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Le dernier et le plus grave de ces incendies eut lieu à la BasseTerre, dans la nuit du 28 au 29 novembre. Pendant deux heures on put craindre la destruction de la ville; il fallut des prodiges d'activité, de courage et de dévouement de la part des habitants de toute couleur, des troupes de la garnison et des autorités pour concentrer le fléau dans son foyer principal, et réduire le sinistre à la perte de trois maisons avec toutes les marchandises qu'elles contenaient. Les blessés furent au nombre de quatorze, parmi lesquels figuraient trois noirs et dix militaires; l'un de ces derniers succomba à la gravité de sa blessure. Parmi les travailleurs les plus empressés, au plus fort de l'incendie, le respect public distinguait le pieux évêque de la Guadeloupe, Mgr Lacarrière, qui, donnant l'exemple, servait les pompes comme le plus humble des citoyens.

Ainsi, cinq fois dans l'espace de deux mois, le feu, allumé par des mains coupables, et en exécution d'un plan systématique, avait éclaté sur divers points de l'île et jeté la consternation parmi les habitants.

Martinique. A la Martinique, une situation semblable exigeait également une répression sévère. Les révélations d'un sieur Joseph Cabon, incendiaire de l'habitation Belost, amenèrent quelques arrestations importantes, entre autres celle d'un sieur Cidias, dit Macaque.

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Guyane française.- Cayenne. La destination nouvelle donnée à notre colonie de la Guyane ramena l'attention sur cette possession, depuis si longtemps laissée dans un injuste oubli.

Des préjugés sans fondement ont détourné de cette colonie l'émigration de la métropole. On accuse la Guyane d'insalubrité. Cependant son territoire est plus sain que celui des Antilles, car il est exempt de la fièvre jaune. Il est vrai que des marais pestilentiels se sont formés à l'embouchure des fleuves, sur les terres basses, et que le séjour près de ces eaux stagnantes est souvent mortel. Mais les terres hautes sont parfaitement saines, et la civilisation avec les travaux aurait bientôt assaini les lieux bas eux-mêmes. Cayenne, où s'est formé le noyau principal de la colonisation, est aussi sain que notre France méridionale. La garnison n'y subit que la mortalité ordinaire; on l'emploie sans

danger aux travaux de fortification, et la population flottante qui passe dans la ville et dans toute l'étendue de l'île, à l'exception des côtes marécageuses, n'est pas, comme dans les Antilles, sujette aux épreuves de l'acclimatation.

Cette année, toutefois, la Guyane était encore rudement éprouvée, non-seulement par la diminution continuelle du travail et des produits, mais encore par une épidémie typhoïde qui décima la magistrature, le clergé, le service de santé et les sœurs si dévouées de Saint-Joseph, et qui enleva, entre autres personnes notables, le gouverneur par intérim, M. Maissin, capitaine de vaisseau, l'un des officiers les plus remarquables de notre flotte.

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Sénégal et Guinée. Le commerce français prend chaque jour plus d'extension sur la côte d'Afrique. Les châtiments même qu'il est, de temps à autre, nécessaire de faire subir aux naturels des deux rives, contribuent au développement de nos relations commerciales.

Au commencement du mois d'avril, il fallut encore donner une leçon à ces sauvages. Les naturels avaient commis plusieurs pillages et s'étaient retirés ensuite dans un vaste village de la Caza mance, à quatre-vingts lieues de Gorée. M. Charles Penaud, commandeur de la station, fit prévenir les chefs qu'il ne les condamnerait qu'à la restitution et à une légère amende, leur donnant d'ailleurs connaissance des forces dont il disposait et leur démontrant la folie d'une résistance. Les naturels firent répondre qu'ils étaient des hommes, et qu'ils boiraient dans le crâne des blancs français comme leurs voisins avaient bu dans le crâne de s blancs anglais. Ils faisaient allusion, par là, à une expédition anglaise battue, quelque temps auparavant, dans le voisinage. Et ces insensés distribuèrent des cordes à leurs femmes pour attacher leurs prisonniers. Il fallut les châtier.

M. le commandant Penaud disposait de trois bâtiments de guerre, la frégate à vapeur l'Eldorado, sur laquelle il avait porté son pavillon; le Liamone, vapeur sous les ordres de M. Ropert et le brick le Prévoyant, commandé par M. Jaffrezie. M. Penaud effectua sa descente par une chaleur accablante, avec quatre cent cinquante hommes et trois obusiers de campagne.

Le choc fut de courte durée. Les naturels en grand nombre s'étaient développés pour entourer les troupes françaises et leur couper la retraite. On les chargea vigoureusement, on leur tua une vingtaine d'hommes et ils prirent la fuite de tous côtés. Le feu fut mis au village et les naturels perdirent une énorme quantité de bestiaux et de provisions.

Le lendemain, les chefs vinrent demander la paix.

Sur les côtes de Guinée, près du comptoir français du GrandBassam, ce sont des populations anthropophages dont il faut réprimer les excès. Le commandant de ce poste, M. Despallières, lieutenant d'infanterie de marine, fut forcé de donner une leçon semblable au roi Peter, chef d'une tribu de ces cannibales.

DEUXIÈME PARTIE.

HISTOIRE ÉTRANGÈRE.

BELGIQUE.

CHAPITRE PREMIER

Formation d'un tiers parti libéral, crise de 1850, le budget de la guerre, réduction des dépenses, loi organique de l'armée, démission du général Brialmont, lettre du roi à M. Rogier, dénoûment de la crise, question de confiance, le ministère l'emporte; l'impôt sur les successions directes, le serment, désaccord entre la chambre et le ministère, seconde crise, replâtrage, menées radicales; la chambre se déjuge, l'impôt adopté, le sénat le rejette, troisième crise ministérielle; dissolution du sénat, clôture de la session, élections, les villes et les campagnes, échec du ministère; réouverture de la session, discours royal, appel à la conciliation; transaction, amendement Spitaels et Dumon-Dumortier, discours de MM. d'Anethan et Dumon-Dumortier, fin du conflit; le coup d'État du 2 décembre, contre-coup en Belgique, craintes chimériques. Budget, commerce extérieur, voies de communication, chemins de fer, canaux. Traité conclu avec la Sardaigne. NÉERLANDE. Loi communale, historique du projet, adoption, dispositions de la loi, élections communales, esprit d'intolérance, exclusion des catholiques; assistance publique, tentative d'usurpation de la part du gouvernement sur les institutions de bienfaisance, émotion générale, opposition grave; liberté d'association et de réunion, ajournement; la chambre se proroge, question constitutionnelle, clôture de la session; ouverture de la session nouvelle, discours royal, appel à la concorde. Situation prospère des finances, budget, découverts, excédants, dette, amortissement, arriéré russe; chemins de fer, projet d'union avec le réseau allemand; flotte marchande, résultat des lois de navigation; commerce extérieur; colonies.

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GRAND-DUCHÉ de Luxembourg.

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Discours duprince lieutenant du roi, adresse de la chambre des députés, rapports du grand-duché avec la Confedération germanique.

BELGIQUE.

On se rappelle quelle était, à la fin de l'année 1850, la situation précaire du ministère belge, en face d'une minorité

toujours croissante et d'une majorité peu dévouée. Un parti intermédiaire se formait depuis quelque temps dans la chambre des représentants. La signification assez confuse de cette fraction. indépendante lui avait permis en 1850 de soutenir, à son gré, ou de combattre la politique du ministère, tandis que celuici était obligé de recourir au dangereux appui du parti catholique. De là la crise de 1850 et la formation du nouveau cabinet du 12 avril, dans lequel figurait un des principaux chefs du tiers parti libéral, M. Tesch.

Le prétexte des luttes de 1850 avait été, on le sait, le budget de la guerre, dont le tiers parti voulait réduire encore les allocations, déjà diminuées par le général Chazal. L'opposition, représentée dans le cabinet par M. Tesch, demandait que le chiffre des crédits fût désormais fixé à 25 millions. Le nouveau ministre de la guerre, le général Brialmont, déclara que cette réduction nouvelle ne pouvait être opérée qu'après une étude approfondie de l'organisation militaire du pays.

Mais, pour descendre à ce chiffre, respecterait-on la loi organique de l'armée ? Ici éclatait un dissentiment dans le sein de l'administration. MM. Rogier et Frère-Orban ne reculaient pas devant une révision de la loi le ministre de la guerre ne voulait pas y consentir. Celui-ci dut céder et donner sa démission. Le 21 janvier S. M. belge avait pris parti dans la querelle par la lettre suivante, adressée à M. Rogier :

« Mon cher ministre,

« Bruxelles, 21 janvier 1851.

« Les circonstances où nous nous trouvons n'indiquent qu'une seule solution >> de la difficulté ministérielle, c'est que vous vous chargiez de l'intérim du por» tefeuille de la guerre. Vous savez quelle est ma confiance en vous; je suis per>> suadé que le sentiment du pays à votre égard est le même.

» Sans sécurité nationale il n'y a pas d'existence politique; tous les intérêts » les plus précieux, sans exception aucune, se rattachent à cette sécurité. Les » garanties les plus fortes doivent donc être données au pays et à l'armée que » nous défendrons les éléments de cette sécurité comme notre trésor le plus pré» cieux. Je remets ce dépôt entre vos mains courageuses et dévouées; la tâche, » je le sais, est laborieuse et difficile, mais vous défendrez le plus grand intérêt »> national.

» J'ai assez de foi dans votre dévouement et dans votre caractère pour m'en » remettre à vous de l'accomplissement d'un devoir sacré pour nous tous, et je

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