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Cette distinction

entre le droit natu

tif e t-elle utile en urisprudence?

médiatement en droit positif (1). On peut, en se plaçant à ce point de vue, définir le droit naturel : celui qui parait étre plus épuré, plus parfait que le droit établi.

-

8. Au reste, cette distinction entre le droit naturel et le droit rel et le droit posi- positif n'est utile que scientifiquement parlant; elle n'a, en jurisprudence aucun côté pratique. Pour le jurisconsulte, pour l'avocat, pour le juge, un seul droit existe, le dro't positif. Les lois naturelles ou morales ne sont, en effet, civilement obligatoires, qu'autant qu'elles ont été sanctionnées par une loi écrite. Les autres ne sont pas matière de droit, et le juge qui s'appuierait sur elles pour mctiver ses décisions dépasserait les limites de ses pouvoirs. Au législateur seul appartient le droit de déterminer, parmi les règles si nombreuses et quelquefois si controversées du droit naturel, celles qui sont légalement obligatoires.

Le principe que l'équité naturelle ne

La règle que j'énonce résuite de l'art. 1er de notre Code, aux termes duquel il n'y a de lois obligatoires que celles qui ont été promulguées dans les formes qu'il prescrit (2).

Elle est absolue en matière criminelle. Tout ce qui n'est pas dé fendu par la loi est licite et ne peut être empêché. Nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

Mais, en matière civile, elle souffre une exception importante : peut pas servir de l'équité ou le droit naturel peut, en effet, servir de base aux décisions base aux décisions judiciaires dans les cas où la loi le permet expressément (3). (Voy. fre-t il pas des ex- les art. 565, 1135, et, à ce sujet, l'explic. de l'art. 4).

judiciaires ne souf

ceptions?

Qu'est-ce que le droit civil?

Le droit des gens?

Le droit civil n'at-il pas des sens dif

férents,

9. 2o En droit civil et droit des gens. Le droit civil est l'ensemble des lois qui sont propres aux membres de la nation qui les a faites; c'est le droit de la cité, le jus civitatis. Ainsi notre droit, civil comprend toutes les lois qui sont spéciales aux Français (4).

Le droit des gens est, dans chaque pays, l'ensemble des lois communes à tous les hommes, étrangers ou nationaux. Ainsi, chez tous les peuples, deux sortes de lois existent : les unes sont propres aux membres de la nation qui les a faites: elles forment le jus proprium civitatis, le droit civil; les autres sont applicables à tous les hommes, sans distinction de nationalités : elles forment le jus commune gentium, le droit des gens.

Les mots droit des gens ont une seconde acception; on les emsuivant ploie pour exprimer ce qu'on appelle dans la langue moderne le qu'on l'oppose à tel droit international, c'est-à-dire celui qui règle les rapports des na▲ quels autres tions considérées comme individus. Il existe, en effet, de peuple à

ou tel autre droit?

droits peut-on l'op

poser?

(1) Essais phil., p. 64 et suiv.

(2) V. la Chrestomutie de M. Blondeau (Introduction, p. 12).

(3) V. M. Oud., Essais phil., p. 163.

(4) Je donne ici aux mots droit civil leur sens historique et scientifique ; mais je dois faire remarquer qu'aujourd'hui, dans la science actuelle du droit, comme dans la pratique, les mots droit civil se prennent par opposition aux mots droit public; le droit civil, c'est le droit privé. —On le prend aussi quelquefois par opposition au droit commercial, ou encore par opposition au droit criminel.

peuple, de gouvernement à gouvernement, des droits et des devoirs, et l'ensemble des lois qui les régissent constitue le droit international. Ce droit a sa source soit dans les traités de paix, d'alliance et de commerce par lesquels les nations s'imposent respectivement différentes obligations les unes envers les autres, soit dans les usages réciproquement observés entre elles, soit enfin dans ces règles si essentielles à la sociabilité humaine qu'elles ont eu dans tous les temps l'assentiment unanime des nations. Sa sanction consiste, d'une part, dans la force que chaque nation peut employer contre la nation qui le viole; d'autre part, dans la déconsidération universelle qu'entraine toujours avec elle l'inobservation des préceptes que les peuples sont habitués à respecter.

droit public?
Le droit privé?

10. — 3o En drot public et en droit privé. Le droit public Qu'est-ce que le règle les rapports des particuliers avec l'Etat; le droit privé, les rapports des particuliers entre eux. En autres termes, les lois qui confèrent des droits ou imposent des devoirs à l'État envers les particuliers forment le droit public (1). Telles sont les lois qui sont relatives à la distribution des pouvoirs, à l'organisation de la puissance publique, celles qui règlent les élections ou qui déterminent les conditions nécessaires pour être admis aux emplois publics, toutes celles aussi qui ont pour objet la répression des attentats aux bonnes mœurs et la sûreté de l'État.

Les lois qui confèrent des droits ou imposent des devoirs aux particuliers envers d'autres particuliers forment le droit privé.

Certaines lois prlvees ne fo ment

Toutefois, il en est parmi elles qui, sous un certain rapport forment un droit public sui generis: telles sont les lois qui sont elles pas un droit relatives à la famille, qui constituent la puissance maritale, la public sui generis? puissance paternelle elles appartiennent évidemment au droit privé, puisqu'elles règlent des rapports privés, c'est-à-dire de particulier à particulier; cependant elles sont aussi de droit public, car elles ont pour objet, non pas de purs intérêts pécuniaires, mais l'ordre général dans l'Etat, l'intérêt public (2). En nous plaçant à ce point vue, nous appellerons droit public, celui qui a l'intérèt purement général pour objet; droit privé, celui qui n'a trait qu'aux intérêts privés.

Ces deux espèces de droits doivent être distinguées. Le premier est au-dessus des conventions des particuliers; ils n'y peuvent point déroger. Le second, au contraire, est susceptible de recevoir

Quel intérêt y adroit public du droit

t-il à distinguer le

prive?

Le droit public se

droit constitution

nel?

1 Quoique les chartes constitutionnelles de 1814 et de 1830 soient intitulées droit public des Français, néanmoins tout le monde reconnaît que les expres- confond-il avec le sons de droit public ont un sens plus général que celui qu'on attache aux mots nel? wrot constitutionnel. Ainsi, les lois qui ont pour objet la répression des aftentats Qu'est-ce que le aux bonnes mœurs ne sont pas des lois constitutionnelles, quoiqu'elles fassent droit constitutionpartie du droit public. Le droit constitutionnel est, à proprement parler, celui qui règle l'organisation intérieure de l'État et l'exercice des pouvoirs de la souveraineté. M. Oudot le définit : « Celui qui, traçant la ligne de demarcation entre es gouvernants et les gouvernés, détermine entre eux le rapport d'autorité et d'obéissance. »

(2) M. Val., sur Proud., I, p. 7.

Qu'est-ce que le droit commercial?

posé au droit commercial?

Qu'est-ce que le droil déterminaleur ?

nateur?

toutes les modifications qu'il plaît aux parties d'y apporter ; elles peuvent même y renoncer complétement. (V. l'art. 6).

-

11. — 4• En droit commercial et droit civil (non commercial). Le droit civil op- Le premier a pour objet les transactions commerciales; le second règle tous les faits qui ne constituent point des actes de commerce. 12. -5° En droit déterminateur et droit sanctionnatenr. - Le droit déterminateur donne les règles du juste et de l'injuste. Le Le droit sanction droit sanctionnateur le fait observer, par les peines qu'il inflige à ceux qui le violent, ou par les récompenses qu'il accorde à ceux qui s'y soumettent (1). Les lois criminelles appartiennent au droit sanctionnateur. La théorie des preuves organisées à l'usage de ceux qui réclament les droits méconnus en fait également partie. On en peut dire autant de la procédure, qui trace la marche qu'on doit suivre lorsqu'on veut faire respecter son droit.

Qu'est-ce que le droit écrit ?

13.- 6o En droit écrit et droit coutumier (ou non écrit). ---- Cette Le droit non écrit division ne se rattache pas au fait matériel de l'écriture. Une loi peut être écrite, bien qu'elle ne soit point constatée par l'écriture, et réciproquement, non écrite, bien qu'un écrit la constate.

ou coutumier?

Cette distinction n'a-t elle pas joué

risprudence?

utile aujourd'hui ?

La loi écrite est celle qui a été proposée, discutée, acceptée expressément et promulguée par le législateur; peu importe qu'elle soit ou non constatée par écrit.

La loi non écrite est celle qui s'est introduite tacilement par la coutume, c'est-à-dire par un usage généralement ohservé; pu importe que cette coutume soit ou ne soit pas constatée par écrit. Ainsi, le droit écrit est celui qui résulte de la volonté expresse du législateur; le droit non écrit est celui qui résulte de sa volonté tacite, manifestée par la tolérance qu'il accorde aux usages constants et généreux.

Cette distinction a joué un grand rôle dans notre ancienne jurisun grand rôle dans prudence. Nous verrons bientôt, en effet, que la France avait autrenotre ancienne ju- fois deux législations bien distinctes, le droit non écrit ou coutumier, Est-elle encore dans le Nord, le droit écrit, dans le Midi. Mais aujourd'hui nous L'usage peut-il n'avons plus que les lois écrites Les anciennes coutumes ont été abrogées; quant aux usages nouveaux, si persévérants, si généraux qu'ils soient, ils n'acquièrent point force de loi Les juges ne peuvent appuyer sur eux leurs décisions que dans les cas spéciaux où la loi écrite s'y réfère expressément. (V. les art. 590, 591, 593, 663, 671, 674, 1135, etc.) Je reviendrai sur ce point, lorsque je traiterai de l'abrogation de la loi.

servir de motif aux
decisions
ciaires?

Comment diviseon historiquement

CHAPITRE II. DES SOURCES DU DROIT FRANÇAIS.

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HISTORIQUE DES POUVOIRS LÉGISLATIFS. CONFECTION DU CODE NAPOLÉON.

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14. Notre droit français se divise historiquement en trois notre droi français? parties:

Qu'est-ce que l'ancien droit ?

La première comprend tous les actes législatifs, ordonnances,

(1) M. Oud., p. 72.

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coutumes et arrêts de règlement qui ont existé depuis le commencement de la monarchie jusqu'au 17 juin 1789. époque de la déclaration de l'Assemblée constituante: c'est le droit ancien ;

La seconde, toutes lois qui ont été rendues depuis le 17 juin 1789 jusqu'au 31 décembre 1804, époque de la promulgation du Code Napoléon c'est le droit intermédiaire;

La troisième, nos cinq Codes (Codes Napoléon, de procédure, de commerce, pénal et d'instruction criminelle) et toutes les lois postérieures c'est le droit nouveau.

Ser. Droit ancien.

L'ancienne France est régie par trois législations différentes : les ordannances royales, les coutumes, le droit romain (1).

Le terme ordonnance vient du

Le droit intermédiaire ?

Le droit nouveau?

Quelle était la législation de la Fran cavant le 47 juin

179?

Etait-elle unifo me comme aujourd'hui ?

ordonnance?

15. — I. DES ORDONNANCES. latin ordinare, qui signifie ordonner. c'est à-dire arranger quelque chose, y mettre l'ordre; et, en effet, les lois, par leurs dispositions, Qu'est-ce qu'une mettent l'ordre dans la société. Du latin ordinare on a fait ordinafi, d'où l'on a formé le terme français d'ordrenances ou ordonnances. Quoique, dans l'origine, ce terme ne signifiåt qu'arrangement ou ordre, néar moins, comme ces arrangements ou dispositions émanent d'une autorité souveraine, on a fini par attacher au not ordonnance l'idée d'une loi impérative: les ordonnances sont donc des commandements on ordres que le roi donne à ses sujets. On les divisee en crdonances proprement dites (2), en édits, déelerations et lettres patentes.

Bien que ces expressions soient souvent employées l'une pour Tautre, elles expriment cependant des idées différentes.

Les ordonnances proprement dites embrassent ordinairement plusieurs matières, ou du moins contiennent des règlements généraux. Les édits, au contraire, ne sont que des règlements sur un point

srécial.

Les déclarations sont, en général, données soit pour interpréter les édits et ordonnances, soit pour en étendre ou en restreindre les dispositions.

Les lettres patentes sont les actes par lesquels le roi concède un privilége ou ordonne aux tribunaux l'exécution d'un arrêt du conseil d'Etat. On les appelle petentes, parce qu'à la différence des Lettres de cachet, qui sont closes, celles-ci sont ouvertes.

Les lois de l'Église, dont quelques-unes étaient observées en France, forwant one quatrième espèce de droit, connu sous le nom de droit canonique. droit, pris dans son sens général, est un ensemble de préceptes tirés de l'Écritae salate, des conciles, des décrets ou constitutions des papes, et enfin des seniments des Pères de l'Église. Il a principalement pour objet d'établir la discipline Eglise et la règle de sa foi. Oa l'appelle canonique, du mot canon, qui sicile regle.

2) Scus les rois de la première race, on les appelait capitulaires parce qu'elles cent divisées en chapitres, ou plutôt en articles appelés capitula. Les capituares de Charlemagne forment un cours complet de législation politique, ecclésiastique, militaire, civile et économique.

Comment diviset-on les ordonnances?

qu'entend-on par

édits?

Par déclarations?

Par leitres patentes?

Qu'était-ce que les États généraux?

Pourquoi ces assemblees étaient elles appelées États?

16.- Les ordonnances, édits et déclarations ont cela de commun qu'ils émanent tous de la volonté du roi; mais la volonté royale suffit-elle pour leur donner force obligatoire ?

Il nous faut, avant de répondre à cette question, dire quelque: mots des Etats généraux et des Parlements.

17.-Les Etats généraux sont des assemblées composées des dé putés choisis parmi les trois ordres reconnus dans l'Etat : la no blesse, le clergé et le tiers-état.

On les appelle États parce qu'elles représentent les différents Etats ou ordres de la nation; États généraux, parce qu'elles repré Pourquoi Etats sentent la nation eutière, à la différence des États particuliers o provinciaux, qui ne représentent qu'une province.

généraux ?

Quelies étaient

Etats généraux ?

Les Etats provinciaux constituent un privilége particulier a certaines provinces appelées pays d'Etats. Ils s'assemblent tous les trois ans. On y discute l'impôt; on y fixe les sommes à payer au

souverain.

Les Etats généraux forment le conseil public des rois. On y traite les attributions des de la police publique, de la paix et de la réforme des lois, des Etaient-il perma- procès criminels des grands, et autres affaires majeures. Mais le roi, dont ils gênent l'autorité, ne les convoque qu'à de rares intervalles et dans des circonstances solennelles.

nents?

Ne faut-il pas les

ciennes assemblées,

Quelques historiens ont très-improprement qualifié d'Etats géné distinguer des an- raux les assemblées de la nation qui, sous les rois de la première connues sous le nom race, se tenaient en plein champ, le premier jour de mars, et, plus ou de mai, et qui, tard, le 1er mai, d'où elles furent appelées Champs de mars o sous Pepin, prirent de mai, et qui prirent, sous le règne de Pépin, le nom de Parle

de champs de mars

le nom de Parle

ments?

Quel est le roi qui, le premier, a con

voqué des États ge

ments.

Les anciens Parlements, dont celui de Paris et tous les autres tirent leur origine, ne sont point des États généraux proprement dits. Composés d'abord des nobles de la nation, ils furent ensuite réduits aux grands du royaume et aux magistrats qui leurs furent associés. Le clergé ne formait pas encore un ordre à part; les prélats n'y furent admis qu'en qualité de grands vassaux de la couronne. Quant au tiers-état, on ne le connaissait pas alors: compose en grande partie de serfs, il n'avait aucune part aux affaires du royaume. Il ne commença à se former que sous Louis le Gros, par l'affranchissement des serfs, qui devinrent ainsi bourgeois du ro et des seigneurs qui les avaient affranchis.

Devenu libre, le peuple voulut avoir part au gouvernement de l'État. Les rois, afin de balancer le crédit des autres ordres, devenus trop puissants, l'élevèrent par degré en l'admettant aux charges. Il n'y eut cependant pas, jusqu'au temps de Philippe le Bel, d'autres assemblées que celles dont je viens de parler.

Philippe le Bel, fort embarrassé dans ses démêlés avec le pape Urbain VIII, eut besoin du peuple: il chercha à se l'attacher en néraux pro, rement l'admettant à l'assemblée qu'il convoqua le 23 mars 1301. C'est donc lui qui le premier a convoqué de véritables Etats généraux,

dits?

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