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gneur marchait comme eux ; mais aujourd'hui que son premier vicaire se fait traîner dans un carrosse attelé de huit mules, les évêques ont quelques droits de se rendre à leurs cathé drales dans des berlines à deux ou quatre chevaux.

CHAPITRE VIII.

De la civilisation et de sa marche.

Si un individu, dans son enfance, ne doit s'adonner à l'étude et à l'application qu'en raison de la force de ses organes, qu'il faut se bien garder de trop fatiguer, dans la crainte de les détendre ou de les rompre, un peuple ou une nation naissante sera languissante et dans un état continuel de faiblesse physique, si elle cherche à atteindre un degré de civilisation et de lumière au-delà de son âge.

Il en est des nations comme des individus précoces, qui non seulement ne deviennent par la suite que des êtres médiocres, mais ne sont réellement que des avortons. Telles sont les lois de la nature, que, dans un être vivant bien organisé et parfaitement constitué, le physique et le moral doivent arriver ensemble à la perfection qu'ils ne peuvent atteindre l'un sans l'autre, sans occasionner, dans l'économie de l'individu, un dérangement considé rable, capable de le faire cesser d'exister longtemps avant le terme fixé la nature.

par

Que ceux qui ne seraient pas disposés à adopter cette vérité, se donnent la peine d'obles server, et ils reconnaîtront que preuves de ce que j'avance fourmillent dans la nature.

Les lumières réelles d'un peuple, comme celles d'un individu, doivent moins consister dans la science acquise par l'étude des auteurs anciens, que dans le savoir, bien préférable, inspiré par son génie naturel, avec l'aide du quel il concevra et enfantera des choses plus que surprenantes, pour ceux qui prétendent que les anciens avaient dit tout ce que l'on pouvait dire de beau et de bon. Qu'ils consultent la nature et écoutent ceux qui sont inspirés par elle, et ils verront combien ils s'abusaient!....

L'incendie de la fameuse bibliothèque d'Alexandrie a été une perte bien grande sans doute pour les sciences et les arts; mais elle n'est pas irréparable: il est un livre universel où celui qui s'applique à l'étudier avec soin, y découvre à chaque page une foule de merveilles qui lui étaient restées inconnues. Ce livre, où l'on a trop peu lu jusqu'à ce jour, ce livre de toute éternité ouvert aux hommes, ce livre, en un mot, où l'on peut copier sans être plagiaire, c'est la nature!....

CHAPITRE IX.

De la force civique et militaire d'un État.

EN comparant toujours un peuple à un être organisé, l'on voit que la force militaire doit être à la force civile, ce que la force physique d'un individu est à sa force morale. Donc, dans un Etat sagement constitué, l'armée ne doit avoir ni opinion ni volonté, mais être toujours soumise et entièrement disposée à obéir aux ordres qui émanent de l'autorité supérieure.

Lorsque par un moyen quelconque, l'armée est parvenue à s'emparer du pouvoir législatif et à régner de fait sur une nation, l'Etat est comparable à un homme dont la raison n'ayant pu résister à la violence des passions, se laisserait entièrement gouverner par elles.

La force morale d'un individu, comme la force législative ou civile d'un peuple, est faite pour commander et diriger les forces physiques

de l'un et de l'autre ; lorsque le contraire arriye, tous les deux agissent comme desi nsensés, et ne peuvent manquer de se précipiter dans l'abîme.

néces

Cette vérité, au reste, est si généralement connue et sentie, que je ne crois pas saire de m'étendre davantage sur ces articles.

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