Page images
PDF
EPUB

Brüsseler

Nr. 5363. discussion du § 6. M. le Colonel Fédéral Hammer demande quelle est Conferenz l'interprétation que le Projet Russe donne ici à l'expression "capitaux du Gouvernement." Il ajoute qu'il est chargé de proposer la rédaction suivante:

staaten.

13. Aug. 1874.

--

"L'armée qui occupe un pays a le droit de prendre possession de tous les fonds du Gouvernement qui se trouvent dans les caisses publiques, de ses dépôts d'armes, de ses moyens de transport, de ses magasins et approvisionnements, et de ses autres propriétés mobilières qui par leur nature peuvent servir au but de la guerre." || M. le Délégué de Suisse motive cette proposition de la manière suivante. Dans son pays il existe, dans presque tous les cantons des administrations particulières, des caisses d'épargnes, assurances obligatoires contre l'incendie des immeubles, &c. Dans ces institutions l'Etat comparaît nominalement comme propriétaire, comme créancier, &c., tandis qu'en réalité il ne fait qu'administrer les affaires de ses ressortissants qui lui confient leurs économies, font assurer auprès de lui leurs maisons, &c. A la rigueur le Projet Russe, en soumettant tous les capitaux du Gouvernement à la prise de possession, permet également de saisir le numéraire, les fonds, les valeurs et les créances des institutions, quoique celles-ci ne soient que des administrations d'intérêts et de biens privés. La rédaction doit donc être précisée. Un débat s'engage sur la demande de M. le Délégué de Suisse. La Commission reconnaît qu'il est difficile de donner une définition technique des mots "capitaux du Gouvernement." || Après avoir écarté plusieurs formules comme ne rentrant pas dans les conditions voulues, MM. les Delégués délibèrent sur l'explication suivante de M. le Général de Voigts-Rhetz: "On peut entendre par "capitaux du Gouvernement" les sommes disponibles et les valeurs exigibles appartenant en propre et exclusivement à l'Etat, tels que le numéraire, les lingots d'or et d'argent, les fonds quelconques, &c. Tout ce qui se trouve dans les caisses de l'Etat, mais appartenant à des personnes privées ou à des corporations, doit rester intact. En d'autres termes, tout ce qui est prouvé être à l'Etat peut être saisi; tout ce qui est démontré être propriété privée, même se trouvant entre les mains de l'Etat, doit être respecté et protégé." || La Commission décide que cette interprétation sera insérée au Protocole. M. le Comte Chotek demande, si, tout en figurant au Protocole, elle ne pourrait pas faire partie intégrante du texte du § 6. M. le Baron Jomini dit que c'est inutile, puisque le Protocole est le commentaire vivant. du texte et fait loi comme le texte lui-même. || M. le Colonel Fédéral Hammer renouvelle la question qu'il a posée plus haut sur le point de savoir, si les capitaux des particuliers, administrés par l'Etat dans les caisses d'épargnes et les assurances contre l'incendie, tomberaient sous l'application de la clause de l'Article 6. || La Commission est d'avis que, d'après l'interprétation déjà admise, les capitaux auxquels fait allusions M. le Délégué de Suisse ne pourraient pas être saisis par l'occupant. | M. le Général de Voigts-Rhetz propose d'arrêter une rédaction provisoire du § 6 et de réserver le texte final pour la seconde ou la troisième lecture. M. le Délégué

Brüsseler

d'Allemagne émet l'opinion que les Gouvernements, sous les yeux desquels les Nr. 5363. Protocoles sont placés, pourront juger les diverses manières de voir expri- Conferenzmées dans la Commission et trouveront sans nul doute une définition qui soit de nature à satisfaire tout le monde. Cette motion est adoptée.

[ocr errors]

M. le Baron Jomini demande, si la Commission peut se prononcer sur la proposition faite par M. le Baron Baude et conçue en ces termes: || "Toutes les valeurs portant intérêts qui seraient saisies devront être restituées, la jouissance des intérêts cessant avec l'occupation." M. le Délégué de France dit qu'il n'a entendu émettre qu'une opinion personnelle, et qu'il demandera des instructions à son Gouvernement pour s'éclairer lui-même || La Commission se prononce dans le même sens.

M. le Général de Voigts-Rhetz demande, si les paiements faits par anticipation au Gouvernement légal, au moment où l'occupation allait commencer, par les habitants du territoire occupé, doivent être respectés et considérés comme compte réglé. M. le Délégué d'Allemagne suppose le cas où l'on retirerait des caisses de perception les impôts qui s'y trouvent pour les rendre à l'Etat légitime. L'occupant doit-il respecter cette espèce de fraude, ou peut-il s'adresser de nouveau aux contribuables? | M. le Général de Leer estime que l'occupant a le droit d'exiger le versement régulier des impôts. || M. le Colonel Staaff pense que la question posée par M. le Délégué d'Allemagne se résout d'elle-même. M. le Délégué de Suède et Norvége est d'avis qu'il ne doit pas être tenu compte de ce paiement, attendu qu'il n'a pu être fait qu'à l'insu et au détriment de l'occupant. M. le Général de VoigtsRhetz tient à préciser sa pensée. Il suppose que l'on se trouve en présence d'une occupation de fait (aux termes de l'Article I), et que les habitants s'acquittent tous d'avance entre les mains de l'ancienne administration, après que le pouvoir occupant est constitué. Celui-ci doit-il respecter le paiement fait, bien qu'il aît un caractère frauduleux? La négative semble évidente à M. le Délégué d'Allemagne. M. le Baron Baude croit que, puisqu'on refuse à l'occupant le droit d'exiger les impôts à l'avance, on ne peut l'obliger à considérer comme régulièrement opérés les versements faits par anticipation au Gouvernement légal; du moment qu'on impose une limite au droit de l'occupant, si l'on veut qu'il la respecte, il faut qu'elle soit respectée à son égard. M. le Comte Chotek fait remarquer en outre qu'il n'y aurait même pas, à proprement parler, de douple paiement, puisque le premier versement devrait être considéré plutôt comme une donation patriotique. || M. de Lansberge dit que le receveur pourrait verser à l'insu des contribuables les recettes entre les mains du Gouvernement légal, et il demande, si, dans ce cas, on peut rendre les habitants responsables de cet acte. M. le Général de Voigts-Rhetz ne voit ici qu'un cas spécial, qu'on ne doit pas prévoir. Le fait qu'a en vue M. le Délégué des Pays-Bas constituerait une escroquerie. M. le Colonel Fédéral Hammer, d'ordre de son Gouvernement, propose d'ajouter après les termes "toute propriété du Gouvernement" le mot "mobi

staaten.

13. Aug. 1874.

Brüsseler

staaten.

13. Aug.1874.

Nr. 5363. lière," et ensuite de dire "qui par sa nature peut servir au but de la guerre." Conferenz- M. le Général de Voigts-Rhetz dit que dans ce cas il faut définir quels sont les objets qui ne peuvent pas servir à ce but. M. le Colonel Fédéral Hammer cite, par manière d'exemple, les ameublements des hôtels de ville, des ministères, &c. | M. le Général de Voigts-Rhetz trouve qu'il serait utile de s'expliquer à cet égard, parceque tout ce qui peut aisément être vendu est de nature à servir au but de la guerre.

La Commission passe ensuite à l'examen dé "l'Observation" placée à la suite du § 6. M. de Lansberge est d'avis qu'il serait préférable de discuter les points qui y sont traités au chapitre qui parle de la propriété privée. M. le Colonel Comte Lanza pense que si la Commission ne croit pas devoir simplement comprendre le matériel dont il s'agit dans les autres propriétés privées dont il est question dans un autre Chapitre, et si elle persiste à maintenir "l'Observation" faisant suite à l'Article 6, il ne pourrait prendre la responsabilité de préjuger, en acceptant telle quelle l'observation susdite, les graves questions qu'elle peut soulever entre les droits de l'Etat, d'un côté, et les droits des compagnies, fabricants, &c., de l'autre. | M. le Président dit qu'on pourrait, à la rigueur, ajouter après chaque Article: "sauf les nécessités de la guerre;" mais il croit que cette restriction vague produirait un effet fâcheux dans l'opinion publique. || Selon M. le Général de Voigts-Rhetz il s'agit quant aux chemins de fer, télégraphes, bateaux, &c., d'objets que l'on peut employer comme moyens de guerre, mais qui doivent être restitués plus tard à leurs véritables propriétaires. Toutefois il ne faudrait pas pousser cette dernière obligation jusqu'à l'excès. Ainsi des armes empruntées ou enlevées seront rendues dans l'état où les aura mises la guerre, ou ne seront même pas rendues du tout; si par suite d'une insurrection ou toute autre cause elles disparaissent, ou subissent des détériorations, on ne devra ni les remplacer ni payer d'indemnité. Il en sera de même des munitions. Mais comme en principe général on doit faire la restitution après la guerre ou donner un reçu de tout ce que l'on demande aux particuliers, il est nécessaire de proclamer ce principe relatif aux armes et munitions, pour que personne n'en ignore; car tout le monde a intérêt à connaître les lois et les droits de la guerre. En résumé, M. le Délégué d'Allemagne trouve qu'une discussion sur cet objet ne serait pas difficile actuellement. | M. le Baron Jomini dit que c'est à l'avantage du pays occupé qu'on cherche à régler cette matière. M. le Baron Lambermont signale l'importance particulière que présentent ces questions pour les compagnies de chemins de fer, la fabrication et le commerce des armes en Belgique. D'après la législation Belge, nul ne peut être privé de sa propriété que moyennant indemnité préalable. En reconnaissant à une armée d'occupation le droit de procéder autrement, le Gouvernement ouvrirait peut-être la voie à des revendications d'indemnité adressées à lui-même et pouvant prendre des proportions énormes. Ce sont là des questions, sur lesquelles il paraît impossible de se prononcer sans un

Brüsseler Conferenz

staaten. 13. Aug.1874.

examen approfondi et prolongé. || M. le Baron Jomini croit qu'il est indispen- Nr. 5363 sable qu'on fasse connaître quels sont les droits de l'occupant en cette matière. Le vague ne profiterait qu'au plus fort. D'après M. le Baron Lambermont on ne peut conclure, de ce qu'il n'existe pas de Traité international sur le droit des gens, que les règles du droit des gens sont inconnues ou n'ont aucune sanction. Grâce aux progrès de la civilisation et aux travaux de la science les principes essentiels sont aujourd'hui dans tous les esprits, et il n'est point de chef d'armée qui oserait, de notre temps, faire bon marché de la conscience générale. Sans doute, si un Traité pouvait être conclu en termes acceptables pour tous les pays, et donnait un corps au droit des gens, ce serait une chose utile et heureuse et méritant toute la reconnaissance des peuples; mais il n'aurait lui-même qu'une sanction morale, attendu que, s'il venait à être violé par des Etats en guerre, aucune des Puissances ici représentées ne contracte l'obligation de prendre les armes pour le faire respecter. M. le Baron Jomini répète qu'il n'en est pas moins utile, dans l'intérêt des populations, d'avoir des règles précises. M. le Président ne fait pas de doute qu'une trop grande liberté laissée au plus fort ne soit la source de graves abus. || M. le Baron Lambermont juge toutefois utile que l'on prenne le temps de s'éclairer sérieusement avant de se prononcer sur une matière aussi délicate et aussi importante que celle dont il s'agit. M. le Général de Voigts-Rhetz reconnaît avec M. le Baron Lambermont que la propriété privée ne jouit pas ici de toute la protection qu'elle trouve en d'autres occasions; mais il y a des circonstances où il est impossible de s'en tenir aux principes absolus. M. le Délégué d'Allemagne cite le cas d'un magasin de poudre ou d'une fabrique de fusils qui se trouveraient dans une ville soumise à l'occupation. Il est de l'intérêt évident de l'occupant de ne les pas laisser subsister. Si les propriétaires sauvent leurs armes au besoin par mer et renoncent spontanément à leur fabrication, ils conservent du moins leur propriété; sinon, ils subiront un dommage considérable. Il est bon, aux yeux de M. le Délégué d'Allemagne, que les Gouvernements appelés à ratifier les décisions de la Conférence connaissent bien l'opinion des Délégués. Si la Commission passe sous silence certaines questions épineuses, les Gouvernements manqueront des lumières nécessaires pour se prononcer en connaissance de cause. M. le Duc de Tetuan, parlant dans le même sens, dit qu'il faut se montrer accommodant pour beaucoup d'articles. Si l'on voulait tracer en toutes matières des limites précises aux droits de la guerre, il serait impossible d'arriver à un résultat pratique. M. le Délégué d'Espagne croit donc qu'il faut se contenter de règler certains points seulement. M. le Président dit que, quelle que soit, pour l'avenir, la suite donnée aux délibérations de la Conférence, il est incontestable qu'elles auront en tout cas jeté une vive lumière sur un grand nombre de questions importantes. Avoir amené des Représentants de tous les Etats Européens à discuter les principes essentiels qui doivent, en réglant la guerre, en adoucir les rigueurs, à en admettre un cer

Brüsseler

staaten.

13. Aug.1874.

Nr. 5363. tain nombre, à préparer les solutions des autres, et enfin à asseoir ainsi les Conferenz- bases de l'édifice qu'il s'agit de construire, c'est un fait dont l'importance ne peut échapper à personne, et dont, semble-t-il, on ne peut que se féliciter. M. le Colonel Fédéral Hammer désirerait attirer l'attention de la Commission sur une question qui a pour son pays une importance particulière. M. le Délégué de Suisse fait observer que dans cette contrée les barques ou nacelles sont souvent les seuls moyens de communication entre plusieurs localités placées sur les bords de certains lacs. Si donc l'on exécutait à leur égard la clause de la Convention, on méconnaîtrait par le fait même les garanties proclamées à l'Article 1, où il est dit que la vie publique doit être assurée. M. le Colonel Fédéral Hammer croit donc qu'il serait équitable de formuler ici une restriction. M. le Général de Voigts-Rhetz dit que si l'ennemi a besoin de bateaux ou de barques, il disposera nécessairement de ceux qu'il a sous la main; mais il est tenu de les rendre ensuite à leurs propriétaires ou, si cela n'est pas possible, de leur donner un reçu. M. le Délégué d'Allemagne ajoute que loin de devoir s'abstenir de saisir les bateaux servant de moyens de communication entre certaines localités, l'ennemi devra s'en emparer parfois dans le seul but d'entraver ces relations absolument comme cela se fait sur terre. | M. le Colonel Fédéral Hammer déclare qu'il a surtout en vue les petites nacelles affectées au transport des habitants. M. le Général de Voigts-Rhetz dit que si l'on peut saisir les voitures des maraîchers ou des fournisseurs, &c., il ne voit pas pourquoi on devrait respecter davantage les nacelles dont M. le Délégué de Suisse plaide la cause. La règle en cette matière est tracée à l'Article 2. Il serait impossible de s'arrêter à rechercher toutes les exceptions qu'elle comporte. | M. le Baron Lambermont trouve qu'il y a une circonstance dont il faut tenir compte. Dans le cas indiqué par M. le Colonel Fédéral Hammer, et en faisant une nouvelle application d'une expression célèbre, on peut dire que la nacelle est un chemin qui marche. Or, on ne saisit pas les chemins. On convient enfin d'insérer au Protocole la déclaration suivante:

"Dans les cas où les bateaux serviront d'unique communication, nécessaire et indispensable, ils est dans la pensée de la Commission que l'occupant aura égard aux exigences de la vie publique."

M. le Général de Voigts-Rhetz expose qu'il pourrait y avoir la même nécessité de s'emparer de nacelles que de bateaux-à-vapeur ou de vaisseaux. Selon M. le Délégué d'Allemagne "tout ne doit pas être nécessairement saisi, mais tout peut l'être." M. le Duc de Tetuan demande la modification de la première partie de l'Observation; il désire qu'on ajoute après le mot "vaisseau" ceux-ci: "appartenant à la navigation des lacs du continent, des fleuves et rivières qui ne sont pas navigables, en communication avec la mer." M. le Délégué d'Espagne dit que le but de cette addition est d'indiquer clairement qu'on ne prétend pas préjuger les droits et lois de la guerre maritime, lois et droits qui sont absolument étrangers au projet soumis aux discussion de

« PreviousContinue »