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des pauvres : « Le régime des pauvres s'étend à toutes les institutions de bienfaisance et à tous les établissements destinés à recevoir les mendiants et les vagabonds. » Et ils ajoutaient : « Par institutions de bienfaisance, on entendra celles qui se proposent le soulagement et le soin des nécessiteux, soit dans les établissements de charité, soit hors de ces établissements. » La conséquence naturelle de ces définitions était que l'existence de tous les établissements de bienfaisance, quelle que fût leur origine ou leur nature, devait être réglée par la loi civile. Tel était, en effet, le but du projet de loi.

Ce projet jeta l'alarme dans tout le pays. De toutes parts, dans la presse périodique et du sein des conseils qui régissent les institutions pour les pauvres, des voix s'élevèrent pour combattre les tendances déplorables qui s'y étaient fait jour, et pour protester vigoureusement contre cette importation du système anglais, contraire à toutes les tendances de l'esprit national. Dans l'opposition contre cette loi présentée par M. Thorbecke, ministre de l'intérieur, la plupart des protestants, et même les israélites, se réunirent aux catholiques. Ces derniers étaient conduits à cette opposition par la force de leurs principes, les autres y étaient poussés par les intérêts bien entendus des institutions charitables qu'ils avaient eu à gérer et à administrer jusqu'à ce jour, et qui se trouvaient menacées par le projet du gouvernement. De là un cri unanime de réprobation contre le ministère; de là un mouvement tout à fait nouveau au sein des partis religieux et politiques des Pays-Bas.

Le parti libéral chercha à limiter cette opposition aux réclamations des diaconies, afin de la mieux combattre. Mais l'usurpation préméditée n'atteignait pas heureusement les églises catholiques seules: elle s'étendait à toutes les institutions de bienfaisance, elle voulait confisquer toutes les créations de la charité publique. Déjà on pouvait prévoir que le ministère courait, sur cette question, au-devant d'un échec.

Un autre projet relatif à la liberté d'association et de réunion ne put aboutir et n'amena que des discussions passionnées. On convint de l'ajourner à une autre session. Puis la Chambre, après avoir voté un certain nombre de lois, celle, par exemple, sur

l'expropriation pour cause d'utilité publique, et des traités de commerce conclus avec la Grèce et la Sardaigne, résolut de se séparer. Ici s'élevait une question constitutionnelle : l'assentiment du pouvoir exécutif n'était-il pas nécessaire? la Chambre pouvait-elle se proroger d'elle-même, et n'y avait-il pas là une flagrante usurpation des droits de la couronne? Quoiqu'il en soit, la clôture de la session fut votée par 37 voix contre 24, et la Chambre se sépara à la fin de juillet. Mais la clôture officielle de la session n'eut lieu que le 13 septembre.

La nouvelle session des états généraux fut ouverte à La Haye, le 15 septembre. Le discours prononcé par S. M. Néerlandaise à cette occasion constata la situation satisfaisante des relations extérieures, l'accroissement des voies de communication, la bonne situation des colonies, la prospérité des finances; il rappelait la conclusion de plusieurs conventions tendant à sauvegarder les intérêts du commerce, entre autres une convention conclue avec la France (voyez le texte à l'Appendice, p. 166).

Quant au conflit qui avait signalé la fin de la session précédente, le discours royal y faisait une allusion toute conciliante. S. M. y disait: « Les projets de loi si importants déjà déposés dans votre session dernière, et pour l'examen desquels le temps nécessaire a manqué, seront de nouveau soumis à vos délibérations. Que le même esprit d'accord commun, qui a pu faire achever jusqu'à présent tant de travaux importants, préside de nouveau à l'examen de ces projets de loi et d'autres qui vous seront présentés dans le courant de cette session. >>

Ce n'est pas en vain que le discours royal aura fait cet appel à la concorde. Les passions politiques, en Néerlande, n'ont jamais prévalu sur le patriotisme et sur l'intérêt du pays bien entendu ; il y a dans les corps politiques, comme dans la nation elle-même, un esprit de mesure et un bon sens qui les font échapper aux dangers des théories excessives.

De là cette prospérité que constatait le discours royal, et que vint résumer par des chiffres M. Van-Bosse, ministre des finances, en présentant le budget de 1852.

Rappelons d'abord les chiffres du budget de l'exercice 1851, voté le 31 décembre 1850.

Les dépenses y montaient à 69,720,622 florins, dont suit le détail :

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Les recettes avaient atteint un total de 70,789,939 florins,

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Pour l'exercice de 1852, M. Van-Bosse évaluait les dépenses à 69,801,936 florins, et les recettes à 71,473,823 florins, prévoyant ainsi un excédant de plus de 1,600,000 florins. Les ré

formes introduites dans les lois de navigation peuvent être considérées comme la cause la plus immédiate de cette situation prospère, en comptant toutefois au premier rang des ressources nationales l'excédant des revenus coloniaux, évalué pour 1850 à plus de 18 millions de florins, pour 1851 à 17,600,000.

Si les revenus de la Néerlande s'accroissent sensiblement, les anciens découverts s'atténuent et ses plaies financières se ferment peu à peu. Au 1er janvier 1850, il ne restait que 328,000 florins du déficit de 1848. En 1849 et 1850, un amortissement de la dette inscrite avait eu lieu jusqu'à concurrence d'une somme d'un million de florins, prise sur l'excédant des voies et moyens des exer

cices courants.

Voici la situation de la dette publique en 1851, d'après la loi du 31 décembre 1850:

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M. Van-Bosse proposa d'étendre cet amortissement en y consacrant désormais une somme de 3,200,000 florins, soit 2 millions 200,000 florins de plus que n'avait voté la loi du 2 mai 1851; cette somme nouvelle consacrée à amortir la dette nationale serait prélevée sur les fonds produits par l'aliénation des domaines. On le voit, M. Van-Bosse entrait résolûment dans la voie du dégrèvement indirect, moyen lent, mais sûr d'affermir le crédit.

La discussion du budget fat, malgré cette situation si favorable, assez passionnée, jusqu'au moment où l'écho de la nouvelle ré

volution française vint rappeler aux divers partis la nécessité de la concorde. Un seul article du budget des affaires étrangères donna lieu à des débats assez amers : il était relatif au paiement d'une dette réclamée par la Russie depuis la séparation de la Belgique et de la Hollande. La répugnance visible de la Chambre força le ministère à ajourner cette discussion pénible.

Nous l'avons dit, l'extension des voies de communication est un des éléments de la prospérité néerlandaise. M. Van-Bosse annonça aux Chambres que l'annexion des lignes néerlandaises et allemandes était en bonne voie de négociation, et que le gouvernement donnerait un subside important à la société du chemin de fer rhénan pour l'aider, aux termes des conventions faites avec le gouvernement prussien, à relier le chemin de fer rhénan-hollandais au réseau allemand.

La flotte marchande néerlandaise, cet autre grand élément de prospérité nationale, se composait, au commencement de l'année, de 2,395 navires jaugeant 224,666 tonneaux, ce qui présentait, sur pareil jour de l'année précédente, une augmentation de 136 bâtiments et de 12,598 tonneaux, déduction faite de 51 navires, jaugeant 4,163 tonneaux, qui avaient été entièrement perdus.

En 1850 étaient entrés dans les ports de Hollande 6,959 navires jaugeant 1,099,751 tonneaux, savoir: 3,117 nationaux chargés, jaugeant 459,617 tonneaux, 3,219 étrangers chargés, jaugeant 590,056 tonneaux, et 613 nationaux et étrangers sur lest, jaugeant 70,078 tonneaux.

Pendant la même année étaient sortis de ces ports: 7,017 navires, jaugeant 1,136,864 tonneaux, savoir: 2,467 hollandais chargés, jaugeant 365,008 tonneaux; 2,274 étrangers chargés, jaugeant 407,625 tonneaux, et 2,276 hollandais et étrangers sur lest, jaugeant 364,231 tonneaux.

Si l'on veut se rendre compte des résultats des lois nouvelles de navigation, on trouvera un enseignement dans les faits suivants les huit premiers mois de 1850 avaient vu donner des lettres de mer à 105 navires jaugeant 8,667 lasts; pendant les huit premiers mois de 1851, il en avait été donné à 116 navires construits dans les Pays-Bas et jaugeant 14,784 lasts, et à 12 navires

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