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s'élever au-dessus des jalousies et des haines des opposants qui leur reprochaient amèrement d'entretenir des intelligences avec un chef, étranger, et de vouloir absorber leur Église dans une Eglise plus universelle. Ils faisaient d'inutiles efforts pour leur démontrer que l'indépendance de leur Eglise ne serait point détruite par sa réunion au centre de la catholicité; ceux-là trouvaient leur intérêt a ne pas les comprendre; et, comme les Gallicans, ils vantaient hautement leur soumission au pouvoir temporel dont ils éveillaient d'ailleurs injustement les soupçons sur la conduite des catholiques. Il était curieux de voir des Arméniens se constituant défenseurs de la puissance turque qui les écrasait, et la poussant à persécuter ces mêmes catholiques qui, dans leur généreux dévouement à l'Église latine, mettaient réellement plus de patriotisme que les

portant ces livres inspirateurs dont ils ne pourraient comprendre la traduction fantive et incorrecte, s'ils savaient lire. Mais quel était leur désappointement, lorsque le lendemain ils retrouvaient par les rues les lambeaux épars de l'Ancien et du Nouveau Testament. (Ibid., p. 73). Certes les missionnaires romains dont ils envient les travaux prospères, agissent autrement. Ils commencent par se naturaliser, pour ainsi dire, chez le peuple qu'ils veulent évangéliser, et cela en adoptant sa langue, ses usages. Ils cheminent à pied, portant le poids du jour, à travers les lieux sauvages et déserts, et non pas sur le dos des mules, et en traînant à leur suite un attirail de bagages, de tentes et de matelas, semblable à la caravane d'un pacha allant prendre possession de son gouvernement. Ils ne comptent point avec inquiétude les pulsations de leur pouls, pour connaître l'influence variable de l'atmosphère sur leur tempérament. Ils ne prennent pas la peine, dans leurs relations, de nous dire l'heure à laquelle ils se sont levés ou couchés, les mets qu'ils ont trouvés chez leurs hôtes, et ils ne se plaignent pas que le thé ou le café leur aient manqué. (Ibid., P. 79, 82, 173). En un mot, avant d'oser allaquer les missions catholiques, il faudrait que ces messieurs missionnaires touristes et gentlemen reformassent leurs propres mis

sions.

autres, puisqu'ils espéraient trouver, dans la réunion religieuse, un moyen de recouvrer leur indépendance politique, en se ralliant à la communion des peuples d'Occident. Ce qu'on peut reprocher au parti catholique, est un excès de zèle, et l'air de supériorité qu'il prenait naturellement pour deux raisons; la première, parce que ses communications avec l'Occident le faisaient participer davantage aux lumières de la civilisation; et la seconde, parce qu'il était fier de défendre contre un plus grand nombre des principes appuyés sur la tradition des âges passés et sur la science ecclésiastique. Ils affectaient aussi à tort de rejeter certaines pratiques de leur liturgie, pour adopter d'autres cérémonies de la liturgie romaine, préférence que les dissidents regardaient comme une insulte. De là l'éloignement qu'ils leur témoignèrent, et qui fut poussé jusqu'à la haine (*). Les deux partis étaient sans cesse en présence, comme deux camps ennemis observant leurs moindres mouvements, et toujours disposés à l'attaque. Nulle relation n'existait entre les deux Églises; jamais le membre d'une de ces deux sociétés n'eût consenti à s'allier par le mariage à l'autre; une ligne de démarcation infranchissable les divisait, et ils manifestaient moins d'antipathie pour un Turc ou un Grec, qu'ils savent être

(*) Au rapport d'un missionnaire, les dissidents de la Perse anathématisent solennellement le concile de Chalcédoine, saint Léon et l'Église romaine, quatre fois l'année, à savoir: à la Quinquagésime, la veille de l'Assomption, la veille de la Transfiguration et la veille de Noël. Voici ce que Tournefort pensait de leur aversion pour les catholiques. « La réunion des religions, dit-il, est un miracle que le Seigneur opérera, lorsqu'il le jugera à propos. C'est du ciel qu'il faut attendre la véritable conversion des schismatiques, dont le nombre est infiniment plus grand que celui des Arméniens romains, Ces malheureux schismatiques, par leur crédit et leur argent, feraient déposer un patriarche qui donnerait les mains à la réunion. La haine qu'ils ont pour les Latins paraît irréconciliable. »

leurs ennemis naturels, que contre un de leurs compatriotes d'une communion différente. Ajoutez à ces causes religieuses les rivalités naissantes de la concurrence et des intérêts commerciaux, vous aurez une idée à peu près complète des principaux motifs de guerre et de discorde existant parmi eux, et, de plus, vous trouverez là une des causes de la dernière crise de 1828, qui a été si fatale aux catholiques.

Parmi les églises catholiques qui ont persévéré avec le plus de constance, on peut citer les trois églises du rite arménien établies dans le Liban. Elles ne sont point autorisées par un firman du Grand Seigneur; la position inaccessible des montagnes qui les protégent leur en tiennent lieu. Elles ont été formées par les réfugiés qui, fuyant une patrie continuellement ravagée par les ennemis, et en proie à une anarchie religieuse et politique, vinrent chercher dans ces montagnes un asile assuré. La concorde et la charité règnent dans cette petite société. Dans le siècle dernier, la direction de l'Église a été confiée à un patriarche.

Une autre église indépendante, bien qu'elle soit renfermée dans une des provinces de l'empire, est celle de Merdin. Soumise à l'autorité d'un grand pacha, décoré du titre de vice- roi de Babylone, elle jouissait au dernier siècle d'une liberté complète, en vertu du privilége accordé par le sultan à ce préfet, lequel l'affranchit, sous le rapport religieux, de toute juridiction, en sorte que les fidèles arméniens ne relèvent pas du patriarche de Constantinople. Partisans des opinions erronées de l'Église arménienne, ils se sont convertis aux principes de la foi catholique au commencement du dixhuitième siècle.

A cette époque, il y eut, parmi les Arméniens, un mouvement visible vers l'unité catholique. Méchitar, ce célèbre fondateur de l'ordre savant' de SaintLazare, dont nous nous proposons de parler, touché du déplorable état de sa nation, concevait le projet d'apporter un remède efficace à ses maux, en extirpant les germes de division. Les

missionnaires européens, envoyés par la Propagande, et qui étaient assez nombreux à Constantinople, secondèrent d'abord heureusement ses projets. Mais ensuite ils ne procédèrent point avec toute la prudence requise dans les moyens qu'ils employérent pour ramener les dissidents. Ils choquèrent ouvertement ce parti beaucoup plus nombreux, en interdisant aux catholiques l'entrée de leurs églises qu'ils représentaient comme le sanctuaire de Satan (*), et en attaquant la liturgie et les pratiques de l'ancienne Église arménienne. On refusa l'absolution à quiconque contrevenait à cet ordre. Les catholiques, trop disposés à s'éloigner de leurs frères, prirent tellement en horreur leurs églises, qu'en passant devant la porte, ils détournaient la tête par mépris, comme si c'eût été une pagode d'idolâtres. On renouvela toutes les disputes assoupies depuis plusieurs siècles, touchant le pape Léon et le concile de Chalcédoine. Dé leur côté, les partisans du patriarche intriguaient vivement contre les missionnaires, qu'ils dépeiguirent à l'autorité civile comme des conspirateurs

(*) De leur côté, les dissidents mettaient une extrême passion à vexer les catholiques qui semblaient les fuir comme des êtres dont le contact était impur. A Julfa, ville dépendante d'Ispahan, leur jalousie contre les catholiques était grande au dernier siecle, et ils suscitèrent ouvertement une longue persécution, voulant les faire chasser de la ville. Ils étaient tous soulevés contre eux, femmes, enfants. C'est alors qu'un chef de famille à qui l'on disait que quand il n'y aurait plus de pères ni de missionnaires catholiques, il serait bien forcé d'aller à leur église, fit cette réponse remarquable : « Je ne connais qu'une Église, c'est l'Église romaine dans laquelle je suis né, et avec laquelle je suis en communion. S'il ne reste plus à Julfa de missionnaires et de prêtres catholiques, je suis veuf, par conséquent libre; j'irai me faire ordonner prêtre, afin de pouvoir satisfaire ma dévotion, et pour que mes enfants trouvent dans leur maison de quoi remplir les devoirs de chrétiens, sans être obligés d'aller aux églises schismatiques. »

soudoyés par la cour d'Occident. Ces faux rapports étaient trop facilement accueillis par les vizirs et les grands, toujours opposés aux catholiques, qu'ils savaient reconnaître un chef spirituel étranger. Ils défendirent, sous peine de mort, à qui que ce fût, de donner asile à ces prêtres latins; et il fut prohibé en outre aux catholiques de s'assembler dans d'autres églises que celles dépendantes du patriarche arménien. On ne voulait pas les laisser communiquer avec les Francs catholiques, toujours d'après les principes de la politique si ombrageuse de la Porte. Les catholiques arméniens se trouvèrent donc dans une grande perplexité, et le plus affreux désordre bouleversa les deux Églises. Le sang coula; et si les catholiques n'avaient trouvé un appui politique dans les ambassadeurs, et principalement dans celui de France, le protecteur officiel de la religion des Latins, ils n'auraient pu résister à la persécution. Cet état anarchique a duré tout le dernier siècle, et de violentes secousses se sont fait encore sentir dans celui-ci.

Enfin, à la dernière guerre qui a consacré l'indépendance de la Grèce, l'influence européenne ayant pris un nouvel ascendant sur la politique ottomane, les cabinets étrangers demandèrent que les catholiques arméniens rentrassent dans le droit commun, et qu'on leur accordât le libre exercice de leur culte. Le général Guilleminot, ambassadeur français, les servit puissamment dans cette conjoncture; aussi les catholiques lui attribuent-ils tout l'honneur du succès.

Avant d'obtenir la reconnaissance d'un droit aussi naturel que sacré, l'Église catholique arménienne devait passer par l'épreuve des persécutions, comme l'Église chrétienne aux premiers siècles de sa naissance. Elle commença en 1827, alors que la Grèce brisait les derniers liens du joug ottoman. L'occasion fut la défaite de Navarin, qui humilia si profondément l'orgueil de la Porte qu'elle voulait à tout prix trouver une raison de ce revers, ailleurs que dans son impuissance. Les dissi

dents poussèrent la haine contre les catholiques à un tel excès, qu'ils parvinrent à persuader au sultan que ceux-ci, unis de communion aux Latins, entretenaient avec eux des intelligences secrètes, et qu'ils avaient trahi le gouvernement. Une calomnie aussi perfide trouva quelque créance dans les esprits. Galib - Pacha, grand vizir, et Seid-Effendi, ministre des affaires étrangères, qui soutenaient les catholiques de tout leur pouvoir, furent disgraciés; le 8 janvier 1828, huit banquiers des principales maisons sont exilés à Angora, et le scellé est mis sur leur comptoir. Tous les habitants de la même ville d'Angora, résidant à Constantinople, reçoivent l'ordre de partir, abandonnant tout ce qu'ils possédaient. Cette mesure s'étend bientôt à tous les autres catholiques, qui, d'après un nouveau firman dont la promulgation avait été remise au patriarche schismatique, furent condamnés à quitter Constantinople dans l'espace de quinze jours, pour aller habiter d'autres villages voisins, occupés par les dissidents. Contraints de vendre leurs maisons et leurs meubles, ils furent réduits à la dernière misère (*).

Le 21 mars, on défendait, sous les peines les plus sévères, de cacher un catholique ou de lui donner asile. En même temps, on annonçait que le sultan ne reconnaissant qu'une seule nation et une seule secte arménienne, les catholiques devaient se conformer à la loi et abjurer leur erreur; c'est à

(*) On vit des femmes et des vieillards brouter l'herbe des champs au milieu desquels ils erraient. La passion des dissidents allait jusqu'à la barbarie, comme on le verra par l'exemple suivant. Une pauvre femme catholique réfugiée dans un grenier avec sa famille, manquait de nourriture. Pressée par la faim, elle envoie un de ses petits enfants prier le cuisinier d'un banquier schismatique de lui donner les restes qu'il jetait aux chiens. J'aime mieux les donner aux chiens,

répondit le cuisinier qu'à vous autres, chiens de catholiques; et l'enfant fut chassé de la maison sans pouvoir soulager sa faim et celle de sa mère.

cette condition qu'on pouvait leur pardonner. Mais nous dirons à la gloire des catholiques arméniens, que pas un seul n'apostasia. C'est dans cette circonstance que l'ambassadeur français, M. Guilleminot, protecteur légal de tous les catholiques de l'empire turc, opéra une réaction heureuse au moyen de ses énergiques représentations. La ruine momentanée du commerce, les pertes incalculables qui résultaient de la proscription de tant de riches banquiers, achevèrent de produire, sur l'âme du sultan, l'impression qui devait naître du moindre sentiment d'humanité. Le calme revint, plusieurs catholiques furent réintégrés dans leur place, et aujourd'hui leur influence est aussi grande qu'autrefois. La liberté des cultes ayant été proclamée, Rome envoya aux catholiques un patriarche que l'État reconnaît.

Puissent désormais ces deux communions vivre dans un esprit de paix et de charité, et ne plus donner aux musulmans le triste exemple des divisions et des haines que défend la loi du Christ, laquelle est une loi d'amour!

LA FAMILLE DUZZOGLOU.

Nous raconterons ici, comme une espèce d'épisode dans l'histoire politique et religieuse des Arméniens, la suite des intrigues et des événements qui ont prépare la chute de la puissante maison catholique des Duzzoglou, riches Arméniens qui s'étaient élevés à Constantinople, vers le commencement de ce siècle, à un tel degré de puissance et de crédit, que le contre-coup de leur disgrâce s'est fait ressentir dans une grande partie de la nation.

Cette famille était originaire d'Allemagne et remontait à un orfévre, qui, deux siècles auparavant, était venu s'établir à Péra. Son habileté lui acquit promptement une grande réputation, et il devint le joaillier du sultan. S'étant marié à la fille d'un Arménien, il voulut définitivement se fixer à Constantinople, et il prit rang parmi les raïas (*).

(*) On donne ce nom à tous les sujets

Son fils, probe et droit comme lui, changea son nom européen en celui de Duzzoglou, lequel exprime cette qualité (*). Pendant plusieurs générations, cette famille grandit en silence et amassa des richesses considérables. A l'avénement de Mahmoud, sultan réformateur qui résiste aujourd'hui à l'intolérance des ulémas, avec la même vigueur qu'autrefois il lutta contre le despo tisme capricieux des janissaires, les Duzzoglou étaient dans le plus brillant état de prospérité.

Jean Tchélébi remplissait les fonctions de directeur de la Monnaie, charge que le sultan lui avait conférée, à cause de la confiance qu'inspirait cette maison patriarcale où les vertus se transmettaient héréditaires comme la fortune. Il mourut en 1813, laissant une famille nombreuse, composée de six garçons et de six filles. Les deux aînés, Grégoire et Serkis, succédèrent à l'emploi de leur père.

Leur fortune s'accrut encore beaucoup, grâce aux renseignements qu'un religieux de l'ordre des Méchitaristes de Saint-Lazare de Venise leur apporta d'Europe sur la fabrication de la monnaie.

Le sultan fut tellement satisfait du succès de cette innovation dans la fabrication des pièces d'or, qu'il prodigua ses faveurs à la famille des Duzzoglou, et lui accorda le privilége du pentché (**). Ce privilége, qui soustrait celui qui en jouit aux vexations arbitraires des vizirs, en le plaçant sous l'autorité directe du sultan, n'avait été accordé qu'à deux autres familles,

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Grégoire l'architecte, et Jean Dadien, inspecteur des poudres, tous les deux également Arméniens.

La prospérité est d'ordinaire plus nuisible à l'homme que l'infortune; car celle-ci excite et met en jeu ses vertus, elle le contraint à lutter, tandis que l'autre l'énerve et l'étourdit. Lors même que l'âme conserve son calme et son égalité au milieu de l'atmosphère enivrante des grandeurs, il est difficile d'échapper aux traits des envieux, et rare de ne pas rencontrer dans le reste de la société une multitude de gens qui travaillent secrètement à votre ruine. C'est ce qui arriva pour la famille des Duzzoglou.

Le faste qu'elle étalait, inconnu jusqu'alors dans la classe des raias, déplaisait aux Turcs, dont la morgue nationale ne pouvait souffrir la vue de tant de grandeur et de fortune chez des chrétiens. La magnificence des maisons de ville et de campagne, la recherche des chevaux de pur sang arabe, le nombre des domestiques attachés au service de ces nobles Arméniens, tout contribuait à attirer sur eux l'attention malveillante des musulmans. Il ne manquait qu'un homme qui osât attaquer leur crédit dans l'esprit du sultan, et renverser ainsi par sa base tout l'échafaudage de leur prospérité. Cet homme se rencontra: c'était Haled. Fourbe, rusé et dissimulé à l'excès, il était venu perfectionner en Europe, durant son ambassade à la cour de Napoléon, ces premières qualités d'un habile diplomate. De retour à Constantinople, il s'était doucement insinué dans les bonnes grâces de Mahmoud, si bien qu'il était devenu le conseiller de tous ses actes. Mahmoud ne cachait point l'ascendant qu'Haled exerçait sur son esprit, et l'on se souvient que, dans une sédition des janissaires, il répondit à quelques-uns des plus hardis qui lui demandaient l'exil et la disgrâce de son favori : « Quoi! vous voudriez me couper le bras, et me priver de celui dont la sagesse m'assiste dans toutes mes entreprises? >>

Haled était jaloux de la puissance des Duzzoglou ; il avait juré leur ruine

au fond de son cœur, et, pour parvenir à ses fins, il se cacha derrière le voile de la plus noire hypocrisie. Il savait que Mahmoud accordait toute sa confiance aux frères arméniens, qu'il était convaincu de leur bonne foi, que même il était lié envers eux par une tacite reconnaissance. Comment donc s'insinuer dans l'âme du sultan? par quel moyen lui persuader que ses plus dévoués serviteurs sont au contraire des ennemis dangereux? Ne risque-t-il pas lui-même de se perdre dans l'abîme qu'il veut creuser sous leurs pas?

Profond connaisseur du cœur humain et de tous les ressorts secrets qui mettent en mouvement ses passions, il avait observé que celle qui dominait au-dessus de toutes les autres l'âme du sultan, était une insatiable avarice; il s'était convaincu qu'en flattant ce vice, et qu'en faisant briller aux yeux du despote cupide l'espoir d'accumuler de nouveaux trésors, on pouvait l'amener sûrement à ses propres désirs. Il pénètre donc par cette voie dans la confiance de Mahmoud, et c'est en lui jetant cet appât qu'il le dispose en sa faveur.

Il commence par lui manifester son étonnement de l'excessive prospérité des Duzzoglou; il laisse deviner ses doutes sur l'intégrité des moyens par lesquels ils se sont élevés à cet état; il fait entrevoir aussi tous les dangers qui peuvent résulter, pour lui et pour sa nation, de cette immense supériorité de fortune dans une maison de chrétiens naturellement ennemis des Turcs; il suggère enfin au prince l'idée de s'emparer de ces trésors et de les ajouter au sien, moyen court et facile de se créer de nouvelles ressources financières.

Ses discours perfides persuadèrent Mahmoud. D'un autre côté, pour ne pas éveiller les soupçons des Duzzoglou, il se lie à eux par une feinte amitié, et cherche toutes les occasions de les convaincre de son dévouement par quelque service apparent ou réel. Grégoire, le plus capable des deux frères, était principalement l'objet de ses prévenances. C'était un esprit calme et

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