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et au delà des monts Imaus, soit que ces peuples, de race japhétique, fussent descendus des hauteurs du Caucase, soit qu'ils appartinssent à l'émigration d'une famille asiatique. Comme les premiers d'entre eux, qui furent rencontrés par les Grecs, combattaient à cheval et montraient une adresse extrême à se servir de l'arc, ils furent appelés Scythes, véritable onomatopée Four désigner le jet de la flèche. Les Grecs apprirent aussi que ces peuples se donnaient entre eux le nom de Skolotes, c'est-à-dire cavaliers. Dans la langue finnoise moderne, les mots Skytta, Kitta et Kit désignent encore un archer. Nous ferons remarquer, en outre, qu'il y a une évidente analogie entre le nom de Celtes, Keltes, ou Kélètes (Κέλτοι, Κέλεται), comme disaient les Grecs, et celui de Skolotes.

Les géographes de la Grèce, et, après eux, ceux de Rome et de Byzance, voulant classer méthodiquement les diverses peuplades confondues à tort sous un nom identique, commirent la faute non moins grande de désigner, par diverses dénominations, des peuples qui appartenaient évidemment à une même nation. De là cet inextricable réseau qui enveloppe la géographie ancienne, et que la critique moderne peut bien trancher hardiment sans grand inconvénient, mais qu'elle ne saurait débrouiller. Nous ne tiendrons aucun compte des Scythes Hamaxobiens, ainsi nommés parce qu'ils vivaient sur des chariots, comme le font encore de nos jours les Tatares Kondures; des Hippomolgues, qui buvaient le lait de leurs juments; des Skénites, qui reposaient sous des tentes; des Troglodytes, qui vivaient dans des grottes; des Aorses, ou peuples silencieux, parce qu'au lieu de bruyants chariots, ils employaient des chameaux au transport de leurs bagages; ni de vingt nations dont les fastes ne se rattachent à l'histoire de cette contrée que par un fil trop délié pour nous servir de guide. Les Cimmériens méritent de nous occuper plus sérieusement. Peut-être descendaientils d'une colonie voyageuse qui, dans

les temps primitifs, avait franchi le Caucase pour chercher vers le nord une patrie moins ingrate que les déserts de la Bactriane, et des rives plus hospitalières que celles de l'Oxus. Ils s'étaient arrêtés sur les bords du Konban, sur ceux de la mer Noire, et dans les grandes steppes qui offrent tant d'attrait à l'indolence des peuples

nomades.

Une autre nation, dont nous avons déja eu l'occasion de parler, habitait alors sur les bords du Tanaïs et du Palus-Mæotis; c'est celle des Magogs, ainsi nommés par les Hébreux, Scythes Mæotes des Grecs, Galactophages d'Homère, Massagètes d'Hérodote, et, depuis, les Sarmates des géographes. Chez les Mæotes, les femmes apprenaient le métier des armes; elles montaient à cheval, tiraient de l'arc, allaient à la chasse et à la guerre avec leurs maris. Contrariée peut-être par l'arrivée des Cimmériens, cette nation envoya au dehors une colonie sous la conduite de deux jeunes princes, Ilinos et Scolopitus, pour découvrir, s'il se pouvait, une terre plus tranquille. Les émigrants traversèrent les gorges du Caucase, sans être arrêtés ni par les aspérités de ces montagnes, ni par les mille torrents qui coulent de leurs sommités neigeuses, et se fixèrent dans le pays de Thémiscyre, sur les bords du Thermodon. C'est la colonie qui donna naissance aux Amazones.

A peu près vers la même époque (1680 avant J.-C. ?), les Mæotes se ruèrent sur les Cimmériens, et les refoulèrent vers le sud. Les vaincus traversèrent le Caucase; quelques-uns y fixèrent leur demeure, le plus grand nombre émigra en Arménie, et, depuis, ravagea une partie de l'Asie.

Trois siècles après (1338 av. J.-C.), nous voyons, sur la foi des traditions égyptiennes, Sésostris faire sa fameuse expédition dans le pays des Scythes. Ce conquérant revient par le nord de la mer Caspienne, passe dans l'isthme et y établit une colonie sur les bords du Phase. Cet événement fit dire par la suite aux Colchéens qu'ils étaient issus des Egyptiens.

2 Livraison. (CIRCASSIE ET GÉORGIE.)

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Les populations sauvages qui habitaient alors les bords de la mer Noire, vivaient moins de leur industrie sur un sol ingrat, que des ressources qu'elles se procuraient par le brigandage et la piraterie. Cet usage immémorial des peuples caucasiens de courir sur les vaisseaux marchands a traversé les siècles et s'est perpétué jusqu'à notre époque. Lorsqu'un navire faisait naufrage sur ces côtes inhospitalières, les gens de l'équipage devenaient esclaves, s'ils n'étaient pas offerts en holocauste aux monstrueuses divinités du lieu. Ces circonstances furent cause que les Grecs donnèrent à la mer Noire le nom de Pont-Axin, qui veut dire mer inhospitalière; mais ils le changèrent plus tard en celui de Pont-Euxin ou mer hospitalière, et ce fut lorsqu'ils en eurent euxmêmes peuplé le littoral (*). Ils comprirent, en effet, la nécessité de visiter ces peuples farouches et de former des établissements stables parmi eux, tant pour élever une barrière contre leur débordement que pour leur apporter, au moyen du commerce, le bienfait de la civilisation.

Les plus anciens souvenirs des premières émigrations de la Grèce se rattachent aux voyages de Phrixus et d'Hellé; cette époque se perd dans les ténèbres de la mythologie, et nous nous bornons à la mentionner. Mais il n'en est pas de même de l'expédition de Jason, sur l'authenticité de laquelle il n'est plus permis, au point où en est arrivée la science, de concevoir des doutes. Un savant archéologue, M. Raoul-Rochette, a dit avec raison que les fables mêmes qui défigurent cette tradition ne paraissent qu'un garant de plus de la vérité des événements qu'elle retrace.

Le désir de purger la mer des pirates qui l'infestaient, joint à l'espoir de trouver dans la Colchide des richesses dont sans doute les premiers navigateurs avaient exagéré l'impor

(*) ÅĘsivos ou Ãkevoç et Eűževoç. (Voyez Pline, Tertullien, Aristote, etc.; d'Anville, Larcher, Millin, Raoul-Rochette, etc.)

tance, attira sous les ordres de Jason l'élite des héros de la Grèce. Plus de quarante chefs se rangèrent sous ses ordres, et chacun montait un vaisseau que manoeuvraient les hommes de sa nation. Quant à Jason, il fit construire, au pied du mont Pélion, un vaisseau long, semblable à ceux dont se servaient les Phéniciens, et qu'on appelait Argo ou Arco. Il y monta, suivi d'une foule de jeunes guerriers, dont les noms appartiennent aux traditions héroïques de la Hellade. Parmi eux on remarque Castor et Pollux, Zétès et Calaïs, Hercule, Orphée, Télamon et Tiphys. Jason partit du port d'Iolchos, et après diverses aventures où il eut à lutter contre la perversité des hommes et la furie des éléments, il découvrit le mont Caucase et entra dans les bouches du Phase. L'entreprise des Argonautes eut peu de succès. Leur chef enleva la fille d'Aëtes, roi de Colchos, la fameuse Médée, et se retira après avoir inutilement guerroyé contre des peuples barbares. Cependant son expédition servit, en quelque sorte, d'itinéraire à celles que la Grèce entreprit successivement. Alors on vit s'élever, sur cette partie du littoral du Pont-Euxin, des villes et des peuples qui revendiquèrent l'honneur d'une origine argonautique (*). Dioscurias, aujourd'hui Iskouriah, près de Soukoum-kalé, fut fondée, dit-on, par les compagnons de Castor et Pollux, connus sous le nom de Dioscures. Phasis, qui devait être située sur la gauche du Phase, en face d'OEa, mais dont il ne reste plus de traces; Pityus, devenue Pitzunda, et Héraclée, aujourd'hui Anagri, remontent à la même source. Les Parrhasiens, sur les bords de la mer Caspienne, se disaient issus des Parrhasiens d'Arcadie; les Albaniens, les Ibériens, la nation des Hénioques, les Tyndarides et vingt autres réclamaient également

(*) Raoul-Rochette, Établissement des colonies grecques. (Denys-le-Périégète, Strabon, Arrien, Ammien Marcellin, Eustathe, Pomponius Méla, Pline, Tacite, Solin, Étienne de Byzance, etc.)

la même origine, et leur prétention à cet égard s'appuyait, non seulement sur des traditions historiques, mais encore sur des rapports physiques, dont plusieurs naturalistes ont cru reconnaître les traces chez les descendants de ces peuples. Les témoignages matériels du voyage de Jason existaient encore du temps de Strabon, et il faut peu s'étonner de ne plus les retrouver dans ce pays, où se sont heurtées tant de populations ignorantes, fanatiques et superstitieuses. L'établissement des colonies fournit aux Grecs les moyens de connaître les peuples du Caucase; mais leur génie poétique a revêtu les faits historiques de cette époque d'un voile qui rend la vérité bien difficile à discerner, et il faut convenir que les événements dont cette contrée a été le théâtre ont singulièrement contribué à embrouiller la question. Cent tribus diverses, auxquelles il serait ridicule de vouloir assigner des limites territoriales, se montrent tour à tour sur la scène politique, dans un flux et reflux de guerre et d'émigration. Enfin la grande irruption des Mongols et des Tatares arrive au moment où les ténèbres de l'histoire commençaient à se dissiper devant les lumières du christianisme.

Ce n'est qu'au moyen de l'analyse que nous pouvons espérer de porter quelque clarté dans les événements qu'il nous reste à raconter; nous allons le tenter.

L'isthme caucasien comprend aujourd'hui environ vingt nations que nous rattacherons à trois groupes principaux, savoir: 1° la Géorgie: nous y ferons figurer les Géorgiens proprement dits, les peuples de l'ancienne Colchide, ceux de l'Albanie, les Souanes et les Lazes; 2° le pays des montagnes. L'histoire des Tcherkesses ou Circassiens, et celle des Abases entrent dans cette catégorie, où il sera parlé également des Lesghis, des Ossètes et des Tchetchenses; 3° la région de la steppe. Nous y comprendrons les Tatares, les Nogaïs, les Turcomans,

etc.

GÉORGIE.

La Géorgie embrassait jadis trois états, que les anciens nommaient Ibérie, Colchide et Albanie.

L'ALBANIE, dont le nom se trouve accidentellement le même que celui d'une province de la Turquie d'Europe, dans le golfe Adriatique, était habitée par les Derbiens. Elle s'étendait le long de la mer Caspienne, depuis l'emplacement où s'est élevé Derbent, jusqu'au confluent du Cyrus et de l'Araxe. Elle a formé, de nos jours, le Daghestan méridional et le Chir

van.

La COLCHIDE, séparée de l'Ibérie par une chaîne de montagnes, s'étendait sur les bords du Pont-Euxin, jusqu'au pays des Abkazes, au nord, et jusqu'au fleuve Apsarus au sud. Elle s'est divisée, dans les temps modernes, en trois provinces: la Mingrélie, l'Iméréthi ou Imirette, et le Gouria. Les principales villes étaient, sur la côte, en descendant du nord au sud, l'ancienne Lazica, Pityusa, Dandari, Dioscurias, Archéopolis, OEa, Phasis; dans l'intérieur, Kyta, Mechlessus, Madia, Surium, etc. On est peu fixé sur l'époque à laquelle le nom de Colchide a cessé d'être en usage.

Le témoignage des historiens place dans cette province les Colchéens, les Mélanklènes, les Coraxites ou habitants de la montagne du Corbeau, les Apsiliens, les Missimaniens et diverses autres tribus dont les noms nous paraissent aujourd'hui arbitraires et capricieux. Mais le peuple le plus intéressant est celui des Soano-Colches de Ptolémée, ou Souanes de Strabon et de Pline. Il était originaire de l'Ibérie et se trouvait établi, du temps des Argonautes, dans les montagnes de la Colchide, au-dessus de Dioscurias. Ce peuple, d'une grande bravoure, était d'une malpropreté si excessive, que les Grecs lui donnèrent le nom de Phtyrophage. (mangeur de poux). Strabon assure que les Souanes avaient un roi et un conseil composé de 300 membres, et

qu'ils pouvaient mettre sur pied des armées formidables, attendu que chez eux tous les hommes portaient les armes sans distinction d'âge. Persécutés par leurs voisins, et toujours en état d'hostilité avec eux, les Souanes ont été tour à tour soumis aux Byzantins, aux Perses, aux princes de la Mingrélie et aux rois de la Géorgie. Fuyant enfin devant une civilisation qui ne s'offrait à eux qu'à la condition de perdre la liberté, ils se sont retirés dans les Alpes caucasiennes, et vivent actuellement dans les parties habitables les plus élevées de la province d'Odichi; on en rencontre cependant aussi sur les bords de l'Ingour, où ils ont même quelques villages; d'autres, mais en petit nombre, habitent les rives du Tzkhénis-tsgali, et ceux-là ont conservé la religion chrétienne, tandis que les autres en ont entièrement perdu le souvenir. Les Souanes, qui se donnent à eux-mêmes le nom de Chnaou, forment la nation la plus pauvre du Caucase. Elle n'a pour se procurer des toiles, des draps, des ustensiles de ménage et du sel, que la ressource de vendre des femmes et des enfants. On dit pourtant que les hommes font eux-mêmes leurs fusils et leur poudre. Ils sont généralement braves, robustes, grands, bien faits, mais d'une malpropreté héréditaire; vivant sous des hangars, ils dorment pêle-mêle sur une couche commune, sans distinction de sexe, et même avec leurs bestiaux. Les femmes de cette nation sont fort belles, et de mœurs très-dissolues. Le costume des hommes est assez difficile à caractériser, n'étant le plus souvent qu'une réunion de haillons, attachés autour des jambes et des bras et recouverts d'une sorte de tablier qui leur tient lieu de culottes. Les femmes mariées portent des robes et des mouchoirs écarlate, leur couleur de prédilection; elles se coiffent avec une pièce d'étoffe, de manière à ne montrer qu'un œil, tandis que les filles nubiles vont tête nue.

Les Lazes sont également d'origine géorgienne. Ils ont imposé leur nom

à toute la côte qui s'étend depuis la Mingrélie et le Gouria, jusques et y compris Trébizonde. Ce peuple sauvage et adonné à la piraterie a dominé quelque temps dans la Mingrélie sous la tutelle des rois de Perse; mais, à l'exception de ce fait, son histoire ne mérite pas de nous arrêter plus longtemps; elle n'est ni plus noble, ni plus intéressante que celle de tous les voleurs de grand chemin.

Les Colchéens, qui se donnent une illustre origine due à l'expédition de Sésostris, n'ont aucune ressemblance avec la race égyptienne. Il est à présumer que les descendants des contemporains de Sésostris ont été depuis long-temps remplacés, sur le sol de la Colchide, par une population composée d'éléments hétérogènes que dominait le type géorgien.

L'histoire de la Colchide se confond tantôt avec celle des Romains, tantôt avec celle des Persans, et presque toujours avec celle des Géorgiens. On voit les Colchéens servir dans les armées de Cyrus, de Xerxès, de Mithridate, de Corbulon et de Chosroës. Toujours tributaires, ils offraient annuellement à leurs suzerains cent jeunes filles et cent jeunes garçons. Mithridate fit la conquête de la Colchide entière et l'annexa à son royaume de Pont; mais la fortune des Romains lui enleva cette province, qui fut gouvernée par des rois tributaires de la race de Polémon. Pompée traversa la Colchide et eut à combattre les Alains, peuple guerrier qui habitait au nord du Caucase; sous le règne de Néron, elle fut mise au rang des colonies romaines, et subjuguée peu après par les Lazes, qui, en dépit des empereurs romains, en firent hommage aux rois de Perse. Vers la fin du ÏVe siècle de l'ère chrétienne, les Huns (*) dominent dans

mination sont encore l'objet d'une erreur (*) Les peuples compris sous cette dénofort commune. Les Huns proprement dits sont d'origine ouralo-finnoise ( des monts Ourals à la Finlande). Ceux dont il est ici question ne sont pas autres que cette nation de Turks désignés dans les Annales chinoises sous le nom de Hioung-nou.

la Mingrélie, comme dans le reste de l'isthme caucasien, pendant que les Romains dégénérés et les Persans se disputent la possession de l'Asie avec des alternatives de bons et de mauvais succès. Dans le Ve siècle, un roi de Colchide, nommé Zathus, échappe à l'obscurité historique, en épousant une princesse chrétienne et en recevant le baptême. Alors s'élève ce fameux rempart qui avait environ vingt lieues de longueur, et qui séparait les provinces romaines ou persanes des pays occupés par les Scythes; on en voit encore les restes auprès de SoukoumKalé. La faiblesse des empereurs semblait lâcher le frein à la licence de la soldatesque et aux déprédations des généraux. Ceux-ci, voulant s'assurer l'impunité dans les provinces lazes, bâtirent, sur les bords de l'Acinasis, la forteresse de Petra, qui devait les mettre à l'abri du ressentiment populaire; mais, à cette même époque, la Providence envoie à la Colchide un souverain qui avait assez de qualités pour devenir un Pierre-le-Grand, si elle l'eût placé sur un trône moins étroit Gubaze fait servir tour à tour les Persans et les Romains à la délivrance de son pays, jusqu'à ce qu'enfin il tombe lui-même assassiné traîtreusement par des officiers byzantins. Sous son règne, le grand roi de Perse, Chosroës Nouchirvan, commença l'œuvre de conquête que ses successeurs devaient accomplir. Après Gubaze, la Colchide fut obscurément soumise aux Byzantins et aux Grecs, avec le titre de royaume du Phase. La province supérieure, désignée sous le nom d'Iméréthi, en avait été détachée à une époque reculée, pour faire partie d'un royaume dit des Abkhars, dont le souverain de droit était toujours l'héritier présomptif du trône de Géorgie; mais vers l'année 1243, les Mongols, ayant divisé l'héritage du roi George Lascha entre les deux David ses fils, l'Iméréthi devint principauté indépendante, et, depuis lors, il fut tantôt séparé de la Géorgie, tantôt réuni sous le même sceptre, jusqu'à Salomon II, mort à Trébizonde en 1819.

Dans les premières années du XIV. siècle, on vit un autre démembrement de la Colchide et du royaume des Abkhars, la Mingrélie, se constituer en royaume indépendant. Ce nouvel état, que baigne le Phase à son embouchure, fut alors gouverné par des souverains qui prirent le titre de Dadians. Ces princes forment une série de brigands qui disparaissent tous, successivement, assassinés, mutilés ou aveuglés par ceux qui ambitionnent de leur succéder.

Vers le milieu du XVe siècle, Mahomet II réunit les provinces caucasiennes à ses possessions, et leur impose le double joug de sa suzeraineté et de sa religion. Peu après, la partie méridionale de la Mingrélie opère sa révolution et se constitue, à son tour, province indépendante, sous le nom de Gouria. Le dernier Gouriel, ou prince de ce pays, végétait, il y a quelques années, à Constantinople.

L'histoire civile de ces états se compose à peu près uniquement de guerres intestines et de querelles de famille. C'est une période sanglante pendant laquelle les forfaits les plus atroces se succèdent avec un acharnement qui étonne l'imagination. La législation, plus ou moins empreinte de férocité, selon les caprices du Dadian ou du Gouriel, y était généralement basée sur les épreuves du jugement de Dieu.

Enfin, la Russie, mettant à profit les levées de boucliers des souverains de la Perse, franchit le Caucase. Alexandre I fait de la Mingrélie, du Gouria et de l'Iméréthi, de nouvelles annexes à ses vastes domaines.

Le commerce des esclaves avait formé, de tout temps, la principale ressource de l'ancienne Colchide; les Russes, en occupant la contrée, ont fait cesser ce trafic infame. La religion qui domine aujourd'hui dans les trois provinces est le christianisme selon le rite grec, mais entremêlé de pratiques superstitieuses, ou joint à une grande indifférence. La Russie entretient un gouverneur qui réside à Khoutaïssi, et dont la juridiction s'étend sur une partie de l'Abasie.

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