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Quelle chance court-il?..,.

gagner.

il ne peut qu'y

Suivant le système général des lois de la nature, dont rien dans l'univers ne saurait nous affranchir, c'est que, de même que l'eau est l'ennemi du feu, les ténèbres l'ennemi de la lumière, le despote l'ennemi de la liberté, etc., etc., etc., le pauvre est l'ennemi du riche; cela fut et sera toujours. - La raison, c'est qu'à deux individus ayant les mêmes sensations, les mêmes désirs, les mêmes organes et les mêmes besoins, la nature n'a pas dit à l'un, tu auras tout, et à l'autre, tu n'auras rien...... Ce n'est peut-être pas sans quelques fondemens que celui qui n'a rien accuse intérieurement celui qui a tout, d'être un usurpateur, et de retenir injustement, et contre le vœu de cette même nature, des biens que dans sa sagesse et sa prévoyance infinie, elle a répandus sur la surface de la terre, pour assurer l'existence et le bonheur de tous les êtres qui l'habitent.

Je borne là ces réflexions pénibles, trop vraies et trop méconnues de ceux qui, par leurs pouvoirs, devraient, au lieu de les protéger, combattre au contraire les abus de ce genre, qui sont d'autant plus dangereux, que,

lorsqu'ils sont parvenus à un certain degré de force, ils sont incurables, et que le remède violent que la nature indique, et qui est le seul, est effrayant, et mille fois pire que le mal qu'il change alors en horribles convulsions, dont l'idée seule fait frémir.

CHAPITRE XVIII.

Des grandes fermes.

L'ABUS des grandes propriétés donne naissance à une infinité d'autres d'un ordre inférieur, qui sont plus ou moins nuisibles au repos et à l'intérêt général, et qui contribuent tous directement et visiblement à la décadence des empires. Les bornes que je me suis prescrites dans cet ouvrage ne me permettant pas de m'y arrêter, il suffira au lecteur intelligent d'avoir été mis sur la voie, pour les apercevoir.

Il en est un, dont je ne puis me dispenser de faire remarquer l'importance; je veux parler des grandes fermes.

Les terres exploitées en grand rapportentelles plus, dans la proportion, que lorsqu'elles sont divisées et cultivées par portions suffisantes à l'entretien d'une famille ordinaire?

Ce n'est plus une question aujourd'hui ; l'expérience a prouvé que la culture des terres demande des soins et des attentions particu

lières, qu'on ne peut lui donner lorsqu'on la pratique en grand. Que l'on compare le produit brut des récoltes de cent arpens du terrain d'une grande ferme, pris au hasard, avec une pareille étendue, des environs d'un village. dont le terrain est divisé et cultivé par un grand nombre de particuliers; l'on trouvera une différence de plus du double, à l'avantage de ce dernier terrain.

Un terrain cultivé avec tout le soin nécessaire, produit une récolte si supérieure à celle que l'on en obtiendrait si on le seignait moins, qu'il n'y a nulle comparaison à faire entre le produit d'un jardin et celui d'une pareille étendue de terrain dans les champs.

Or, diminuer les ressources agricoles d'un peuple, est la même chose que diminuer les alimens nécessaires à la subsistance d'un individu; d'où il en résulte, pour l'un et pour l'autre, une langueur et un dépérissement physique qui, à la longue, le conduit au néant. C'est ce que je vais prouver.

Il me suffirait à la rigueur, après ce que je viens de démontrer, de conclure que, la terre produisant moins, doit nécessairement nourrir une quantité moins considérable d'individus, et que la population faisant la force d'un

Etat, il s'ensuit que la nation est plus faible qu'elle ne le serait sans cet abus. Cette raison, qui suffirait aux uns, ne serait peut-être pas capable de convaincre le plus grand nombre. Je vais entrer dans de plus amples détails, et pour rendre la chose plus sensible, leur donner d'autres preuves, car rien n'est plus facile à prouver que ce qui est vrai.

Je suppose une ferme occupant un espace d'une demi-lieue carrée (il y en a beaucoup qui ont cette étendue); elle sera exploitée par un certain nombre de gens, de chevaux, etc. Qu'une autre ferme de même étendue, limitrophe de celle-ci, lui soit ajoutée pour n'en faire qu'une seule à elles deux, le fermier ne gardera tout au plus, à son service, que la moitié ou les deux tiers des personnes que le régisseur de la ferme supprimée employait. Les individus dont il n'a pas besoin, et qui n'ont que le fruit de leur travail pour subsister, seront forcés de chercher de l'emploi ailleurs, et s'ils n'en trouvent pas, il ne leur restera que deux ressources, de mendier ou de se faire voleurs. Qu'une autre ferme soit encore ajoutée à celle-ci, et l'on verra une quantité excessive de terrain cultivé et habité par une poignée d'individus, et pro

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