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plusieurs élèves sortis de l'école polytechnique. Nous citerons encore l'école des ingénieurs civils, et celle des conducteurs des voies de communication, organisées sous le règne de l'empereur actuel la première renferme 100 élèves, et la seconde 300.

L'école de jurisprudence mérite aussi une mention particulière.

L'institut oriental du ministère des affaires étrangères forme une section du département asiatique de ce ministère; il doit son origine au vice-chancelier comte de Nesselrode, qui le fonda en 1823, dans le but d'établir une école de jeunes de langues, propres à servir l'Etat comme interprètes diplomatiques dans les missions russes à Constantinople, en Perse, et dans les échelles de l'Orient.

Parmi les institutions de bienfaisance, il faut citer en première ligne les maisons des enfants trouvés de Moscou et de Saint-Pétersbourg. Elles furent placées sous la direction de l'impératrice Marie, qui ne négligea rien pour les faire prospérer. Aujourd'hui l'impératrice Alexandra s'en occupe avec une tendre sollicitude. Nul n'est refusé; tout enfant déposé ou né dans la maison est inscrit sous un numéro qui lui reste, et qui peut servir à constater son identité; il est baptisé suivant le rit grec, et remis à une nourrice, à sa mère, de préférence, si elle veut le garder jusqu'à l'âge de sept ans, moyennant une pension mensuelle. Tous les élèves des maisons des enfants trouvés sont divisés en trois catégories principales ceux qui se trouvent dans les hospices mêmes; ceux que l'on met en nourrice dans des villages, enfin ceux dont l'éducation première est confiée à des habitants des villes. La destination des premiers se règle d'après les dispositions naturelles des enfants. Les élèves de la seconde catégorie restent dans la condition à laquelle appartiennent les familles qui ont pris soin d'eux; ceux de la troisième entrent, après avoir atteint l'âge de sept ans, soit aux hospices memes, soit aux établissements qui en dépendent.

Le gouvernement ne se borne pas à procurer à ces enfants les bienfaits de l'éducation; il veille à leur avenir; et ceux qui montrent l'aptitude nécessaire peuvent terminer leurs études soit dans les écoles supérieures, soit dans les académies.

Le défaut d'espace ne nous permet pas d'entrer dans les détails de ces fondations intéressantes, où le bienfait enrichit sans cesse et féconde sa source; nous nous bornerons à dire que les deux maisons des enfants trouvés, à Saint-Pétersbourg et à Moscou, renferment environ cinquante mille élèves de l'un et l'autre sexe.

Saint-Pétersbourg a en outre une école de commerce, un institut des sourds-muets. L'hospice des aveugles est situé à Gatchina. Moscou a aussi une école de commerce, fondée par les habitants de cette ville, et une maison de bienfaisance, qui porte le nom d'institut des orphelins d'Alexandre.

L'impératrice Marie a voué une sollicitude particulière à l'éducation des filles; les établissements fondés antérieurement ont été améliorés par ses soins, et un grand nombre d'autres lui doivent leur existence: il nous suffira de nommer l'institut des demoiselles nobles à Pétersbourg; celui de Sainte-Catherine dans la même ville, également destiné à la noblesse; la section pour les demoiselles près le corps de Paul, ouverte aux orphelines de militaires; l'institut de Sainte-Catherine à Moscou, pour la petite noblesse; et les écoles pour les filles de soldats et de matelots. Ces établissements et plusieurs autres sont aujourd'hui placés sous la protection de l'impératrice régnante, à laquelle la bienfaisante Marie les a légués en mourant.

Parmi les écoles allemandes, les principales sont celles de Saint-Pierre à Saint-Pétersbourg, celles de SainteAnne et de Sainte-Catherine, et l'école près l'Église réformée à Saint-Pétersbourg.

Il existe en outre un grand nombre d'écoles dans les colonies allemandes qui se trouvent particulièrement dans

les gouvernements de Kherson, de Iekaterinoslaf, de Tchernigof, de SaintPétersbourg, en Bessarabie et en Georgie. Ces écoles, qui sont entretenues par les communes, répondent aux écoles de villages (Dorf-schulen) de l'Allemagne.

Les colonies étrangères en Russie sont au nombre de 410, y compris les colonies grecques, bulgares et juives, et renferment ensemble une population de 250,000 âmes, dont les quatre cinquièmes d'Allemands: or, comme le nombre d'élèves qui fréquentent les écoles des Alemands colonisés est de plus de 35,000, on verra, d'après le chiffre total des élèves de tout l'empire, que si l'on représente par l'unité la civilisation des Allemands colonisés, celle des Russes ne sera exprimée que par un vingtième. Mais les Allemands fixés en Russie sont moins avancés que leurs compatriotes nationaux ; c'est donc une mesure au moins intempestive que d'avoir mis obstacle à l'enseignement par des étrangers, au lieu de se contenter de prendre à leur égard de légitimes mesures de précaution.

Les Tatars, à l'exception de ceux qui existent encore à l'état nomade, savent presque tous lire et écrire. Il y a ordinairement une école près de chaque mosquée. Le mollah exerce en même temps les fonctions de maître d'école. Du reste, ces établissements ne ressemblent en rien aux autres écoles élémentaires. La maison est ordinairement achetée par un riche Tatar; un autre se charge de l'entretien soit pour un an, soit pour plus longtemps, selon sa fortune ou sa dévotion. La maison se compose d'un petit vestibule et d'une grande salle dont le plancher est disposé en pente. Sur cette élévation, chaque élève occupe un espace d'environ deux pas de long, où il place son matelas, ses effets, et même ses ustensiles de cuisine que chacun doit apporter avec soi. Cette salle sert en même temps de classe, de dortoir et de réfectoire pour les

élèves, et de logement pour le maître. Les enfants tatars sont envoyés à l'école à l'âge de sept à huit ans, et ils y restent pendant cinq années, à l'exeeption de ceux qui se vouent à l'état ecclésiastique, et dont les études durent beaucoup plus longtemps. Les objets d'enseignement sont : les dogmes de la religion mahométane, la lecture et l'écriture arabes, et quelquefois, selon les besoins locaux, le persan et le boukhare. Les Tatars n'apprennent point aux écoles leur langue maternelle, attendu, disent-ils, qu'il serait superflu de faire des dépenses pour un enseignement qu'on peut recevoir chez ses parents. Le maître n'est point rétribué en argent, mais en nature, c'est-à-dire, en vêtements ou en denrées qu'on lui envoie en forme de présents.

La population professant l'islamisme s'élève, dans la Russie d'Europe, à 1,287,407 âmes, et habite particulièrement les gouvernements d'Orenbourg, Kasan, Viatka, Nijni-Novgorod, Astrakhan, Saratof, Penza, Perm et la Tauride.

Il existe dans ces divers gouvernements 561 écoles mahométanes, renfermant environ 14,000 élèves.

La population juive, groupée dans les provinces polonaises successivement incorporées à l'empire, depasse un million d'âmes. Les écoles israelites sont au nombre de 3,523, toutes indépendantes de l'action du gouvernement; cependant plusieurs écoles qu'on pourrait appeler mixtes ont été fondées dans le but de perfectionner l'éducation scientifique de quelques jeunes Israelites; le règlement de 1835 ne peut manquer d'exercer une heureuse influence sur l'état moral et la civilisation de cette classe industrieuse, si longtemps et si injustement oppri

mée.

Le total des écoles spéciales et diverses dans tout l'empire est de 1622, renfermant 127,864 élèves.

Le tableau suivant présente l'état de l'instruction publique en Russie.

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Sur ce nombre d'élèves, 44,000 environ reçoivent une instruction supérieure; les autres se contentent de connaissances élémentaires ou pratiques. Ainsi le nombre des élèves qui suivent les écoles est à la population totale de l'empire dans le rapport approximatif de un à cent quarante.

Le gouvernement poursuit avec persévérance la tâche d'éclairer le peuple russe; mais s'il peut décréter l'établis sement d'un collége ou d'une académie, il est impuissant à donner la vie scientifique et morale. En dépit de toutes les précautions, les moyens dont se sert la Russie pour distribuer les lumières dans les diverses classes de sa hiérarchie sociale, étant le produit d'une civilisation plus complete, conservent l'esprit de leur origine; et ils pousseront les intelligences à la liberté qui est inséparable de la science, ou au désespoir. Entre ces deux alternatives il ne peut y avoir qu'un état mixte et apathique, où tombent quelquefois les peuples qui ont passé par toutes les phases politiques, mais qui ne peut convenir longtemps à une nation qui est dans la période la plus active de son développement.

Les derniers voyages de l'empereur Nicolas, sa visite inattendue à Bernadotte, ses excursions en Allemagne, qui rappellent l'activité inquiète de Pierre le Grand, ont sans doute un but politique; mais le défaut de ren

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252,311 28,734,141 roubles.

seignements positifs ne nous permet pas de caractériser ces démarches. Nous nous contenterons de répéter que le but du cabinet russe est de rompre, ou tout au moins de neutraliser l'alliance anglo- française : il manie habilement à cet effet tous les incidents qui naissent de la question hollando-belge, de celles d'Afrique et d'Espagne, et des embarras où s'est jetée la France en rompant ses relations amicales avec la Suisse et le Mexique. Pendant que la Russie embrouille tous ces fils, elle protége à sa manière la Porte ottomane, la Grèce et la Perse; et déjà les contrées limitrophes de l'Inde s'émeuvent sous son influence. Toutefois, plus elle approche du but, plus l'Angleterre s'inquiète; et le dernier pas sera plus difficile que tous les autres.

Les mœurs russes, sous le règne actuel, ont repris une allure plus nationale; encore un quart de siècle de cette séquestration de l'empire en Europe, et le caractère asiatique aura envahi les plus hautes classes de la société, qui, sous l'empereur Alexandre, se faisaient remarquer par une politesse et une élégance de langage dont s'étonnèrent souvent les cours étrangères. On peut dire que les sciences militaires ont été seules en progrès; les arts et les lettres, qui ont besoin pour fleurir du soleil de la liberté, se courbent sous le niveau des institu

tions. Depuis la mort du poëte Pouchkin, les écrivains russes ont quelquefois fait preuve de talent; mais le génie et la véritable inspiration ont disparu. Après tout, qu'importe? La civilisation, en Russie, n'a pour mission que de perfectionner l'obéissance; tout ce qui sortirait de cette limite, le pouvoir le regarderait moins comme un avantage que comme un obstacle.

Quant au caractère personnel de l'empereur Nicolas, il est écrit tout entier dans l'allocution qu'il a adressée à la députation de Varsovie en octobre 1835 nous le résumerons en deux mots: inflexibilité et persévérance. Ses actes les plus absolus ont une empreinte de grandeur; il possède l'art difficile d'associer son peuple aux mesures qui affermissent l'absolutisme; étrange spectacle que celui de tant de millions d'hommes qui applaudissent à leur propre assujettissement, parce que le reflet de la gloire militaire dore leurs chaines!

Nicolas ne s'est point signalé personnellement par de hauts faits militaires; mais il sait donner l'impulsion, démêler et récompenser le mérite; dans une guerre européenne, il ferait marcher jusqu'au dernier homme, et dépenserait le dernier rouble, plutôt que de céder sur un point qui engagerait

onneur de sa couronne. Il a montré un grand sang-froid dans des circonstances difficiles: son attitude, lors de la révolution militaire de Saint-Pétersbourg, en 1824, a donné la mesure de sa fermeté. Quand le choléra éclata dans sa capitale, on l'a vu s'avancer, le front sévère, au milieu d'une populace furieuse, lui reprocher en termes brefs et incisifs son égarement, et la faire tomber à genoux d'un geste.

En 1828, les Russes reprirent, à Varna, plusieurs canons conquis sur les Polonais en 1444, lorsque Ladislas Jagellon périt au siège de cette ville. NicoJas, à la vue de ce trophée, ordonna de transporter ces pièces à Varsovie pour en faire un monument national.

C'est par l'autorité de l'exemple, non moins que par ses avertissements su

prêmes, qu'il exerce une influence irrésistible sur les masses; il a le droit de recommander l'ordre, l'économie et les vertus de la famille, lui dont les mœurs sont rigides, et qui ne déploie de magnificence que pour récompenser d'éclatants services, ou pour l'établissement de fondations utiles. Certes, sa sévérité a fréquemment dépassé les bornes; mais, pour bien juger un prince, il faut lui tenir compte de certaines exigences de position : la plus impérieuse, peut-être, a été cette sorte de réaction qui, dans les États despotiques, imprime souvent à la politique du nouveau souverain 'une marché contraire à celle de son prédécesseur; soit que les abus du règne qui vient de finir, s'attribuent aux traits caractéristiques les plus saillants du dernier autocrate, soit que le nouveau maître, pressé de faire acte de puissance, entre instinctivement dans le despotisme en s'éloignant des limites où, comme les autres, il a dû marcher le front courbé. Or, nous avons vu que les qualités dominantes d'Alexan dre étaient la clémence, et une douceur de formes qui n'excluait point une grande finesse de vues: c'en était assez pour préparer la Russie et le monde au gouvernement dur, franc et entier de l'empereur Nicolas : d'ailleurs, quand un homme d'un caractère fort est maître absolu de soixante millions d'âmes, comment ne serait-il pas tenté de briser violemment les résistances; et, quand son agrandissement personnel n'est que l'expression de la puissance collective de tout un peuple, peut-on nier que ses efforts revêtent un caractère imposant? Ce prince peut quelquefois errer dans les moyens; mais, aux yeux de son peuple, le but l'absout; l'autocrate fait son devoir, pourquoi l'Europe ne fait-elle pas le sien?

Les ancêtres de Nicolas ont dit aux Russes Abjurez vos coutumes, vos mœurs, pour adopter les mœurs et les coutumes étrangères: Nicolas, prématurément, selon nous, a dit aux Russes: Votre civilisation mûrira d'ellemême; désormais vous marcherez seuls....

FIN DE LA RUSSIE.

TABLE DES MATIÈRES

CONTENUES DANS LA RUSSIE.

Abo, ville dévastée par un incendie en
1827, 33 b, regardée encore comme la plus
grande ville de la Finlande, 45 b.

Administration municipale des villes, 28
a, b; état intérieur vers l'an 1224, 100 a.
Aimant, mines à Perm, 57 a.
Albâtre, belles carrières à Koungour,
57 a.

Aléontes, iles qui renferment quelques
crateres tantôt fumants, tantôt lançant des
flammes, 60 b; les Russes y ont formé quel-
ques établissements, 61 a; époque de leur
découverte, commerce qui s'y fait, 30g a.
Alexandre Ier (1801-1825) impliqué par

Pahlen dans la conspiration contre Paul Ier,

et sontenu par lui pour son avénement au

trône (V. les relations, 398 a — 411 a); idée

de sa position, de ses qualités, de son ca-

ractère, 4 b- 413 a; abandonne les

plans de Paul Ier; lève l'embargo mis sur les

bâtiments anglais; Markof, ambassadeur

russe, est expulsé de France; le tsar s'oc-

cupe d'améliorations administratives, réunit

Ja Géorgie à l'empire, a une entrevue avec

le roi de Prusse, déclare la guerre à la

France, 413b-417 a; envoie une ambas-

sade pour obtenir l'entrée dans les États

chinois, réprime les empiétements de la

Suède et les incursions des Lesghis; après

l'enlèvement d'Ettenheim, fait remettre une

note terminée par un ultimatum, sur la-

quelle M. de Talleyrand est chargé de noti-

fier la réponse; effectif auquel est portée

l'armée russe. 417 a- -421 b; utiles ré-

formes à l'intérieur; la Russie refuse de re-

connaître Napoléon empereur; campagne

d'Austerlitz; traité de Presbourg; entrevue

de Napoléon et de l'archiduc Charles; la

Russie renouvelle avec la Porte le traité de

1798, signe un traité de paix avec la France,

421 b-429 b; débats entre la France et

la Prusse, hostilités, Iéna; l'électeur de

Saxe, allié de Napoléon; Eyiau; campagne

41 Livraison. (RUSSIE.) T. II.

A

de 1807 contre la Russie, Friedland; en-
trevue de Tilsitt à laquelle prend part la
reine de Prusse; le grand-duché de Var-
sovie est donné au roi de Saxe; traité de
Tilsit; l'Angleterre détermine la Suède à
la guerre, fait bombarder Copenhague et
s'empare de la flotte danoise; déclaration
rendue à ce sujet par Alexandre, embargo
mis sur les vaisseaux anglais; sur les arti-
cles secrets du traité de Tilsitt, 429 b-
437 a; la Russie continue la guerre sur les
frontieres de la Perse; trait de courage de
la dernière reine de Géorgie; expédition
des Anglais dans les Dardanelles, résistance

des Turcs, renversement de Sélim; la Va-

lachie est gouvernée par un divan de Russes

et de boyars du pays; expédition en 1808

de la Russie contre la Suède, occupation de

la Finlande suédoise; déposition de Gus-

tave IV, 437 a—447 b; guerre d'Espagne,

échec de Baylen; conférence d'Erfurt; lettre

adressée par Napoléon et Alexandre au

d'Angleterre; l'Autriche attaque la Bavière;

Vienne est occupée par les Français; Essling,

Raab, Wagram; traité de Schönbrunn,

mariage de Marie-Louise; nouveaux soins

donnés par Alexandre à l'administration in-

térieure; succes des Russes sur les Turcs,

paix de Boukharest, ib. 447 b — 453 a; si-

iuation de l'Europe en 1812; Alexandre

lève des armées; Napoléon arrive à Dresde,

donne quelques espérances aux Polonais, est

privé de l'appui de la Suède et de celui de

la Turquie; dispositions et marches des deux

armées, Napoléon déclare la guerre; sa si-

tuation déjà critique à Wilna, 453 a- 459

b; mouvements et engagements entre les

deux armées; Napoléon reçoit à Wilna la

députation de la diete du grand-duché de

Varsovie; manifestes d'Alexandre qui se

rend à Moscou, puis à Abo, où il décide

Bernadotte à combattre pour la Russie, 459

b463 a; mouvements des deux armées

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