connue repousse une telle supposition; et les faits vous démon

treront que l'inscription de ces trois électeurs n'a point ce caractère.

Ces électeurs n'ont point été introduits furtivement sur les listes tous les trois étaient sur les premières, publiées en vertu de la loi du 2 mai 1827; tous les trois étaient inscrits sur la liste du grand collège en 1820, et depuis cette époque, ils n'ont point cessé d'en faire partie.

Pour venir à ces électeurs, M. le préfet ne pouvait connaître l'existence d'un frère infirme, dans une maison de santé depuis plusieurs années, puisque jamais aucunes réclamations n'avaient été faites, et qu'ils avaient constamment été en possession publique du droit électoral depuis 1820.

Ces électeurs eux-mêmes, faisant seulement une pension alimentaire, croyaient avoir, à tort, il est vrai, mais de bien bonne foi, la capacité voulue pour être du grand collège.

Le troisième, inscrit sur des extraits réguliers qui prouvaient la possession annale pour l'election qui eut lieu en décembre 1826, avait été maintenu sur la liste d'août 1827, d'après la déclaration positive que sa position n'avait pas changé.

M. le préfet a agi ainsi pour les électeurs de toutes les opinions de l'arrondissement de SaintLo, qui avaient pris part à la nomination du 13 décembre 1826; et parmi ceux maintenus sur la liste définitive, seulement d'après leur déclaration et la notoriété publique, sans avoir produit toutes les pièces nécessaires, il se trouve deux des signataires de la seconde pétition qui Vous est soumise, dont les droits, réels à la vérité, n'avaient pas mieux été prouvés que ceux de l'électeur attaqué.

Il y avait donc impartialité complète, et non envie de tromper.

La notoriété n'avait point fait connaître que l'électeur, maintenu par erreur, avait vendu une portion de sa propriété ; la mutation n'était point faite le préfet ne pouvait connaître la nouvelle position de cet électeur, qui, peu au courant des lois, se croyait en droit de pouvoir faire partie du grand collège.

Mais sur une simple observation, cet honnête homme se serait abstenu d'user d'un droit qu'il n'avait plus, et cette observation n'a pas été faite.

Voilà la vérité tout entière, vérité qui résulte des éclaircissements et des nombreuses pièces fournies à votre cinquième bureau. Vous resterez de nouveau convaincus, Messieurs, je n'en doute point, que la bonne foi et la loyauté ont présidé aux élections de la Manche.

Je m'estime heureux que cette circonstance me donne l'occasion de rendre hommage à l'administrateur zélé et éclairé qui toujours se montre le véritable défenseur des nombreux et grands intérêts d'un département riche et populeux, et qui a su, par une conduite des plus honorables, se concilier l'estime et la reconnaissance de tous les hommes de bien.

Je n'ai point demandé la parole pour m'opposer aux conclusions du rapport de votre commission; au contraire, je les appuie de toutes mes forces, certain que l'administration et tous les électeurs de la Manche ne craignent point l'investigation la plus rigoureuse.

M. Méchin. J'ai entendu prononcer, par M. le ministre de l'intérieur, le nom du département de l'Aisne. Comme j'ai l'honneur d'être un des députés de ce département, je dois donner, autant qu'il est en moi, quelques éclaircissements sur un

fait qui a excité d'un côté de cette Chambre une Joie prématurée. M. le ministre de l'intérieur a eu la bonté de me communiquer la lettre qu'il a

reçue.

Des quatre signataires de cette lettre, j'en connais deux qui sont des électeurs recommandables. Il en est un qui était maire d'une commune en 1824, et qui a été destitué, parce qu'il n'a pas eu la complaisance de montrer son vote au président du collège. J'ai entre les mains la lettre du fonctionnaire qui prescrivait au maire de montrer son vote au président; cela lui étant facile, puisqu'il était, comme scrutateur, assis à ses côtes. Les quatre électeurs dont il est question étant des personnes parfaitement honnêtes, et dans des principes très manifestement constitutionnels, il est évident que des intrigants ont usurpé leurs noms auprès de l'estimable avocat dont il s'agit. (Murmures à droite.) On n'en peut pas douter, puisqu'eux mêmes le déclarent offiCiellement au ministre de l'intérieur. Je vous demande s'il peut se faire que ce soit au profit du parti, et je regrette d'être obligé d'employer ce mot, que ce soit au profit du parti constitutionnel que ces intrigants aient usurpé les noms des électeurs constitutionnels? ainsi je renvoie la fraude à qui elle appartient, et nous n'avons pas à rougir pour des hommes qui partagent nos sentiments, d'une tromperie si indigne.

Ces quatre électeurs ont un devoir à remplir; c'est celui de désavouer, par devant le conseil d'Etat, celui qui se serait servi de leurs noms. Ce désaveu, cet avocat ne le redoute pas; c'est un des hommes les plus honnêtes, les plus instruits, les plus sages du barreau de Paris. M. le ministre de l'intérieur a eu la discrétion louable de ne pas le nommer; j'imiterai son exemple, bien que son nom fût un éloge. Les faits étant éclaircis, le coupable doit être exemplairement puni. Qu'on ne conçoive donc pas un préjugé défavorable contre les amis de la cause constitutionnelle, ce serait une absurdité de leur attribuer un pareil fait.

Une commission d'enquête a été établie, mipartie de membres du conseil d'Etat et mi-partie de membres de l'ordre judiciaire, pour examiner les renvois que vous faites au gouvernement de ces sortes de pétitions. Cette commission se trouve composée d'une manière analogue à nos renvois, soit au ministre de l'intérieur, soit au ministre de la justice. Il est donc de notre devoir de renvoyer aux deux ministres les documents qui nous arrivent; et comme le renvoi a lieu après une discussion solennelle, il est bon que les rapports entrent dans plus de détails. Nous n'avons certainement pas l'intention de rien faire de désobligeant pour les collègues qui ont été admis, mais nous devons porter aide et protection aux électeurs, qui ont le plus grand intérêt à prouver qu'ils n'ont pas été calomniateurs. Les déclarations du gouvernement leur ayant permis de consulter les registres publics, il était de leur devoir de le faire, afin de vous apporter des preuves propres à dissiper les soupçons qu'on a élevés sur leur probité. Il me semble que vos commissions, qui se sont empressées à rendre justice aux collègues qui ont été admis parmi nous, devraient aussi rendre aux électeurs la justice qu'ils méritent. On nous a dit que la commission avait craint de fatiguer l'Assemblée; Messieurs, la Chambre des députés est infatigable. (Murmures à droite.) Oui, Messieurs, elle sera toujours infatigable quand il s'agira de signaler des fraudes de cette nature. C'est sous sa sauve

garde qu'est placée la liberté des élections, c'est à elle à signaler les fonctionnaires qui abuseraient de leur position. J'appuie le renvoi.

M. de Martignac, ministre de l'intérieur. Le fait que j'ai cité tout à l'heure est assez délicat et assez grave pour que j'aie le plus grand intérêt à éviter d'être mal compris. Il me semble que ce que j'ai dit n'a pas été également saisi par tous les membres de la Chambre. Je crois devoir préciser le fait.

J'ai voulu prémunir la Chambre contre une trop grande facilité à croire les dénonciations ici adressées. J'ai dit à ceux qui rappelaient les termes dans lesquels ces pétitions étaient conçues, qu'ils devaient se défendre d'une prévention aveugle, et qu'avant tout ils devaient éclaircir les faits et s'assurer de la réalité des signatures. J'énonçais en cela une chose qui parait raisonnable et sage. J'ai été loin de dire que l'avocat dont j'ai parlé eût trahi ses devoirs. J'ai rapporté ce qui lui était arrivé, comme une preuve qu'avec des intentions louables on peut être trompé. J'ai dit qu'un avocat au conseil à présenté au roi, en son conseil d'Etat, une pétition au nom de quatre individus, lesquels n'ont pas signé la requête, la signature de l'avocat au conseil étant suffisante. L'avocat s'est plaint de ce que ces quatre électeurs, ayant été portés sur la première liste, avaient été rayés sur la seconde, et de ce qu'on ne leur avait pas dénoncé cette radiation. Sur cette plainte adressée au conseil d'Etat, des informations ont été prises. Le conseil d'Etat a reconnu que c'était justement qu'ils avaient été rayés sur la seconde liste, et que, n'ayant pas produit depuis de pièces à l'appui de la première inscription, ils ne devaient pas être rétablis sur la liste. Les quatre individus ignoraient ce qui se faisait en leur nom. Quand l'ordonnance du roi a été rendue, on la leur a fait connaître, et alors chacun d'eux a déclaré qu'il n'avait donné mission à personne de demander, en son nom, sa réintégration sur la liste électorale; et tous ont reconnu que c'était justement qu'ils en avaient été éliminés. J'ai dû citer ce fait pour en conclure qu'il fallait vérifier l'authenticité des noms propres avant d'ajouter foi aux plaintes qui sont portées. Voilà la seule conséquence que j'ai voulu en tirer.

M. Dupin aîné. Certes, Messieurs, on ne peut nier que dans le très grand nombre de plaintes qu'ont excitées les élections, il peut y en avoir eu quelques-unes hasardées ou peu justifiées. Il était même impossible qu'il en fût autrement, dans le refus complet de la part de l'ancienne administration d'entrer en communication avec les citoyens. Mais on ne peut nier non plus qu'il y a eu un grand nombre de plaintes fondées. Il est vrai que cela ne vous a pas empêchés de valider certaines élections. Mais c'est en considération de la bonne foi des électeurs, et pas du tout de celle de l'administration, qui est toujours restée incriminée. Aussi, l'impression que ces débats ont laissée a été funeste à l'ancienne administration; et le ministère s'est vu dans la nécessité de satisfaire à un besoin public, de faire ce qui n'avait pas encore été fait en France, ni avant, ni depuis la Charte, d'établir une commission extraordinaire chargée d'examiner si les plaintes qui leur sont envoyées sont fondées. On a raison de réclamer de toutes parts l'examen. On a raison aussi de dire qu'il faut se défendre de trop de prévention, en ce sens qu'il ne faut pas trop se håter de condamner.

Cependant nous sommes tous attentifs en présence les uns des autres, dans des circonstances assez délicates, pour ne rien faire au hasard. La Chambre a pu être émerveillée de voir qu'à l'occasion d'une pétition, un ministre se soit trouvé armé d'un dossier véritablement de circonstance. (On rit); car ce n'est pas la seule affaire de ce genre qui ait été renvoyée au conseil d'Etat; si nous voyons ici un honorable avocat qui aurait été trompé, il y a un grand nombre de pétitions dont on a pu vérifier l'exactitude. Je ne puis m'empêcher d'être frappé de l'empressement avec lequel on est venu vous citer celle-là à cette tribune. Il me semble que, dans cette circonstance, le ministère a méconnu sa position. Il lui convenait peu de se constituer avec acharnement l'accusateur de ces électeurs. En France, les convenances sont aussi une loi, et la première de toutes. Il y a de la générosité, et peut-être de l'héroïsme, à venir ici se montrer le défenseur de l'ancienne administration. Une opinion française n'a pas craint de dévoiler les fraudes électorales et d'attaquer l'administration qui nous opprimait, et qui nous guette et nous menace encore. (Mouvement en sens divers.)

Eh bien, quoique le nouveau ministère ait employé dans les élections qui ont eu lieu récemment, les mêmes fonctionnaires, vous n'avez pas entendu une plainte contre l'administration actuelle. Mais cela n'absout pas le passé. Que le ministère en laisse faire justice; et puisqu'on se livre à un examen approfondi des faits, il ne faut pas que cet examen se fasse sous les prémices de la petite anecdote qu'on nous a contée, mais sous l'influence même des faits. Nous sommes déjà rassurés pour l'avenir, par la loi sur les listes électorales, que les circonstances ont rendues nécessaires; que nous avons votées, et qui,je crois, ne tardera pas à être soumise à la sanction. (Mouvement d'adhésion à gauche.)

M. His. C'est pour moi un devoir impérieux de prendre la parole dans cette discussion. J'ai été rapporteur du troisième bureau qui a eu à examiner l'élection de M. Drouilhet de Sigalas. Le rapport de M. de Laboulaye m'a paru un peu trop laconique. On fait planer sur les électeurs quí se sont plaints une espèce d'accusation, en disant que l'élection a été validée. Mais il faut considérer que la plainte était fondée sur deux points sur de faux électeurs et sur des électeurs retranchés de la liste. Quant aux faux électeurs, les plaignants, malgré leurs demandes réitérées, n'ont pu se faire délivrer des extraits pour faire les vérifications nécessaires. Quant aux électeurs retranchés, il est demeuré constant que le sieur Saint-Martín père avait été d'abord porté sur la liste du 15 août 1827, retranché le 5 septembre, rétabli le 25 du même mois, et définitivement rayé le 28; et que nonobstant cette radiation, il avait voté. Or, vous savez dans quelle circonstance ce fait était articulé. M. de Sigalas n'avait eu qu'une voix de plus que son compétiteur M. Delong. Si le sieur Saint-Martin avait été considéré comme n'ayant pas le droit de voter, M. Delong eût eu le même nombre de voix, et comme plus âgé, il eût été le député du département. Cette circonstance a dû influer sur la décision du 3° bureau.

Il a été reconnu que si la radiation du préfet n'avait pas été notifiée au sieur Saint-Martin, c'est qu'il payait le cens nécessaire. Mais il n'en résulte pas moins que les electeurs avaient eu raison d'adresser leurs plaintes à la Chambre. Il me semble que, dans ces circonstances, la pétition ne

devrait être renvoyée ni au ministre de la justice, ni au ministre de l'intérieur.

M. de Bricqueville. Les pétitionnaires avaient des raisons graves de s'élever contre l'élection de M. Lorimier; d'autant plus graves, Messieurs, qu'un grand nombre d'électeurs incapables avaient été introduits dans le collège départemental, où l'élection n'a été décidée qu'à la majorité d'une voix.

Je m'étais imposé une réserve qu'on aurait dû apprécier; mais on me force à déchirer le voile et à vous faire connaître les faits dans toute leur nudité.

Une malice de l'esprit de parti, combinée dans Je département de l'Aisne, ne résout pas la question du département de la Manche, et je doute même que ce soit au profit de l'ancienne administration et de ses agents, qu'on ait adressé au conseil d'Etat un mémoire aux noms d'hommes qui avaient préféré le silence à la révélation de turpitudes qui n'étaient que trop vraies.

Mais examinons, en peu de mots, ce qui s'est passé dans le département que j'ai l'honneur de représenter, et voyons si les autorités qui ont dirigé les élections, méritent tous les éloges que vous venez d'entendre.

Rappelez-vous les aveux même qu'on vient de faire à cette tribune. On ne disconvient pas que des individus qui ne payaient point le cens électoral, ont figuré sur nos listes où déposé leurs votes dans l'urne. On ne conteste que le nombre, c'està-dire qu'on avoue sa défaité. Mais quel est celui qui peut nier que M. Hulmel, avocat, conseiller de préfecture, n'a pu voter qu'en ajoutant à ses contributions personnelles, celles portant sur une succession Lebannier dont il est légataire? mais il s'est attribué un tiers de ces contributions, et un jugement confirmé par arrêt de la cour de Caen, du 10 février 1826, vingt mois avant la confection des listes, décide irrévocablement que M. Hulmel n'a droit qu'à un quart de succession. C'est au mépris de ces deux décisions, que M. Hulmel a pris dans la succession encore indivise du mineur Lebannier, non pas le quart des impositions qu'il paye, mais le tiers dont il avait besoin pour atteindre le cens du collège départemental. M. Hulmel, porté sur la liste pour une somme de 879 fr. 82 c., ne paye réellement, après calcul fait, que 820 francs; c'est-à-dire 60 francs audessous de la somme portée sur la liste, et 28 fr. 31 c. au-dessous du cens exigé, qui était de 848 fr. 31 c.

M. le conseiller de préfecture Hulmel a fourni le renseignement suivant, dont on ne nous a pas parlé (Lecture du renseignement); il a osé déclarer à votre 5° bureau qu'il n'a connu une vente faite de la terre de Saint-Léger et Carcagny, à MM. de Fontette, passée devant Me Macaire, notaire à Caen, au prix de 42,000 francs, qu'au mois de juin 1817, époque à laquelle il fut appelé au tribunal civil de Caen, dans une intance introduite par M. le baron de Fontette, contre les héritiers Lebannier, copartageants avec M. Hulmel, ses vendeurs. Or, Messieurs, voici un acte passé devant Hippolyte Gosselin, notaire à Saint-Lô, le 30 octobre 1816, où furent présents le sieur Hulmel, qui se réserve à tous autres droits et créances sur la succession dont il s'agit. Sont effectivement signés au bas de la minute: Leduc, Marie-Louise Arthur, Mauger de Varennes, général retraité; de Lavalette, Hulmel, Girard et Gosselin. Légalisé le 22 mars 1828, signé Moncuit, juge.

Les pétitionnaires m'envoient en outre une note accompagnée de pièces prouvant que, pour échapper à la honte d'une fraude, M. le conseiller de préfecture s'est attribué une contribution payée depuis douze ans dans le département du Calvados, par M. de Fontette, acquéreur des biens de la succession Lebannier. La liste électorale ne fait aucune mention d'impositions payées par M. Hulmel, hors la Manche; le nom du Calvados ne s'y trouve pas. Cet électeur n'avait donc pas fait valoir cette imposition et ne le pouvait pas, puisqu'elle est payée par M. de Fontette.

Le rapporteur de votre 5 bureau m'a dit avoir reçu du ministère le renseignement qu'aucune imposition locale n'était prélevée à Saint-Lô en 1827. Pour combattre cette assertion au profit de M. le conseiller de préfecture, je joins ici un certi-. ficat signé de M. le directeur des contributions directes de la Manche, qui ne cadre pas avec le renseignement donné par le ministère à M. le rapporteur. (Lecture du certificat.)

M. Couraye-Duparc, conseiller de préfecture, inscrit comme payant 1,028 fr. 74 c., ne paye que 439 fr. 94 c.

M. Lioult de Morigny (Jacques), maire de Raids, ne paye qu'une somme de 667 fr. 06 c.

Il est notoire dans tout l'arrondissement de Saint-Lô, que M. Le Creps du Bosq, juge de paix de Saint-Clair, n'a pu avoir le droit de voter, puisque sa femme et sa belle-mère ont fait à feur fils majeur une cession universelle de biens, que ce fils passe les baux à son nom, quoique les actes soient sous seing privé et n'aient pas été enregistrés.

M. Dumesnil (Louis-Charles-François), percepteur d'Isigny, arrondissement de Mortain; et son fils M. Auguste-Louis-Gabriel Dumesnil, maire d'Isigny, ne payent à eux deux qu'une somme de 1,310 francs.

M. Regnault de Bouttemont, maire de Domjean, canton de Vessy, arrondissement de SaintLộ, n’a pu être considéré comme payant le cens de 948 francs pour lequel il a été porté, qu'en se faisant compter les impositions d'un bien payant 600 francs, bien qu'il possède indivis avec son oncle, M. Regnault du Breuil. Or, en retranchant 300 francs, pour la part de cet oncle, il ne reste plus que 668 francs, et M. Regnault de Boutteinont à voté.

Des pièces déposées à votre 5 bureau résulte la certitude que:

MM. Lucas de Courville, dont l'un est maire de Courville, arrondissement de Cherbourg, se sont attribué les impôts de la totalité des biens que possédait feu leur père, Jean-Pierre-Desiré Lucas, quoiqu'une partie de ces biens soit maintenant possédée par Miles de Gourville, leurs

sœurs.

Votre 5 bureau a regardé comme indument inscrits sur la liste électorale, deux MM. Béatrix de Mesnilrainne. Ces Messieurs payaient, avec un troisième frère, 1,800 francs d'impôt. L'interdiction par jugement de ce dernier, mort même depuis l'élection, avait donné à ces Messieurs la jouissance de la portion de bien qui lui revenait, à charge de lui payer une pension viagère. Ils ont cru et beaucoup à leur place auraient cru pouvoir se prévaloir de la totalité des impositions. Cela n'attaque nullement l'honneur de ces Messieurs c'élait cependant suffisant pour vicier l'élection, et surtout pour empêcher l'administration de les porter sur les listes.

M. de Boyer, chef de bataillon en retraite à

Valognes, M. Le Chartier de la Varinière, maire de Thorigny, M. de Beaugendre, ancien juge de paix de Saint-Lô, ont été portés d'office sur la liste, ne payant pas le cens, Ces honorables citoyens ont cru devoir s'abstenir et se sont en elfet abstenus de voter. Il n'en est pas moins vrai que ces Messieurs ont tenu la place de trois électeurs qui auraient rempli les conditions électorales.

M. du Hérissier de Gerville, membre du conseil général, domicilié à Valognes, ne se trouve inscrit sur le cinquième tableau de rectification que pour une somme de 845 fr. 70 c.; son nom ne se trouve plus sur le sixième et dernier tableau. Votre cinquième bureau a admis M. de Gerville à produire de nouvelles impositions qu'il avait négligé de faire valoir. Cette manière de voir ne peut empêcher la prise en considération des assertions des pétitionnaires. Ils ont affirmé que M. de Gerville n'était inscrit que pour 845 fr. 77 c., et cette nouvelle et tardive production prouve que, quoique payant le cens, M. de Gerville a voté bien qu'il ne fût pas inscrit sur la liste.

Les électeurs douteux sont en grand nombre. Le candidat opposé à M. de Lorimier au grand collège, et qui pouvait l'emporter s'il n'eût voté que des électeurs véritables, était M. le comte Duparc de Barville, ancien député, homme fort honoré dans le département.

M. de Lorimier, président du collège d'arrondissement de Saint-Lô, ayant déclaré que le secret du vote n'était que facultatif, cette décision, qui violait le texte et l'esprit de la loi, excita un juste mécontentement; cent cinquante-six électeurs rédigèrent une protestation qui fut jointe au procès-verbal, et M. de Lorimier ne fut pas élu.

Dans la nuit, une circulaire sans nom d'imprimeur, avait été imprimée, et fut distribuée avant huit heures du matin, dans une ville où pas une ligne ne peut être imprimée sans le consentement des autorités; et cependant l'Avis, appelé salutaire, annonçait par son humidité qu'il venait de sortir des presses. Qui de vous, Messieurs, ne reconnaîtra à la tolérance de la police, toujours active dans cette ville, à laisser circuler cet avis, qu'elle s'est crue obligée d'en respecter l'origine.

Je ne parle pas seulement de cette circulaire parce qu'elle recommande M. de Lorimier, mais bien parce qu'elle reproche à tous les électeurs de n'avoir pas accompagné la veille la nomination du bureau du cri de vive le roi! Dans le département de la Manche, l'amour du roi est dans tous les cœurs, et c'est seulement lorsque le fonctionnaire qui le représente ne fait pas son devoir que ce sentiment reste comprimé.

(Lecture de l'avis).

Quel insidieux avis, Messieurs, pour le département qui a donné plusieurs millions pour l'établissement de la préfecture à Saint-Lo! Quelle perfide menace pour une ville aussi fidèle à son roi, que de lui faire craindre le changement de chef-lieu sí le candidat ministériel n'y était pas élu !

Il m'est pénible de fatiguer la Chambre de faits et de détails que j'aurais voulu pouvoir taire. Je quitte cette tribune pour vous en épargner et m'en épargner de plus graves encore.

Je remets sur le bureau l'Avis salutaire de l'électeur prévoyant, que m'avait confié M. le rapporteur de votre cinquième bureau.

(Ces détails ont été lus au milieu du bruit des

conversations particulières et de l'agitation de l'Assemblée; une grande partie des membres avaient quitté leurs places et s'étaient formés en groupes autour de la tribune. M. le Président parvient difficilement à rétablir l'ordre et le calme, afin que M. le rapporteur puisse être fatendu).

M. de Laboulaye, rapporteur. Je ne sais si la dignité de la Chambre a fort à s'applaudir de la discussion qui vient d'avoir lieu; mais le but de la commission était de l'éviter. Je ne sais pourquoi on a mis en avant le nom du rapporteur. Quand un rapporteur a soumis son rapport à une coinmission, il ne lui appartient plus: il est celui de la commission. Ce n'est donc pas au rapporteur, mais à la commission, qu'on devrait s'en prendre.

Il n'y a pas dans le rapport de la commission un seul mot qui puisse être désagréable on défavorable aux électeurs. Je conçois, que des électeurs qui dénoncent ne veulent pas passer pour des calomniateurs. J'entre dans leurs vues, et je suis loin de m'opposer à la juste indignation des collègues qui repoussent cette imputation. Mais mon rapport n'en a pas dit un mot. J'ai annoncé que je n'avais pas de faits nouveaux à vous apprendre; que la commission ne croyait pas devoir entrer dans une discussion tout à fait épuisée; que, le fait de l'élection étant consommé, il ne restait plus à examiner que l'acte de l'administration.

Quoique M. le ministre de l'intérieur soit assez fort pour se défendre lui même, je demanderai la permission de faire remarquer que, quand il est monté à cette tribune, ce n'est pas l'ancien ministère qu'il a prétendu défendre, mais sa propre administration, celle qui, de votre aveu, vient de faire des élections si franches, si loyales. Il était naturel qu'elle défendit ses agents, parce qu'ils représentent le roi, et que, si nous leur ôtons la considération qu'ils méritent comme représentants de la royauté.......

M. le Président. Vous ne parlez pas comme rapporteur de la commission: ce n'est pas là la question, je vous prie d'y rentrer.

M. de Laboulaye, rapporteur. Quant à la circulaire qu'on est venu vous dénoncer, je vois au bas écrit: attribué au préfet. Je ne vois pas d'ailleurs que cela soit fort dangereux.

Je persiste dans les conclusions de la commission, c'est-à-dire le renvoi aux ministres de l’intérieur et de la justice, des pétitions relatives aux faits d'élections.

(Ce double renvoi est ordonné sans opposition).

M. de Laboulaye, continue son rapport:

La pétition sous le n° 202 signale, mais sans les appuyer d'aucune autre preuve que l'assertion des pétitionnaires, quelques irrégularités dans l'élection de M. de Kerjégu, nommé par le collège de l'arrondissement électoral de Saint-Brieuc, avec une majorité de 54 voix.

Au reste, l'objet spécial de cette pétition était moins d'attaquer les opérations du collège, que d'indiquer au législateur quelques vues d'amélorations dans notre régime électoral. C'est dans ce but que l'honorable M. Kératry en avait fait le dépôt à la Chambre. Ce but est à peu près rempli, en tout ce que demandaient les pétitionnaires, par la nouvelle loi que vous venez de voter, et

sous ce rapport tout renvoi deviendrait sans objet. Toutefois, la commission ne voit pas d'inconvénient à vous proposer d'en ordonner la communication à M. le ministre de l'intérieur et le dépôt au bureau des renseignements.

Telles sont les conclusions du rapport que j'ai l'honneur de vous soumettre en son nom. (Ces conclusions sont adoptées.)

Le sieur Hérail, propriétaire à Lisle-en Dodon (Haute-Garonne), se plaint de n'avoir pas été porté sur la liste des électeurs malgré la production de ses titres en temps utile.

Lorsque le pétitionnaire se présenta pour soumettre au visa du maire de Saint-Farjon ses extraits de contribution sur cette commune, ce fonctionnaire, absent pour ses fonctions de notaire, ne put les viser.

Le 8 septembre, sur la sommation régulière d'un huissier, ce maire les légalisa.

Le pétitionnaire fit passer ses pièces à la souspréfecture, qui les adressa à la préfecture; mais il ne justifia pas de son âge, se fondant, dit-il, sur ce qu'il avait déjà figuré sur les listes des précédentes élections.

On voit par une lettre du 21 septembre, du sous-préfet de Saint-Gaudens, qu'ayant consulté ce magistrat sur cette omission, et lui ayant déclaré le fait de sa présence aux élections antérieures, celui-ci pensa qu'en effet une nouvelle justification n'était pas nécessaire, mais qu'au surplus il allait en référer au préfet.

Le 2 octobre, arrêté de M. le préfet qui rejette la demande du sieur Hérail, attendu qu'il n'est porté sur aucune liste, et qu'il ne justifie pas de son âge.

Notification de cet arrêté est faite au pétitionnaire le 18 du même mois, par M. le maire de Lisle-en-Dodon, lieu de sa résidence. La lettre d'envoi est du 16.

Rien de plus simple que la difficulté. Le sieur Hérail avait-il ou n'avait-il pas l'âge? avait-il ou n'avait-il pas figuré précédemment sur les listes d'électeurs ou de jurés ?

Rien ne lui était plus facile que d'en justifier à temps devant le préfet, puisque lui-même avait présenté la difficulté dans le milieu de septembre. Un extrait de ses titres, ou son extrait de baptême levaient tout obstacle.

Rien ne lui était plus facile aussi que d'en justifier à la Chambre. Depuis les élections jusqu'au 1er mars, il pouvait aisément se procurer ces deux pièces, ou seulement son extrait de naissance; ce qui décidait le fait sans retard.

La réclamation devenait donc une allégation sans preuves, et votre commission, sans les précédents établis, vous aurait proposé l'ordre du jour. Toutefois, elle ne trouve aucun inconvénient à renvoyer la pétition à M. le ministre de l'intérieur; et c'est ce que j'ai l'honneur de vous proposer en son nom. (Adopté.)

Le sieur Juttier, ex-instituteur à Neuville-Bosc, département de l'Oise, se plaint d'avoir été destitué et de ne pouvoir obtenir le payement de ce qui lui était dû pour son traitement; il réclame l'intervention de la Chambre.

Le sieur Juttier se plaint principalement de son maire; il cite une pétition adressée à la Chambre, l'année dernière, par plusieurs habitants de la commune de Neuville-Bosc contre ce fonctionnaire. Cette pétition avait été renvoyée par la Chambre à M. le ministre de l'intérieur, et celle du sieur Ju tier indique même qu'il y a été donné suite, et qu'une enquête a été faite par l'ordre de M. le ministre de l'intérieur. Cette circonstance

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