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à une précaution prise dans une industrie similaire.

L'ouvrier victime de l'accident ne travaillait pas, tant que le procès se poursuivait et tombait dans la misère.

Si la justice est lente, elle est aussi fort onéreuse et pour pouvoir faire valoir son bon droit dans une affaire qui était appelée à durer un an, parfois même deux et trois ans, l'ouvrier, qui ne possédait rien ou à peu près, était obligé de confier ses intérêts à un homme d'affaires, qui, une fois l'indemnité accordée, commençait par se payer larga manu; l'ouvrier ne touchait que la moitié ou le tiers de l'indemnité, et comme le tribunal connaissait l'état de misère de l'ouvrier, comme il savait qu'une partie de la somme versée irait à l'homme d'affaires, il avait tendance à augmenter le taux de l'indemnité, pour qu'il en restât davantage à la victime de l'accident.

Avec la nouvelle loi, les indemnités accordées par les tribunaux sont en général moins élevées, mais, disent les patrons, la loi de 1898 oblige à déclarer et à entamer une procédure toujours

coûteuse pour une blessure légère, l'écrasement d'une phalange par exemple, pour laquelle autrefois on se contentait de faire un pansement, et dont la guérison survenait dans l'immense majorité des cas sans complication et parfois même sans que le malade fût obligé de suspendre son travail. Cette objection est exacte, et il faut espérer que lorsque la pratique de la loi sera mieux établie, cet inconvénient disparaîtra.

Le législateur n'a pas compris les maladies professionnelles dans les accidents du travail. Les intoxications chroniques par le plomb, le mercure, l'arsenic, ne sont pas considérées comme accidents du travail; quelques députés voudraient faire disparaître cette distinction et annexer les maladies professionnelles à la loi sur les accidents ou faire pour elles une loi spéciale (1). Pour moi, je pense qu'on pourrait

(1) D'après la proposition de loi, seraient considérées comme maladies professionnelles les empoisonnements, aigus ou chroniques, résultant de l'emploi des substances suivantes : plomb, mercure, arsenic, cyanogène (ainsi que leurs composés), phosphore, sulfure de carbone, nicotine, benzine, nitrobenzine, aniline, pétrole,

rendre encore ce projet plus compréhensif et y englober certaines maladies telles que la tuberculose, si souvent transmise par le manque d'hygiène des ateliers. Je sais bien qu'on se trouve en présence de grosses difficultés, et je me demande, si nous ne devons pas organiser l'assu

goudron, essence de térébenthine, vanilline, essences odorantes, acide picrique, esprit de bois, acide sulfureux, acide hypoazoteux, acide azoteux et vapeurs d'acide azotique, acide chlorhydrique, chlore, brome, iode, acide fluorhydrique, acide carbonique, acide sulfhydrique, oxyde de carbone, virus de la variole, du charbon, et de la morve, poussières diverses.

La Chambre des députés, après avoir voté l'urgence, a renvoyé cette proposition de loi à la commission d'assurance et de prévoyance sociales; mais pour que la question arrive à une solution pratique la commission en question n'ayant pas la compétence technique nécessaire pour établir la liste des maladies professionnelles, le gouvernement a été invité à instituer une commission extra-parlementaire composée de membres du Parlement, de savants, de représentants des patrons et des ouvriers, chargée de dresser : 1° la liste des maladies professionnelles, c'est-à-dire de celles dont l'exercice continu de la profession est la cause organique exclusive ou essentielle; 20 la liste des professions correspondantes avec, pour chacune d'elles, le coefficient de risque spécial d'invalidité ou de morbidité résultant desdites maladies.

rance contre la maladie, notamment la tuberculose, et compléter ainsi l'action des Sociétés de secours mutuels.

Dans la loi de 1898, les articles 4, 5 et 11 intéressent plus spécialement le médecin. Ils sont ainsi conçus:

ART. 4. Le chef d'entreprise supporte en outre les frais médicaux et pharmaceutiques et les frais funéraires; les derniers sont évalués à la somme de 100 francs au maximum.

Quant aux frais médicaux et pharmaceutiques, si la victime a fait choix elle-même de son médecin, le chef d'entreprise ne peut être tenu que jusqu'à concurrence de la somme fixée par le juge de paix, conformément aux tarifs adoptés dans chaque département pour l'assistance médicale gratuite.

ART. 5. Les chefs d'entreprise peuvent se décharger pendant les trente, soixante ou quatre-vingt-dix premiers jours à partir de l'accident, de l'obligation de payer aux victimes les frais de maladie et l'indemnité temporaire ou une partie seulement de l'indemnité, comme il est spécifié ci-après, s'ils justifient :

10 Qu'ils ont affilié leurs ouvriers à des sociétés de secours mutuels et pris à leur charge une quote-part de la cotisation, qui aurait été déterminée d'un commun accord et en se conformant aux statuts types, approuvés par le ministre compétent, mais qui ne devra pas être inférieure au tiers de cette cotisation.

20 Que ces sociétés assurent à leurs membres en cas de blessure pendant trente, soixante ou quatre-vingt

dix jours, les soins médicaux et pharmaceutiques et une indemnité journalière.

ART. 11. Tout accident ayant occasionné une incapacité de travail doit être déclaré dans les quarantehuit heures par le chef de l'entreprise ou ses préposés, au maire de la commune, qui en dresse procèsverbal.

Cette déclaration doit contenir les noms et adresses des témoins de l'accident; il y est joint un certificat du médecin, indiquant l'état de la victime, les suites probables de l'accident et l'époque à laquelle il sera possible d'en connaître le résultat définitif.

Je ne dirai rien des deux premiers articles; le chef d'entreprise supporte les frais médicaux et pharmaceutiques d'après le tarif adopté dans chaque département pour l'assistance médicale gratuite. A Paris, où l'assistance médicale gratuite n'existe pas, le prix des déplacements médicaux a été fixé à cinq francs.

L'article 5 permet aux chefs d'entreprise, suivant certaines conditions, de s'abriter derrière des compagnies d'assurances, qui, en cas d'accidents, se substituent à lui.

Je m'étendrai plus longuement sur l'article 11 qui exige le certificat médical, car le certificat est une pièce trop souvent donnée sans une précision suffisante et bien des médecins ont

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