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avec l'assentiment de tous les Etats allemands et l'approbation empressée des grandes puissances. Ainsi était définitivement effacée l'œuvre de la révolution de 1848.

Le premier soin de la diète nouvelle fut, en effet, d'abolir ces droits fondamentaux (Grundrechte) que le parlement révolutionnaire de Francfort avait établis à la base du nouvel édifice social. Déjà, au reste, la plupart des Etats allemands les avaient abrogés ou s'étaient habitués à n'en tenir aucun compte.

La diète eut encore à s'occuper de la question d'incorporation des provinces autrichiennes non allemandes dans la Confédération germanique. Le plénipotentiaire de l'Autriche ramenait devant elle cette question brûlante. Les gouvernements de France et d'Angleterre renouvelèrent, ce dernier avec moins de mollesse, leurs protestations premières, et la Prusse, pour écarter définiti vement le danger d'une extension autrichienne, proposa de laisser en dehors de l'union les provinces de Prusse orientale et occidentale et celle de Posen qui ne faisaient pas partie de la Confédération avant 1848. La proposition fut acceptée : c'était donner l'exemple; il fallut bien que l'Autriche le suivît et qu'elle ajournât son projet.

A partir de ce moment, la diète de Francfort reconstituée reprend son rôle conservateur et s'occupe surtout de conjurer les efforts de l'esprit révolutionnaire. Elle adresse au cabinet de Saint-James des réclamations insistantes contre l'abus du droit d'asile accordé aux réfugiés politiques, jusqu'au jour où le coup d'Etat du 2 décembre renverse dans le cabinet anglais le protecteur des révolutionnaires européens et rassure l'esprit conservateur en Allemagne.

Une autre grande difficulté qui domine toute la situation actuelle de l'Allemagne, c'est l'organisation commerciale. La Prusse se rapprochera-t-elle plutôt de l'association douanière hanovrienne que du système autrichien, les Etats du midi de l'Allemagne ne cèderont-ils pas à l'attraction qui tend à les séparer du Zollverein, telles sont les graves questions qui s'agitent à côté des questions d'influence politique. Le Zollverein a depuis longtemps réalisé, dans le cercle des intérêts commerciaux, le système de P'union restreinte. Mais il restait à le développer, et c'est ce que

fit la Prusse par un traité conclu, le 7 septembre, avec le Hanovre représentant d'une union particulière de douanes connue sous le nom de Steuerverein. :

Voici les principales dispositions du traité conclu dans le but de réunir le Steuerverein au Zollverein.

A partir du 1er janvier 1851, il y aurait entre la Prusse et les Etats qui forment le Zollverein d'une part, et le Hanovre joint aux Etats de l'association des impôts, d'autre part, des relations commerciales libres et une législation uniforme sur les droits d'importation, d'exportation et de transit, ainsi que sur les droits à établir sur la fabrication du sucre indigène, et une communauté des recettes que produiraient ces droits. La base de cette réunion, c'est le principe du Zollverein et les modifications stipulées (art. 1er).

Art. 12. En ce qui concerne la répartition du revenu des droits d'importation et de transit, le Hanovre appartiendrait à l'union occidentale du Zollverein.

Art. 13. Il n'y aurait lieu à la perception d'aucun droit supplémentaire pour les marchandises existant actuellement dans le Hanovre.

Art. 14. La durée du traité s'étendrait du 1er janvier 1854 jusqu'au 31 décembre 1865. Mais si avant cette époque on parvenait à réaliser une union douanière de tous les Etats allemands, le présent traité expirerait au moment où cette union serait mise en vigueur.

Parmi les articles séparés, annexés au traité, on remarquait celui-ci : « Avec le consentement du gouvernement de Brunswick, le présent traité s'étendra aux possessions communes au Hanovre et au duché de Brunswick. Aussi longtemps que Bremerhasen ne sera pas incorporé dans l'union, Zestemünde restera exclu du territoire de l'union. On réglera ultérieurement ce qui concerne l'exclusion des îles hanovriennes. »

L'article 13 portait que la Prusse entamerait des négociations avec les Etats du Zollverein pour renouveler l'union douanière avec eux, et prendrait les mesures nécessaires pour arriver à ce but. Le Hanovre prendrait part à ces négociations avec le même droit de vote que la Prusse.

Art. 14. Dans les négociations qui auraient lieu suivant l'article 13, la Prusse et le Hanovre partiraient du principe qu'il convient de diminuer les droits d'entrée : 1o sur les eaux-de-vie de France de 8 rixthalers par quintal, le café de 5, le sirop de 2, le tabac en feuilles de 4, le thé de 8, les vins en tonnes de 6.

Les droits d'exportation de la laine seraient diminués d'un tiers de thaler par quintal.

Suivaient les signatures: de Manteuffel, Von der Heydt, Bodelschwingh, de Munchhausen, baron de Hammerstein.

Pour se rendre un compte exact du traité du 7 septembre, il faut se rappeler ce qu'ont été, jusqu'à ce jour, les deux grandes unions douanières de l'Allemagne, le Zollverein et le Steuerverein. L'article 19 du pacte fédéral, concernant la législation du commerce n'ayant pas produit de résultats définitifs dans les différents Etats allemands, c'est le gouvernement prussien qui, par la loi du 26 mai 1818, posa la pierre fondamentale du Zollverein. Cette loi ne pourvoyait cependant qu'aux besoins de la Prusse, comme Etat indépendant et n'appartenant à l'Allemagne que par une partie de son territoire; néanmoins le système auquel cette loi avait donné naissance exerçait une attraction naturelle sur les petits Etats étrangers voisins de la Prusse. Après que ces Etats eurent été reçus dans le système douanier de ce pays, le grand-duché de Hesse s'y joignit en 1828. La communication entre les anciennes et les nouvelles provinces de la monarchie prussienne fut ensuite établie, en 1832, par l'accession de la Hesseélectorale, et c'est de cette ligne douanière, dans laquelle étaient entrés la Bavière et le Wurtemberg, qui, en 1828, avaient fait entre eux un traité à part, et à laquelle se joignirent ensuite la Saxe et les Etats de Thuringe, que fut formé le Zollverein. Dans les années 1836 et 1842, l'accession du grand-duché de Bade, de Nassau, de Francfort, de Lippe, de Waldeck, de Brunswick et de Luxembourg, donnait à cette union douanière une étendue de 8,307 milles carrés, avec une population de 30 millions d'âmes, et elle ne comptait pas moins de vingt-sept Etats fédératifs.

En 1831, le Hanovre et le Bruswick avaient fait un traité commercial à part, auquel avaient adhéré, en 1837, les Etats d'Ol

denbourg et de Schaumbourg-Lippe. Cette seconde union douanière des Etats, dont l'industrie pouvait, du reste, très-bien se passer d'un tarif protecteur bien élevé, prit le nom de Steuerverein. Elle perdit en importance par la sortie, en 1844, du duché de Brunswick, qui fit désormais partie du Zollverein. Cependant cette association embrassait toujours une population de 2 millions d'âmes. De cette manière, une partie des provinces de l'est de la Prusse reste séparée des provinces de l'ouest, et les embouchures de l'Elbe, du Weser, de l'Ems, et les côtes de la mer du Nord étaient encore inaccessibles au Zollverein. En même temps, le Holstein, y compris le Slesvig, le Mecklembourg et les villes hanséatiques, avaient leur système douanier à part. Enfin les provinces allemandes de l'Autriche étaient soumises à une législation douanière, basée sur la prohibition ou sur l'imposition exagérée de presque tous les produits de l'industrie étrangère.

Dans cet état de choses, on sentait généralement la nécessité de réunir les neuf différentes unions douanières de l'Allemagne. On revint donc, en 1848, sur la promesse formulée en vain dans le pacte fédéral; mais, ni les délibérations des députés qui s'étaient réunis à Francfort pour faire un tarif général pour toute l'Allemagne, tarif qui devait être basé sur des impositions peu élevées, ni les efforts de la réunion générale allemande pour la protection de l'industrie intérieure, qui cherchait à contrecarrer la réunion de Francfort, n'arrivèrent à un résultat favorable. C'est alors que le gouvernement autrichien saisit l'occasion pour proposer, dans la Gazette de Vienne du 26 octobre 1849, et dans un mémoire du ministre du commerce, en date du 30 décembre 1849, la création d'un système douanier austro-allemand. L'Autriche demandait en même temps que tous les Etats allemands prissent part à la discussion de son projet; mais bientôt elle reconnut elle-même l'inopportunité de ces propositions. En conservant la base des anciens traités, la Prusse ne faisait qu'éviter soigneusement une dissolution du Zollverein, et elle reçut l'assentiment de presque tous ses alliés. Cependant, lors de la neuvième réunion générale des membres du Zollverein, on s'occupa de nouveau des propositions de l'Autriche, mais on ne pouvait pas se décider à conclure un

premières à leur importation de l'étranger; les facilités accordées au commerce de transit; la convention relative à la réduction réciproque des péages du Rhin; les traités conclus avec les royaumes de Sardaigne et de Hanovre, telles étaient les mesures signalées avec une faveur particulière par les chambres de commerce. Le traité du 7 septembre, qui abaissait les barrières du Hanovre, leur paraissait surtout destiné à stimuler de la façon la plus heureuse le développement de toutes les branches de la production et du commerce. Non-seulement ce traité était à leurs yeux un événement capital parce qu'il ouvrait à l'union douanière de nouveaux débouchés, et lui conquérait en quelque sorte un littoral; mais elles y voyaient encore (chambres d'Elberfeld et de Darmen) un pas décisif fait par les Etats allemands vers « une union bien autrement solide que toutes celles que l'on avait tentées jusqu'à ce jour.» Elles y voyaient «< une tendance des membres disjoints du corps germanique à se rapprocher et à se relier dans une vaste unité où les intérêts les plus élevés, et moraux et matériels, devront se fondre de telle sorte qu'il ne sera plus possible de les sé

parer. >>

Enfin, on comprend aisément que la situation particulière de la France, à la fin de l'année, avait dû réagir sur la prospérité intérieure de l'Allemagne. L'influence exercée sur les mouvements du commerce européen par le coup d'Etat de décembre était considérée comme favorable par toutes les chambres de commerce. La chambre de Dusseldorf s'exprimait ainsi : « Les affaires de l'Allemagne seraient restées dans la plus profonde stagnation sans l'acte du 2 décembre: Le coup d'Etat du Président de la République française a fait disparaître les craintes qu'inspirait la situation de la France, et il a relevé, chez nous aussi, la foi dans la durée de la tranquillité et de l'ordre légal, dans l'inviolabilité de la propriété et dans l'essor de la vie industrielle. »>

Si l'on jette un regard d'ensemble sur les voies de fer du continent européen, on remarque que ces communications sont trèsinégalement distribuées, et cela suivant la population, le commerce et l'industrie. Une grande surface de pays, à l'est des frontières des Pays-Bas, mesurant 664 kilom. de l'est à l'ouest, et 322 kilom. du nord au sud, est couverte d'un réseau de che

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