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pense à la charge du budget départemental. Le 4 avril, la majorité de la commission proposait à l'Assemblée de revenir sur son premier vote, en décidant que les secours et les pensions seraient dus par la commune. De son côté, la minorité de la commission proposait un système intermédiaire qui participait des deux systèmes exclusifs, en disposant que, dans le cas où le budget communal n'offrirait pas de ressources, ou n'en offrirait que d'insuffisantes, il y serait suppléé par le département. Après un long débat, auquel prit part le ministre de l'intérieur, le système proposé par la minorité de la commission fut rejeté; celui que présentait la majorité de la commission fut adopté.

Le lendemain, 5 avril, le projet fut adopté dans son ensemble, par 503 voix contre 79.

Sortie péniblement d'une discussion difficile, pendant laquelle les amendements s'étaient succédés en grand nombre, cette loi n'était pas complète; sa bonne application exigeait sans doute des solutions complémentaires, mais elle consacrait formellement un droit important en faveur de citoyens dévoués, leur assurait, dans des circonstances douloureuses, un avenir moins incertain, et c'était là un résultat louable.

Sans doute la sollicitude constante des communes pour les sapeurs-pompiers qui succombent dans l'accomplissement de leur tâche périlleuse, ou qui en restent victimes jusqu'à la fin de leur vie, ne permettait pas de considérer la loi comme un acte de réparation; mais on ne pouvait qu'approuver la pensée de fixer législativement des droits si légitimes.

Tel est l'ensemble des efforts honorables faits par l'Assemblée pour assister, protéger et moraliser les masses. Dans cet ordre d'idées, deux écueils sont à éviter; il faut se garder d'exagérer le droit du pauvre, il faut éviter aussi de substituer incessamment l'action officielle de l'Etat à l'action individuelle de la charité. Ces deux tendances contraires n'avaient été que trop représentées des deux côtés de l'Assemblée. On pourrait dire sans exagération que la prétention à réglementer partout et toujours l'assistance que le riche doit au pauvre, n'est pas moins démoralisante que les doctrines haineuses qui partagent la société en deux camps ennemis.

Et cependant, comment ne pas prendre confiance dans la charité individuelle, quand on assiste à ses miracles!

Au milieu des déclamations qui attaquent la société moderne et qui appellent sur elle le déchaînement des plus mauvaises passions, un fait patent, incontestable, c'est que, dans le foyer même. des déclamations et des misères, à Paris, la bienfaisance a plus que triplé depuis vingt ans. On donne plus, on donne mieux. Le recensement des pauvres, en 1850, constate que, malgré l'accroissement de la population et toutes les ruines qu'entraînent à leur suite les soulèvements révolutionnaires, le chiffre des misères est redescendu au point où il était en 1844.

Si Paris a donné l'impulsion, son exemple a été noblement suivi dans presque toutes les grandes cités et dans un grand nombre de villes de second et de troisième ordre. Il n'est pas une invention de la charité, pas une ruse de la bienfaisance pour attirer ou surprendre les dons qui n'ait eu des imitateurs.

CHAPITRE VIII.

FINANCES.

Budget. Projet de M. de Germiny, les découverts, la dette flottante, les différents services; discussion dans les bureaux, optimisme et inquiétudes; rapports de MM. Gouin et Passy. Caisses d'épargne. Histoire de l'institution, proposition de M. Delessert, législation nouvelle. Réforme hypothécaire, crédit foncier. Projets divers, rapport de M. Chégaray, avortement.

Situation financière, établissements de crédit. Adjudication de rentes; abaissement de l'intérêt des bons du Trésor; situation de la Banque, afflux de l'encaisse; opérations de la Banque et de sa succursale pendant l'année ; opérations de la caisse d'épargne, effet de la loi nouvelle; budget municipal de la ville de Paris, répartition de la contribution foncière, augmentation du contingent imposé à la ville; dépréciation de l'or, commission spéciale, résolution.

Au milieu des préoccupations journalières de la politique, les questions de finances devaient être impuissantes à attirer la sérieuse attention de l'Assemblée nationale. Aussi, n'est-ce qu'en réunissant les discussions tronquées ou mal étudiées de la Chambre, en constatant à divers moments l'état de la fortune publique, que nous pourrons donner au lecteur une idée des finances de la France pendant cette année de luttes et de crise.

Budget. - Le projet présenté par M. Fould, le 4 avril 1850, pour le budget de 1851, avait, on se le rappelle (Voyez l'Annuaire pour 1850 p. 312), porté les dépenses à la somme de 1,284 millions et la recette à 1,292 millions, avec un boni apparent de 8,807,000 fr., l'action de l'amortissement restant encore suspendue. Le résultat final fut une balance de 1,367,000 fr. environ pour les dépenses et de 1,371,000 fr. pour les recettes, mais non compris les travaux extraordinaires montant à plus de 67 millions, et les crédits supplémentaires et extraordinaires.

Ainsi disparaissait en réalité l'excédant de 4 millions dont le vote de la chambre avait consacré l'apparence.

Le 7 février 1851, M. de Germiny présenta ses prévisions pour l'exercice de 1852; elles s'élevaient, quant au service ordinaire, pour les recettes, à 1,382,663,416 fr., pour les dépenses, à 1,372,978,828 fr., d'où ressortait un excédant de ressources présumées de 9,684,588 fr. C'était, sur l'exercice précédent, une amélioration de 5,547,539 fr. obtenue par des augmentations de recettes montant à 11, 283,688 fr., tandis que les crédits n'avaient été accrus que de 5,736,319 fr.

Les découverts des exercices antérieurs, ajoutés à ceux des années 1848, 1849, 1850 et 1851, s'élevaient à 646,873,600 fr.

Les découverts antérieurs à 1848 s'élevaient à 260,870,600 fr. Le découvert de l'année 1848, estimé d'abord à 72, puis à 19 millions, s'était considérablement atténué par les liquidations finales de l'exercice, et le projet de loi de règlement définitif le portait seulement à 3,005,000 fr. Mais ce n'était qu'au prix de charges extraordinaires imposées à la dette consolidée et à la propriété foncière, que ce résultat avait pu être obtenu.

Le découvert de 1849, porté d'abord à 253 millions, s'étaitréduit, par des plus-values dans les recettes, par des économies réalisées sur divers crédits, par des reports de crédits non employés à 202 millions.

Quant au budget de 1850, au moment où il avait été voté, il semblait devoir se solder par un excédant de dépense de 12,256,000 fr.; les crédits supplémentaires successivement accordés par l'Assemblée ou soumis à son examen, l'augmenteraient de 50,286,000 fr.; mais, d'un autre côté, l'élévation des revenus indirects, le produit des droits additionnels sur le timbre, la négociation d'obligations du chemin de fer de Rouen, montant à 15,302,821 fr. 50 cent., et la plus-value des rentes provenant des caisses d'épargne et du chemin de fer de Lyon, avaient créé des ressources nouvelles qui, compensation faite des réductions survenues dans quelques branches de revenus, s'élèveraient à la somme de 43,301,000 fr. Le découvert du service ordinaire était ainsi ramené à 13,241,000 fr., somme à peu près égale à l'évaluation primitive, et si l'on y ajoutait la dé

pense des travaux extraordinaires autorisée pour 90,066,500 fr. par la loi du 15 mai 1850, et accrue de 2,200,000 fr. par des allocations subséquentes, l'exercice 1850, pris dans son ensemble, révélerait une insuffisance de recette de 105,507,500 fr., situation qui pourrait s'améliorer, d'ailleurs, en règlement d'exercice, par des abandons ou des reports de crédits.

On ne pouvait encore former que des conjectures sur les résultats de l'exercice 1851. Le service ordinaire, voté avec un excédant de recette de 4,137,200 fr., présentait, dès aujourd'hui, un découvert de 7,866,800 fr., par suite du vote ou de la présentation de divers projets de loi portant ouverture de crédits additionnels, pour une somme totale de 12,004,000 fr. Il y avait lieu de prévoir, en outre, que des besoins supplémentaires viendraient, dans le cours de l'exercice, s'ajouter à cet excédant. Mais, en tenant compte des annulations habituelles de crédits qui s'opèrent en clôture d'exercice, et des plus-values considérables que l'expérience des deux années précédentes faisait pressentir sur les impôts indirects, il était permis d'espérer, disait M. de Germiny, que le budget de 1851, pour le service ordinaire, se réglerait en équilibre.

Quant aux travaux extraordinaires de 1851, les crédits qui avaient été ouverts par la loi du budget pour 67,391,500 fr., s'élevaient maintenant à 67,623,700 fr. par le report d'un crédit non employé.

La situation du Trésor n'inspirait pas d'alarmes à M. de Germiny, et le ministre ne voyait aucun danger dans une dette flottante assez lourde. Cette dette se décomposait ainsi :

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Inutile de dire que l'action de l'amortissement restait encore suspendue.

Dans le projet de M. de Germiny, l'instruction publique récla

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