Page images
PDF
EPUB

qui contient cette requête. On comprend qu'aucun gouvernement ne pouvait se soumettre à de semblables conditions, et il en ré sultait que les journaux avaient toute licence. L'attitude énergique de la France allait enfin faire sentir au cabinet de Turin la nécessité d'avoir égard aux représentations des gouvernements. Dans la séance de la chambre piémontaise du 17 décembre, le ministre de la justice présenta un projet de loi aux termes duquel les délits d'outrages contre les souverains et les chefs de gouvernements étrangers seraient jugés dorénavant conformément aux lois ordinaires, et sans que le ministère public fût tenu de produire une demande de poursuite émanée du gouvernement insulté.

Au point de vue économique, le gouvernement sarde est entré dans la voie féconde de la liberté commerciale. Il a signé, en 1851, des conventions de commerce avec la Belgique, l'Angleterre et la France (convention additionnelle du 20 mai), avec la Grèce (31 mars), avec la Suisse (5 juin), avec le Zollverein (20 juin), avec la Néerlande (24 juin), enfin avec l'Autriche (18 octobre). Le dernier traité fut suivi, le 22 novembre, d'une convention pour la répression de la contrebande sur le lac Majeur, le Tessin et le Pô.

Aucun gouvernement ne travaille plus activement que le gouvernement sarde à l'exécution de ses chemins de fer. Le chemin de fer de Turin à Gênes est terminé entre Turin, Alexandrie, Novi et Arqueta, jusqu'au pied des Apennins. Des travaux non moins gigantesques que ceux du Sommering étaient à la fin de l'année en cours d'exécution pour la traversée des Apennins entre Arqueta et Gênes. On croyait qu'ils pourraient être terminés, comme ceux du Sommering, dans le courant de 1853, et on se flattait de cet espoir peut-être mal fondé que le port de Gênes pourrait par conséquent, comme celui de Trieste, disputer le transit des Indes à Marseille.

DEUX-SICILES.

Les vingt-deux provinces de la monarchie virent, cette année, se réunir les conseils généraux, dont les événements des trois

dernières années avaient forcément suspendu les délibérations et les travaux. Ces conseils sont composés de propriétaires élus sur la proposition des représentants des communes. Leurs attributions comprennent :

1o L'examen et la discussion des propositions des conseils de district; 2o le budget des provinces; la perception, l'emploi des fonds et la vérification des comptes de l'année qui précède leur réunion; 3o l'état administratif des provinces, la conduite et la capacité des fonctionnaires publics, les améliorations à introduire dans l'administration; 40 la nomination des directeurs des travaux publics, et l'examen de toutes les propositions relatives à l'emploi des fonds destinés à ces travaux; 5o la répartition de l'impôt foncier, etc., etc.

Malgré les terribles événements qui ont désolé la Sicile en 1848 et 1849, la situation générale de l'île s'améliore avec une rapidité extraordinaire.

En deux ans, ce malheureux pays, bouleversé par la démagogie et par les menées anglaises, a repris ses forces et son assiette. On en trouverait au besoin la preuve dans les comptesrendus des séances des conseils provinciaux en 1851, dans la statistique criminelle de 1850. Pour cette année, en effet, la différence relativement au nombre des individus condamnés pour crimes et délits est de 436 en faveur de 1850 comparé à 1846: 894 contre 1350.

Tout était revenu à un état normal dans l'administration de la Sicile. Les conseils provinciaux examinaient, contrôlaient, discu taient, dans l'intérêt des provinces, les recettes et les dépenses; ils votaient le budget, et s'immisçaient enfin dans toutes les mesures qui peuvent contribuer au bien-être universel et moral des populations.

L'amnistie, généreusement accordée par le roi de Naples, avail été si scrupuleusement respectée par son lieutenant, que le prince de Resultana, le duc de Césaro, les trois fils du prince Trabia, les deux Scordia, les barons Favara et Anglis, l'avocat Anglis, le médecin Raffaële et tant d'autres qui, en leur prétendue qualité de pairs et de députés siciliens, signèrent l'acte de déchéance de Ferdinand et l'élection d'un nouveau roi, se promenaient en liberté

à Palerme sans être l'objet d'aucune poursuite pour leurs actes et leurs opinions. Ces hommes qui, dans tous les temps et dans tous les pays du monde auraient payé de leur tête ou au moins de l'exil l'acte de félonie dont ils furent coupables, étaient une vivante réponse aux mensonges qu'on essayait d'accréditer contre le général Filaugieri.

La calomnie avait été plus loin: elle avait osé remonter jusqu'au roi lui-même, jusqu'au gouvernement napolitain tout entier. Un procès célèbre, qui réveilla les tristes souvenirs des derniers excès démagogiques, le procès de l'Unita Italia, servit de prétexte aux accusateurs.

Le dernier procès judiciaire relatif à la secte de l'Unité italienne avait été le fruit d'une instruction de quinze mois. Et cependant on osa dire que la procédure avait été dérisoire. Le procès auquel cette instruction donna lieu ne dura pas moins de soixante-quatorze jours.

La justice, dans le royaume de Naples, est rendue publiquement, tout comme en France et en Angleterre. Le nombre des témoins entendus fut de deux cent vingt-six. Les dépositions formaient à elles seules un énorme volume. Les inculpés furent défendus par quelques-uns des avocats les plus distingués du royaume de Naples. Les plaidoiries remplirent vingt-cinq audiences. Les délibérations de la cour durèrent tout une nuit et une partie du jour suivant.

La sentence fut rendue le 1er février. Sur quarante-deux accusés, trois, les nommés Settembrini, Faucitano et Agresti furent condamnés à mort; deux furent condamnés au bagne, deux à trente ans, deux à vingt-cinq ans de fers, trois à une détention moins longue. Mais le roi se refusa à laisser exécuter la peine capitale, qu'il commua en une réclusion à perpétuité. Le 30 avril, il graciait entièrement cinq condamnés à un an de prison.

Cette clémence fut calomniée par un membre du parlement, homme honorable, mais Anglais et protestant fanatique, M. Gladstone, ancien ministre avec sir Robert Peel. M. Gladstone enregistra les griefs des démagogues napolitains sans les vérifier en aucune façon; tous les témoignages qu'il apportait à l'appui des faits faux et calomnieux recueillis dans une brochure intitu

lée

[ocr errors]

Lettres à lord Aberdeen sur les procès d'Etat dans le royaume de Naples, se réduisaient à ceux-ci : « D'après ce que j'entends dire (as i hear), >>>> « l'opinion générale est que, » a cette croyance est partagée par des personnes intelligentes,» « j'ai entendu dire (i have heard), » « d'après ce qu'on m'a assuré (as i was assured), » « on a dit (it is said), » « je tiens d'une source respectable, quoique cela ne soit pas d'une autorité certaine (the mode was specified to me upon respectable though not certain authority), » « je crains (i fear), » « je suis convaincu, d'après ce qui est arrivé jusqu'à moi (from what has reached me), » etc., etc.

C'est sur de pareilles preuves que M. Gladstone affirmait que le nombre des prisonniers dans le royaume des Deux-Siciles variait entre quinze, vingt et trente mille. Le gouvernement, ajoutait-il, enlevant tout moyen d'information exacte, ces chiffres ne peuvent avoir aucune certitude (There can be no certainty on that point).

Et M. Gladstone avançait, sur des données aussi précises, que le gouvernement napolitain emprisonnait les gens seulement pour s'en défaire, qu'il refusait des conseils aux accusés, qu'on poursuivait d'une « hostilité féroce » toute indépendance, toute vertu, toute intelligence, enfin qu'on aggravait les peines portées par la loi au moyen de tortures barbares et illégales. Enfin M. Gladstone ajoutait cette injure révoltante adressée directement au roi des Deux-Siciles : « Le prince, qui se dit l'image de Dieu sur la terre, n'apparaît aux populations qu'entouré des vices les plus révoltants. >>

Qui eût dit qu'il s'agissait là d'un des rois que son peuple entoure de plus de respect et d'amour?

Quant aux accusations portées, leur fausseté égalait leur vio⚫lence. On le sait, le gouvernement napolitain a été un des premiers de l'Europe à s'occuper de l'adoucissement des peines infligées aux criminels. L'exposition et la marque étaient pratiquées en France, lorsque ces peines étaient depuis longtemps abolies dans les États du roi barbare des Deux-Siciles.

Lord Palmerston s'empara avidement de cette diatribe et, pro"cédé inouï jusqu'alors, imagina de lui donner un caractère offi

ciel en l'adressant aux cabinets des grandes puissances. Cellesci accueillirent cette communication insolite avec une froideur significative et le gouvernement napolitain répondit par un Mèmoire, qui ne laissait subsister aucune des accusations de M. Gladstone.

TOSCANE.

L'occupation autrichienne continue en Toscane, triste et inévitable résultat des excès démagogiques.

Si le grand-duc a dû chercher un appui dans l'amitié protectrice de l'Empire, il ramène aussi peu à peu les institutions de son pays dans la voie de la conservation et de l'autorité. Il restaure l'ancienne condition de l'Église en revenant sur les lois joséphines. Il signe, le 25 avril, les bases d'un concordat avec le Saint-Siége.

Une lettre adressée par le souverain Pontife aux évêques toscans, prouva que le concordat en question n'était qu'une convention provisoire, et que le Saint-Père ne le considérait que comme le prélude d'une convention plus ample, par laquelle seraient définitivement réglés dans la Toscane les rapports entre l'Église et l'État.

Voici comment furent évaluées les dépenses pour 1851.

[blocks in formation]

des finances, du commerce et des travaux publics. 19,594,700

Total des dépenses, non compris les frais d'occupa-
pation par l'armée autrichienne.

Recettes

35,198,900

[ocr errors][merged small]

Les recettes effectuées en 1848, 1849 et 1850 avaient atteint les chiffres suivants :

« PreviousContinue »